Une Fédération bien vivante

Les membres de la Fédération des femmes du Québec, dont la CSN, ont signé une lettre en réponse à l’article d’Hélène Buzzetti du Devoir Voile islamique – Vivian Barbot se dissocie de la FFQ qu’elle a dirigée. La lettrea été publiée dans l’édition du Devoir du 10 octobre. Vous pouvez en prendre connaissance ci-dessous. La réplique – La Fédération des femmes n’est pas en déclin! Plusieurs opinions exprimées dans Le Devoir récemment dressaient un portrait d’une Fédération des femmes du Québec (FFQ) qui est erroné. Un féminisme individuel ? C’est à mille lieues de l’organisation à laquelle nous participons. Au contraire, depuis près de 50 ans, la FFQ a su allier lutte pour une transformation sociale avec avancement des droits et libertés collectifs et individuels. En 1992, à l’appel de la FFQ, nous avons participé au forum Pour un Québec féminin pluriel, qui avait pour but d’examiner la dimension sociale et politique des inégalités vécues par les femmes. Au terme de ce rendez-vous réunissant 1000 femmes, la conclusion était évidente. La pauvreté avait un sexe. Le mouvement féministe s’est alors mobilisé autour de la marche « Du pain et des roses » de 1995. Plus de 800 femmes ont marché des milliers de kilomètres pour réclamer, entre autres, une Loi sur l’équité salariale, une augmentation du salaire minimum, la perception automatique des pensions alimentaires, la concrétisation d’un programme d’infrastructures sociales offrant des emplois de qualité aux femmes. Ce grand rendez-vous de l’histoire du mouvement féministe nous a fait réaliser l’importance de renforcer l’autonomie économique des femmes. Réaliser cette autonomie suppose des conditions qui permettent un véritable respect des droits individuels et collectifs fondamentaux, dont celui à l’autodétermination, afin de permettre aux femmes de faire des choix et d’avoir du pouvoir sur leur vie et la société. Cette autonomie repose sur l’indépendance des femmes par rapport aux hommes et la fin du travail mal rémunéré ou peu reconnu des femmes. Dans cette optique, la FFQ et ses membres ont pris part aux luttes pour l’obtention d’un programme universel de service de garde, d’un Régime québécois d’assurance parentale, pour des allocations familiales décentes et pour l’accès des femmes à des secteurs d’emplois non traditionnels. Les dangers du néolibéralisme Au fil du temps, nous avons également compris que les politiques néolibérales affaiblissaient les gains des femmes. Pour de nombreuses femmes, l’autonomie s’amenuisait, alors que d’autres femmes faisaient des progrès sur les bancs d’école et sur le marché du travail. C’est le début d’un écart entre le discours dominant sur l’égalité entre les femmes et les hommes et celui porté par les groupes féministes. Selon plusieurs, l’égalité était atteinte. Nous avons répondu : « Un peu oui, même amplement pour certaines, mais certainement pas pour toutes. » Le travail de la FFQ était loin d’être terminé. Par ces actions collectives, les femmes se sont solidarisées et ont voulu contribuer à mondialiser les luttes féministes. C’est ainsi que nous avons demandé à la FFQ de lancer l’appel pour l’organisation de la 1re action internationale de la Marche mondiale des femmes (MMF) en 2000. Des milliers de groupes de femmes à travers le monde ont répondu présents. Lors de la 3e action internationale de la MMF en 2010, pas moins de 10 000 personnes se sont rassemblées à Rimouski. Au coeur des thèmes abordés : le contrôle du corps des femmes, la militarisation, la privatisation des services publics, les conditions de vie et de travail des femmes. La FFQ a ainsi permis la naissance d’un mouvement féministe international. Treize ans plus tard, ce mouvement est présent sur cinq continents, dans plus de 50 pays, et prépare sa 4e action internationale en 2015. Rassemblements courus Cet intérêt pour les enjeux actuels a aussi mené la FFQ à organiser deux rassemblements, en 2003 et 2008, auxquels ont participé chaque fois plus de 500 jeunes femmes, visant à consolider la solidarité féministe chez les jeunes. Celles-ci ont adopté un manifeste qui conçoit la solidarité féministe comme « un effort pour comprendre tous les enjeux […] et nous tenir debout toutes ensemble contre les oppressions » qui marquent la vie de toutes les femmes. La lutte contre la violence envers les femmes, l’élimination de la pauvreté, la lutte contre les discriminations vécues par les femmes et contre la mondialisation patriarcale et capitaliste sont les axes de travail adoptés par les membres de la FFQ à son Congrès d’orientation en 2003. Pour donner vie à ceux-ci, la FFQ a depuis coordonné la Campagne des 12 jours d’action contre la violence envers les femmes, milité d’arrache-pied pour contrer les reculs en matière d’avortement, travaillé à contrer la discrimination à l’égard des aînées et oeuvré pour la reconnaissance des droits des lesbiennes. Avec les changements démographiques du Québec, la FFQ a milité avec des féministes de toutes origines pour comprendre les sources d’exclusion des femmes immigrantes. Cela l’a conduite à s’intéresser aux enjeux touchant les politiques d’intégration et les formes d’oppression à l’oeuvre dans la vie de ces femmes. Les membres de la FFQ sont à l’affût des changements ici et ailleurs. Le réseautage avec les féministes dans le monde nous a permis d’identifier que partout où les inégalités augmentent, on attaque le droit à l’avortement et des liens entre la militarisation et la culture de la violence ou encore comment la chaîne de production de nos vêtements repose sur des conditions de travail horribles pour les femmes. Pour faire face aux enjeux de notre époque, nous avons mandaté la FFQ d’en appeler à la tenue des états généraux de l’action et de l’analyse féministes. La FFQ a tenu un premier événement permettant la nomination d’un Comité d’orientation autonome et a soutenu l’organisation de ce processus de réflexion s’échelonnant sur deux ans, qui culminera lors du Forum de novembre 2013 et qui sera l’occasion d’adopter les orientations qui influenceront le travail collectif du mouvement pour les années à venir. Depuis mai 2011, c’est donc plus de 1000 féministes qui se sont impliquées dans les états généraux. À six semaines du Forum, elles sont déjà 500 à s’être inscrites. Au fil du temps, loin de représenter un féminisme individuel, la FFQ affiche son parti pris pour le droit à l’égalité de toutes les femmes. Et c’est tant mieux.

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