Comment brasser un syndicat CSN en trois jours

Délégué dans l’ancienne organisation syndicale (TUAC 501), Kevin Villeneuve croit que le syndicat affilié à une organisation américaine était trop éloigné des membres. Pire, lui et ses pairs ont constaté un net recul dans leurs conditions de travail par rapport aux autres brasseries régionales et surtout par rapport aux trois géants transnationaux de l’industrie brassicole au Québec : Molson-Coors, Labatt et Sleeman. « Nous n’étions vraiment pas satisfaits de ce local, nous confie-t-il. Lorsqu’on essayait de régler des problèmes à l’usine, il fallait toujours passer par la centrale, la FTQ. On n’avait jamais la chance de résoudre nos difficultés à l’interne. » Ce manque de contrôle sur leur propre destin se faisait le plus sentir lorsqu’ils avaient à négocier leur convention collective : « L’ancien syndicat négociait sans même nous parler », renchérit M. Villeneuve.

Ce n’est plus le cas. Kevin Villeneuve est le président du tout nouveau Syndicat des travailleuses et travailleurs Les Brasseurs RJ (FC–CSN) depuis l’obtention de leur nouvelle accréditation, le 4 février dernier.

Le changement d’allégeance syndicale s’est réalisé très rapidement. Après un premier contact l’été dernier avec Renaud Ledoux, conseiller à la syndicalisation, ils ont choisi la semaine entre Noël et le Jour de l’An pour entamer le processus de signature des cartes. En seulement trois jours, la grande majorité des membres de l’unité avaient signé leur carte d’adhésion à la CSN. « Ça s’est passé excessivement vite, s’est exclamé Renaud Ledoux. J’ai déjà connu des campagnes de syndicalisation qui ont duré deux ans ! »

Le conseiller lève son chapeau aux nouveaux membres : « C’était comme un exemple type ; ils étaient très bien structurés et tout le monde respectait les mots d’ordre à la lettre. » Cet enthousiasme a débordé dans l’organisation de leur syndicat. « Il y a eu une très forte participation à leur première assemblée, remarque Renaud Ledoux. Il y avait des travailleurs de nuit, des jeunes. Plusieurs d’entre eux portaient déjà des tuques CSN ! »

Nouveau climat de confiance

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Le prochain défi, c’est de négocier une première convention collective digne d’un syndicat CSN. À cette fin, les premiers pourparlers ont été entamés le 10 juin. Selon Martin Pagé, conseiller syndical à la FC–CSN, il y a du pain sur la planche : « Il faut renégocier la convention collective au complet, surtout sur le plan salarial afin de rattraper les salaires du secteur. C’est le plus gros enjeu et la priorité des membres. C’est également important d’obtenir du temps de libération syndicale afin de donner les moyens aux représentants syndicaux de remplir leurs obligations. »

Pour Kevin Villeneuve, l’autonomie syndicale est primordiale. Les membres détiennent enfin leur propre accréditation, et il faut que l’employeur respecte le fait que les travailleuses et travailleurs de Les Brasseurs RJ ont leur mot à dire sur leurs conditions de travail.

Le président syndical constate déjà une nouvelle atmosphère au sein du syndicat de la brasserie. « Quand nous avons un problème, ça se règle ici, explique Kevin Villeneuve. Si un travailleur signale une lacune en santé-sécurité au vice-président responsable du dossier, il s’en occupe tout de suite. Maintenant que notre comité exécutif travaille dans l’entreprise, ça marche beaucoup mieux. »

Cadenassage : Plus qu’un mot, une procédure pour éliminer le danger à la source

Jusqu’au début de 2016, la définition du cadenassage n’était pas présentée dans le Règlement sur la santé et la sécurité du travail (RSST) et les articles qui traitaient du sujet restaient très évasifs sur le sens et la portée de ce concept. La CSN, par diverses actions, a toujours martelé ses préoccupations par rapport à la mise en application et à l’efficacité du règlement sur le cadenassage, mais le gouvernement et les instances responsables tardaient à agir.

Entre-temps, le nombre d’accidents reliés au contrôle des énergies continuait de croître dans les milieux de travail, atteignant une moyenne annuelle de 1 000 accidents, dont quatre décès causés par le dégagement intempestif d’une source d’énergie. Le règlement était loin de correspondre à la réalité du travail ainsi qu’à l’évolution des outils et des techniques. Il ne garantissait pas non plus le respect de la santé, de la sécurité et de l’intégrité physique des travailleuses et des travailleurs.

Il a fallu attendre jusqu’en 2005 pour qu’un comité multisectoriel soit mis en place avec le mandat d’identifier des procédures de cadenassage applicables sur les différents lieux de travail. Ce comité devait en outre élaborer une proposition de modification du règlement. Tout ceci a été rendu possible grâce aux efforts de la CSN et à la persévérance des syndicats. Dix ans plus tard, cette démarche aboutira à des modifications à la réglementation avec des articles concrets et intelligibles sur l’application du processus de cadenassage et d’autres méthodes de contrôle des énergies.

