Au terme d’une tournée d’assemblées générales partout au Québec, l’entente a été adoptée par les travailleuses et les travailleurs des CPE de la CSN. Les 13 000 travailleuses des CPE de la CSN continueront d’exiger que le gouvernement en fasse davantage dans les prochains mois pour assurer l’avenir du réseau.
Ce sont 58 % des travailleuses et des travailleurs qui ont voté en faveur de l’entente intervenue le 5 mai dernier avec le Conseil du trésor, le ministère de la Famille et les regroupements patronaux. L’entente contient des augmentations salariales entre 17,4 % et 19,4 %, en plus d’une bonification des premiers échelons de l’éducatrice qualifiée et spécialisée, ce qui permet de diminuer l’écart avec le secteur public pour la plupart des titres d’emploi. Elle contient aussi des gains supérieurs à ceux obtenus par les autres organisations syndicales, par exemple pour l’obtention de primes de disparités régionales, d’une prime de valorisation pour les travailleuses d’expérience, d’une prime de reconnaissance des années de service récurrente et d’une prime de disponibilité au travail améliorée, de même qu’une bonification de l’assurance collective et de l’ajout de quatre heures pour la gestion à la cuisine. Malgré cela, le résultat témoigne de la déception des milliers de travailleuses face à la fermeture gouvernementale d’agir davantage pour freiner la pénurie de personnel dans les CPE.
« Ce que l’on doit retenir de cette négociation, c’est que c’est la mobilisation exemplaire qui a permis de faire bouger un gouvernement insensible aux préoccupations des travailleuses de CPE. Nous avons réussi à repousser la majorité des demandes patronales de reculs dans nos conditions de travail et à obtenir certains gains. Rappelons-nous que des milliers de familles attendent toujours une place alors que le réseau peine à attirer et retenir le personnel. C’est pourquoi les travailleuses espéraient obtenir plus de reconnaissance. Mais tôt ou tard, le gouvernement devra se rendre à l’évidence qu’il devra en faire plus pour ce réseau si important pour le Québec », explique Stéphanie Vachon, représentante des CPE de la FSSS–CSN.
« Dans les prochains mois, nous allons continuer d’interpeller le gouvernement à tous les niveaux pour qu’il pose les gestes nécessaires pour compléter le réseau des services de garde éducatifs à l’enfance. Ce n’est pas en misant sur les garderies privées qu’on réussira à répondre aux besoins des familles. Pour donner les meilleurs services aux enfants, il faut compter sur les CPE et pour ça, on a besoin des milliers de travailleuses qui se lèvent chaque jour pour prendre soin des tout-petits », poursuit Lucie Longchamp, vice-présidente de la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS–CSN).
« Le gouvernement caquiste est sur une bien mauvaise pente. Dans les derniers mois, il utilise tous les moyens de s’en prendre aux travailleuses et aux travailleurs et de démanteler nos acquis sociaux. Pas une semaine ne passe sans qu’il dénigre des salarié-es voulant améliorer leur sort. Cela rappelle toute l’urgence de continuer de lutter pour bâtir un autre Québec, un Québec pour les travailleuses et les travailleurs », de conclure Caroline Senneville, présidente de la CSN.
À propos
La Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS–CSN) constitue l’organisation syndicale la plus importante dans le secteur des centres de la petite enfance (CPE) au Québec. Elle regroupe 80 % des CPE syndiqués, soit près de 13 000 travailleuses et travailleurs.
Fondée en 1921, la CSN est une organisation syndicale qui œuvre pour une société solidaire, démocratique, juste, équitable et durable. À ce titre, elle s’engage dans plusieurs débats qui intéressent la société québécoise. Elle regroupe plus de 330 000 travailleuses et travailleurs réunis sur une base sectorielle ou professionnelle dans 8 fédérations, ainsi que sur une base régionale dans 13 conseils centraux, principalement sur le territoire du Québec.
S Construction de la Côte-Nord nouveau Québec
S construction des Îles de la Madeleine
S construction de l’Outaouais
S construction de Lanaudière
S construction des Laurentides
S construction de Montréal
S construction de l’Abitibi-Témiscamingue
S construction de Québec
S construction du Bas St-Laurent et de la Gaspésie
S construction du Saguenay-Lac-Saint-Jean
S construction de l’Estrie
S construction de la Montérégie
S construction de la Mauricie et des Bois-Francs
Le projet de loi 89, adopté aujourd’hui, aura de lourdes conséquences pour l’ensemble de la main-d’œuvre du Québec. « Le premier ministre et son ministre du Travail n’ont vraisemblablement pas saisi l’ampleur des dégâts qu’occasionnera cette nouvelle législation. Il s’agit d’une journée sombre pour les travailleuses et les travailleurs », dénoncent les porte-paroles Robert Comeau de l’APTS, Luc Vachon de la CSD, Caroline Senneville de la CSN, Éric Gingras de la CSQ, Mélanie Hubert de la FAE, Julie Bouchard de la FIQ, Magali Picard de la FTQ, Christian Daigle du SFPQ et Guillaume Bouvrette du SPGQ.
Des conséquences pour toutes les personnes salariées du Québec
Il ne fait aucun doute pour les organisations syndicales que les impacts du projet de loi se feront sentir bien au-delà des personnes syndiquées. « Nous le répétons, les gains obtenus par la négociation exercent une pression positive sur les milieux non syndiqués, obligeant les employeurs à s’ajuster pour demeurer compétitifs. C’est à l’ensemble de la main-d’œuvre québécoise que le gouvernement s’attaque en limitant la capacité des travailleuses et des travailleurs à défendre et à améliorer leurs conditions de travail », déplorent les porte-paroles.
Une menace à la paix industrielle
Les règles entourant le recours et l’exercice de la grève permettaient jusqu’ici de maintenir l’équilibre fragile, mais essentiel entre les travailleuses, les travailleurs et les patrons. Les organisations syndicales ne s’expliquent pas pourquoi Jean Boulet a voulu tout bouleverser, si ce n’est pour assujettir l’ensemble des personnes salariées au bon vouloir des employeurs et pour faire plaisir au patronat ainsi qu’à un conseil des ministres aux tendances antisyndicales. « L’encadrement entourant l’exercice du droit de grève, qui était somme toute limitatif, offrait aux travailleuses et aux travailleurs la possibilité d’améliorer leurs conditions à l’intérieur de balises claires. Le ministre semble s’être trouvé des prétextes pour bafouer leurs droits et, de ce fait, il menace la paix industrielle », évoquent les représentants syndicaux. « Il nous semble clair que les limitations au droit de grève contenues dans cette législation ne passeront pas le test des tribunaux. Les constitutions, tant canadienne que québécoise, ainsi que l’arrêt Saskatchewan sont sans équivoque à ce propos. Les droits syndicaux sont aussi des droits humains. »
Des gains obtenus grâce aux luttes
Au fil des décennies, de nombreuses avancées sociales bénéficiant à l’ensemble de la société ont été obtenues grâce aux luttes menées par les travailleuses et les travailleurs syndiqués. L’équité salariale, l’implantation du réseau des CPE, le salaire minimum, les congés parentaux sont quelques-uns des gains obtenus grâce à la mobilisation syndicale. « Ce sont nos moyens de pression et nos grèves qui ont permis à des millions de Québécoises et de Québécois de bénéficier de ces droits. Priver les travailleuses et les travailleurs de leur capacité à lutter, c’est freiner les progrès de toute la société québécoise », insistent les porte-paroles.
