Dossier : Bilan des conservateurs – CSN – Confédération des syndicats nationaux https://www.csn.qc.ca Le maillon fort du syndicalisme au Québec Wed, 16 Aug 2017 09:13:40 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=6.7.2 https://www.csn.qc.ca/wp-content/uploads/2019/05/csn-logo-150x150.png Dossier : Bilan des conservateurs – CSN – Confédération des syndicats nationaux https://www.csn.qc.ca 32 32 Comment larguer les futurs retraités https://www.csn.qc.ca/actualites/comment-larguer-les-futurs-retraites/ Mon, 01 Jun 2015 08:47:40 +0000 https://www.csn.qc.ca/?post_type=csnqc_actualite&p=63011 En juin 1985, une retraitée du nom de Solange Denis apostrophe le premier ministre conservateur, Brian Mulroney, à la suite de sa décision de désindexer les pensions de vieillesse. « Tu nous as menti », lui lance-t-elle devant des journalistes à Ottawa. « T’es venu chercher notre vote, pis, bye bye, Charlie Brown. » Ces propos ont créé une telle onde de choc que Brian Mulroney a dû faire marche arrière et annuler la désindexation pourtant prévue dans son premier budget.

Autres temps, autres mœurs : en mars 2012, les conservateurs majoritaires de Stephen Harper ont repoussé l’âge d’admissibilité à la retraite à 67 ans, limitant ainsi le régime universel de pension déjà largement insuffisant. Malgré une forte opposition, les dispositions du régime mis en place en 1951 ont été modifiées. Les nouvelles mesures s’appliqueront progressivement à partir de 2023 jusqu’à son entrée en vigueur complète en 2029. Dès lors, les Canadiennes et les Canadiens devront patienter deux ans avant de se prévaloir de la pension de la sécurité de la vieillesse (PSV) et du supplément de revenu garanti (SRG), pour les plus pauvres d’entre eux. Pour les personnes nées avant le 31 mars 1958, aucune perte. C’est pour les autres que l’histoire se complique.

Le gouvernement a invoqué les effets du vieillissement de la population sur les finances publiques pour justifier sa réforme, soit la hausse du nombre de retraité-es, mais aussi l’augmentation de l’espérance de vie. Selon les données du Directeur parlementaire du budget sur la viabilité financière du gouvernement et les prestations aux aîné-es, les coûts du régime devraient passer en 2012 de 2,2 % du PIB (32 milliards) à 3,2 % du PIB (142 milliards) jusqu’en 2031-2032. Cependant, à partir de 2032, ces mêmes coûts vont redescendre à 1,8 % du PIB annuellement. Pourquoi alors cet empressement à réformer le régime canadien, sinon pour imposer davantage de coupes dans l’un des programmes sociaux les plus utiles ?

La pauvreté conjuguée au futur

Ainsi, les personnes nées entre le 1er avril 1958 et le 31 janvier 1962 toucheront leur pension selon une formule qui leur fera perdre progressivement des revenus de retraite sur une base mensuelle. Mais celles nées après le 1er février 1962 perdront deux années de rentes complètes — en plus de devoir travailler ou vivoter jusqu’à 67 ans —, des montants évalués à environ 6500 $ par individu par année, ce qui entraînera une hausse de la pauvreté de 6 à 17 % chez les aîné-es, dont 50 % des plus pauvres perdront 60 % de revenus, selon l’étude Reforming Old Age Security : Effects and Alternatives, menée l’automne dernier par des chercheurs de l’Université Laval et de l’Université du Québec à Montréal.

La même étude montre que cette réforme du programme, en prenant en compte ses répercussions sur les recettes fiscales, aura pour effet de diminuer les dépenses fédérales annuelles de 7,1 milliards de dollars en 2030. Ce sont donc les provinces, dont le Québec, qui devront assumer les coûts — estimés à près de 169 millions de dollars en 2030 — engendrés par le recours accru aux prestations de l’aide sociale pour compenser la perte du PSV. L’étude conclut que les femmes seront les grandes perdantes, leurs revenus étant généralement 40 % inférieurs à ceux des hommes.