Vers de bonnes pratiques

Les amendements ratifiés en janvier 2016 amènent divers points qui assurent l’élimination du danger à la source. Nous trouvons, entre autres, une définition claire du cadenassage qui vient préciser son cadre d’application. Des dispositions spécifiques dictent, en outre, la procédure d’application d’autres méthodes de contrôle des énergies. En dernier lieu, une clarification des responsabilités de l’employeur, du sous-traitant et de l’employé-e définit les exigences liées à la coordination des procédures de cadenassage.

Ces dispositions dans le règlement prônent l’intégration de tous dans l’élaboration d’une procédure de cadenassage. Les procédures sont élaborées avec l’employeur, le contremaître et les opérateurs et, ensuite, approuvées par une personne responsable dans l’entreprise. Grâce à ces modifications, le cadenassage n’est plus de la responsabilité d’un seul travailleur, encore moins d’un service, mais bien de toute l’entreprise.

Après analyse des risques, ces procédures disponibles sur les lieux de travail fournissent, sous forme de fiches, des méthodes de contrôle adaptées à chaque source d’énergie identifiée et présentent un plan de remise en marche sécuritaire de la machine. La formation, issue de la collaboration des syndicats et des employeurs, devient un élément clé du processus et constitue la pièce maîtresse de la réussite de toute procédure.

En devenant obligatoire, cette formation protège des vies. Elle garantit l’accomplissement d’un travail sécuritaire et permet à tout travailleur de se prémunir du droit de refus. Le syndicat doit veiller à l’actualisation de cette formation et s’assurer de son adéquation avec les machines, les techniques et la compétence de celles et de ceux qui les utilisent. Étant mieux formé et informé des dangers, le travailleur devient plus conscient des impacts sur sa santé, sa sécurité et son intégrité physique. Il est plus apte à contribuer à l’atteinte de l’objectif premier de la prévention : l’élimination des risques à la source.

Des reculs importants à prévoir

Peu trouvent l’argument convaincant, d’autant que les pratiques budgétaires reprochées au gouvernement de Dilma sont fréquentes. Mais c’était la seule manœuvre qui pouvait permettre à ses adversaires de renverser le gouvernement alors que le PT perdait ses appuis politiques, un objectif devenu évident au courant de la dernière année.

Le contexte politique récent a été marqué par le scandale de Petrobras, la compagnie nationale de pétrole, dans lequel plusieurs élus des différents camps font l’objet d’une enquête, ou sont déjà derrière les barreaux pour avoir reçu des pots-de-vin. Le tout survient dans un contexte économique très difficile, après des années d’attaques des partis de droite et des grands médias contre le PT qu’ils tentent de discréditer pour cause de corruption et pour leur gestion de l’économie et des finances publiques.

Le gouvernement de Dilma n’a pas échappé au scandale de la corruption, pas plus que les forces qui en ont finalement eu raison ! Eduardo Cunha, président de la Chambre des députés, est accusé de corruption et de blanchiment d’argent en Suisse. Michel Temer du Parti du mouvement démocratique brésilien (PMDB), allié du PT jusqu’à la fin mars 2016, accède maintenant à la présidence du pays. Il fait également l’objet d’une enquête dans le scandale de Petrobras.

Pour plusieurs organisations brésiliennes, dont nos camarades de la Centrale unique des travailleurs (CUT), c’est un véritable coup d’État que subit la jeune démocratie brésilienne. Elles dénoncent vertement les manœuvres d’une droite impatiente de reprendre le pouvoir après 14 ans de gouvernement du PT. Certes, le bilan du PT n’est pas parfait et les critiques fusent aussi à gauche : alliance avec la droite empêchant des réformes importantes (terres agricoles, système électoral, communications), sommes astronomiques dépensées pour la Coupe du monde et les Jeux olympiques, etc.

Des avancées majeures

Mais il y a aussi bon nombre de réalisations positives depuis 14 ans qui ont permis de diminuer les inégalités. Ainsi, 22 millions de personnes ont fui la pauvreté extrême et 35 millions d’autres ont rejoint les rangs de la classe moyenne, des centaines d’écoles et 14 universités ont été construites, 20 millions d’emplois officiels ont été créés, etc. Le gouvernement du PT a aussi encouragé l’intégration régionale en Amérique latine sur la base d’un autre modèle de développement économique et social, ainsi que le renforcement du BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, South-Africa/Afrique du Sud) face au bloc dominant contrôlé par les États-Unis dans la joute géopolitique mondiale.   

Le nouveau gouvernement a déjà annoncé qu’une de ses priorités était l’adoption d’une loi qui permettra la sous-traitance dans toutes les entreprises et dans le secteur public. Ainsi, nos camarades craignent non seulement une régression de la démocratie au Brésil, mais aussi des reculs quant aux conditions de vie et de travail, des obstacles à l’action des mouvements sociaux et du mouvement syndical et un changement d’orientation qui amènerait le Brésil, ainsi que d’autres pays de la région où la droite a repris le pouvoir (Argentine) ou pourrait le récupérer (Venezuela), à intégrer l’Amérique latine dans l’alliance néolibérale dominée par les États-Unis, qui se consolide notamment avec de nombreux accords commerciaux.

