Réforme du régime forestier
Le régime des relations de travail doit d’abord être modifié
« Le régime forestier actuel constitue un obstacle structurel et permanent au droit d’association et à la négociation collective. Nous estimons que le régime des relations de travail doit être modifié. La CSN et la FTPF en font une condition essentielle à toute réforme. »
Le mémoire des deux organisations déposé à la Commission de l’économie et du travail sur l’occupation du territoire forestier québécois préconise un changement de cap en matière de relations de travail. La présidente de la CSN, Claudette Carbonneau et le président de la FTPF, Sylvain Parent plaident en faveur d’une nécessaire adaptation des lois du travail pour développer une véritable industrie de l’aménagement forestier durable au Québec.
Tous les comités d’experts mis sur pied par le gouvernement (Rapports Mireault, Bernier, Coulombe) ont identifié le problème de la définition de l’employeur dans les aires communes où travaillent de nombreux intervenants, les détenteurs de CAAF ainsi que leurs sous-traitants à la récolte, au transport et à la sylviculture. « C’est cette multitude d’intervenants qui rend pratiquement impossible la syndicalisation », affirme Sylvain Parent.
Au fil des années, le gouvernement ne donnera jamais suite aux recommandations visant à identifier un responsable des opérations tant dans la Loi sur les forêts, que dans le Code du travail. « Encore aujourd’hui, la question majeure de l’organisation du travail est complètement évacuée du projet de régime forestier. La réforme telle que proposée décentralisera les responsabilités et nécessitera une intensification des activités de sylviculture et d’aménagement forestier. Cette décentralisation se traduira par un recours accru à l’impartition et à la sous-traitance. Rien n’est réglé. Au contraire, la situation risque de s’aggraver », estime la présidente de la CSN. « Si l’objectif de la réforme est d’accroître les travaux d’aménagement et de sylviculture dans une perspective de développement durable, la qualité des conditions de travail doit devenir un corollaire, sinon comment allons-nous attirer et retenir la main-d’uvre ? »
Le livre vert et le document de travail du ministère des Ressources naturelles et de la Faune proposent de confier les responsabilités relatives à l’aménagement, aux récoltes et à la sylviculture à des sociétés d’aménagement sur une base régionale. « Quelque soit l’organisme qui ultimement sera retenu pour exercer ces responsabilités, nous estimons nécessaire qu’à l’instar des recommandations des experts, dans les différentes régions forestières, la loi prévoit la nomination d’un maître d’uvre qui prendra aussi la responsabilité des relations du travail », de poursuivre Claudette Carbonneau.
Pour la CSN, les sociétés d’aménagement, ou les organismes qui seront désignés par la loi pour exercer les mêmes responsabilités, devraient assumer la responsabilité des relations du travail pour l’ensemble des activités forestières. Ces sociétés devraient être l’employeur présumé au sens du Code du travail. Tous les salariés seraient donc réputés être employés des sociétés, qu’ils y soient employés directement ou par des sous-traitants.
Le cas particulier des travailleurs sylvicoles
Les travailleurs sylvicoles vont profiter de la présentation de la CSN et de leur fédération pour remettre aux passants à l’extérieur de l’Hôtel du Parlement un article sur leurs difficiles conditions de travail publié dans le magazine de la Confédération des syndicats nationaux, Perspectives CSN. Il en est ainsi des dépenses d’emploi des sylviculteurs qui sont substantielles. L’écart est important entre ce qu’ils gagnent en salaire brut et en salaire net une fois comptabilisé ce qu’ils leur en coûtent pour travailler. Faute de correctifs, la FTPF et le Syndicat national de la sylviculture (SNS) ont choisi la voie juridique pour faire reconnaître que le temps de déplacement des ouvriers devait être rémunéré en conformité avec la Loi des normes du travail du Québec.
« Une décision arbitrale nous donnant raison sur les déplacements des travailleurs tarde à être appliquée par les parties parce que cela mettrait en péril la survie de l’entreprise. Comment peut-on supporter un régime qui ne permet même pas aux entreprises de respecter les normes minimales du travail, une loi d’ordre public », de dénoncer Sylvain Parent.
Pour le président de la FTPF, « ces travailleurs méritent mieux que les conditions de travail d’un autre temps qui sont encore leur lot quotidien. Il est plus que temps qu’on mette fin à la rémunération à forfait en sylviculture. Nous considérons que le salaire au rendement est incompatible avec l’esprit de l’aménagement durable des forêts. De plus, il est impératif que des améliorations substantielles soient apportées à l’ensemble des conditions d’exercice du métier de ces travailleurs. »
Bien d’autres aspects de la réforme demeurent nébuleux et ne rassurent personne. L’un des concepts fondamentaux de la réforme, à savoir la gestion écosystémique, n’est pas clairement défini et la détermination du coût du bois par un mécanisme de marché, dont les structures n’existent pas encore, rendent le travail d’analyse particulièrement difficile.
« Nous invitons donc le ministère à poursuivre la réflexion et à prendre le temps nécessaire afin de documenter davantage les aspects incomplets de la réforme et à y intégrer ceux qui ne sont pas traités, notamment celui des relations de travail. Ce faisant le gouvernement contribuera à la conciliation des différentes opinions. Le débat ne peut se faire en « silo » où chaque intervenant ne valorise que son point de vue. Les intérêts des différents utilisateurs de la forêt doivent être pesés et examinés dans un esprit d’ouverture », de conclure les deux leaders syndicaux.
La Confédération des syndicats nationaux représente plus de 300 000 membres dans tous les secteurs d’activité. La Fédération des travailleurs et des travailleuses du papier et de la forêt (FTPF-CSN) est présente depuis plus de cent ans dans les secteurs du papier et de la forêt et représente aujourd’hui plus de 10 000 membres, dans ce seul secteur d’activité, à travers tout le Québec.
Source : FTPF—CSN – 16 octobre 2008
Pour renseignements : Michelle Filteau, directrice du Service des communications de la CSN, bureau : 514 598-2162, cellulaire : 514 894-1326