Réaction de la CSN : Un manifeste qui résonne comme une douce musique aux oreilles de Jean Charest
« Il est malheureux que 12 personnalités québécoises deviennent les faire-valoir des politiques néolibérales du gouvernement Charest ». Réagissant au dévoilement du manifeste Pour un Québec lucide, la présidente de la CSN, Claudette Carbonneau a estimé que cette opération orchestrée, entre autres par Lucien Bouchard, donne un nouveau souffle à l’entreprise de « réingénierie » menée par le gouvernement Charest, alors qu’on tient les syndicats responsables d’un statu quo intenable.
Suite logique au rapport Ménard sur les soins de santé, le manifeste dresse un portrait alarmiste de la situation économique et démographique du Québec et met en avant plusieurs propositions, déjà formulées sur diverses tribunes par la droite au cours des dernières années, comme la privatisation des services publics et l’augmentation des taxes à la consommation et des tarifs, pour réduire la dette publique. En fait, leurs solutions auraient pour effet de faire payer les pauvres et la classe moyenne.
« S’appuyant sur les défis de la mondialisation, le groupe, composé principalement de représentants des gens d’affaires, montre du doigt les syndicats qui refuseraient tout changement. Mais leur manifeste ne fait appel à aucune contribution de la part du secteur industriel et des milieux financiers pour solutionner les problèmes qu’ils identifient. Comme si la responsabilité d’effectuer des changements sociaux ne reposait que sur les épaules des organisations syndicales », a dénoncé Claudette Carbonneau. « Ils auraient pu reconnaître que l’attitude de Jean Charest à l’égard des syndicats depuis son élection et sa volonté affichée de leur tenir tête coûte que coûte, ne laissent pas beaucoup de place à la discussion. »
Le rapport Ménard et les PPP : prise deux
« Visiblement, ce manifeste vise à relancer les idées émises par le rapport Ménard sur l’avenir des soins de santé. Rejeté par les syndicats, même par les centrales qui avaient participé aux travaux du comité, ce rapport faisait la promotion des partenariats public-privé (PPP) dans le réseau de la santé et des services sociaux et plaidait pour l’augmentation des taxes et des tarifs afin de préparer le « choc démographique et de réduire l’endettement de façon accélérée », a tenu à rappeler Madame Carbonneau.
« Partout où ils ont été appliqués, les PPP ont résulté en une dégradation des conditions de travail ainsi que de la qualité et de l’accessibilité des services. À ce jour, personne n’a pu faire la preuve d’une diminution des coûts. C’est plutôt le contraire qu’on observe. En fait, les contrats en PPP font porter le poids des investissements aux générations futures », observe Claudette Carbonneau.
La présidente de la CSN estime que « c’est bien que l’on réfléchisse publiquement à l’avenir du Québec, mais qu’on le fasse, sans nuance, en caricaturant les problèmes et en employant des termes aussi catastrophistes, ça manque de crédibilité ! ». Y voyant une énième tentative de mettre le train des privatisations sur les rails, la présidente de la CSN croit que « ce manifeste donne la respiration artificielle au rapport Ménard sur la santé, qui recommandait les PPP. C’est du copier-coller. »
Des nuances
Pour la CSN, ces analyses catastrophistes ne contribuent pas positivement au débat démocratique. Il est vrai que le Québec sera confronté à des enjeux démographiques mais il faut prendre en compte de nombreux autres facteurs que ne reflète pas du tout le manifeste publié hier. Par exemple, il est indéniable que les futurs retraités auront de meilleurs revenus que les générations précédentes et ils continueront à payer des impôts. À ce jour, il n’y aucune étude qui démontre que le vieillissement de la population est un facteur principal de l’augmentation des coûts du système de santé. Par contre, les impacts de la hausse vertigineuse du coût des médicaments ainsi que les coûts des nouvelles technologies sur le système de santé sont abondamment documentés.
Le manifeste propose quelques pistes susceptibles de permettre à une minorité de Québécois de s’enrichir davantage mais on ne souffle pas un mot sur la répartition de la richesse.
Quant au poids de la dette du Québec, il n’y a pas lieu d’agiter les épouvantails. Par rapport à la richesse collective, le niveau d’endettement (dette sur produit intérieur brut), est passé de 52,2 % en 1996-1997 à 43,7 % en 2004-2005. « Faire ce constat ne veut pas dire que nous n’avons pas de défis collectifs à relever, mais ne pas le faire du tout relève de la malhonnêteté intellectuelle. La dette, c’est aussi des infrastructures collectives précieuses et, en ce sens, un héritage positif pour les générations futures », de conclure la présidente de la CSN.
Source : CSN – 20 octobre 2005
Pour renseignements : Michelle Filteau, directrice du service des communications de la CSN tél. : 514 598-2155