« Le lien de confiance est rompu »
Dès l’évocation par Jean Boulet de ses intentions, à la fin 2024, les organisations syndicales ont invité le ministre du Travail à la prudence. « Nous avons rapidement saisi que le ministre ne serait pas ouvert à la discussion afin de trouver des solutions satisfaisantes pour tous. D’ailleurs, nous nous expliquons mal cette volte-face complète de la part du ministre du Travail, qui a drastiquement changé de ton à partir de ce moment : il a choisi de rompre le dialogue avec les travailleuses et les travailleurs du Québec. Le lien de confiance est rompu », concluent les porte-paroles.
Les travailleuses et les travailleurs du secteur résidentiel de la construction sont en grève depuis le mercredi 28 mai, à 00h01. En conférence de presse ce matin à Montréal, le porte-parole de l’Alliance syndicale de la construction – regroupant les cinq syndicats de l’industrie –, Alexandre Ricard a répété que les dernières offres de l’APCHQ sont insuffisantes pour en arriver à un règlement.
L’Alliance syndicale de la construction – regroupant les cinq syndicats de l’industrie – confirme que l’Association des professionnels de la construction et de l’habitation du Québec (APCHQ) n’a pas répondu positivement à sa demande de soumettre la dernière offre à ses membres, afin de passer au vote. Pour cette raison, l’Alliance syndicale confirme qu’une grève générale illimitée sera déclenchée ce mercredi 28 mai, à 00h01, dans le secteur résidentiel.
Rappelons que l’Alliance syndicale avait exhorté l’APCHQ de faire voter ses membres en se référant à l’article 44.1 de la Loi R-20, dans laquelle il est notamment stipulé qu’une « association représentative peut conclure une entente sectorielle […] si elle y est autorisée par la majorité de ses membres qui exercent leur droit de vote lors d’un scrutin secret ».
« Il est déplorable que l’APCHQ prive ses membres d’un tel droit de parole. Nous croyons fermement que les entrepreneurs membres de l’APCHQ auraient été favorables à l’acceptation de la dernière offre de l’Alliance syndicale dans le contexte actuel, tout comme les membres des autres associations patronales l’ont été dans les dernières semaines, pour les secteurs Institutionnel-Commercial et Industriel (IC-I) et du Génie civil et Voirie (GCV) » affirme Alexandre Ricard, porte-parole de l’Alliance syndicale de la construction.
« Obtenir une telle entente dans le secteur Résidentiel aurait favorisé le maintien de la paix industrielle et aurait permis d’éviter la grève » poursuit-il.
Que cache l’APCHQ?
L’APCHQ fait preuve d’entêtement injustifié dans le cadre des négociations en cours, en refusant de consulter ses membres pour leur présenter la plus récente offre de l’Alliance syndicale. L’APCHQ a-t-elle peur de la réponse positive qu’elle pourrait obtenir? Qui cherche-t-elle à protéger? Les ménages québécois qui bénéficient des travaux destinés à l’habitation, ou les promoteurs immobiliers qui s’en mettent plein les poches?
L’Alliance syndicale croit fermement que le gouvernement ne doit pas se mêler des discussions. Pourtant, l’APCHQ se cache derrière celui-ci. Au lieu de répondre positivement à une simple demande d’appel au vote, elle repousse volontairement le processus de consultation et se dirige elle-même vers un conflit de travail, en espérant que le ministre du Travail intervienne.
En route vers la grève
L’Alliance syndicale a obtenu un fort mandat de grève (83,8%) en bonne et due forme, en exécutant une consultation au scrutin secret, accessible à l’ensemble des membres des cinq syndicats. Un préavis de déclenchement de grève a été formellement envoyé aujourd’hui au ministre du Travail.
Les cinq syndicats communiqueront activement avec leurs membres dans les prochaines heures afin de partager les informations relatives aux lieux de rassemblement et les détails logistiques nécessaires pour le début de la grève. Les travailleurs et les travailleuses du secteur Résidentiel méritent les mêmes salaires et conditions que dans tous les autres secteurs de l’industrie et doivent pouvoir récupérer le pouvoir d’achat perdu. Leur contribution à la construction de logements et de maisons est essentielle et doit être reconnue.
À propos de l’Alliance syndicale de la construction
L’Alliance syndicale est composée des cinq syndicats de l’industrie de la construction : la FTQConstruction, le Syndicat québécois de la construction (SQC), le Conseil provincial du Québec des métiers de la construction (International), la CSD-Construction et la CSN-Construction. Ils unissent leurs voix pour représenter l’ensemble des travailleurs et des travailleuses de l’industrie lors de la négociation des conventions collectives. www.facebook.com/AllianceSyndicale/
Sans surprise, le PL 89 du ministre Boulet, l’une des plus grandes attaques envers le droit des travailleuses et des travailleurs, figure à la une de cette édition d’été 2025. Mais ce n’est pas le seul sujet qui occupe les pages de cette 17e édition du journal du Point syndical.
Message de l’équipe du Point syndical :
« Étant donné les risques d’un conflit de travail imminent chez Postes Canada, la CSN a décidé, en guise de solidarité envers le Syndicat des travailleurs des postes (STTP), de diffuser ce numéro du Point syndical principalement en format numérique.
Exceptionnellement, le journal ne sera donc pas distribué dans vos boîtes à lettres respectives. Quelques copies seront toutefois imprimées et distribuées lors du conseil confédéral des 18 et 19 juin prochains, à Jonquière, et quelques autres seront également disponibles au siège social de la CSN à Montréal.
Merci de votre compréhension. »
L’abaissement de la cote de crédit du Québec par l’agence de notation Standard & Poor’s fait l’objet de l’édito de la présidente de la CSN, Caroline Senneville. L’austérité refait aussi surface alors que la CAQ gèle les embauches ou coupe dans les services.
Les sujets ne manquent pas dans cette édition. Retrouvez en rafale ci-dessous les différents articles consultables directement sur le site de la CSN ou en version PDF.
« En 30 ans de militantisme syndical, je n’ai jamais vu une telle attaque aux droits des travailleuses et travailleurs », assure le premier vice-président de la CSN, François Enault.
À en croire le premier ministre, cette décote n’est pas la conséquence des baisses d’impôt qu’il a lui-même octroyées il y a deux ans, ni des investissements de plusieurs centaines de millions de dollars dans des projets économiques risqués, comme une usine de batteries dont la maison mère est maintenant en faillite, ni même de la planification d’un 3e lien qui ne verra jamais le jour à Québec ou encore d’un dépassement de coûts d’un demi-milliard de dollars dans le dossier SAAQclic.
« On doit refuser l’austérité ! Refuser de se rendre malade, refuser de faire toujours plus avec moins ! », scandait à la manifestation contre le gel d’embauche dans les cégeps, en avril dernier devant le Conseil du trésor à Montréal, Ryan William Moon, vice-président à la Fédération des professionèles–CSN.
Sans que ce soient des changements majeurs, plusieurs points devaient être modifiés [à notre convention collective], parce qu’on avait des problèmes de compréhension et d’application. Environ une cinquantaine de ces petits points ont été modifiés.
La décision d’Amazon de fermer ses sept entrepôts au Québec ne passe tout simplement pas. Une personne du Québec sur deux a ou bien diminué ses achats chez Amazon depuis janvier, ou bien a carrément cessé de transiger avec la multinationale délinquante.