Le démantèlement du bloc progressiste au Sud, le seul véritable dans le monde, risque de renforcer l’alliance néolibérale et de réduire le nombre d’États qui défendent les droits de la personne et syndicaux face aux entreprises, dans les institutions internationales, mais surtout dans leur pays. Mais ne sous-estimons pas la force et la vitalité des mouvements sociaux brésiliens et argentins, ainsi que leur détermination à freiner les avancées de la droite.

Que vient-on de signer au juste ?

Faut-il en comprendre que l’on a négocié un peu à l’aveugle, pendant plus de trois ans ? Quand on sait que le Canada se spécialise de plus en plus dans l’exportation de ressources naturelles, alors qu’il importe de plus en plus de produits transformés, il y a de quoi se demander quel impact aura l’accord sur notre balance commerciale et notre secteur manufacturier, déjà mis à mal par la primarisation de l’économie canadienne. On révélait récemment qu’un an après avoir signé un accord commercial avec la Corée du Sud, nos exportations vers ce pays avaient chuté de 3,9 % alors que les importations coréennes ont augmenté de 8 %. De plus, l’accord limitera sérieusement la capacité du gouvernement de mettre en place des politiques de développement industriel et de soutien à des entreprises nationales afin de diversifier l’économie.

Des perspectives inquiétantes

Selon les conclusions d’une étude émanant de l’Institut sur le développement mondial et l’environnement de l’Université Tufts, le PTP pourrait entraîner la perte de 58 000 emplois au pays et la détérioration des conditions de travail. Si l’on voulait renforcer l’économie canadienne et favoriser la création d’emplois, on s’y prendrait autrement. L’objectif avec le PTP est plutôt de créer un milieu propice aux investissements grâce à des mesures qui vont accroître la mobilité et la sécurité du capital. Or, pour attirer les investissements, il faut offrir des profits concurrentiels, ce qui risque d’entraîner une pression à la baisse sur les conditions de travail. D’ailleurs, c’est la tendance que l’on enregistre depuis l’ouverture des marchés dans les années 1980. Imaginez avec certains partenaires, comme la Malaisie, où l’on pratique des formes d’esclavage modernes !

La sécurité des investissements sera quant à elle assurée par le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et États, également présent dans l’ALÉNA, et maintes fois décrié, qui permet aux entreprises de poursuivre des États lorsqu’ils adoptent des mesures qui limitent leur possibilité de profit. Par exemple, l’entreprise Transcanada poursuit actuellement le gouvernement états-unien pour 15 milliards de dollars en raison du rejet du projet Keystone XL devant acheminer le pétrole albertain aux raffineries du Sud. Cela n’est pas sans rappeler la poursuite de 250 millions de Lone Pine Resources qui poursuit le Canada en raison du moratoire sur la fracturation hydraulique dans la vallée du Saint-Laurent.

Pas d’équivalent pour nos droits

Le contraste entre les protections accordées au capital et les mécanismes collaboratifs et volontaires concernant les droits du travail et l’environnement est frappant. De plus, alors que l’on allongera la durée des brevets des produits pharmaceutiques pour enrichir ces entreprises, nous paierons collectivement plus cher les médicaments. Plusieurs autres dispositions accroîtront la pression pour la privatisation des services publics et nous empêcheront à l’avenir de revenir sur des décisions passées ou d’orienter librement le développement de nos sociétés. Il est plus que temps qu’un large débat de société, avec études à l’appui, soit mené afin de faire des choix éclairés pour l’avenir de nos sociétés et de nos droits collectifs comme individuels. 

Un tremplin pour les syndicalistes en devenir

Tout d’abord, il me paraît pertinent de préciser que la formation mise en place il y a une quinzaine d’années est donnée par les membres du comité. Elle vise essentiellement à réunir des jeunes syndiqué-es de la CSN âgés de 30 ans et moins, possédant peu ou pas d’expérience syndicale et ayant la curiosité d’en apprendre davantage sur le syndicalisme et son histoire. L’activité se déroule à Jouvence, une base de plein air dont les employé-es sont syndiqués avec la CSN. En matinée, les participantes et les participants assistent à une séance de formation syndicale, les après-midi sont libres et, en soirée, on reçoit des invités de marque pour qu’ils nous racontent leur expérience syndicale.