En reportant l’âge de la retraite, le gouvernement Harper s’est nettement engagé dans une voie commune aux gouvernements successifs des dernières années : pelleter ses responsabilités sociales dans la cour des individus en les appauvrissant davantage. À moins que d’autres, comme Solange Denis il y a trente ans, décident de faire renverser la vapeur !


Pour en savoir plus : L’assaut contre les retraites, sous la direction de Normand Baillargeon, M Éditeur, 167 pages, avril 2015

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Les femmes plus pénalisées par la réforme https://www.csn.qc.ca/actualites/les-femmes-plus-penalisees-par-la-reforme/ Mon, 01 Jun 2015 08:38:13 +0000 https://www.csn.qc.ca/?post_type=csnqc_actualite&p=63008 La réforme de l’assurance-emploi a été décriée sur toutes les tribunes, parce qu’elle contraint notamment les personnes en perte d’emploi à accepter un travail moins bien rémunéré et plus éloigné de leur domicile, ce qui affecte plusieurs secteurs de l’économie. L’effet qu’elle produit sur les chômeuses a pour sa part à peine été évoqué. Il est pourtant direct et bien réel.

La population active se compose à 47 % de femmes, qui contribuent à 45 % des cotisations d’assurance-emploi. Pourtant, en 2013, seulement 35,5 % des femmes en chômage étaient admissibles à des prestations régulières, tandis que 44,8 % des hommes y avaient droit. « En tenant uniquement compte des prestations régulières, les femmes versent plus d’argent dans la caisse d’assurance-emploi qu’elles n’en perçoivent », souligne Kim Bouchard du Mouvement action chômage de Montréal. Les femmes étant davantage touchées par le travail atypique, il leur est plus difficile de cumuler les heures nécessaires à la perception de prestations. « Au lieu de corriger cette discrimination systémique, le gouvernement conservateur est venu l’aggraver par l’entremise de sa réforme », déplore Kim Bouchard.

Classes de chômeurs : les femmes plus touchées

Les chômeurs sont maintenant divisés en trois catégories de prestataires qui sont soumis à des exigences différentes dans la recherche d’un emploi. « Le gouvernement n’a pas fourni de données pour indiquer dans laquelle de ces catégories se retrouvent les femmes et ne s’est prêté à aucune analyse différenciée selon les sexes », déplore la vice-présidente de la CSN, Véronique De Sève. Or, en raison du travail souvent précaire des femmes, plusieurs risquent d’avoir plus de mal à répondre aux critères de la première catégorie (travailleurs de longue date), entre autres de ne pas avoir atteint le maximum permis de 35 semaines de prestations au cours des cinq dernières années. Comme elles s’occupent davantage de l’éducation des enfants ou de proches malades, elles sont également pénalisées par le critère leur exigeant d’avoir payé au moins 30 % de la cotisation maximale pendant sept des dix dernières années.

Selon Kim Bouchard, les femmes risquent également de devenir plus souvent des prestataires soit occasionnelles, soit fréquentes. Ce dernier statut diminue à six semaines seulement le délai de recherche d’un emploi payé à 80 % du salaire antérieur. Après cette période, elles doivent accepter tout travail payé à 70 % du précédent. « Elles courent ainsi le risque d’être emprisonnées dans des emplois précaires comme le commerce de détail, la restauration, les services de garde ou les soins à domicile et de se retrouver rapidement acculées au salaire minimum », dénonce-t-elle.

La réforme de l’assurance-emploi appau­vrit tous les chômeurs, sans exception. Comme c’est le cas avec les politiques d’austérité en général, les femmes en font encore plus cruellement les frais.

