Le nouveau premier ministre libéral Mark Carney s’appuie sur la guerre des tarifs imposée par le président Trump pour aller vite, mais il ne faudrait pas pour autant calquer son agenda sur celui des conservateurs. Il s’agirait là d’un jeu dangereux.
L’emploi du bâillon pour faire passer le projet de loi C-5, manœuvre antidémocratique appuyée de surcroît par le Parti conservateur du Canada, ouvre la porte à des erreurs irréversibles, comme les groupes écologistes et les autochtones n’ont pas tardé à le souligner.
« Si C-5 est si bon que ça pour les travailleuses et les travailleurs, pourquoi ne pas prendre le temps nécessaire pour l’étudier avec les acteurs qui les représentent », s’interroge Caroline Senneville, présidente de la CSN. La centrale syndicale craint par ailleurs qu’un projet de loi technique soit une sorte de cheval de Troie pour faire passer des pipelines dans un Québec qui n’en veut pas.
On sait que les minéraux critiques (un des secteurs visés par C-5) ont fait partie des discussions entre messieurs Carney et Trump à Kananaskis, mais on ne sait pas quelles concessions sont exigées par les États-Unis.
Des négociations dans l’ombre
Pendant que C-5 passera sous bâillon à Ottawa, des négociations entre le premier ministre Carney et le président Donald Trump se poursuivent dans le plus grand secret.
« Est-ce que notre premier ministre peut nous assurer qu’il va régler l’éternel conflit sur le bois d’œuvre, qu’il va protéger la gestion de l’offre comme prévu dans la nouvelle loi, la culture québécoise et notre industrie aéronautique, de même que celle de l’acier ou de l’aluminium ? Doit-on craindre des concessions sur ces secteurs pour sauver l’industrie automobile en Ontario ? » s’inquiète Caroline Senneville, qui demande au premier ministre Carney de rapidement faire connaître ses orientations à tous les acteurs concernés afin de les rassurer.
Un dialogue social sur l’immigration s’impose
En matière d’immigration, le projet de loi C-2 parait sortir du chapeau trumpiste. « Le gouvernement Carney présente ce projet de loi comme une réponse à des enjeux de sécurité frontalière. On joue le jeu du président américain. On associe les personnes migrantes, immigrantes ou réfugiées à des criminels. C-2 durcit considérablement les règles d’accès à l’asile au Canada et accorde des pouvoirs extraordinaires au gouvernement pour suspendre, annuler ou modifier massivement des documents de personnes immigrantes lorsque “l’intérêt public le justifie”. Ceci peut ouvrir la porte à des expulsions arbitraires, comme on l’a vu récemment au sud de la frontière, et vient politiser grandement les questions migratoires. Veut-on vraiment calquer notre modèle d’immigration sur ce que fait Donald Trump ? Est-ce vraiment ce que Mark Carney nous propose ? ».
À propos
Fondée en 1921, la CSN est la première grande centrale syndicale québécoise. Composée de près de 1600 syndicats, elle compte plus de 330 000 membres dans tous les secteurs d’activité.