Je dois avouer que l’idée de présenter la formation me tracassait. À l’été 2014, j’avais eu l’occasion de participer à l’école de la relève à titre de participant et j’avais trouvé les jeunes formateurs tout à fait exceptionnels. Je ne croyais pas pouvoir leur arriver à la cheville lorsque je me suis retrouvé dans leurs souliers, et c’est avec sérieux que je me suis préparé. Au cours des mois qui ont précédé la formation, avec mes camarades du comité national, et d’autres jeunes, nous avons révisé le contenu et fait la mise à jour des documents et des outils qui auraient pu être désuets, tout en tenant compte du travail titanesque que l’ancienne équipe avait fait pour remodeler la formation. Notre préoccupation étant, bien sûr, d’offrir la formation la plus à jour possible. Ainsi, bien armé des connaissances syndicales et des techniques d’animation que j’avais acquises, j’étais fin prêt à donner la formation. Après un début plutôt laborieux, devant un auditoire résolument prêt à me concéder une seconde chance, j’ai pris de l’assurance et me suis lancé avec enthousiasme dans l’animation de la formation.

J’ai eu beaucoup de plaisir à côtoyer tout ce beau monde au cours des deux sessions de l’école de la relève. Et, il y a matière à se réjouir. Allumés, passionnés, motivés, ces jeunes travailleuses et travailleurs, qui viennent des quatre coins du Québec — de l’Abitibi-Témiscamingue à la Côte-Nord en passant par Montréal, Québec, le Saguenay–Lac-Saint-Jean—, représentent une relève prometteuse pour le mouvement CSN. Cette occasion qui est offerte aux jeunes de partager leurs réalités a permis des moments riches en discussions, témoignages et perspectives. Pour ce qui est des invité-es, tous captivants, ils leur ont visiblement infusé une dose extraordinaire de motivation et de détermination pour qu’ils aient le goût de s’engager dans leurs milieux syndicaux et qu’ils deviennent des leaders capables de rallier tous ceux et celles qui se sentent interpellés par la vie syndicale.

J’ai été surpris par l’énergie, la curiosité et l’intérêt manifestés par les participantes et les participants. J’ai vu des jeunes déterminés à prendre leur place dans leurs instances démocratiques syndicales. Ne soyez donc pas étonnés de les voir s’investir de plus en plus dans le mouvement CSN !


Prochaines sessions : du 7 au 10 août 2016 (date limite d’inscription : 24 juin) ; du 10 au 13 août 2016 (date limite d’inscription : 24 juin) ; du 2 au 5 février 2017 (date limite d’inscription : 9 décembre)

Un espace de parole et de débats ouverts

Que des hommes et des femmes ne comprennent pas le besoin de se réunir entre femmes démontre bien l’intégration du discours patriarcal. Certaines personnes banalisent ce besoin et revendiquent la transformation des comités de condition féminine en comités de « relations humaines » ou autre appellation du genre. D’autres réagissent en critiquant le manque de reconnaissance des féministes envers la solidarité de plusieurs hommes et les problèmes qu’ils vivent eux aussi (violence, harcèlement, monoparentalité, etc.). Pourtant, bien que les femmes n’aient pas le monopole de la discrimination, elles la subissent plus souvent que les hommes.

On entend souvent dire que l’égalité est acquise et que sa concrétisation ne relève que du bon vouloir des femmes. Un exemple patent est leur sous-représentativité dans les postes politiques. Les femmes autant que les hommes peuvent poser leur candidature à la tête d’institutions politiques ou syndicales, etc. Pour les tenants de cette vision, le manque de volonté des femmes ou leur désintérêt pour la chose politique expliquent un tel déséquilibre.

Certes, les femmes doivent prendre leur place. Mais cette façon stéréotypée d’analyser la situation est issue de centaines d’années passées à entretenir un modèle de société patriarcale bien ancré en nous. Les façons de faire en politique, notamment le recrutement et l’organisation des réunions, ont longtemps été appliquées par des hommes, pour des hommes. Les premières femmes à avoir réussi à se tailler une place dans ce milieu d’hommes devaient se conformer aux pratiques établies, et la critique était prompte et vive envers celles qui ne rentraient pas dans les rangs.

Il est possible de faire les choses autrement et des améliorations notables ont été apportées grâce aux revendications des femmes. L’égalité de droit, du moins au Québec et au Canada, est en grande partie atteinte : la discrimination basée sur le sexe n’est plus acceptable. Mais dans les faits, beaucoup de chemin reste à parcourir, les nombreuses statistiques disponibles sur les écarts salariaux, l’accès aux postes de pouvoir, les responsabilités familiales, la pauvreté, la violence, etc., le démontrent bien.

Les stéréotypes sont encore bien présents dans nos sociétés dites égalitaires. Ils sont insidieux et difficiles à combattre, car ils sont banalisés et font partie d’un mode « normal » de fonctionnement. Cette passivité, cette force d’inertie, met un frein aux revendications féministes. C’est « l’antiféminisme ordinaire ». Il faut que le réflexe de briser les stéréotypes s’acquière. Il faut que cesse la pression sociale qui veut faire entrer les gens dans un moule.

Un espace de discussion entre femmes permet les débats ouverts sur le féminisme qui sont difficiles à faire en groupes mixtes. Les femmes ont besoin de cet espace pour pouvoir faire naître des idées et les porter haut et fort, et s’exprimer sans cette pression intangible, mais bien présente. Tant que l’égalité ne sera pas atteinte, ces espaces « pour femmes seulement » seront nécessaires.