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Des politiques hostiles aux agents correctionnels https://www.csn.qc.ca/actualites/des-politiques-hostiles-aux-agents-correctionnels/ Mon, 01 Jun 2015 08:28:20 +0000 https://www.csn.qc.ca/?post_type=csnqc_actualite&p=63003 Les politiques et les fausses promesses du Parti conservateur ont doublement pénalisé les 7500 membres du Syndicat des agents correctionnels du Canada (UCCO-SACC-CSN). L’organisation trace un bilan très sombre des années qu’a passées au pouvoir le gouvernement Harper.

Depuis 2005, UCCO-SACC-CSN fait des représentations auprès du gouvernement fédéral afin qu’il adopte une loi imposant un prélèvement sanguin automatique lorsqu’une agente ou un agent est exposé au sang d’un détenu. « On veut ainsi éviter que les agents ne contractent des maladies. Sept provinces sur dix ont une législation qui permet ce type d’intervention. Mais après 10 ans de démarches de notre part, le gouvernement Harper refuse toujours de légiférer en la matière », explique le vice-président national d’UCCO-SACC-CSN, Jason Godin.

Les conservateurs ont aussi attaqué directement les agents correctionnels en apportant certains changements au Code du travail. L’amendement à la partie 2 du Code du travail vient modifier la définition de danger. Pour que des agents refusent une affectation, il ne suffit plus qu’il y ait un « danger potentiel », il doit maintenant y avoir un « danger imminent ». En d’autres mots, pour qu’une situation soit considérée aujourd’hui comme dangereuse, l’agent correctionnel doit avoir un couteau sous la gorge !

Le gouvernement Harper a également adopté le projet de loi omnibus C-4 afin de limiter la capacité du syndicat à trouver un mécanisme de règlement en cas d’impasse dans les négociations. Pourtant, dans le passé, UCCO-SACC-CSN a négocié avec succès deux conventions collectives en utilisant la conciliation pour sortir de l’impasse dans des cas spécifiques liés à l’environnement de travail de ses membres. Stephen Harper veut ainsi forcer le syndicat à accepter un arbitrage exécutoire.

Lutte à la criminalité illusoire

Le gouvernement conservateur affirme faire de la lutte au crime sa priorité. Cette politique n’est rien d’autre que de la poudre aux yeux destinée à rassurer les électeurs, selon UCCO-SACC-CSN. « En fait, ce gouvernement ne mène pas une lutte contre le crime, mais bien une lutte contre les agents correctionnels fédéraux », ajoute M. Godin. La plateforme électorale des conservateurs tough on crime ne s’est jamais concrétisée. Au contraire, le gouvernement a plutôt réalisé des compressions de 290 millions de dollars dans les centres de détention au pays pour ensuite ajouter d’autres coupes de 65 millions.

Un bon exemple de ce phénomène est la sentence à vie sans possibilité de libération conditionnelle. La nouvelle loi proposée par les conservateurs ne tient pas la route. Les détenus qui étaient reconnus coupables d’un crime nécessitant un emprisonnement à vie sortaient rarement des pénitenciers sous l’ancien système. Ils écopaient toujours d’une sentence dont la durée était indéterminée. S’ils étaient considérés comme trop dangereux pour sortir, la Commission des libérations conditionnelles rejetait leur demande de libération.

Le gouvernement conservateur a également fait des compressions dans les différents programmes offerts aux prisonniers pour favoriser leur réhabilitation. Ces derniers n’ont plus rien à quoi s’accrocher et accumulent ainsi des frustrations qui se traduisent par des tensions encore plus grandes entre les murs, tensions qui doivent être gérées par les agentes et les agents correctionnels.

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Après les compressions, le démantèlement https://www.csn.qc.ca/actualites/apres-les-compressions-le-demantelement/ Mon, 01 Jun 2015 08:17:29 +0000 https://www.csn.qc.ca/?post_type=csnqc_actualite&p=62996 On a beaucoup parlé de la fermeture du costumier de Radio-Canada, annoncée en octobre 2014. La dispersion des vêtements de personnages fétiches de notre imaginaire collectif a marqué les esprits. Mais ce n’est que la pointe de l’iceberg.