« Le mouvement syndical a largement contribué à l’amélioration des conditions de travail, à la reconnaissance des droits des travailleuses et travailleurs ainsi qu’au renforcement du filet social de l’ensemble de la population québécoise. Les victoires obtenues ont façonné le Québec moderne et montré la force de la solidarité syndicale et sociale… mais le monde du travail change à une vitesse fulgurante et les défis qui se dressent devant nous sont plus grands que jamais », peut-on lire dans la déclaration officielle des États généraux du syndicalisme.
« Les victoires sont rares. Nous célébrons cette hausse de financement du Conseil des arts et des lettres du Québec. Mais nous demeurons réalistes : on sauve tout juste les meubles », Valérie Lefebvre-Faucher, autrice, rédactrice en chef de la revue Liberté et représentante de la GMAQ.
« Mon objectif est de faire reconnaître l’acupuncture comme outil d’intervention sociale. C’est plus qu’une activité relaxante, ça a du potentiel pour la réadaptation en santé mentale et le traitement des dépendances », explique Charlotte Astier, acupunctrice.
La négociation a été rude dans le secteur. Les hôteliers voulaient garder les profits accumulés grâce à l’inflation et à la forte reprise du secteur. Mais au Reine Elizabeth, c’est dans une campagne antisyndicale virulente que l’employeur s’est lancé tête baissée.
Il faut savoir que pour un même métier de la construction, une ou un salarié-e reçoit actuellement entre 2 et 4 dollars de moins l’heure lorsqu’il travaille sur un chantier résidentiel. L’Alliance syndicale souhaite lancer le processus pour enfin régler ce problème qui n’a pas lieu d’être.
Les travailleuses de la santé ont dû attendre plus de 14 ans avant que le gouvernement leur verse les sommes qu’il leur devait pour le maintien de l’équité salariale. Retour sur une lutte où nos efforts ont fini par payer.
« On entend souvent dire que les travailleuses et travailleurs des RPA sont nos anges gardiens. Et comme des anges, on s’attend à ce qu’ils se dévouent pour la cause, et surtout sans se plaindre. Je pense que ces attentes sacrificielles doivent cesser. Nos membres prennent soin de nos aîné-es, de nos grands-parents et de nos parents, quand leurs familles ne sont plus en mesure de le faire », dénonce Marlène Ross, représentante du secteur des résidences privées pour aîné-es.
« En uniformisant l’apparence du personnel, la CAQ envoie un message d’exclusion aux communautés culturelles et aggrave la pénurie des employé-es de soutien, notamment dans les grandes villes », explique Annie Charland, présidente du Secteur soutien scolaire de la FEESP–CSN.
« Depuis que je suis rentré au resto, je parlais du syndicat, mais toujours un peu à la blague… Un bon jour, je suis passé à l’action et j’ai amené des cartes à signer », raconte Guillaume Gagné, serveur et étudiant en science politique de 28 ans qui est à l’origine de la nouvelle section montréalaise du Syndicat des employé-es de la restauration–CSN.
Ce livre constitue une critique puissante de la manière dont l’État canadien réagit aux revendications autochtones : par la militarisation, la manipulation médiatique et la criminalisation de la résistance.
« On a confiance en la CSN. On vient d’un contexte difficile au Mexique… alors, arriver ici, au Québec, et gagner sa vie dans de mauvaises conditions, c’est compliqué ! On a choisi un nouveau syndicat où tout est transparent », raconte tout sourire, Jenny Anamaria Granados Mediola, la vice-présidente du syndicat fraîchement élue.
Rappelons que cet événement historique constituait le point culminant de cinq ans de travaux et de négociation à la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) afin d’en arriver à une entente touchant les mécanismes de prévention et de participation
Entente pour les 13 000 travailleuses des CPE ; assemblée générale annuelle d’UCCO-SACC-CSN, un événement riche en actions ; le chiffre du numéro et plein d’autres petites nouvelles !
Entre le 7 mars et le 16 mai 2025, 12 nouveaux syndicats (ou accréditations) représentant 600 salarié-es ont reçu la confirmation qu’ils adhèrent à la Confédération des syndicats nationaux (CSN).
«On doit refuser l’austérité ! Refuser de se rendre malade, refuser de faire toujours plus avec moins ! », scandait à la manifestation contre le gel d’embauche dans les cégeps, en avril dernier devant le Conseil du trésor à Montréal, Ryan William Moon, vice-président à la Fédération des professionèles–CSN.
Les manifestations contre l’austérité se multiplient depuis un an. Les syndicats ne veulent pas rejouer dans ce film. Les travailleuses et les travailleurs des réseaux de la santé et de l’éducation se remettent à peine de la pandémie, et le gouvernement leur demande – encore – de se serrer la ceinture et de travailler plus fort.
En novembre 2024, le gouvernement annonçait un gel d’embauche dans certains ministères et sociétés d’État. En santé et services sociaux ainsi qu’en éducation, cette politique ne vise pour le moment que le personnel administratif. Mais ça n’empêche pas les suppressions de postes. Parce qu’en même temps que le gel d’embauche, il y a eu les mauvaises nouvelles au sujet de Santé Québec : des coupes de 1,5 milliard de dollars en dépenses, donc plusieurs emplois abolis.
Au Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM), ça représente 26 postes de préposé-es aux bénéficiaires et sept d’agentes administratives en moins.
Impacts dévastateurs
« Ces compressions ont un impact profond et dévastateur sur les conditions de travail du personnel. Les gens sont épuisés, tant physiquement que mentalement, ce qui mène à des risques accrus d’épuisement professionnel », déclare Anick Mailhot, présidente du syndicat des employé-es du CHUM.
Elle ajoute que les préposées aux bénéficiaires sont brûlées parce qu’elles sont tout le temps débordées. « Tu n’as jamais l’impression de bien accomplir ton service. Ça vient affecter mentalement les membres », croit-elle.
Les compressions faites au CHUM ont engendré un gros mouvement de main-d’œuvre et une série de supplantations. « Des dizaines de vies sont chamboulées. Des femmes monoparentales, dont l’horaire travail-famille est réglé, apprennent du jour au lendemain que leur poste est supprimé. Imagine un peu : tu changes d’horaire, tu changes de milieu de travail, tu changes d’unité. Ça crée de gros impacts dans la vie des travailleuses et des travailleurs », explique Guillaume Clavette, représentant du personnel paratechnique, des services auxiliaires et des métiers à la Fédération de la santé et des services sociaux–CSN.
« C’est aussi de l’expertise qu’on perd, ajoute Mme Mailhot. On est spécialisés, on connaît le service par cœur, on sait comment ça fonctionne. On n’a besoin de personne pour nous dire quoi faire ».
Vient avec ça la surcharge de travail. « Quand des collègues partent en maladie et qu’ils ne sont pas remplacés à cause du gel d’embauche, ça génère un surplus de tâches pour le personnel restant », soutient Marie-Noël Bouffard, présidente par intérim du secteur soutien cégeps de la Fédération des employées et employés de services publics–CSN.
« Ça peut mener à des épuisements professionnels, c’est ça qu’on veut éviter », soutient Ryan William Moon.
Guillaume Clavette s’inquiète de la baisse du sentiment d’appartenance au sein de ses troupes. « On a le sentiment d’être un simple numéro dans Santé Québec. On ne se sent plus impliqué. Ces compressions ont provoqué de l’amertume. Ça fait que le monde quitte le bateau. »
On avance en arrière
Au cours des dernières années, les syndicats avaient l’impression d’avoir avancé. Le gouvernement, durant la pandémie, avait compris qu’il devait dégager le personnel soignant de la paperasse. Il a donc engagé 3000 agentes et agents administratifs. C’est maintenant un retour en arrière. Il gèle leur embauche. Qui va faire leur job ?