Il faut combattre cette réserve à ne pas se dire féministe, comme l’a fait de façon bien maladroite la ministre Thériault. À la question « Êtes-vous féministe? » plusieurs hommes et femmes répondent « Oui. Mais… ». La crainte d’un féminisme extrémiste n’est jamais bien loin.

Une fois cette prise de conscience effectuée, levons-nous et applaudissons les espaces « pour femmes seulement ». Ils contribuent à briser les mythes, à secouer l’inertie et à ouvrir le chemin à une véritable société égalitaire.

Le retour au travail à la suite d’un problème de santé psychologique

Que font la plupart des organisations devant ce fléau ? Elles ont une approche centrée sur la réduction des coûts. Paradoxalement, alors que des recherches démontrent qu’elles sont un obstacle au retour au travail, elles multiplient les expertises psychiatriques qui coûtent les yeux de la tête et négligent de se questionner sur les causes de ces absences.

Certains événements de la vie personnelle (maladie d’un proche, difficultés conjugales) peuvent mener à un problème de santé psychologique. Toutefois, des études ont démontré que, pour une proportion très importante de travailleuses et de travailleurs qui se sont absentés en raison d’un problème de santé psychologique, le travail était en cause et qu’il existait un lien direct avec certains facteurs organisationnels (faible reconnaissance, surcharge de travail, faible soutien social, rôle ambigu).

Vers un retour au travail réussi

Pour que le retour au travail se passe dans les meilleures conditions possible et que la travailleuse ou le travailleur puisse demeurer au travail de manière durable, les organisations doivent passer d’une approche médico-administrative (contrôle des coûts engendrés par l’absence, contre-expertise médicale) et adopter un véritable programme de retour et de maintien centré sur le travail1 où tous les acteurs clés ont un rôle à jouer. Une personne doit agir comme « agent de soutien » auprès de la travailleuse ou du travailleur en absence maladie et, par la suite, tout au long du processus de retour et de maintien. Cette personne doit être neutre et détachée des enjeux administratifs. L’agent de soutien doit accompagner le travailleur durant son absence et l’amener progressivement à identifier les facteurs qui ont contribué à son arrêt de travail et à faire part de ses préoccupations quant à son retour. Ces éléments serviront de base à une première discussion avec le supérieur immédiat pour ensuite envisager des pistes de solutions et amener le travailleur et le supérieur immédiat à s’entendre sur un plan de retour au travail. Les représentants syndicaux doivent collaborer en soutenant la personne en absence maladie, en l’informant de ses droits et des ressources disponibles. Ils participent aussi à l’analyse du plan de retour afin qu’il respecte la convention collective. L’agent de soutien en effectuera le suivi et des mesures d’ajustement pourront être apportées au besoin.

La face cachée de la honte

Le regard et les jugements que les autres portent sur nous ne sont pas sans conséquence quand nous faisons face à un problème de santé mentale. Savoir que nous sommes reconnus pour notre travail et soutenus par nos collègues ou notre supérieur facilite le processus de rétablissement et de retour au travail. À l’inverse, les tabous et les préjugés sont des obstacles à un retour réussi. À ce chapitre, le supérieur et les collègues de travail ont un rôle important à jouer. Une dépression, un trouble d’adaptation, ce n’est pas comme un cancer, ça n’attire pas autant de sympathie. Au contraire, ça sème plutôt la controverse ou le doute : « Je fais le même travail, moi, et je ne suis pas malade ». Le syndicat peut jouer un rôle déterminant en participant à la sensibilisation de ses membres aux problèmes de santé psychologique et aux facteurs qui y contribuent. Une chose est certaine, personne n’est à l’abri d’un problème de santé psychologique. Une personne sur cinq en souffrira au cours de sa vie. Nous avons toutes et tous à gagner d’une approche centrée sur la santé au travail. n

1. Cet article est inspiré du guide Soutenir le retour au travail et favoriser le maintien en emploi – Faciliter le retour au travail d’un employé à la suite d’une absence liée à un problème de santé psychologique de Louise St-Arnaud et Mariève Pelletier [RG-758, Montréal, IRSST, 2013, 38 pages]. Téléchargement gratuit.

De l’indépendance à l’autonomie

Macadam Sud, qui emploie 15 salarié-es, existe depuis plus de 30 ans et offre différents services aux jeunes de 12 à 35 ans. Parmi ceux-ci, nous pouvons compter une école de la rue pour jeunes décrocheurs, un volet squat qui fait office de maison de jeunes, un centre de jour et un service de travail de rue partout dans le Grand Longueuil.

Le travail réalisé par ces salarié-es est considérable. Ils sont appelés à intervenir dans des situations complexes, confrontés parfois à des réalités qui échappent au commun des mortels. Les travailleuses et les travailleurs de rue arpentent, hiver comme été, les rues, les ruelles, les « piqueries », et autres « piaules », afin d’apporter soutien et réconfort aux populations marginalisées et précarisées. Les intervenants ne sont pas en reste, ils ont la tâche d’agir auprès de jeunes ayant parfois des situations de vie extrêmement difficiles. Les organismes communautaires ont une mission louable, mais il ne faut pas oublier que ce sont les travailleurs qui la réalisent au jour le jour.