Radio-Canada, institution de culture, d’information et de création, vacille sur ses bases et peine à réaliser un mandat qu’elle est seule à assurer. Les compressions budgétaires successives du fédéral y sont pour beaucoup. Les dernières en date se sont étalées entre 2012 et 2014 et ont totalisé 115 millions de dollars. Le résultat : plus de 1300 emplois supprimés partout au Canada. C’est la plus récente étape d’un long déclin. En fait, les crédits parlementaires alloués à Radio-Canada/CBC aujourd’hui n’atteignent que 60 % de leur valeur de 1990, selon les données compilées par le groupe Amis de la radiodiffusion canadienne.

Mais au lieu de réclamer un financement adéquat, le conseil d’administration et la haute direction ont décidé de s’accommoder de la situation et de transformer irrémédiablement l’institution.

En juin 2014, ils ont accouché d’un plan, baptisé Un espace pour nous tous, qui prévoit des compressions supplémentaires de 100 millions et la suppression de 1500 autres emplois d’ici 2020. Ils veulent ainsi se créer un coussin financier pour effectuer un virage vers les médias numériques (téléphones mobiles, tablettes, etc.). Près de la moitié de ces 1500 emplois ont déjà été supprimés (392 en octobre 2014 et 318 en avril 2015).

Que nous réserve le plan de Radio-Canada ?

D’abord une baisse du soutien à la culture. Par exemple, les budgets alloués à l’enregistrement de concerts classiques, de spectacles ou de performances d’artistes ont été réduits à presque rien. Résultat : moins de revenus pour les artistes, moins de création.

Deuxième impact : moins d’information régionale accessible à tous. L’automne prochain, la plupart des bulletins de nouvelles télévisés régionaux passeront de 60 à 30 minutes ; au réseau anglais, ils passeront de 90 à 30 minutes. On nous annonce un virage vers les plateformes numériques, mais personne ne sait comment il s’effectuera. Pourtant, une part importante de la population s’informe toujours à la télévision, et bon nombre de gens n’ont pas accès aux plateformes numériques, entre autres en raison des coûts (appareils et abonnement).

Troisièmement, la fin annoncée de la production interne d’émissions dramatiques et de variétés. Déjà, la majorité de ces émissions sont produites par le privé. Mais la Maison de Radio-Canada, à Montréal, recèle encore de vastes studios qui offrent des possibilités uniques au Québec. La direction de Radio-Canada souhaite vendre cet immeuble pour devenir locataire d’un autre immeuble où il n’y aurait plus qu’un seul studio (au lieu des 12 actuels). Deux des trois consortiums qui avaient été retenus pour ce projet immobilier se sont retirés et la proposition du troisième n’a pas été retenue. Malgré cela, Radio-Canada n’a pas renoncé à se départir de la production télévisuelle.

Enfin, de nombreux services en soutien à la production sont réduits ou supprimés : moins de documentalistes, fermeture des ateliers de décors et de costumes, moins de personnel pour l’archivage des émissions, moins d’accès aux services de la bibliothèque, moins de services techniques (prise de son, mixage sonore, montage), etc.

Tout cela se produit pendant que le monde des médias est en plein bouleversement. Les modèles d’affaires sont à revoir, car tous les médias doivent s’adapter aux nouvelles façons dont le public les consulte. Dans ce contexte, nous avons besoin d’un producteur et diffuseur public solide, soutenu par l’ensemble de la société. Cela doit être un enjeu de la prochaine campagne électorale fédérale.

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Une idéologie dévastatrice https://www.csn.qc.ca/actualites/une-ideologie-devastatrice/ Mon, 01 Jun 2015 08:10:27 +0000 https://www.csn.qc.ca/?post_type=csnqc_actualite&p=62993 Du point de vue du droit du travail, cette idéologie chamboule les rapports de force entre patronat et travailleurs, affectant même des acquis de longue date.

