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Marlène Paul ou le militantisme syndical pour créer des ponts sur les réalités autochtones

Innue par son père, Marlène est née il y a soixante-trois ans à Mashteuiatsh, la seule communauté autochtone au Saguenay–Lac-Saint-Jean. Elle enseigne à l’école secondaire Kassinu Mamu de Pekuakamiulnuatsh Takuhikan, à Mashteuiatsh. Elle a œuvré à syndiquer le personnel enseignant de son école en 2014 et est maintenant présidente du Syndicat des travailleuses et travailleurs de Mashteuiatsh—CSN.

« Étant à moitié innue, j’ai les pieds dans deux cultures. Cela a fait en sorte que souvent, pour les Autochtones, je ne suis pas vraiment autochtone. Et pour les Blancs, c’est pareil, je ne suis pas vraiment comme eux, mon nom de famille est associé aux Innus. Cette tension a parfois été difficile, surtout plus jeune », commence Marlène.

Les pensionnats autochtones, on a l’impression que c’est bien loin, mais Marlène les a connus. La pratique de séparer les enfants autochtones de leur famille en les plaçant dans ces pensionnats a été adoptée par le gouvernement fédéral et le clergé pour « tuer l’indien dans l’enfant ». Ces pensionnats ont existé dans toutes les provinces canadiennes, des années 1880 jusqu’aux années 1990, le dernier ayant fermé ses portes seulement en 1996, en Saskatchewan.

« Lorsque j’étais enfant, il y avait un pensionnat directement dans la communauté, qui s’appelait Pointe-Bleue à cette époque. À l’âge de seulement six ans, on m’a arrachée à ma famille pour m’y envoyer. J’y suis demeurée quatre ans. Pendant tout ce temps, je n’ai pas revu mes parents, mes frères, mes sœurs. Ce fut… marquant », dit-elle simplement.

Après le pensionnat, Marlène fréquente l’école secondaire hors de sa communauté. « Lors de la séparation de mes parents, j’ai ensuite quitté Mashteuiatsh. J’ai étudié en génie mécanique, mais n’ai pas trouvé d’emploi. Je suis donc retournée à l’université en enseignement des mathématiques et des sciences. J’ai enseigné dans plusieurs écoles, partout au Québec, dans des communautés autochtones ou non. Je connais donc bien les différents enjeux touchant les Autochtones en éducation », continue-t-elle.

De retour à Mashteuiatsh depuis plusieurs années, Marlène est d’avis que les perceptions et les préjugés à l’endroit des Autochtones diminuent un peu. « Mais c’est un travail très lent. Ce n’est pas évident d’aller à la rencontre de l’Autre. La méfiance est très présente, de part et d’autre. C’est en créant des espaces d’échange et de dialogue que les barrières pourront tomber, j’en suis persuadée », observe Marlène.

« Les allochtones ont beaucoup de préjugés envers nous. On leur a rentré dans la tête que nous avons des privilèges, notamment au niveau de la chasse et de la pêche. C’est très tendu, ici, sur ces questions, ainsi que sur la question des terres qui appartiennent à la communauté. Ça crée des conflits entre les gens, on entend des propos racistes de la part de citoyennes et citoyens à la radio… Ce n’est pas facile », poursuit-elle.

Marlène croit que l’éducation est une clé importante pour faire tomber ces préjugés et ces méconnaissances, qui engendrent du racisme à l’endroit des membres des Premières Nations. « Les Innus de Mashteuiatsh sont de façon générale plus pauvres et plus malades que les gens de la région. Pourquoi ? Entre autres parce que le système colonial canadien nous maintient encore aujourd’hui dans une posture de mineur vis-à-vis Ottawa. Est-ce que les gens savent qu’on ne peut pas se prendre une hypothèque et que nous ne pouvons pas être propriétaires de nos maisons dans les communautés ? Que le gouvernement fédéral est encore notre “tuteur légal ?” Il commence à y avoir un certain éveil sur ces questions et des politiques timides de réconciliation voient le jour, mais il faut voir cela sur le long terme », souligne-t-elle.

Résolument engagée pour créer des espaces de dialogue partout où elle peut, Marlène a été nommée en 2019 au Conseil supérieur de l’éducation, qui conseille le ou la ministre de l’Éducation. Active au sein de la FNEEQ depuis 2014, elle voit aussi le militantisme syndical comme une occasion de créer des ponts et d’éduquer les gens sur les réalités autochtones. « Il faut parler, parler, parler, pour finir par se comprendre. Il ne faut pas se décourager, ça évolue », termine-t-elle en souriant.

 

 

 

 

La FNEEQ accueille deux nouveaux syndicats

La Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec (FNEEQ-CSN) est heureuse de souligner l’arrivée de deux nouveaux syndicats qui se joignent aux 39 syndicats membres du regroupement des établissements privés de la fédération.

La quarantaine d’enseignantes et d’enseignants membres du Syndicat des travailleuses et travailleurs de l’Ecole de joaillerie de Montréal-CSN, qui travaillent dans une école de métiers d’art associée au cégep du Vieux Montréal, ont ainsi opté pour une affiliation à la FNEEQ. Il s’agit du 10e établissement collégial du réseau privé à se joindre à la fédération.

En outre, le personnel enseignant des écoles primaire et secondaire de la communauté innue de Mashteuiatsh a fait de même. Précisons qu’il s’agit d’un deuxième syndicat d’enseignants œuvrant auprès des Premières nations à joindre les rangs de la fédération, après celui de la communauté innue de Pessamit en 2012. Le Syndicat des travailleuses et travailleurs de Mashteuiatsh-CSN regroupe quelque 75 enseignantes et enseignants.

« Nous nous engageons auprès de ces nouveaux membres à les accompagner afin de contribuer significativement à l’amélioration de leurs conditions de travail, ce qui aura nécessairement un effet positif sur les conditions d’apprentissage des élèves et des étudiants », affirme Mme Caroline Quesnel, vice-présidente de la FNEEQ responsable du regroupement privé.

Mentionnons que l’on compte près d’une douzaine de nouveaux syndicats au sein du regroupement des établissements privés la FNEEQ depuis quatre ans.

À propos de la FNEEQ-CSN

La Fédération nationale des enseignants et des enseignantes du Québec (FNEEQ-CSN) regroupe plus 33 000 membres, dans les cégeps, les établissements privés et les universités. Le regroupement privé compte 41 syndicats rassemblant plus de 2400 membres. La FNEEQ-CSN est affiliée à la Confédération des syndicats nationaux (CSN).