Lors de la dernière négociation dans le secteur de la santé, le gouvernement voulait créer plus de postes à temps plein. « Mais les mesures négociées ne sont pas mises en place, et on réduit les postes à temps complet. Quel est le message que nos membres reçoivent ? », s’insurge M. Clavette.
Même type d’accroc à la convention collective des professionnel-les des cégeps. Dans leur nouveau contrat de travail, il est écrit que la décision de ne pas remplacer une personne ne devrait pas aboutir à une charge excessive pour les personnes qui restent.
Ces clauses se devaient d’offrir plus de stabilité d’emploi ou de perspectives aux travailleuses et travailleurs à statut précaire. Avec cet arrêt de recrutement, le gouvernement vient changer unilatéralement les termes et l’application de la convention collective.
Invitation à la sous-traitance
« Affirmer que le personnel administratif d’un cégep, par exemple, peut ne pas être remplacé, c’est négliger qu’un cégep est un tout », soutient Benoit Lacoursière, président de la Fédération nationale des enseignantes et enseignants du Québec (FNEEQ–CSN).
Parfois, le nombre d’absents non remplacés est tellement grand que les directions se tournent vers la sous-traitance. Car elle n’est pas considérée dans la même enveloppe budgétaire.
Marie-Noël Bouffard explique : « les salaires et les coûts de la sous-traitance proviennent de budgets distincts. La loi prévoit que si quelqu’un à l’interne peut faire la job, on n’a pas le droit d’aller en sous-traitance. Mais là, on ne peut pas embaucher… c’est une belle passe pour les contrats à l’externe. C’est malsain comme façon de voir les choses. »
Illustration : Luc Melanson
« Les vautours tournent autour, résume la présidente de la CSN, Caroline Senneville. Là où les services de l’État ne sont plus maintenus, le privé rentre en ligne de compte. On le voit en santé et en éducation. »
Impacts sur la population
Il est faux de croire que les compressions budgétaires n’ont pas d’impacts sur la clientèle du réseau public. « La CAQ peut jouer sur les mots, le personnel du réseau de la santé et les bénéficiaires ne sont pas dupes : les coupes sont bien réelles et elles font mal, en plus de mettre la population en danger, affirme Anick Mailhot. Certains préposé-es et des employé-es administratifs m’envoient couramment des informations sur ce qui se passe dans les départements. On est confrontés à de grosses problématiques. Des cas de patientes et patients qui ont dû attendre 45 minutes assis à la toilette à faire sonner la cloche… mais aucun employé ne pouvait aller les aider. »
« Il y a des personnes alitées qui doivent être levées deux ou trois fois par jour, mais qui ne le sont pas. Il faut deux préposé-es pour les mobiliser et il est difficile d’en trouver deux libres en même temps. Ça rend le rétablissement des bénéficiaires plus long et ça accentue la perte d’autonomie des personnes âgées », ajoute-t-elle.
Dans les écoles, il s’agit souvent de livres de bibliothèque non commandés ou de nouveaux équipements de laboratoire qui ne sont jamais installés. Bref, ce sont les outils d’apprentissage aux élèves qui sont tout simplement négligés.
Des infrastructures en ruines
C’est en matière d’infrastructures que les compressions font le plus mal. Comme l’illustre le cas des travaux à l’hôpital Maisonneuve-Rosemont qui sont sans cesse reportés.
Même constat du côté des cégeps. « Les budgets alloués aux infrastructures sont tout simplement insuffisants pour rattraper le déficit d’entretien », croit Benoit Lacoursière. En décembre 2023, le cégep de Saint-Laurent a dû condamner un pavillon complet parce que la façade était en trop en mauvais état. Il est d’ailleurs toujours fermé.
Pendant ce temps, il y a une augmentation de la population étudiante. Les directions doivent improviser des solutions, mettre plus de monde dans une même classe, offrir davantage de cours en ligne ou de soir.
Ce sont les choix que le gouvernement a faits. Les prochains mois ne s’annoncent pas faciles sur le plan économique avec la décote, et l’intérêt du ministre des Finances, Eric Girard, d’implanter ce qui pourrait ressembler à un DOGE québécois. Les compressions historiques dans les cégeps, dévoilées en mai dernier, auront également des conséquences importantes.
Ryan William Moon rappelle quant à lui au gouvernement : « Que la création d’emplois, ça passe aussi par l’éducation. En période d’incertitude ou de déclin économique, le réseau de l’enseignement est très sollicité par les personnes qui veulent se recycler ou qui cherchent une formation pour se remettre en action après la perte d’un boulot. »
Été 2024. Les travailleuses et les travailleurs de l’hôtellerie obtiennent des règlements un après l’autre dans le cadre de leur négociation coordonnée. De son côté, l’Hôtel Reine Elizabeth jetait ses 600 salarié-es à la rue le 20 novembre 2024 en décrétant un lock-out. C’est finalement près de six mois plus tard que le syndicat a réussi à obtenir une entente contenant les gains de la négociation coordonnée.
La négociation a été rude dans le secteur. Les hôteliers voulaient garder les profits accumulés grâce à l’inflation et à la forte reprise du secteur. Mais au Reine Elizabeth, c’est dans une campagne antisyndicale virulente que l’employeur s’est lancé tête baissée.
Attaques frontales
Un rapport d’enquête du ministère du Travail, tombé en décembre 2024, fait état du recours à au moins 30 briseurs de grève pendant la Coupe des Présidents de la PGA en septembre 2024. « Le Reine s’est fait prendre à utiliser des scabs. C’est incroyable de voir un employeur de cette importance bafouer nos lois du travail. Visiblement, il faut aller plus loin pour serrer la vis aux employeurs dans les conflits de travail », lance Michel Valiquette, trésorier et responsable du secteur de l’hôtellerie à la Fédération du commerce–CSN.
À cela s’ajoutent deux sanctions pour représailles antisyndicales en 2024. La première fois, pour avoir installé des caméras de surveillance devant le bureau du syndicat, la seconde, pour avoir suspendu sans cause un vice-président du syndicat.
L’entente adoptée le 12 mai dernier contient l’ensemble des gains de la négociation coordonnée, soit une augmentation salariale de 21 % sur quatre ans, une bonification de la contribution de l’employeur à l’assurance collective, ainsi que d’autres avantages en lien avec la formation, les vacances et le pourboire. L’entente permet aussi d’obtenir des gains sur la restriction du recours aux agences de personnel, un élément majeur de cette négociation.
« Les travailleuses et les travailleurs du Reine Elizabeth nous montrent que lorsqu’on se tient, on peut gagner le respect », conclut Michel Valiquette.
Dans un premier temps, la vice-présidente de la CSN, Katia Lelièvre, rencontre la présidente du syndicat, Jessica Larochelle, ainsi que la secrétaire Geneviève Gagnon, pour discuter des nouveautés au musée et de leur dernière convention collective.
JESSICA LAROCHELLE : On a vécu un changement de direction en mars 2024 et notre convention collective allait être échue en avril 2025. On a donc négocié avec les ressources humaines et un avocat qui ne connaissaient pas nécessairement ce qui se passait sur le plancher de l’établissement. Il faut savoir qu’ici, on fait partie d’un complexe qui comprend le restaurant, l’hôtel et le musée ; et on partage les mêmes ressources humaines. On devait négocier dans ces circonstances-là. Expliquer notre travail et pourquoi on faisait telle ou telle demande… ralentissait le processus.
GENEVIÈVE GAGNON : La négociation, qui devait être assez courte, a été plutôt longue. On a commencé à négocier en mai et on a signé en décembre.
