Rapport du Commissaire au lobbyisme
Les trois grandes centrales syndicales souhaitent des modifications en profondeur de la Loi actuelle
À l’occasion de la révision quinquennale de la Loi sur la transparence et l’éthique en matière de lobbyisme, les grandes centrales souhaitent une modification en profondeur de la loi actuelle. Le Commissaire au lobbyisme propose d’étendre la portée de la loi à un nombre encore plus grand d’organismes sans but lucratif (OSBL) par souci d’équité, dit-il, pour l’entreprise. Nous nous opposons fermement à cette proposition fondée, selon nous, sur une prémisse erronée soit : l’égalité des acteurs devant l’appareil gouvernemental », de déclarer René Roy, secrétaire général de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ).
Tous les groupes de pression ne sont pas égaux
Selon le commissaire, les entreprises et les groupes de pression populaires seraient sur un pied d’égalité devant le gouvernement. Cette thèse ne résiste pas à l’analyse. Les groupes de pression populaires n’ont pas les moyens financiers de l’entreprise. En outre, ils sont loin de bénéficier de la même écoute auprès du gouvernement. Une entreprise aura toujours de bien meilleures chances d’attirer l’attention des titulaires de charges publiques qu’un groupe écologiste ou une banque alimentaire. Ce n’est généralement que s’ils parviennent à attirer l’opinion publique que les OSBL deviennent des interlocuteurs écoutés. De plus, ils ne reçoivent aucune rétribution en argent sonnant pour leur travail d’influence Ces organismes qui militent pour l’avancement social sont essentiellement financés par des subventions. Il est tout à fait odieux de vouloir s’en prendre au mouvement associatif qui peine, jour après jour, à s’en sortir financièrement.
L’action syndicale est transparente
En 2002, le mouvement syndical s’était trouvé assujetti à la loi in extremis. « Voici donc plus de cinq ans que nous subissons les effets de cette loi tatillonne, bureaucratique, mal conçue et inefficace. Les syndicats, à n’en pas douter, sont des groupes de pression. Ils militent, manifestent, font des pétitions en vue de faire pression sur les décideurs publics. Mais de tels gestes n’ont rien de clandestin. Au contraire, ils se font au grand jour, sur la place publique. Lorsque l’action concerne la rencontre d’un titulaire de charges publiques, elle n’a rien de secrète. En ce sens, l’action syndicale est transparente parce que par définition, elle vise la mobilisation publique », d’affirmer le 1er vice-président de la CSN, Louis Roy.
En comparaison, le lobby d’entreprise s’exerce essentiellement dans le feutré des officines et loin des regards du public. Il commande en conséquence un encadrement serré, mais un tel encadrement est inapproprié pour un groupe dont l’action est basée sur la prise de parole et la pression publique. Une grande confusion règne et a pour effet de mettre dans le même panier trafic d’influence, conflit d’intérêts, corruption et influence des groupes, syndicaux, environnementaux et communautaires.
Une loi qui va à l’encontre de la liberté d’expression
Le syndicalisme s’appuie sur deux valeurs démocratiques et fondamentales : la liberté d’expression et la liberté d’association. Dans une démocratie, les syndicats ont le droit de faire entendre leurs opinions et influencer les pouvoirs politiques. « Le fait de vouloir les assujettir à la loi sous prétexte d’un « droit à l’égalité » avec les entreprises relève d’une méconnaissance totale du rôle des organisations syndicales. Le libre accès aux institutions est d’intérêt public et celui-ci doit être rétabli sans contrainte pour le mouvement syndical », de revendiquer le président de la CSQ, Réjean Parent. Pour les trois grandes centrales syndicales, la loi sur le lobby va beaucoup trop loin et s’immisce dans la liberté d’association et d’expression en assujettissant les dirigeants syndicaux à des règles d’éthique propres aux entreprises à but lucratif.
Un objectif valable, un mauvais moyen
Une loi sur le lobby ne viendra jamais à bout de la corruption et du trafic d’influence. À preuve, la loi fédérale adoptée en 1988 n’a nullement empêché le scandale des commandites. Croire que le public sera informé par le registre des actions malhonnêtes qui se trament dans son dos, est puéril. Le Code criminel est là pour régir ce type de comportements frauduleux.
« La loi sur le lobby est une loi qui poursuit un objectif noble, la transparence, mais par de mauvais moyens. Il est temps de revoir cette loi afin qu’elle donne les résultats auxquels nous sommes en droit de nous attendre », de conclure les porte-parole syndicaux.
Le mémoire des trois centrales syndicales concernant le lobbyisme >>>
Source : CSN – 5 mai 2008
Pour renseignements : Michelle Filteau, CSN : 514 894-1326, Louis Cauchy, FTQ : 514 235-3996, Marjolaine Perreault, CSQ : 514 235-5082