Étude britannique sur les soins de santé

La sous-traitance au privé est un échec

par André Noël

La sous-traitance des soins de santé dans des cliniques privées a nui au réseau de santé public en Grande-Bretagne, indique une étude qui paraît aujourd’hui dans le British Medical Journal, alors que cette réforme est en train de se mettre en place au Québec.

Le réseau de la santé britannique fonctionne sur la base de National Health Services(NHS) auxquels s’apparentent, au Québec, les agences régionales de la santé et des services sociaux. En 2003, le gouvernement britannique a demandé aux NHS de sous-traiter une partie des soins dans des centres médicaux privés, une pratique qu’encourage désormais le ministère de la Santé du Québec.

En établissant un système de sous-traitance, le gouvernement britannique a indiqué qu’il visait à accroître l’offre de services des NHS et à réduire les temps d’attente pour les chirurgies électives. Ce sont exactement les mêmes objectifs que vise le ministre Philippe Couillard, avec la création de centres médicaux associés.

« Cette politique de détourner les ressources limitées des NHS vers le secteur indépendant des centres de soins provoque la fragmentation et l’instabilité. Les lits et les services des NHS sont fermés pour que s’épanouisse le secteur privé lucratif. Malgré les assurances données par le secrétaire (ministre) de la Santé, Alan Johnson, la preuve disponible montre que le secteur privé fait des profits au détriment des patients, du public et des NHS. »

En 2006, à Londres, le comité sur la santé de la Chambre des communes a entendu des témoignages suggérant que certains centres privés offraient des soins bien en deçà des normes, ajoutent les chercheurs.

« Des organismes et des associations professionnels ont rapporté divers problèmes, comme l’utilisation de médecins formés à l’étranger et peu familiers avec les techniques chirurgicales des NHS, du laisser-aller dans la formation et la vérification, un manque de continuité des soins, et un grand nombre de litiges non résolus.

« Le Collège royal des chirurgiens d’Angleterre a fait état de preuves croissantes montrant que ces centres étaient incapables de gérer les complications, avec pour conséquence le transfert des patients dans les établissements existants des NHS. »

Les garanties initiales n’ont pas été respectées : les centres privés ont siphonné du personnel dans le réseau public, alors qu’ils n’étaient pas censés faire des embauches dans les NHS, ajoutent les auteurs. « Les définitions de pénurie de personnel ont été redéfinies pour faire en sorte que presque tout le personnel des NHS ait désormais le droit de travailler dans les centres privés. »

Les établissements publics se font parfois avoir en signant des contrats avec des centres privés, affirment les chercheurs. Ainsi, lorsque des retards ont empêché un fournisseur de services d’ouvrir un centre à temps, l’établissement public a quand même dû lui verser un million de livres (environ deux millions de dollars) pour les patients qui auraient dû y être traités pendant la durée du retard.


Source : La Presse, page A-7, 22 février 2008

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