Modernisation des dispositions anti-briseurs de grève

La CSN propose des amendements

Aujourd’hui, devant la Commission de l’économie et du travail, la Confédération des syndicats nationaux (CSN) présente son mémoire . La CSN demande au gouvernement du Québec d’aller de l’avant et de moderniser la notion de briseur de grève contenue dans le Code du travail. Celle-ci doit s’appliquer équitablement à tous les contextes de travail, notamment à ceux modifiés par le développement des nouvelles technologies de l’information et des communications. « Le conflit du Journal de Montréalillustre très bien que l’on déroge à l’esprit de la loi adoptée en 1977, ce qui donne un avantage écrasant à la partie patronale et laisse, depuis plus de 24 mois, 253 travailleuses et travailleurs à la rue. C’est impensable, dans une société de droit comme la nôtre, que nos dirigeants politiques laissent une telle situation perdurer, alors qu’ils détiennent les outils pour agir », de clamer la présidente de la CSN, Claudette Carbonneau.

Lorsqu’on analyse le contexte et l’historique des dispositions anti-briseurs de grève, la CSN constate qu’elles ont toujours leur raison d’être en 2011. Elles contribuent à la paix industrielle en consolidant la capacité de négociation des syndicats par le maintien du rapport de force entre les parties patronale et syndicale tout au long du processus de renouvellement de la convention collective. Ces dispositions devraient en conséquence faire partie du monde du travail québécois encore pour longtemps, en plus de s’épanouir dans d’autres juridictions.

D’ailleurs, la centrale syndicale a accueilli favorablement le dépôt, le 3 décembre dernier, du projet de loi privé 399 modifiant les dispositions anti-briseurs de grève par le député péquiste de Beauharnois et critique en matière de travail, M. Guy Leclair. La présente Commission devrait s’inspirer des termes de ce projet de loi dans la mise en œuvre de ses réflexions et y donner également son appui.

Notion d’établissement Les dispositions anti-briseurs de grève ont été adoptées pour maintenir l’équilibre des forces lors d’un conflit. À l’ère du Web et des médias sociaux, il est anachronique que la notion d’établissement renvoie strictement à des notions d’adresse civique et de lieu physique, propriétés de l’employeur.

Faire fi des nouvelles technologies et des nouvelles réalités du travail, c’est abandonner de plus en plus de travailleurs, mais aussi traiter différemment les entreprises, car certaines, impunément, parviennent à maintenir leurs activités sans contrainte aucune, alors que d’autres sont davantage encadrées par la loi. En modernisant les dispositions, le législateur doit interdire l’utilisation du produit du travail effectué par d’autres à son bénéfice en cas de conflit de travail. Faire autrement serait permettre une voie de contournement inadmissible. En outre, il convient de s’assurer par une définition large inscrite au Code que l’établissement n’est pas seulement un lieu physique, mais peut être composé des multiples lieux, mêmes virtuels, où s’effectue le travail habituel couvert par l’accréditation.

« Nous pouvons constater à quel point l’absence d’une modernisation de la loi maintient un déséquilibre inacceptable dans le rapport de force dans certaines négociations très médiatisées et d’une durée interminable telles que celle du Journal de Québecou encore celle du Journal de Montréal», de poursuivre la présidente de la CSN, qui estime que le champ d’application visé par ces modifications ne se limite pas qu’au secteur des médias.

Le travail administratif, le travail de recherche effectué dans tous les secteurs d’activité, sont tout à fait susceptibles de connaître les mêmes difficultés lors d’un conflit de travail. L’informatique permet d’accéder à distance aux banques de données des employeurs et les emplois qui consistent à donner une information, un conseil à distance, sont maintenant légion. Le Parlement doit agir pour éviter que la loi ne tombe en désuétude.

Travailleurs bénévoles La CSN propose aussi que, pour en finir avec les faux bénévoles, le législateur ajoute une nouvelle disposition au Code du travail pour en interdire le recours.

Chaque ronde de négociation dans l’hôtellerie ramène avec elle un phénomène troublant, soit celui des bénévoles d’entreprises. Parents, vagues amis, cousins éloignés, quand ce n’est pas de la main-d’œuvre migrante tout à fait vulnérable, débarquent dans les établissements hôteliers pour faire le travail des syndiqués en grève ou des lock-outés. Ils jurent tous ne recevoir aucune contrepartie, pas même un repas, pour faire les chambres de longues heures durant, alors qu’ils font du bénévolat auprès d’entreprises multinationales !

Il n’est pas acceptable que de supposés bénévoles viennent déséquilibrer le rapport de force lors de conflits. « Le bénévolat est un acte altruiste de bienfaisance qui n’a pas de logique dans les activités commerciales d’un hôtel en situation de grève. C’est là une façon éhontée de contourner la loi », de marteler la leader syndicale.

« Moderniser les dispositions anti-briseurs de grève du Code du travail, c’est une simple question de justice. Justice pour toutes les travailleuses et tous les travailleurs. Il ne s’agit pas ici de prendre parti pour un groupe ou l’autre. Il s’agit de rétablir un équilibre nécessaire à l’exercice du droit de négocier », de conclure madame Carbonneau.

La CSN invite la population à signer la pétition demandant la modernisation des dispositions anti-briseurs de grève, en ligne sur le site de l’Assemblée nationale.

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