K.L. : Quels ont été les plus gros gains obtenus ?
J.L. : Sans que ce soient des changements majeurs, plusieurs points devaient être modifiés, parce qu’on avait des problèmes de compréhension et d’application de la convention collective. Environ une cinquantaine de ces petits points ont été modifiés.
Album photo du musée
G.G. : Notre ancienne convention, celle de 2019, était un peu désuète. Nous avions le but de ramener la nouvelle convention à la réalité du terrain. Les gains servent à tout le monde aujourd’hui.àJ.L. : La négociation était une dictée, c’était un travail de grammaire [rires].
G.G. : On a vécu une session de négociation où on s’est chicanés sur un mot pendant deux heures.
K.L. : Souvent, quand on demande à nos membres ce qui les dérange, ce ne sont pas des choses si grosses, mais quand ça revient fréquemment, ça devient harassant pour les gens. Ça fait une meilleure atmosphère de travail quand on réussit à aplanir les embûches.
C’est la première fois qu’un ministre du Travail québécois ose évoquer aussi explicitement de nouvelles restrictions au droit de grève, du moins depuis sa reconnaissance en tant que droit constitutionnel par l’arrêt Saskatchewan il y a dix ans.
Le ministre Boulet n’aura pas chômé. Dès février, il présente sa pièce législative : la Loi visant à considérer davantage les besoins de la population en cas de grève introduit un nouveau chapitre au Code du travail et instaure des pouvoirs discrétionnaire inédits pour le ministre.
Par simple décret, celui-ci pourrait dorénavant permettre à l’une des parties négociantes de saisir le Tribunal administratif du travail (TAT) afin que celui-ci détermine si des « services minimalement requis pour éviter que ne soit affectée de manière disproportionnée la sécurité sociale, économique ou environnementale » doivent être maintenus. À défaut d’entente entre les parties, le TAT serait alors mandaté à stipuler les services qui doivent être maintenus.
Le ministre s’arroge également le droit de mettre un terme à un conflit de travail et le droit d’imposer aux parties l’arbitrage obligatoire. Simplement par décret, sans aucune forme de débat parlementaire.
Un interventionnisme sans précédent
Aux fins de l’analyse, mettons de côté un instant les représentations effectuées par les organisations syndicales et patronales, que d’aucuns pourraient soupçonner d’être teintées d’intérêts particuliers.
N’en déplaise au ministre, les avis des experts indépendants sont unanimes : les spécialistes du droit et des relations de travail qui sont intervenus en commission parlementaire ont tour à tour pourfendu les modalités contenues dans le projet de loi 89. Tant pour ses atteintes à la liberté d’association et au droit de grève que pour le déséquilibre majeur qu’il entraînera dans le système des relations de travail qui prévaut au Québec.
Tous trois professeurs à l’École de relations industrielles de l’Université de Montréal, Patrice Jalette, Mélanie Laroche et Gregor Murray s’interrogent d’abord, dans un mémoire présenté en commission parlementaire, sur la pertinence même du projet de loi, qui s’apparente à leurs yeux à « une distraction inutile par rapport aux priorités auxquelles les parties patronales et syndicales sont confrontées ». Si les dernières années ont vu une recrudescence relative des conflits de travail, c’est en grande partie dû à la montée de l’inflation postpandémie, juxtaposée à une importante pénurie de main-d’œuvre, précisent les auteurs.
Rappelant à quel point le droit de grève est encadré au Québec et qu’il demeure indissociable à notre régime de paix industrielle, les professeurs sont particulièrement préoccupés par « l’encadrement excessif du droit de grève » et par « la politisation accrue des relations du travail dans le secteur privé », entraînés par tant de pouvoirs discrétionnaires accordés au ministre.
« En 30 ans de militantisme syndical, je n’ai jamais vu une telle attaque aux droits des travailleuses et travailleurs », assure le premier vice-président de la CSN, François Enault.
Contestations à venir
Plusieurs éléments du projet de loi 89 risquent de ne pas passer le test des tribunaux, soulignent des spécialistes intervenus en commission parlementaire.
C’est le cas d’un groupe de huit professeurs de droit et de relations industrielles associés au Centre de recherche interuniversitaire sur la mondialisation et le travail (CRIMT).
Craignant une « banalisation de la violation des droits consacrés par les chartes », ces experts prévoient que l’adoption du projet de loi « conduira inévitablement à une prolifération de contestations constitutionnelles et à une judiciarisation des conflits de travail ».
L’obligation de maintenir des services assurant le bien-être économique, social et environnemental de la population risque également d’être taillée en pièces par les tribunaux, rappellent les universitaires. À ce jour, seules la santé et la sécurité de la population sont reconnues par les tribunaux comme étant des critères raisonnables qui justifient de restreindre le droit de grève, tel que confirmé par l’arrêt Saskatchewan.
D’autant plus qu’à très court terme, malgré les contestations à venir, c’est le rapport de force des syndicats qui risque d’en pâtir. À ce sujet, les avis sont sans équivoque : sans même avoir à être mise en exécution, la seule possibilité du ministre de mettre un terme à un conflit ou d’exiger le maintien de services minimaux au-delà des exigences de santé et de sécurité de la société entraînera une perte d’efficacité de la grève.
Pour la présidente de la CSN, le projet de loi 89 doit être retiré. « Nous avons la profonde conviction que ce projet de loi contrevient aux chartes. Les experts sont de notre avis. S’il est adopté, nous le contesterons avec vigueur devant les tribunaux. Mais les dommages sur nos conditions de travail auront été faits. Et ça, le ministre le sait, c’est ce qui est particulièrement enrageant ».
À plusieurs reprises durant les travaux parlementaires, le ministre Boulet s’est défendu de vouloir abuser de ces nouveaux pouvoirs, y voyant là plutôt l’occasion d’intervenir dans des circonstances exceptionnelles.
Les huit experts du CRIMT ne sont pas dupes pour autant : rappelant la métaphore du fusil de Tchekhov, « de tels pouvoirs sont octroyés pour être utilisés », soulignent-ils dans leur mémoire.
22 mars 2025 : des milliers de personnes marchent partout au Québec, répondant à l’appel de la Grande mobilisation pour les arts au Québec (GMAQ). Ce mouvement, qui rassemble artistes, travailleuses et travailleurs de la culture – théâtre, danse, cirque, musique, arts visuels, littérature et plus encore – exige une meilleure reconnaissance des arts et une hausse des budgets gouvernementaux dédiés à la culture. Quatre jours plus tard, le ministre des Finances du Québec présente son budget. Le financement du Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ) est rehaussé de façon importante, répondant en partie aux demandes de la GMAQ.
« Les victoires sont rares. Nous célébrons cette hausse de financement du CALQ. Mais nous demeurons réalistes : on sauve tout juste les meubles, le ministre de la Culture nous a avisés que pour les années à venir, l’investissement ne sera pas indexé. Le problème de fond demeurera. Parce que la précarité dans le milieu des arts et de la culture, c’est beaucoup plus large », observe Valérie Lefebvre-Faucher, autrice, rédactrice en chef de la revue Liberté et représentante de la GMAQ.
Sans filet
Les travailleuses et travailleurs culturels, souvent autonomes ou indépendants, vivent dans une grande précarité. « Une majorité d’entre nous cumule les emplois pour arriver. Quand nous réussissons à obtenir du financement, c’est bien souvent le projet qui est financé, pas notre temps de création », continue Mme Lefebvre-Faucher.