Lorsque les salarié-es de l’organisme entreprennent un processus de syndicalisation à l’automne 2014, ce n’est pas nécessairement parce qu’ils jugent leurs salaires trop bas, ils veulent plutôt limiter l’arbitraire de l’employeur en établissant des règles claires et identiques pour tout le monde. Comme nous l’explique Carl Lafrenière, président du SÉMAC-CSN : « Notre objectif, c’était d’établir une équité en matière de salaires et de conditions de travail. Nous voulions que toutes et tous aient les mêmes règles à respecter et les mêmes avantages. »

Mais après une année d’existence, il semble de plus en plus évident que leur volonté initiale de bâtir un syndicat indépendant, non affilié, s’avère une tâche plus difficile que ce que les membres avaient prévu. Les négociations stagnent depuis plusieurs semaines, le rapport de force est difficile à établir et la mobilisation s’essouffle, le syndicat n’a pas les moyens financiers pour accomplir des tâches importantes comme le suivi des griefs, les militantes et les militants n’arrivent plus à réaliser l’ensemble du travail à faire. Pour toutes ces raisons, les salarié-es en arrivent à considérer l’affiliation à une centrale. Après avoir évalué certaines options, le choix de la CSN va de soi pour l’ensemble des membres, qui demeurent jaloux de leur autonomie, un principe cher à la CSN.

« Il était très important pour nous de conserver notre liberté tout en étant épaulés par une équipe de personnes spécialisées dans différents domaines, affirme Carl Lafrenière. Avec la CSN, on obtenait des outils, des ressources, tout en conservant notre certificat d’accréditation, donc notre autonomie. » La présence d’une forte représentation du milieu communautaire au sein de la CSN, plus particulièrement à la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS–CSN), a également pesé fort dans la balance.

Une fois affilié, le SÉMAC–CSN a pu rencontrer un conseiller syndical et la négociation avec la partie patronale s’est poursuivie. « Il y a eu une première rencontre avec le conseiller, les échanges ont été intéressants et on sent que cela pourrait évoluer plus rapidement, bref, on voit déjà les impacts positifs de notre affiliation », se réjouit Carl Lafrenière. n

La percée du mouvement syndical dans le village global

Le Québec se préparait pour un réfé­rendum sur son avenir, Céline nous chantait Pour que tu m’aimes encore, et La Petite Vie devenait la seule série télévisée québécoise ou canadienne à franchir la barre des quatre millions de téléspectateurs. Une minorité de Québécois se branchait peu à peu à Internet, dont Jean-Pierre Paré, aujourd’hui retraité du Service des communications et architecte du premier site web de la CSN.

Pionnier parmi les internautes québécois, M. Paré fréquentait plusieurs babillards électroniques au début des années 90 avant la parution du web tel qu’on le connaît aujourd’hui. C’est là qu’il se familiarise avec les avancées technologiques et prend con­nais­sance de quelques outils d’apprentissage pour bâtir des pages web rudimentaires.

Un site entre 18 trous

En 1995, il profite de son congé estival pour monter un projet HTML qu’il dévoile lors d’une partie de golf informelle avec le président de la CSN d’alors, Gérald Larose. « Ça lui a pris une minute de réflexion — peut-être moins — avant de me donner le go », explique M. Paré. Deux mois plus tard, c’était fait, la CSN était en ligne, devenant la première centrale syndicale au Québec ouverte à cette nouvelle fenêtre sur le monde. »

On y retrouvait des informations d’actualité générale, les publications de l’ancien organe officiel Nouvelles CSN, un aperçu des services confédéraux, et même la possibilité « de s’adresser directement au président Gérald Larose par courrier électronique ». Bien que ça paraisse banal aujourd’hui, c’était un développement « révolutionnaire » il y a 20 ans.

Les outils web additionnels furent bien accueillis par les membres de la CSN. « Je recevais des courriels des militants qui me disaient, c’est le fun parce que chez nous Nouvelles CSN n’est pas toujours distribué, mais maintenant, avec le site web, on y a accès facilement », se rappelle M. Paré.

L’importance d’un mouvement branché

Les tendances et les habitudes de l’univers virtuel ont beaucoup évolué au cours des dernières décennies. Si en 1995 seulement 4 % des foyers canadiens étaient connectés à Internet, aujourd’hui, c’est 85 % d’entre eux qui se retrouvent sur la toile. Il est aussi important de noter que les téléphones intelligents sont maintenant présents dans près de 60 % des domiciles québécois et que plus d’un Québécois sur deux possède une tablette.

