Mars 2003 – Fatima Marhfoul, un silence inadmissible

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Mars 2003 – Fatima Marhfoul, un silence inadmissible

Le ministre Coderre refuse d’intervenir pour arrêter la déportation de Fatima Marhfoul, un silence inadmissible sur un cas d’esclavage éhonté au Canada

Depuis jeudi matin, des groupes sociaux de plus en plus nombreux remuent mers et monde pour convaincre le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, Denis Coderre, d’accorder, par son pouvoir discrétionnaire, le statut de résidente permanente à Fatima Marhfoul, utilisée comme esclave durant dix ans par une famille aisée de Montréal. C’est là son seul espoir pour éviter la déportation vers le Maroc, ce dimanche 2 mars.

Une manifestation d’urgence, organisée par la Fédération des femmes du Québec (FFQ), l’Association des aides familiales du Québec (AAFQ), le Conseil central du Montréal métropolitain de la CSN et le Centre communautaire des femmes sud-asiatiques, avait lieu en ce vendredi 28 février à 15 heures afin de faire bouger le ministre Coderre. En l’absence de réponse, les groupes se rendront à l’aéroport en fin de journée dimanche “pour que le monde voit comment, au Canada, on récompenses les esclavagistes et on punit les esclaves”, a lancé Louise Dionne, directrice de l’AAFQ.

“C’est inacceptable que le gouvernement se rende complice du trafic des femmes et de cette forme moderne d’esclavage. Au Québec, des centaines voire des milliers de femmes vivent dans la clandestinité en travaillant pour de riches employeurs. Pas de chambre privée, pas de droit de sortie, pas de salaire, pas d’autonomie… Séquestrée, travaillant sept jours par semaine… Voilà ce que vivait Fatima depuis dix ans. Si ce n’est pas de l’esclavage, je n’ai pas d’autre mot! Le ministre Coderre doit agir immédiatement et offrir l’immunité à Mme Marhfoul en lui accordant sa résidence permanente” a commenté Barbara Legault, de la FFQ.

Agée de 48 ans, Fatima Marhfoul vit au Québec depuis maintenant 13 ans. Battue par son mari, son frère et son père alors qu’elle était au Maroc, elle a ensuite perdu ses enfants en 1977, son ex-mari les ayant kidnappés. Fatima n’a jamais eu de nouvelles depuis. Lorsqu’elle décide, en 1990, d’accepter l’offre de l’Ambassadeur marocain au Canada et de le suivre à Montréal pour lui faire office de domestique, elle ne laisse derrière elle que ses parents, décédés depuis. Malgré 10 ans de cauchemar au Québec, où elle a été victime d’exploitation, de chantage, de séquestration et de harcèlement psychologique, Fatima ne veut pas retourner au Maroc, où seule la prison l’attend.

Fatima El Amraoui, qui a aidé Fatima Marhfoul à deux reprises, notamment lors de sa récente tentative de suicide, assure que son amie préférerait mourir plutôt que retourner au Maroc. Depuis son arrestation le 8 février 2003, Fatima est détenue au Centre de prévention de l’immigration, à Laval, et est sous calmants. Selon Louise Dionne, directrice de l’AAFQ, “il semble que l’administration de sédatifs aux immigrants voués à la déportation y soit une pratique courante”.

Madame Dionne explique qu’il y a un trafic de domestiques au Maroc comme dans d’autres pays, souvent des jeunes filles de familles pauvres qui, pour ne pas mourir de faim, acceptent des conditions d’exploitation qui équivalent à de l’esclavage. “Les droits humains sont bafoués dans ce pays, et renvoyer Fatima là-bas, c’est signer son arrêt de mort” a-t-elle averti.

Au Canada, il semble que plusieurs femmes sans papier travaillent comme domestique dans des familles notables et subissent des méfaits révoltants. On rapporte fréquemment à l’AAFQ des cas de harcèlement sexuel et psychologique, d’agressions sexuelles, de menaces, et surtout, d’exploitation économique. “Rappelons-nous ces 30 femmes retrouvées sur l’Ile Bizarre entrées au pays de façon légale grâce à une agence d’immigration spécialisée dans le travail domestique et qui servaient en fait de harem pour les propriétaires de l’agence de placement (reportage de Zone libre, 17 janvier). Encore une fois, Coderre n’avait rien fait là-dessus” s’indigne Louise Dionne. Selon elle, des chiffres conservateurs montreraient qu’une travailleuse domestique sur dix est illégale, donc susceptible d’être exploitée. C’est dire qu’il y en aurait au moins 1 000 dans la même situation que Fatima sur la seule Ile de Montréal.

Ce midi, à Ottawa, la députée Jocelyne Gérard-Bujeau a posé à M. Sarkis Assadourian (le secrétaire parlementaire de M. Coderre qui lui, demeure introuvable), la question suivante : “Monsieur le Président, dimanche, faisant fi de toute compassion, Immigration Canada expulsera Fatima Marhfoul vers le Maroc, son pays d’origine où elle risque une sévère peine d’emprisonnement, puisque la demande de résidence permanente qu’elle a effectuée au Canada constitue une insulte à la monarchie marocaine. Sachant aussi que Fatima Marhfoul a été honteusement exploitée pendant 10 ans au Canada comme domestique, le ministre de l’Immigration ne considère-t-il pas qu’il devrait faire preuve d’humanité à son égard et renoncer immédiatement à la procédure d’expulsion avant qu’il ne soit trop tard?”

Mais le secrétaire de Monsieur Coderre a simplement répondu qu’il ne pouvait pas commenter un cas spécifique de la sorte. Ce n’est pas la première fois qu’on interroge Coderre ou ses représentants en chambre sur des cas semblables et à chaque fois, c’est la même langue de bois qu’ils nous servent” a lancé la représentante de la FFQ, visiblement outrée.

La FFQ, l’AAFQ, la CSN et le Centre communautaire des femmes sud- asiatiques lancent donc un grand appel à la population pour faire des pressions constantes sur le ministre Coderre afin que justice soit rendue à Fatima Madame Marhfoul et qu’elle obtienne sa résidence permanente sur une base humanitaire. Il ne reste plus beaucoup de temps pour sauver Fatima! Suivez les directives dans les médias et sur le site de CMAQ (www.cmaq.net) pour connaître l’heure exacte de la manifestation à l’aéroport dimanche en fin de journée et le lieu de rendez-vous.

Source: CCMM 01-03-03 Renseignements: Fédération des femmes du Québec, (514) 876-0166; Association des aides familiales du Québec, (514) 272-9830

   


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