La Fédération nationale des communications et de la culture (FNCC–CSN) appuie la GMAQ dans ses revendications. La fédération explore l’idée d’un filet social pour les artistes. « Il y a un travail de fond à faire afin que socialement, on réalise que la création, ce n’est pas un passe-temps. C’est un travail et des droits devraient venir avec ça », martèle Jean-Philippe Bergeron, écrivain et président du Syndicat des travailleuses et travailleurs de Copibec–CSN.
Le filet de sécurité conçu pour les salarié-es censé soutenir le revenu des individus lorsqu’ils sont confrontés aux aléas de la vie est souvent inexistant pour les artistes. Ce filet serait destiné à compenser les périodes de transition ou de précarité financière entre deux projets et à éviter que les artistes aient à occuper deux, parfois trois emplois pour avoir les moyens de créer. « Nous sommes en défrichage sur ces questions. On pourrait s’inspirer des travailleurs des pêches et de leur accès à l’assurance-emploi : c’est un exemple parmi d’autres. Mais des solutions peuvent être mises en place », termine M. Bergeron.
Alors que l’efficacité de l’acupuncture est reconnue scientifiquement et que cette médecine traditionnelle est intégrée dans plusieurs systèmes de santé à travers le monde, il subsiste plusieurs préjugés à son sujet au Québec. En pratiquant l’acupuncture sociale, Charlotte Astier s’efforce de déconstruire ces mythes et de rendre à l’acupuncture ses lettres de noblesse, une oreille à la fois.
« Mon objectif est de faire reconnaître l’acupuncture comme outil d’intervention sociale. C’est plus qu’une activité relaxante, ça a du potentiel pour la réadaptation en santé mentale et le traitement des dépendances », explique celle qui coordonne maintenant des cliniques d’acupuncture gratuites pour des organismes communautaires et pour l’unité psychiatrique des toxicomanies du CHUM.
L’acupuncture sociale ou solidaire signifie essentiellement de rendre la pratique plus accessible, notamment en traitant un groupe de bénéficiaires simultanément. Cette pratique, acceptée au Québec depuis 2021 à la suite de pressions de la part de l’Association des acupuncteurs du Québec (AAQ), a l’avantage de pouvoir se pratiquer n’importe où et de permettre de répartir le coût d’une heure d’acupuncture entre quelques personnes.
Évidemment, cette approche ne permet pas de traitements individualisés comme la consultation en cabinet privé. On utilise plutôt un protocole nommé NADA, qui consiste à insérer cinq aiguilles fines à des points spécifiques sur le pavillon de chaque oreille.
« C’est un protocole qui a fait ses preuves pour réguler le système nerveux, donc ça va aider à diminuer le stress, l’anxiété, la dépression et les dépendances. C’est le protocole idéal pour le traitement en groupe, puisque ça ne touche que les oreilles. Les gens peuvent être assis et on n’a pas besoin d’aménagement particulier. »
Pour la présidente de l’AAQ, Michèle Joannette, le travail de Charlotte illustre bien la contribution que l’acupuncture pourrait apporter au système de santé québécois.
« Ce n’est pas une question de croyance. Ç’a été démontré que l’acupuncture peut aider dans plusieurs champs : en santé mentale, en obstétrique, et en traitement d’enjeux musculosquelettiques. Il y a des acupunctrices et des acupuncteurs prêts à venir agir pour soulager le réseau de la santé. On attend juste qu’on nous ouvre la porte. »
Les membres de l’AAQ ont décidé de passer à l’offensive pour la reconnaissance et la valorisation de leur profession en s’affiliant à la FP–CSN en novembre 2024.
Au-delà des coups de sonde qui ne font que confirmer la déconnexion de plus en plus marquée du gouvernement Legault par rapport aux besoins de la population, voilà que l’agence de notation Standard & Poor’s (S&P) vient d’abaisser la cote de crédit du Québec, ce qui pourrait coûter aux contribuables des centaines de millions de dollars. Du jamais vu en 30 ans !
À en croire le premier ministre, cette décote n’est pas la conséquence des baisses d’impôt qu’il a lui-même octroyées il y a deux ans, ni des investissements de plusieurs centaines de millions de dollars dans des projets économiques risqués, comme une usine de batteries dont la maison mère est maintenant en faillite, ni même de la planification d’un 3e lien qui ne verra jamais le jour à Québec ou encore d’un dépassement de coûts d’un demi-milliard de dollars dans le dossier SAAQclic.
Non, mesdames et messieurs ! Cette décote, aux dires de notre cher premier ministre, serait la conséquence du rattrapage salarial des employé-es du secteur public obtenu lors de la dernière ronde de négociation.
Or, tout récemment, une des membres du comité chargé de l’étude du dossier du Québec chez S&P a confirmé publiquement1 que c’est principalement la réduction d’impôt décrétée par M. Legault il y a deux ans, ainsi que la lourdeur des investissements requis en immobilisations, qui ont pesé dans la balance.
Pour un gouvernement qui se voulait le champion de l’économie, on repassera !
Pendant ce temps, on apprend que plus d’une trentaine de projets d’infrastructures en santé ont été mis sur la glace par le gouvernement… pour des raisons budgétaires (!), alors qu’on doit fermer les salles d’opération de l’hôpital Maisonneuve Rosemont… pour cause d’orage !
Comme si ça ne suffisait pas, la ministre de l’Enseignement supérieur, Pascale Déry – dont nous venons de réclamer la démission – vient d’annoncer des compressions budgétaires historiques de l’ordre de 151 millions de dollars dans le réseau collégial, ce qui affectera les services directs aux élèves, comme du soutien pédagogique, du mentorat ou encore de l’aide psychosociale. C’est la goutte qui fait déborder le vase
Rouleau compresseur antisyndical
Pour compléter le portrait : le ministre du Travail, Jean Boulet, poursuit son œuvre antisyndicale en déposant, en plus du projet de loi 89, une autre pièce législative d’envergure qui vient modifier plusieurs lois du travail et qui comporte de nombreux éléments préjudiciables pour les organisations syndicales, mais surtout, pour les travailleuses et travailleurs, notamment en matière de santé et sécurité.
Si Jean Boulet et François Legault pensent faire mal uniquement aux syndicats avec ces projets de loi, ils se trompent royalement, parce qu’en s’attaquant au rapport de force et aux droits des travailleuses et des travailleurs, c’est à toute la population du Québec qu’il s’attaque.
Heureusement, l’échéance électorale de 2026 arrive à grands pas. Ce sera le temps collectivement d’honorer notre devise nationale Je me souviens !
Faux départ à Ottawa
Parlant d’élections, on connaît désormais les résultats du scrutin sur la scène fédérale.
Si on peut maintenant pousser un léger soupir de soulagement à savoir que la menace d’un gouvernement conservateur mené par Pierre Poilievre est temporairement écartée, il ne faudrait pas se réjouir trop vite de la victoire minoritaire de l’ex-banquier, Mark Carney, qui a repris à son compte certaines idées de M. Poilievre, comme l’abolition de la taxe carbone et l’abandon de la hausse de la part imposable des gains en capital.
Sur l’échiquier gauche-droite, on assiste clairement à un recentrage du Parti libéral du Canada par rapport aux années Trudeau, donc à un virage plus marqué vers la droite.
Le dicton nous dit de donner la chance au coureur. Soit. En espérant qu’il ne trébuche pas trop souvent en s’inspirant des arbitrages budgétaires douteux qui ont conduit, sur la scène provinciale, à la décote caquiste.