Bien que le dévoilement de son site date déjà de 20 ans, la CSN continue de se doter des outils nécessaires pour se démarquer sur le web. C’est dans ce sens qu’elle a adopté une proposition lors de son dernier congrès pour redynamiser la démocratie syndicale en développant une plateforme commune web pour outiller les fédérations, les conseils centraux et les syndicats en vue de mieux communiquer avec leurs membres.

Pour M. Paré, l’idée derrière son projet demeure aussi importante aujourd’hui qu’il y a 20 ans. « J’ai toujours été un gars qui se préoccupe de la nécessité de diffuser l’information. L’histoire du syndicalisme doit être accessible aux gens. Nos luttes, nos recherches et nos revendications doivent être à portée de main. L’information se doit d’être libre. »

La CSN travaille actuellement à la refonte de son site web, celui-ci sera en ligne au printemps 2016.

Le syndicalisme, une histoire de valeurs

Les attaques des conservateurs contre les syndicats, l’austérité et la négociation dans le secteur public québécois sont autant d’éléments qui mobiliseront les forces vives de la CSN. Ce genre de lutte syndicale ne date toutefois pas d’hier.

Il y a deux phases dans la négociation des salaires et des conditions de travail des employé-es directs et indirects de l’État québécois. La première correspond à la syndicalisation et à la négociation dans les années 1960 et 1970. Elle est marquée par un fort militantisme, la constitution d’un front commun, des grèves nombreuses et une amélioration substantielle de leurs conditions de travail. L’autre période débute avec les décrets imposés par le gouvernement en 1982-1983 et elle se poursuit jusqu’à nos jours. Devant l’imposition de nombreuses lois spéciales, les syndicats s’efforcent d’enrayer une érosion de la rémunération et des conditions de travail.

Pour simplifier, la syndicalisation des secteurs public et parapublic représente une troisième étape dans la syndicalisation des salarié-es au Québec. La première est liée à la syndicalisation des ouvriers de métier à partir du milieu du 19e siècle. Leur qualification leur confère un rapport de force pour essayer d’imposer la négociation collective aux employeurs. Les effectifs syndicaux atteignent 97 000 membres en 1921 et ces travailleurs n’hésitent pas à faire grève : il y a près d’un million de jours de travail perdus à cause de conflits en 1919 et 1920.

Au tour du secteur public

Le syndicalisme franchit une deuxième étape d’expansion avec l’organisation des ouvrières et ouvriers semi-qualifiés et non qualifiés de l’industrie manufacturière. Cet élargissement est le résultat du militantisme syndical pendant la Deuxième Guerre et de l’adoption en 1944 de la Loi des relations ouvrières inspirée du Wagner Act voté aux États-Unis en 1935. Le gouvernement encadre le processus de négociation collective en posant comme principe que les employeurs doivent négocier « de bonne foi » avec les représentants de leurs employé-es. Les effectifs syndicaux atteignent près de 300 000 membres en 1951 (30 % des salarié-es).

Dans les années 1960, le syndicalisme franchit une troisième étape en regroupant massivement les employé-es des services publics et parapublics. Au début de cette décennie, les fonctionnaires de l’État québécois n’ont pas le droit de négocier leurs conditions de travail alors que les enseignantes et les enseignants et les employé-es des municipalités, de la santé et des services sociaux peuvent le faire depuis 1944. Mais ils ne détiennent pas le droit de grève et les conflits de travail doivent être soumis à l’arbitrage. Emportés par le climat de changement issu de la Révolution tranquille, ces salarié-es commencent à joindre massivement des organisations syndicales. Ainsi, à partir de 1961, la CSN commence à syndiquer des fonctionnaires et des ouvriers qui réclament les mêmes droits que les autres catégories de travailleurs, soit la libre négociation, la possibilité de s’affilier à une centrale syndicale et même le droit de grève. Le premier ministre Jean Lesage y était opposé, ayant notamment déclaré en 1962 que « la reine ne négociait pas avec ses sujets ».

Au même moment, les employé-es d’hôpitaux et les enseignantes et les enseignants remettent en cause le système d’arbitrage qui les régit. Des grèves illégales frappent neuf commissions scolaires en 1963 et les infirmières de l’hôpital Sainte-Justine, dont le syndicat est affilié à la CSN, débraient illégalement pendant un mois en octobre de la même année. Lors d’une rencontre avec le ministre de la Santé qui refuse d’intervenir à cause de l’illégalité du conflit, Madeleine Morgan, présidente du syndicat, réplique : « Tout ce que vous avez à faire, si vous voulez que nous soyons dans la légalité, c’est de changer votre loi ! » Le gouvernement, surpris par une mobilisation exceptionnelle des centrales syndicales, cède en 1964 à l’occasion de l’adoption d’un Code du travail. La CSN organise une assemblée extraordinaire de ses dirigeants et militants alors que la FTQ tient un congrès extraordinaire qui donne au comité exécutif le pouvoir de recourir à la grève générale si le gouvernement n’amende pas profondément le projet de loi. Les enseignantes et les enseignants ne sont pas en reste : la Corporation générale des instituteurs et institutrices menace aussi de convoquer un congrès d’urgence. « La pratique intégrale du droit d’association, peut-on lire dans un rapport de la corporation, n’a pu et ne peut se concevoir sans l’usage du droit de grève. »

La dernière version du projet de loi consacre le droit de grève pour tous les employé-es d’hôpitaux, de commissions scolaires et de municipalités. L’année suivante, ce droit est étendu aux enseignantes et enseignants et aux salarié-es directs de l’État. À peu de choses près, les principes généraux du Code du travail s’appliquent avec la restriction que les services essentiels soient déterminés entre les parties ou par décision du Tribunal du travail. Cette libéralisation des règles touchant la syndicalisation et le droit de grève des secteurs public et parapublic place le Québec à l’avant-garde en Amérique du Nord.

