L’histoire du cinéma en jeu

Plus que jamais, l’avenir de la Cinémathèque québécoise est sombre et incertain. Non seulement souffre-t-elle d’un sous-financement chronique depuis plus de 20 ans, mais voilà que le gouvernement libéral envisage de fusionner la Cinémathèque à Bibliothèque et archives nationales du Québec (BANQ), une idée qui entraînerait des mises à pied et une importante perte d’expertise dans le domaine cinématographique.

« La solution proposée par la ministre de la Culture et des Communications, Hélène David, n’est pas envisageable. Ce gouvernement semble obsédé par les fusions tous azimuts. Sous prétexte de vouloir réaliser des économies de bouts de chandelle, cette hypothétique fusion entre la Cinémathèque et la BANQ menace sa mission même. Nous demandons donc à madame la ministre de protéger l’intégrité et l’indépendance de la cinémathèque et de prendre le temps d’étudier, avec les employés, les artisans et les acteurs du milieu, d’autres possibilités de scénarios afin d’assurer la pérennité de cette institution vieille de 51 ans. À court terme, nous voulons que le budget soit reconduit et augmenté de 800 000 dollars annuellement pour enrayer le déficit actuel. C’est bien peu, compte tenu de tout ce que nous devons faire et de ce que nous voulons accomplir dans l’avenir », soutient Pascale St-Onge, secrétaire générale de la Fédération nationale des communications (FNC-CSN).

Le sacrifice des employé-es

Rappelons que la mission de la Cinémathèque québécoise est d’acquérir, de documenter et de sauvegarder le patrimoine cinématographique, télévisuel et audiovisuel québécois, ainsi que le cinéma d’animation international et des œuvres significatives du cinéma canadien et mondial, pour en assurer la mise en valeur à des fins culturelles et éducatives.

Au fil de ses 51 années d’existence, la cinémathèque a développé une expertise unique et admirée partout dans le monde.

Le sous-financement de la Cinémathèque québécoise étouffe la créativité de ses artisans depuis trop longtemps. « Ce sont les sacrifices des employé-es de la cinémathèque qui, en acceptant de geler nos conditions de travail depuis 2008, ont permis à l’institution de demeurer en vie tout ce temps. Le gouvernement doit reconnaitre nos efforts et nous aider à trouver une solution à long terme qui assurera le rayonnement de notre travail. On ne peut pas conserver 40 000 films et vidéos et 30 000 émissions de télé dans un état extraordinaire sans avoir au préalable développé une expertise unique. Je crains pour l’histoire du cinéma au Québec », a lancé Lorraine LeBlanc, présidente du syndicat des employés et employées de la Cinémathèque québécoise (SEECQ)

Plusieurs membres de la communauté artistique du cinéma et de la télé sont également inquiets. « La Cinémathèque est comme notre cave à vin. Elle protège nos films de leur nature éphémère. Elle leur offre cette pérennité qui témoignera de notre culture », mentionne avec justesse le cinéaste Charles Binamé qui a tenu à défendre la pérennité de cette institution.

« La Cinémathèque québécoise fait partie de nos fondations, ces fondations qui nous permettent comme peuple de nous ouvrir au monde, qui participent à donner à notre jeunesse un lieu d’appartenance, un sentiment de confiance, que cette jeunesse soit née ici ou qu’elle trouve ici une terre d’adoption. La cinémathèque permet aussi à sa population vieillissante de se retrouver, se reconnaître et de se souvenir », a soutenu la comédienne, Suzanne Clément.