La décision d’Amazon de fermer ses sept entrepôts au Québec ne passe tout simplement pas. Une personne du Québec sur deux a ou bien diminué ses achats chez Amazon depuis janvier, ou bien a carrément cessé de transiger avec la multinationale délinquante.
Ces données ont été rendues publiques début mai par l’Académie de la transformation numérique de l’Université Laval, dont l’enquête NETendances porte, chaque année, sur les habitudes de consommation en ligne des Québécoises et des Québécois.
Ainsi, « 17 % des internautes déclarent avoir boycotté les achats en ligne réalisés sur Amazon, alors que 32 % d’entre eux mentionnent avoir réduit leurs achats sur la plateforme », précise l’étude.
Ces chiffres ont de quoi réjouir la présidente de la CSN : « Ça démontre qu’au Québec, la solidarité et le respect, c’est encore important », note Caroline Senneville.
En réponse à la fermeture des sept entrepôts d’Amazon et des 4 700 mises à pied qui en résultent, la CSN appelait la population et les institutions à boycotter Amazon, tant l’antisyndicalisme primaire de la multinationale teintait cette décision, insensée sur le plan des affaires.
La réponse des villes et des gouvernements ne s’est pas fait attendre. En mars, la présidente du Conseil du trésor, Sonia LeBel, incitait l’ensemble de l’appareil gouvernemental à ne plus s’approvisionner chez Amazon, tout en restreignant la possibilité de le faire.
Et après Montréal, Bromont, Alma et Nicolet, les municipalités de Sherbrooke, Québec et Gatineau ont emboité le pas. Au cours des dernières semaines, elles ont toutes informé la CSN que leur administration cessera de s’approvisionner auprès du géant américain fautif.
De leur côté, les recours juridiques intentés par la CSN pour infirmer la fermeture des entrepôts suivent leurs cours. Une première audience avait lieu le 16 mai dernier devant le Tribunal administratif du travail, qui entendra la cause tout au long de l’automne.
Bien que l’Alliance syndicale de la construction, dont la CSN-Construction fait partie, ait réussi à obtenir des règlements intéressants dans les secteurs industriel, institutionnel et commercial ainsi que du génie civil et de la voirie, les négociations se poursuivent dans le secteur résidentiel. Pour la première fois depuis des décennies, les ententes ont été conclues avant l’échéance des précédentes conventions collectives. Elles prévoient des augmentations salariales de 22 % sur quatre ans et ont été adoptées dans une proportion de 84 %.
« Nous sommes très satisfaits de ces ententes », explique le président de la CSN-Construction, Pierre Brassard, qui souhaite maintenant un déblocage dans le dernier secteur toujours en négociation, celui de la construction résidentielle. « Nous visons le commencement d’un rattrapage par rapport aux autres secteurs, mais les boss nous déposent une offre inférieure à ce qui a été négocié dans ces secteurs. » Le 21 mai, les syndicats ont présenté une offre finale pour tenter de dénouer l’impasse.
Il faut savoir que pour un même métier de la construction, une ou un salarié-e reçoit actuellement entre 2 et 4 dollars de moins l’heure lorsqu’il travaille sur un chantier résidentiel. L’Alliance syndicale souhaite lancer le processus pour enfin régler ce problème qui n’a pas lieu d’être. Or, dans la négociation actuelle, les patrons du résidentiel n’offrent que 5 % la première année contre 8 % dans les autres secteurs.
« Avec une offre comme ça, on viendrait creuser encore plus l’écart en partant », poursuit Pierre Brassard. La CSN-Construction fait présentement le tour des chantiers résidentiels afin de bien informer les travailleuses et les travailleurs de l’état des négociations et leur faire comprendre les importants enjeux en présence.
Dans les écoles du Québec, le personnel de l’éducation fait déjà face à une pression constante : budgets restreints, violence, conditions de travail pénibles. Pourtant, plutôt que de les soutenir, le gouvernement Legault alourdit encore leur quotidien.
Présenté le 20 mars 2025 par le ministre Bernard Drainville, le projet de loi 94 interdirait le port de signes religieux à tout le personnel scolaire, forçant ainsi des milliers de personnes à choisir entre leur emploi et leur foi.
Derrière l’homélie caquiste sur la neutralité de l’État, la réalité est brutale. Des éducatrices en service de garde, des surveillantes de dîner, des techniciennes en éducation spécialisée, déjà sous-payées et débordées, devront se conformer à des règles stigmatisantes. Pour certaines, cette réforme pourrait signifier la fin de leur carrière. Pour d’autres, un frein au recrutement dans un secteur déjà en crise.
Même la clause de droits acquis ne dissipe pas l’angoisse. « En uniformisant l’apparence du personnel, la CAQ envoie un message d’exclusion aux communautés culturelles et aggrave la pénurie des employé-es de soutien, notamment dans les grandes villes », explique Annie Charland, présidente du Secteur soutien scolaire de la Fédération des employées et employés de services publics–CSN.
Au-delà de l’atteinte aux libertés individuelles, cette réforme brise un équilibre fragile. Les accommodements pour les congés religieux, jusque-là reconnus par la Commission des droits de la personne, ne sont pas un privilège, mais une nécessité. Les remettre en question met en péril des années d’efforts pour bâtir des milieux inclusifs.
Le gouvernement justifie ces restrictions par des incidents survenus dans 17 écoles, notamment à Bedford. Pourtant, ces événements ont eu lieu alors que des règles strictes de laïcité s’appliquaient déjà aux travailleuses et travailleurs visés par ces incidents.
« Plutôt que d’élargir la laïcité sans raison, le gouvernement devrait faire respecter les lois existantes et agir concrètement pour répondre rapidement aux véritables débordements, comme ceux de l’école Bedford », poursuit Annie Charland.
Cette réforme injuste détourne l’attention des besoins réels. Alors que les écoles manquent de ressources, il est urgent d’abolir le gel d’effectifs et d’améliorer les conditions de travail, au lieu d’imposer des règles vestimentaires punitives et inutiles.
C’est le sentiment partagé par de nombreuses personnes qui travaillent dans les résidences privées pour aîné-es (RPA). La grande majorité des membres de la CSN œuvrant dans ce secteur sont des femmes. Elles accomplissent un métier indispensable au bien-être des personnes âgées.
Ces employées connaissent les résidentes et résidents sur le bout des doigts ; leurs petites habitudes et leurs besoins particuliers. Par exemple, une préposée aux bénéficiaires doit, durant un quart de huit heures, visiter tous les usagers et usagères sous sa responsabilité, faire le ménage, préparer les repas et les collations, et même distribuer les médicaments. La charge de travail est telle qu’elles sont souvent contraintes de tourner les coins ronds et de passer moins de temps auprès des occupantes et occupants.
Et pourtant, bon nombre d’entre elles sont à peine rémunérées au-dessus du salaire minimum. Cette réalité touche de nombreux membres de la CSN dans des secteurs majoritairement féminins, où le travail est trop souvent tenu pour acquis. Ces emplois, souvent décrits comme des vocations par certains employeurs, sont parfois perçus comme étant motivés par le désir de servir la communauté. Cette contribution est essentielle et mérite une reconnaissance et une rémunération à la hauteur de leur dévouement.