Des gains

De 1964 à 1966, les syndiqué-es relevant directement ou indirectement de l’État québécois font des gains importants, tant en terme salarial que sur le plan des clauses normatives. Il faut dire qu’ils ont un long chemin à rattraper tant leurs salaires et leurs conditions de travail viennent loin derrière ceux du secteur privé. Pour éviter la surenchère de négociations décentralisées, le gouvernement se substitue en 1968 aux commissions scolaires et aux corporations hospitalières en se donnant une politique salariale qu’il applique à tous ses employé-es directs ou indirects.

Les syndicats répondent en 1972 par la négociation en front commun, une méthode unique en Amérique du Nord. La négociation de 1972 donne lieu à l’emprisonnement des présidents des trois principales centrales syndicales pour avoir recommandé de ne pas respecter des injonctions. Répétées en 1975 et 1979, les négociations en front commun sont perturbées par des grèves parfois illégales, des injonctions et des lois spéciales. Néanmoins, elles valent des avantages significatifs aux syndiqué-es en termes d’augmentations salariales, d’avantages normatifs et de sécurité d’emploi. Pour le gouvernement, la rémunération de ses employé-es doit correspondre au salaire moyen des emplois analogues dans le secteur privé. En revanche, les centrales souhaitent que les augmentations obtenues aient un effet d’entraînement pour l’ensemble des travailleuses et des travailleurs du secteur privé. Le patronat s’en inquiète et des économistes confirment à cette influence au début des années 1980.

Fer de lance du syndicalisme, le front commun subit un revers majeur en 1982 et 1983 à l’occasion de la crise économique qui frappe le Québec. Le gouvernement impose une récupération salariale et de très faibles augmentations salariales pendant trois ans. Les grèves déclenchées se terminent par la rigoureuse loi 111, forçant les enseignantes et les enseignants à retourner au travail sous peine de congédiements collectifs et de perte d’ancienneté. Ce lourd échec marque un tournant non seulement pour les employé-es de l’État, mais pour tout le mouvement syndical.

Les négociations subséquentes (1986, 1989, 1992, 1993, 1995, 1997, 1999, 2005) sont marquées par de nombreuses lois spéciales comportant des récupérations salariales, la réouverture de conventions ou leur prolongation, des gels ou de faibles hausses de rémunération. En 1986, le gouvernement s’est donné la loi 160 qui modifie le rôle du Conseil des services essentiels lui octroyant le pouvoir de déterminer l’étendue de ces services, de réagir rapidement et de prévoir de lourdes conséquences pour le non-respect des ordonnances : fortes amendes, baisse de salaire, perte d’ancienneté, suspension de la retenue syndicale, etc. Les employé-es du réseau de la santé en subissent les conséquences lors d’arrêts de travail en 1989, alors que la FIIQ est frappée en 1999. C’est une véritable camisole de force pour limiter le droit de grève.

Le déséquilibre

Depuis les années 1970, le gouvernement s’est appliqué à suivre une politique ayant pour objectif d’aligner la rémunération de l’administration publique et parapublique sur celle du secteur privé. Selon la logique gouvernementale, il appartenait aux entreprises et aux forces du marché de déterminer le niveau de rémunération de ses salarié-es ; l’État devait se contenter d’être un acteur neutre. Mais, depuis les années 1990, il se sert de son pouvoir législatif pour repousser la rémunération des salarié-es de l’État bien en dessous de celle offerte dans le secteur privé. C’est ainsi qu’en 2014, le retard de la rémunération globale (elle comprend les avantages sociaux et les congés) était de 7,6 % par rapport à celui de l’ensemble des autres salarié-es québécois et de 24,1 % par rapport aux autres salarié-es syndiqués.

Compte tenu du nombre imposant de travailleuses et de travailleurs touchés directement ou indirectement par ces négociations (20 % des salarié-es), leurs faibles augmentations influent à la baisse sur la rémunération des autres salarié-es au Québec. Depuis trente ans, elles contribuent à ce que les hausses salariales de l’ensemble des travailleuses et des travailleurs ne dépassent guère l’augmentation des prix à la consommation. Le pouvoir d’achat des salarié-es n’a augmenté que de 11 % depuis plus de trente ans, du jamais-vu depuis que des statistiques sur les salaires réels moyens sont compilées.