Réunis en assemblée générale spéciale, les soixante-dix syndiqués, membres de la Fédération de l’industrie manufacturière (FIM-CSN), à l’emploi de Tourbières Lambert, ont accepté à 71 % la recommandation d’un conciliateur du ministère du Travail. Cela met donc fin à une grève générale qui avait débuté le 2 juin dernier alors que leur convention collective était échue depuis le 31 décembre 2016.
Une fois signée, la nouvelle convention collective sera en vigueur jusqu’au 31 décembre 2024. Pour Michel Boucher, président du Syndicat des travailleurs de la Tourbière Lambert : « L’adoption de la recommandation du conciliateur constitue un compromis qui permet d’atteindre une partie de nos objectifs de négociation. Sans ce compromis, c’est la récolte de tourbes qui aurait été perdue. Les travailleurs peuvent marcher la tête haute : ils ont solidairement montré qu’ils étaient déterminés à se faire entendre. Ils sont maintenant confiants d’entreprendre des relations de travail sur de nouvelles bases qui soient plus respectueuses. »
À propos
Le Syndicat des travailleurs de la Tourbière Lambert est affilié à la Fédération de l’industrie manufacturière (FIM-CSN) qui regroupe plus de 30 000 syndiqués au Québec. Il est aussi affilié au Conseil central du Bas-Saint-Laurent (CCBSL-CSN) qui représente dans la région environ 9 000 travailleuses et travailleurs des secteurs privé et public. Pour sa part, la Confédération des syndicats nationaux (CSN) compte plus de 300 000 membres de tous les secteurs d’activité.
Au cours des dernières heures, la CSN et le Syndicat des travailleurs de Tourbières Lambert ont déposé une demande d’ordonnance adressée au Tribunal administratif du travail (TAT) visant à faire cesser le travail réalisé normalement par les employés en grève, mais présentement exécuté par des travailleurs hors unité. Il s’agit notamment du travail effectué par deux compagnies de transport en sous-traitance, par un employé d’une autre installation de Tourbières Lambert ainsi que par trois employés non syndiqués de Rivière-Ouelle.
L’enquête conclut à l’infraction
Constatant déjà de possibles infractions au Code du travail, particulièrement en ce qui concerne le recours aux briseurs de grève, le Syndicat et la CSN avaient adressé une demande d’enquête au TAT, dès la première semaine de grève. L’enquête du TAT est sans équivoque : il y a bel et bien infraction au Code du travail, notamment relativement à l’article 109.1.
Rappelons que les 70 travailleurs de Tourbières Lambert de Rivière-Ouelle, dont la convention collective est échue depuis le 31 décembre 2016, exercent une grève générale illimitée depuis le 2 juin dernier. La durée de la convention, que l’employeur souhaite d’une durée de six ans, ainsi que les salaires, constituent les principaux enjeux qui achoppent. Les travailleurs souhaitaient à l’origine une convention de 3 ans et obtenir des augmentations de salaire de l’ordre de 3 % par année de convention.
« Depuis le début des négociations, les travailleurs dénoncent le manque de respect de leur employeur, et voilà maintenant qu’ils doivent se défendre contre le manque de respect des complices de l’employeur, qui acceptent de jouer aux briseurs de grève », a dénoncé Nancy Legendre, présidente du Conseil central du Bas-Saint-Laurent (CSN).
Pour sa part, le vice-président de la Fédération de l’industrie manufacturière (FIM–CSN) s’interroge sur les motifs évoqués par l’employeur pour ne pas régler cette négociation. « Nous ne comprenons toujours pas la logique de Tourbières Lambert, a expliqué Louis Bégin. La situation financière de l’entreprise est bonne, le contexte aussi. C’est à la table de négociation que la solution se trouve. Il faut agir avant que la saison complète ne soit perdue faute de récolte », a-t-il conclu.
En grève générale illimitée depuis le 2 juin dernier, les travailleurs de Tourbières Lambert ont profité de la Course de la rivière Ouelle pour se faire entendre de la population et sensibiliser cette dernière à leur difficile négociation.
Des offres odieuses
Depuis le début de la négociation, cinq rencontres ont été tenues entre le syndicat et la direction de Tourbières Lambert et trois réunions ont eu lieu en présence d’un conciliateur. « Le syndicat a fait de nombreuses concessions afin de trouver une solution à l’impasse. Le syndicat a entre autres accepté de reculer sur ses demandes de vacances et de banque d’heures supplémentaires. La dernière offre de l’employeur, bien que décevante, pouvait constituer l’ultime compromis fait par le syndicat. Mais les offres salariales incluses dans cette proposition étaient tout simplement odieuses et inacceptables », a expliqué Nancy Legendre, présidente du Conseil central du Bas-St-Laurent-CSN.
Les travailleurs, dont plusieurs cumulent plus de 40 ans de services, gagnent autour de 18,00$ l’heure. Afin d’améliorer leur sort, ils ont même décidé en cours de négociation d’abandonner leur demande de mise sur pied d’un régime de retraite. Les travailleurs souhaitent obtenir des augmentations de salaire de l’ordre de 3% par année de convention.
Maintenir son pouvoir d’achat
Parmi les nombreux reculs exigés par Tourbières Lambert, notons la durée de la prochaine convention collective qu’il souhaite voir passer de X à six ans. « Mais avec les offres salariales qui sont sur la table il s’agit à terme en 2023, d’un appauvrissement pour les travailleurs d’ici, a expliqué pour sa part le vice-président de la Fédération de l’industrie manufacturière de la CSN, Louis Bégin. Si l’employeur veut une longue convention collective, il doit nous donner l’assurance que nous maintiendrons notre pouvoir d’achat ! »
Un contexte favorable à Tourbières Lambert
Les finances de l’entreprise et l’avenir du secteur d’activité ne sont pas menacés. Selon différents médias, Tourbières Lambert a investi minimalement 4 millions de dollars depuis 2015, au sein de ses différentes usines. L’entreprise est suffisamment rentable pour prendre de l’expansion. « Nous savons que Tourbières Lambert investit présentement en Abitibi. Mais il semble qu’elle veut faire payer ses investissements par les travailleurs de Rivière-Ouelle et ça, nous ne l’accepterons pas » a conclu la présidente.