La désinstitutionnalisation : un moratoire virtuel !
Les intervenant-es dans le milieu de la santé mentale et de la déficience intellectuelle se disent très inquiets de la situation des quelque 88 personnes présentant une déficience intellectuelle présentement hébergées au Centre hospitalier Robert Giffard (CHRG). Alors que le nouveau ministre de la santé, Philippe Couillard, annonçait le 8 mai dernier un moratoire sur leur intégration dans la communauté, nous apprenons que dans les faits, la gestion du processus se poursuit. Selon la régie régionale, il s’agissait tout simplement d’un moratoire de quelques jours, sans remise en cause de la décision de transférer cette clientèle hors du CHRG-CRDIQ. Tout le processus de « désins » se poursuit, et ce, selon les mêmes bases d’évaluation qu’auparavant.
Pourtant, le candidat Couillard, en campagne électorale, avait qualifié de « loufoque » la décision de désinstitutionnaliser des personnes ayant d’importants besoins d’assistance et d’encadrement. Il s’était montré sensible aux inquiétudes des parents, insuffisamment consultés et soutenus pour participer aux décisions touchant un de leurs proches, avec toutes les conséquences qui en découlent pour le futur de leur vie familiale.
Depuis son annonce, trois comités ont été formés au CRDIQ :
- Grand comité du plan d’intégration sociale supervisant des sous-comités chargés respectivement de l’évaluation et du regroupement des usagers, de l’organisation des ressources humaines, et enfin, un dernier chargé de l’encadrement physique, matériel et de la localisation des résidences ;
- Comité de support au personnel en période de changement ;
- Comité d’analyse des besoins de formation.
À titre de personnes salariées soucieuses du bien-être des bénéficiaires et solidaires des familles touchées, nous allons participer et suivre de près les travaux de ces comités. Quatre éléments retiendront principalement notre attention, soit :
- Une garantie d’amélioration de la qualité de vie pour la personne bénéficiaire ;
- Le respect de la volonté des proches ;
- Une garantie de sécurité pour les personnes intervenantes dans la communauté ;
- Une intégration sociale qui maintient la qualité de vie des communautés d’accueil.
De plus, une attention particulière devrait être accordée aux bénéficiaires qui sont sous la « protection » de la curatelle publique.
Les nominations aux divers comités devront être connues dans les prochains jours. Nous espérons que les décideurs feront appel à l’expertise des travailleuses et travailleurs qui sont souvent les personnes significatives qui connaissent le mieux les besoins des bénéficiaires.
Pour notre part, compte tenu des bilans disponibles en déficience intellectuelle, tous confirmant l’existence de nombreuses personnes en attente de services et l’insuffisance des services aux personnes ayant les besoins les plus lourds de même que l’insuffisance des soutiens offerts aux familles et dans les communautés, nous escomptions que le moratoire aurait permis de reconnaître qu’il y a sans doute des personnes pour lesquelles une sortie prochaine de l’institution n’est pas réaliste ni souhaitable.
Compte tenu des formidables défis que présente la Politique de soutien visant l’intégration et la participation sociale des personnes ayant des limitations fonctionnelles, nous pensons simplement qu’il vaut la peine de se demander s’il n’est pas préférable d’investir pour mieux soutenir les nombreuses personnes atteintes de déficience intellectuelle et leurs familles vivant déjà dans leurs communautés (plus de 95 %) plutôt que dans une opération consistant à « finir la désins » qui demandera à l’évidence beaucoup d’attention et de ressources pour vraiment garantir la sécurité et le bien-être de l’ensemble des personnes en cause.
Source : Conseil central de Québec Chaudière-Appalaches – CSN 29-05-2003 Renseignements : Ann Gingras, présidente (418) 573-0080 Sylvie Desnoyers, vice-présidente régionale (418) 647-5741