Projet de loi encadrant les demandes d'accommodement

Où sont les balises ?

La CSN demande au gouvernement un véritable débat sur les accommodements raisonnables en matière religieuse et sur la place de la religion dans l’espace public. « Nous pensons que la population du Québec est prête pour ce débat sur une Charte de la laïcité. Seul le gouvernement semble le fuir », de constater la présidente de la CSN, Claudette Carbonneau. Le projet de loi no 94 ne fait que réitérer la définition déjà connue de ce qu’est un accommodement raisonnable sans donner de balises claires. Or, ce n’est pas la définition qui pose problème, mais son interprétation. Seul le port du niqab est interdit. La CSN rappelle que les demandes d’accommodement ne concernent pas que le voile intégral. Le projet de loi n’apporte aucune réponse concernant le port de signes religieux ostentatoires par les agents de l’État en autorité et ceux qui servent de modèle aux jeunes dans les écoles ou dans les services de garde subventionnés. « La période des questions qui a suivi la conférence de presse du premier ministre était des plus éloquentes. Ou bien les journalistes ont mal compris, ou bien les balises contenues dans le projet de loi ne sont en rien des balises ! » La laïcité de l’État Le gouvernement affirme que son projet de loi garantit la laïcité de l’État et la protection du droit à l’égalité entre les hommes et les femmes. Comment la neutralité de l’État se traduit-elle ? Qu’est-ce que le projet de loi a à nous dire sur des sujets au cœur de cette neutralité, telle la prière à l’ouverture des assemblées municipales ? « On ne parle pas ici de l’espace public en général, on parle d’un appareil étatique dont la neutralité s’exprime à travers l’absence de signe d’adhésion ou de préférence envers une ou des religions ou envers les non-croyants, de préciser Claudette Carbonneau. Bref, nous parlons d’un appareil étatique neutre desservant une population plurielle qui, elle, a le droit d’exprimer ses convictions ou opinions. » Il ne s’agit pas d’interdire aux agents de l’État d’avoir des croyances religieuses et de pratiquer leur religion. Les agents ont déjà une obligation de réserve quant à leurs opinions politiques. Ne devraient-ils pas en être de même relativement à leurs croyances, particulièrement quand ils sont en position d’autorité ou de modèle ? La confiance que le citoyen aura d’être traité de façon la plus objective possible réside dans cette neutralité. Or, le gouvernement va dans le sens contraire. Égalité homme-femme Pour la CSN, le projet de loi n’apporte rien de neuf pour mieux baliser l’égalité entre les hommes et les femmes. L’enchâssement de ce principe dans le préambule de la Charte des droits et libertés n’a pas donné de balises claires. Comment en serait-il autrement d’un projet de loi qui demeure flou ? Pour la CSN, le refus de certains clients ou usagers d’être servis par quelqu’un d’un autre sexe est inacceptable. L’accommodement raisonnable bien compris ne permet pas de soutenir de telles requêtes qui relèvent en fait de l’accommodement déraisonnable parce qu’elles compromettent un autre droit fondamental, celui de l’égalité entre les femmes et les hommes. Malheureusement, et faute de directives claires, on a constaté récemment que certaines administrations, pour éviter tout litige, se sont laissées convaincre d’accéder à de telles demandes, comme le montrent les exemples sur lesquels s’est penchée la Commission des droits de la personne. « Bien que l’accommodement raisonnable doit demeurer un outil en cas de litige, nous devons définir collectivement ce qui représente, sur certaines questions, la limite du raisonnable dans une société laïque comme la nôtre. Une Charte de la laïcité devrait apporter des balises claires pour aider les administrateurs publics à faire des choix judicieux. Ce qu’évite complètement de faire le projet de loi du gouvernement. Il s’agit d’un manque de courage flagrant. Le gouvernement ferme la porte au débat avant même d’avoir accepté de l’ouvrir », de conclure la présidente de la CSN. La Confédération des syndicats nationaux est composée de 2100 syndicats qui regroupent plus de 300 000 membres.

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