Il est difficile de faire une recension rigoureuse de toutes les attaques du gouvernement Harper contre le mouvement syndical. Depuis 2011, les manœuvres tentant d’affaiblir les syndicats du Canada ont été si nombreuses et insidieuses, qu’un portrait fidèle est presque impossible à tracer. Selon Gilles Trudeau, professeur en droit du travail à la Faculté de droit de l’Université de Montréal, les différents projets de loi omnibus ont été truffés de mesures portant atteinte aux syndicats, sans que l’information sorte au grand jour. « Je ne suis pas en mesure de brosser un tableau complet de toutes les actions dans les dernières années qui ont visé directement ou indirectement le mouvement syndical, explique le professeur. Certaines passent inaperçues aux yeux du public, car elles sont incluses dans de gros projets de loi qui font passer un paquet de mesures en même temps. Mais pour moi, il ne fait pas de doute que ce gouvernement a une attitude peu sympathique envers les syndicats. »

Dangereux projets de loi

M. Trudeau cite cependant quelques exemples concrets des tentatives de manipulation du gouvernement. « Le projet de loi d’initiative parlementaire C-377 a particulièrement attiré mon attention », affirme-t-il.

Ce projet de loi, proposé par le député conservateur d’arrière-ban de Colombie-Britannique, Russ Hiebert, a en effet mobilisé le mouvement syndical. En modifiant la Loi de l’impôt sur le revenu, C-377 viendrait forcer les organisations syndicales, même celles sous compétence provinciale, à dévoiler leurs états financiers et leurs dépenses, et indirectement, leurs stratégies futures. Si le projet de loi est adopté, les informations financières de tous les syndicats, ainsi que des renseignements personnels sur les membres et les comités exécutifs, seront diffusées sur le site Internet de l’Agence du revenu du Canada.

« Ce projet de loi me paraît inusité, ajoute Gilles Trudeau. Pour moi, c’est manifestement une tentative de contrôle qui pourrait avoir des impacts majeurs sur l’organisation même d’un syndicat. De plus, cela dépasse largement les compétences du fédéral. »

Après avoir été lourdement amendé au Sénat (par des sénateurs conservateurs), le projet de loi C-377 est retourné en chambre. Au moment d’écrire ces lignes, le Comité sénatorial des affaires juridiques et constitutionnelles tenait des audiences à propos de ce projet de loi dans sa nouvelle version amendée.

L’avocat en droit du travail Stéphane Lacoste est aussi convaincu que l’idéologie conservatrice est hostile aux rassemblements de travailleurs. « Les conservateurs prônent un conservatisme très inspiré des États-Unis, très marqué contre la négociation collective », dit Me Lacoste. Pour cet expert juridique des choses syndicales, c’est un autre projet de loi, le C-525, qui fera le plus mal.

En modifiant la Loi sur les relations de travail au Parlement, la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique et le Code canadien du travail, ce projet de loi d’initiative parlementaire impose aux syndicats de la fonction publique fédérale une étape de plus au processus d’accréditation. Le projet empêche toute possibilité d’accréditation automatique. Pour permettre l’accréditation d’un syndicat, le total de 50 % + 1 dans le décompte des cartes signées et la collecte des droits d’adhésion (5 $ par personne) ne suffiront plus. Il faudra dorénavant proposer un vote aux membres, sans limite de temps, par la suite. Une étape qui, selon Me Lacoste, ouvre la porte à toutes sortes de tentatives de dissuasion de la part des employeurs. « Démocratiquement, cette loi nuit aux travailleuses et travailleurs qui souhaitent se syndiquer et au processus naturel d’adhésion, dit-il. Quand on provoque un vote, tout devient possible ! Les employeurs peuvent tenter de soudoyer les travailleurs avec des cadeaux, des promesses… »

Alors que les syndicats ignorent ce qu’il adviendra de C-377, les effets néfastes de C-525 se feront bientôt sentir. Le 16 juin, la loi entrera en vigueur.

