12 septembre 2006 – Commentaires de la CSN sur le projet de loi no 33 faisant suite au jugement de la Cour suprême dans l’affaire Chaoulli

Commentaires de la CSN sur le projet de loi no 33 faisant suite au jugement de la Cour suprême dans l’affaire Chaoulli

La CSN tient à faire connaître sa déception de ne pas avoir été invitée à participer aux travaux de la commission parlementaire qui se tient cette semaine sur le projet de loi no 33. « Ce projet de loi déposé en juin dernier soulève des enjeux majeurs pour l’avenir de notre système de santé. Nous tenons à réaffirmer, comme beaucoup d’autres intervenantes et intervenants, notre opposition aux propositions visant à accentuer le rôle du privé dans le système de santé », d’affirmer la vice-présidente de la CSN, Denise Boucher.

Les centres médicaux spécialisés ou une place accrue au privé

Le projet de loi confirme ce qui était annoncé dans le livre blanc : la mise en place d’un partenariat public-privé pour la réalisation de certaines activités médicales spécialisées. À cette fin, le projet de loi crée des centres médicaux spécialisés qui pourront dispenser tous les services médicaux nécessaires pour effectuer les chirurgies liées au remplacement de la hanche, du genou ou au traitement de la cataracte ou tout autre service médical spécialisé déterminé par règlement du ministre.

Dans son mémoire du printemps dernier, la CSN s’était dite favorable à la création de tels centres spécialisés en autant qu’il s’agisse d’institutions publiques. « Le ministre de la Santé et des Services Sociaux persiste à privilégier le secteur privé pour le développement de ces nouvelles cliniques spécialisées même si aucune preuve ne démontre la justesse de ce choix », fait valoir la vice-présidente de la CSN. « Le ministre justifie sa décision en prétextant que des partenaires privés sont prêts et disponibles au Québec pour investir dans ces cliniques spécialisées et que cela s’est fait ailleurs dans le monde. Pourtant plusieurs études démontrent que ces expériences étrangères sont loin d’être concluantes. »

Dans ses commentaires déposés à la Commission des affaires sociales, la CSN préconise de miser sur des cliniques publiques, à l’intérieur ou à l’extérieur de l’hôpital, en cliniques externes ou en centres ambulatoires. « Nous croyons qu’il faut miser sur les médecins cliniciens plutôt que sur les médecins entrepreneurs car les formules de partenariat public-privé contenues dans le projet de loi portent les germes d’un système parallèle de soins privés incompatible et nuisible avec les objectifs d’efficience et d’équité portés par le réseau public », de poursuivre Denise Boucher.

L’assurance maladie privée duplicative : une brèche dangereuse

Autre volet important du projet de loi no 33 : la levée de l’interdiction de l’assurance-maladie privée duplicative limitée pour l’instant à des chirurgies ciblées (hanche, genou, cataracte). Toutefois, le projet de loi prévoit que cette levée d’interdiction pourra s’étendre à d’autres services médicaux déterminés par simple règlement du ministre.

Les pénuries actuelles dans le système de santé québécois, en particulier chez les médecins, font craindre le pire. « Il est illusoire de penser que le recours accru à des cliniques privées, composées de médecins non participants et financées par une assurance-maladie privée, pourra réduire les temps d’attente dans l’ensemble du système. Avec le transfert de ressources professionnelles vers le secteur privé, il y a fort à parier que le secteur public sera plus déficitaire », de poursuivre Denise Boucher.

« Il est, par ailleurs, reconnu que les systèmes de santé parallèles au système public favorisent un régime à deux vitesses dans lequel la rapidité d’accès aux services est déterminée par les moyens financiers des patients. »

La CSN note, enfin, qu’une ambiguïté subsiste dans le projet de loi en regard de l’assurance-hospitalisation. En effet, il demeure interdit pour une assurance privée de couvrir des services inclus dans le régime public. Mais en même temps, il sera possible aux centres médicaux spécialisés, en fonction de leur permis, de disposer de lits d’hébergement. « Nous laissons à d’autres le soin de clarifier s’il s’agit d’hébergement ou d’hospitalisation, mais il risque d’y avoir là une autre brèche ouvrant à des services hospitaliers privés. »

« Nous croyons que le ministre parle des deux côtés de la bouche en même temps. Il prétend vouloir améliorer l’accès aux services publics. Mais, dans le même souffle, il propose de faire une place accrue au privé. C’est à cette double logique que la CSN s’oppose afin d’éviter la mise en place d’un système de santé à deux vitesses », de conclure Denise Boucher.

Pour la CSN, il faut rayer du projet de loi les dispositions qui misent sur la logique marchande et les occasions d’affaire pour régler les problèmes d’accès. Il faut plutôt privilégier les moyens suivants : implanter un mécanisme de garantie d’accès tel que le prévoit déjà le projet de loi et regrouper les activités médicales souffrant de longue liste d’attente dans des cliniques ou centres publics spécialisés afin d’en accroître la performance et d’en réduire les délais d’intervention. Pour la CSN, ces mesures répondent amplement aux problèmes soulevés par le jugement de la Cour suprême dans l’affaire Chaoulli.

La CSN représente plus de 300 000 travailleuses et travailleurs répartis dans ses syndicats affiliés. Elle est l’organisation la plus représentative dans le secteur de la santé et des services sociaux au Québec.


Source : Confédération des syndicats nationaux – 7 septembre 2006

Pour renseignements : Michelle Filteau, directrice du Service des communications de la CSN Tél. : 514 598-2162, cellulaire : 514 894-1326

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