Marlène Ross, représentante du secteur des résidences privées pour aîné-es, dénonce cette vision patronale qui contribue au maintien de mauvaises conditions de travail et à la dégradation des services offerts aux aîné-es. « On entend souvent dire que les travailleuses et travailleurs des RPA sont nos anges gardiens. Et comme des anges, on s’attend à ce qu’ils se dévouent pour la cause, et surtout sans se plaindre. Je pense que ces attentes sacrificielles doivent cesser. Nos membres prennent soin de nos aîné-es, de nos grands-parents et de nos parents, quand leurs familles ne sont plus en mesure de le faire. Comme société, le minimum serait de reconnaître l’énorme service qu’elles nous rendent, en les rémunérant justement et en leur offrant de bonnes conditions de travail. »
Depuis le printemps 2025 et jusqu’au début de l’année 2027, la CSN, la FTQ, la CSQ, la CSD, l’APTS, la FAE, la FIQ, le SFPQ et le SPGQ uniront leurs forces pour réfléchir collectivement aux défis qui attendent les travailleuses et les travailleurs. « Il s’agit d’une démarche sans précédent qui prend tout son sens dans le contexte où les droits syndicaux sont plus que jamais menacés avec le projet de loi 89, et où le climat social, politique et économique est particulièrement incertain », explique Caroline Senneville, présidente de la CSN.
« Le mouvement syndical a largement contribué à l’amélioration des conditions de travail, à la reconnaissance des droits des travailleuses et travailleurs ainsi qu’au renforcement du filet social de l’ensemble de la population québécoise. Les victoires obtenues ont façonné le Québec moderne et montré la force de la solidarité syndicale et sociale… mais le monde du travail change à une vitesse fulgurante et les défis qui se dressent devant nous sont plus grands que jamais. Dans plusieurs secteurs, la précarisation s’accentue, le taux de syndicalisation stagne ou diminue. La judiciarisation croissante des relations de travail, les attaques politiques face aux lois encadrant le droit d’association et la polarisation des discours fragilisent notre capacité à défendre efficacement les intérêts des travailleuses et travailleurs, qu’ils soient syndiqués ou non. Le mouvement syndical québécois est à un tournant important », peut-on lire dans la déclaration officielle des ÉGS, dont le lancement officiel a eu lieu le 31 mars dernier à Montréal.
En mode introspectif
Au nombre de sept, les thèmes abordés lors des phases de l’exercice permettront de se questionner, de manière franche et honnête, sur les pratiques syndicales et le rôle des organisations. « Quelle est la place du syndicalisme dans la société ? Quelle capacité ont les syndicats à mobiliser leurs membres et à accroître leur rapport de force ? Ce sont quelques-unes des questions que nous nous poserons. Le modèle québécois en relations de travail, l’évolution des relations intersyndicales ainsi que la représentativité et le sentiment d’appartenance des membres seront aussi abordés. Finalement, comment assurer une plus grande inclusion au sein du mouvement syndical aux groupes non syndiqués ? », questionne la présidente Caroline Senneville.
Les États généraux du syndicalisme se dérouleront sur près de deux ans et se déploieront en trois étapes importantes : tout d’abord, tout au long de 2025, une période de consultation sera menée auprès des travailleuses et des travailleurs ainsi qu’auprès de spécialistes du monde du travail et de la société civile, pour recueillir leurs perspectives. Par la suite, au printemps 2026, un colloque où seront discutés les résultats des consultations et où des pistes de solution seront proposées sera organisé. Finalement, un grand événement aura lieu au début de 2027 pour clore les États généraux et présenter les conclusions de cette démarche collective.
Dans cette pizzéria de la rue Jarry comme dans bien d’autres restaurants montréalais, la distribution des pourboires et la gestion des horaires étaient souvent décidées de manière arbitraire.
« Depuis que je suis rentré au resto, je parlais du syndicat, mais toujours un peu à la blague… Un bon jour, je suis passé à l’action et j’ai amené des cartes à signer », raconte Guillaume Gagné, serveur et étudiant en science politique de 28 ans qui est à l’origine de la nouvelle section montréalaise du Syndicat des employé-es de la restauration–CSN.
Le Point syndical s’est entretenu avec lui dans un petit café situé en face de la pizzéria. Les trois propriétaires, dont un chef très médiatisé, ont refusé que l’on puisse photographier les nouveaux syndiqué-es dans leur milieu de travail.
Guillaume Gagné a eu « la bonne idée » en lisant un article sur une pizzéria de Brooklyn qui s’était syndiquée en 2023. « S’ils sont capables, on l’est aussi, a-t-il alors pensé. Le restaurant new-yorkais a été une inspiration pour moi. Je veux que notre processus de syndicalisation soit une histoire réussie », insiste toutefois Guillaume, en racontant qu’il vient d’une famille ouvrière de Rimouski.
La dizaine d’employé-es ont finalement suivi celui qui est le plus âgé du groupe. « J’étais fier de la gang. En restauration, c’est souvent chacun pour soi, chacun pour son pot, mais les mentalités changent », fait valoir Guillaume.
Déjà, la nouvelle convention des pourboires a été soulevée entre les parties et elle est maintenant beaucoup plus claire. Elle prévoit enfin un pourcentage également pour le personnel de cuisine. Les employé-es ont maintenant accès aux chiffres et peuvent vérifier si tout le pourboire leur revient bel et bien.
La négociation d’une première convention est lancée. Le nouveau syndicat demandera une hausse des salaires, des horaires selon l’ancienneté, mais aussi davantage de respect de la part des patrons. ● Thierry Larivière
Dans Quand tombent les aiguilles de pin, Katsi’tsakwas Ellen Gabriel livre un témoignage percutant et personnel sur l’un des événements les plus marquants de la résistance autochtone récente : la crise d’Oka de 1990. Cet ouvrage puissant retrace les faits survenus lorsque la municipalité d’Oka avait approuvé l’agrandissement d’un terrain de golf sur un territoire sacré des Mohawks, un site ancestral comprenant un cimetière et une forêt historique appelée Les Pins.
Devant cette atteinte à l’intégrité de leur territoire, des membres de la communauté mohawk de Kanesatake avaient décidé de dresser une barricade pour protéger la zone visée. Cet acte de résistance pacifique fut violemment réprimé par les forces policières québécoises, puis par l’armée canadienne. Ce qui avait commencé comme un conflit local se transforma rapidement en un siège de 78 jours, attirant l’attention nationale et internationale. Aujourd’hui connue sous le nom de crise d’Oka, cette confrontation constitue un point tournant dans la lutte pour les droits et la souveraineté des peuples autochtones au Canada.
Quand tombent les aiguilles de pin va bien au-delà des événements de 1990. Ellen Gabriel inscrit la crise d’Oka dans une histoire plus vaste de dépossession coloniale, qui s’amorce avec la prise illégale des terres mohawks par le Séminaire de Saint-Sulpice au XVIIIe siècle. Elle montre comment cette logique coloniale se poursuit aujourd’hui à travers des projets d’oléoducs, des accaparements de terres, et le déplacement forcé de communautés autochtones. Elle affirme ainsi que le colonialisme n’est pas un fait du passé, mais un système toujours d’actualité – fondé sur la déshumanisation des peuples autochtones et l’exploitation de leurs terres.
Ce livre constitue également une critique puissante de la manière dont l’État canadien réagit aux revendications autochtones : par la militarisation, la manipulation médiatique et la criminalisation de la résistance. L’autrice invite les lecteurs à déconstruire les mythes d’un Canada pacifique et bienveillant. Elle révèle la violence profonde qui sous-tend l’histoire et le développement du pays.
L’ouvrage est un appel à la mémoire, à la justice et à l’action. C’est une lecture incontournable pour quiconque souhaite comprendre non seulement ce qui s’est passé à Kanesatake, mais aussi pourquoi la résistance autochtone est toujours d’actualité