Lois spéciales tous azimuts

Les deux experts considèrent qu’une autre tendance du gouvernement Harper prouve son mépris pour la négociation collective, une des valeurs essentielles du droit du travail canadien. « Le gouvernement intervient maintenant beaucoup plus rapidement pour mettre fin à des conflits de travail et bloquer des grèves dans les secteurs fédéraux, affirme Gilles Trudeau. Que le gouvernement fasse passer des lois spéciales pour forcer le retour au travail n’est absolument pas nouveau. Mais ce qui est différent avec ce gouvernement, c’est la rapidité avec laquelle on intervient. Ça démontre un mépris manifeste à l’égard du droit de grève. »

Les exemples sont nombreux, dit M. Trudeau. Dans le secteur des postes, du transport aérien, ferroviaire… Parfois, une grève n’est même pas encore votée que l’on force déjà le retour au travail. « Le gouvernement dit qu’il protège les citoyens en garantissant les services essentiels, explique Stéphane Lacoste. Il faudrait s’entendre sur ce qu’est un service essentiel. Est-ce que recevoir le courrier, prendre l’avion est essentiel pour un être humain ? Non. Je crois que ce qu’ils entendent, c’est plutôt protéger l’économie du Canada de potentielles pertes. »

Qu’adviendra-t-il du syndicalisme et de la protection des travailleurs si le Parti conservateur est de nouveau porté au pouvoir, en octobre prochain ? La situation ne fera qu’empirer, croit Stéphane Lacoste. « Ce à quoi l’on s’attend comme prochaine étape, c’est une mesure à la Right to Work, inspirée de ce qui se fait aux États-Unis. Je crois que le gouvernement veut laisser le choix aux syndiqué-es de cotiser ou non à leur syndicat, ce qui affaiblirait énormément les syndicats partout au pays. La loi oblige tout de même les syndicats à défendre les travailleurs, mais si les gens ne paient plus de cotisations, la force syndicale sera considérablement affaiblie. »

Le prétexte C-51

Le 6 mai, le projet de loi « antiterroriste » C-51 a été adopté en chambre. En réaction aux attaques d’Ottawa et de Saint-Jean-sur-Richelieu, survenues en octobre dernier, C-51 permet au Service canadien du renseignement de sécurité de surveiller secrètement les personnes s’adonnant à une « activité qui porte atteinte à la souveraineté, à la sécurité ou à l’intégrité territoriale du Canada ou à la vie ou à la sécurité de la population du Canada ». De nombreux militants pour la défense de l’environnement, pour les droits autochtones, provenant de groupes anti­capitalistes, et bien d’autres, craignent d’être surveillés en vertu de cette loi. La confusion règne, et toute la population peut se retrouver sous la loupe. « L’ampleur des communications de renseignements entre les ministères et organismes fédéraux proposés dans C-51 est sans précédent. Ces nouveaux pouvoirs sont démesurés et les mesures de protection de la vie privée proposées sont nettement insuffisantes », écrivait le Commissaire à la vie privée du Canada, Daniel Therrien, dans une lettre ouverte publiée en mars dernier dans Le Devoir. Pour Karine Péloffy, avocate et directrice générale du Centre québécois du droit de l’environnement, il s’agit d’un prétexte pour imposer certaines mesures strictes, qui ne seraient pas acceptées en contexte normal. « On crée un flou pour des raisons idéologiques et l’on mise sur la peur du terrorisme pour appliquer un plus grand contrôle sur les personnes qui sont “nuisibles” à l’économie canadienne », affirme Mme Péloffy. Ce qu’elle considère comme un grand danger, c’est l’absence dans le projet de loi de dispositifs de contrôle ou de régulation de la surveillance. « Ce qui est dommage, c’est que je crois que les gens seront découragés de s’impliquer, par peur d’être considérés comme des “extrémistes”. Mais, nous ne comptons pas nous laisser intimider », conclut Me Péloffy.

