La Pocatière

Les travailleurs de Bombardier se mobilisent

Plus de 300 travailleurs et résidents de La Pocatière se sont rassemblés vendredi midi devant l’usine de Bombardier pour manifester leur opposition au transfert du contrat du métro de Chicago à l’usine de Plattsburg  aux États-Unis. Ce transfert de production met fin aussi à l’expertise exclusive de la soudure par point détenue par les travailleurs de l’usine de La Pocatière.   Déjà des travailleurs de l’usine sont appelés à se rendre à Plattsburg pour y former des travailleurs américains. Le président du syndicat, Mario Lévesque, a indiqué que les syndiqués ne veulent pas assister à la mort de l’usine de La Pocatière, le fleuron québécois de Bombardier en matière de transport. Plus de 90% des contrats de Bombardier La Pocatière proviennent des États-Unis. Or si la machinerie et l’expertise technique « pocatoise » sont dorénavant détenues par les Américains, il y a fort à parier, se disent les travailleurs, que les contrats ne traverseront plus la frontière… Une impression de déjà vu Les syndiqués se souviennent qu’en 2005, lors du transfert vers le Mexique de la production des pièces dites primaires et de sous-ensembles mineurs, la direction de Bombardier avait dit au syndicat qu’environ 50 emplois seraient touchés. En réalité, plus de 200 emplois ont été perdus à La Pocatière. Ils se rappellent aussi que vers la fin des années 90, dans un contexte de plein emploi chez Bombardier, la compagnie avait transféré en Ontario la technologie de soudure d’aluminium, une expertise exclusive de l’usine de La Pocatière. Pour eux, le véritable enjeu, c’est non seulement la perte du contrat des voitures de Chicago mais aussi le transfert de l’équipement et de la technologie jusque-là exclusifs à La Pocatière. « C’est une expertise reconnue à l’échelle internationale », a souligné le président de la Fédération de la métallurgie, Alain Lampron, qui les a assuré ce midi de l’appui inconditionnel de leur fédération syndicale. Prenant aussi la parole lors de ce rassemblement, la vice-présidente du CCBSL-CSN, Nancy Legendre, a rappelé les propos tenus par le président de Bombardier, Laurent Beaudoin. au quotidien Le Soleil, au mois d’août dernier, à l’occasion de l’ouverture du Centre Bombardier : « Si notre usine constitue aujourd’hui un centre d’excellence en fabrication de matériel roulant en acier inoxydable et un élément essentiel du réseau manufacturier nord-américain de Bombardier Transport, c’est grâce à nos employés, à leur ardeur au travail, à leur détermination à réussir et à leur extraordinaire capacité d’adaptation ». Elle invite maintenant Bombardier à respecter ces travailleurs. Un peu d’histoire L’usine de La Pocatière tire ses origines de l’entreprise Moto-Ski, fondée en 1962 par Charles-Eugène Bouchard, lequel au début fabriquait des coupe-légumes automatiques pour les cuisines des restaurants et des institutions. En 1968, la famille Bouchard vendait l’entreprise à Griffin Recreation Entreprise de Miami en Floride, laquelle vend ensuite l’usine à Bombardier en 1971. Mais le marché de la motoneige s’effondre en 1973 avec la crise du pétrole. Bombardier décide alors d’acheter la licence de la Compagnie internationale de matériel de transport de France et de reconfigurer son usine de La Pocatière pour le contrat des wagons du métro de Montréal. Cela va lui permettre de faire une percée sur le marché mondial des voitures de métro et de trains de banlieue.   En 1983, le contrat du métro de New York d’un milliard de dollars consacre la vocation internationale de l’usine de La Pocatière. C’est aussi à La Pocatière qu’ont été construites les caisses en acier inoxydable des trains-navettes pour le transport d’automobiles et d’autobus du tunnel franco-britannique sous la Manche.(1) L´usine de La Pocatière fabrique toujours des caisses en acier inoxydable dont, jusqu’à tout récemment, celles du métro de Chicago qui étaient expédiées à l´usine de Bombardier de Plattsburgh pour l’assemblage final. Un moteur économique pour la région L’usine de La Pocatière – la plus importante entreprise privée de l’Est du Québec – est un acteur majeur de l’économie régionale et québécoise. Bon an, mal an, l’usine procure du travail à environ 500 à 700 personnes et une masse salariale variant entre 30 et 50 millions de dollars annuellement. (2) Entre 1974 et 2007, 32 contrats ont été réalisés à l’usine de La Pocatière, soit 5  300 voitures de train et de métro. 90% de la production de wagons de métro et de train fabriqués dans cette usine est exportée. (1) L’usine fait  :  

  • des achats annuels en matériel auprès de 50 fournisseurs québécois de 250 millions de dollars en moyenne;
  • des achats de biens et services à des fournisseurs régionaux (rayon d’environ 100 km de La Pocatière) qui ont totalisé plus de  28 millions de dollars d’investissement dans la région en 2005. (1)

  « L’implication des milieux socio-politique et institutionnel de La Pocatière dans le développement de Bombardier a été si forte que les cadres supérieurs de l’entreprise l’ont considérée comme déterminante dans le succès de la compagnie, et notamment dans celui du métro de New-York. Certains administrateurs vont jusqu’à mentionner que Valcourt a créé l’entreprise Bombardier et La Pocatière l’a mise au monde », selon une étude effectuée en 2002 par les professeurs André Bilette (Université Laval) et Denis Robichaud de la Télé-Université. Situation de l’emploi à l’usine

  • Au début du mois de novembre, Bombardier a annoncé le transfert du contrat de Chicago vers l’usine de Plattsburgh. Ce contrat prévoit la construction de plus de 700 voitures et devait donner de l’emploi à environ 50 personnes durant 3 ans. Pour faire passer la pilule, Bombardier veut transférer de Plattsburgh à La Pocatière la finition des voitures actuellement exécutée par Plattsburgh, ce qui permettrait le maintien de 40 emplois sur une période de 1 an. C’est donc une perte nette de 10 emplois pour un an et de 50 emplois pour 24 mois supplémentaires.
  • En décembre 2009, entre 200 et 250 mises à pied sont attendues en raison d’une baisse planifiée de la production.
  • Septembre 2010, les travaux de soudure liés au contrat de l’AMT seront terminés, ce qui entraînera environ 130 mises à pieds.
  • Mai 2011, fin du contrat de l’AMT. À ce moment, il ne restera plus que le contrat de Toronto, lequel procurera plus ou moins 20 emplois dans l’usine…

  Sources :    1. http://www.magazinemci.com/articles/dossiers/2007/02/bombardier.htm 2. http://www.cyberpresse.ca/le-soleil/affaires/les-regions/200908/20/01-894413-la-pocatiere-au-coeur-de-lhistoire-de-bombardier.php

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