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Le déclin de l’empire pétrolier de Stephen Harper https://www.csn.qc.ca/actualites/le-declin-de-lempire-petrolier-de-stephen-harper/ Mon, 01 Jun 2015 08:01:16 +0000 https://www.csn.qc.ca/?post_type=csnqc_actualite&p=62990 Depuis déjà neuf ans, le gouvernement conservateur s’attaque sans remords aux institutions démocratiques d’un océan à l’autre tout en faisant obstacle aux acteurs de la société civile qui osent lui bloquer le chemin. Sur le plan environnemental, le premier ministre éprouve toutefois des difficultés à contourner la résistance des peuples qui refusent sa vision de l’exploitation pétrolière et qui s’opposent au transport non réglementé des hydrocarbures.

Le 11 avril dernier, plus de 25 000 personnes ont pris d’assaut les rues de Québec pour se porter à la défense de l’environnement et pour s’opposer au programme de Stephen Harper et de ses amis de l’industrie pétrolière. Les manifestants ont enjoint les élu-es canadiens à mettre en place des politiques favorisant la réduction d’émissions de gaz à effet de serre (GES) pour respecter les objectifs établis en 2009 lors du Sommet COP15 de Copenhague. Cette marche s’est ajoutée à une vague de contestations des politiques d’exploitation hypercapitalistes du gouvernement Harper.

« Coule pas chez nous »

Malgré sa réélection en 2011 et l’obtention de son premier gouvernement majoritaire, le premier ministre n’arrive pas à mettre en œuvre le développement d’oléoducs pour faciliter la commercialisation du pétrole des sables bitumineux de l’Alberta. La construction de l’oléoduc Keystone XL, projet chouchou du gouvernement, a été mise sur la glace grâce à la pression de mouvements citoyens provenant des deux côtés du 49e parallèle. L’oléoduc Northern Gateway a connu un sort semblable en 2014 face à une forte résistance des peuples autochtones de la Colombie-Britannique. Au Québec, le projet Énergie Est a récemment été reporté au moins jusqu’en 2020 après que TransCanada ait plié sous les cris des citoyennes et des citoyens qui s’opposaient à la construction d’un port méthanier en plein cœur d’une pouponnière de bélugas.

Pour Melina Laboucan-Massimo, mem­bre de la Première nation des Cris du Lubicon et responsable de la campagne Halte aux sables bitumineux pour Greenpeace, il s’agit d’importantes victoires qui méritent d’être célébrées. « Il y a dix ans, ces conversations ne faisaient pas partie du débat public. Mais la population commence à comprendre l’urgence de la situation et à se rallier aux cris d’alarme des groupes autochtones et environnementalistes. »

Tout n’est pas joué

Selon le dernier rapport de la commissaire à l’environnement et au développement durable du Canada, le gouvernement s’écarte de ses obligations internationales de réduction de GES. Il s’est également attaqué au ministère de l’Environnement en lui imposant d’importantes compressions financières ainsi que l’abolition de quelque 300 postes, principalement de scientifiques. Les conservateurs ont éliminé la protection de la majorité des cours d’eau canadiens : des 2,5 millions de lacs et de rivières protégés, il en reste tout juste 159 qui le sont conformément aux lois fédérales.

« C’est une attaque aux droits ancestraux et aux droits issus des traités. Nos communautés sont les plus frappées par ce racisme environnemental parce qu’elles sont les plus près de l’extraction néocoloniale des ressources naturelles. Plus personne ne peut pratiquer la médecine traditionnelle parce que tout est contaminé : l’eau, le sol, les plantes. Nos jeunes comme nos vieux sont en train de mourir de cancers qu’on n’a jamais connus auparavant », dénonce Mme Laboucan-Massimo.

La lutte pour préserver l’environnement devra maintenant faire face à la criminalisation de la dissidence avec l’adoption du projet de loi C-51, mais « malgré l’adoption de cette loi orwellienne, nous devons continuer à nous battre. Le Canada doit assurer la transition vers les énergies renouvelables et la création d’emplois verts » , conclut Melina Laboucan-Massimo.

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