50 ans de luttes conjointes : les syndicats demandent toujours le respect

La négociation du secteur public battant son plein, la CSN a voulu souligner les 50 ans du premier Front commun de 1972 par une courte rétrospective de cette négo au fil des ans. La projection du documentaire s’est close avec une ovation et des chants solidaires qui ont ouvert la troisième journée du rassemblement.

Dans la conjoncture politique du moment, les troupes se mobilisent devant un gouvernement qui « tend vers un appauvrissement des conditions de travail dans le secteur public », soutient François Enault, 1er vice-président de la CSN.

Pour le responsable de la négociation des secteurs public et parapublic, « les travailleuses et les travailleurs, comme en 1972 avec Robert Bourassa, considèrent que le gouvernement Legault a peu de respect pour leur profession. C’est pour ça que le monde se mobilise. » Pour une huitième fois au cours de l’histoire québécoise, les trois grandes centrales syndicales, accompagnées cette fois de l’APTS, ont décidé de se réunir à la table des négociations.

« Le Front commun, c’est super important. On est toutes et tous dans le même bateau, on a besoin du plus de bras possible pour assurer une bonne mobilisation et pour que le message passe », avance Yves Sabourin, vice-président à la vie syndicale, à la mobilisation et à l’information du Syndicat des travailleuses et des travailleurs de la santé et des services sociaux de l’Outaouais–CSN.

En 1972, la revendication principale était de 100 $ minimum par semaine. « En 2023, la moyenne de la demande salariale du Front commun équivaut, pour la première année, à 100 $ de plus par semaine. Le gouvernement dit que ça n’a pas de bon sens, mais en même temps, les député-es vont se voter dans quelques jours une augmentation de 30 %, ce qui équivaut à 582 $ par semaine. C’est rire de nous autres », affirme François Enault. Pour la majorité des élu-es, l’indemnité annuelle de base passerait à 131 766 $, à laquelle s’ajoutent des primes dans la plupart des cas.

Une privatisation accélérée

La sauvegarde des services publics est le nerf de la guerre dans la bataille de l’heure, pour les militantes et les militants du secteur. Avec le dépôt du projet de loi 15 et l’objectif d’implanter la mégastructure que sera l’agence Santé Québec, le mouvement vers la privatisation se fera en accéléré et ce sont les contribuables qui « risquent d’en payer la facture ». Pour le premier vice-président de la CSN, « la vraie bataille est celle du maintien des services publics forts au Québec. Il faut s’adresser à l’ensemble du monde, pour que le message soit bien compris par toute la population. Ce n’est pas vrai qu’on va laisser le gouvernement nous pousser vers une privatisation de plus en plus grande », ajoute-t-il dans son discours d’aujourd’hui.

Annoncer des reculs acquis au terme de longues batailles a habituellement un effet mobilisateur. Dans son dépôt de décembre dernier, la CAQ proposait des reculs dans les

régimes de retraite. Pour le Comité de coordination des secteurs public et parapublic (CCSPP), le gouvernement utilise comme prétexte les départs hâtifs à la retraite provoqués par la récente bonification du Régime des rentes du Québec (RRQ). Il cherche ainsi à réduire la rente et à reprendre d’une main ce qu’il a donné de l’autre, alors que le régime est en pleine santé. « Un des avantages que les travailleuses et les travailleurs du secteur public ont, c’est bien le régime public de retraite. Ça mobilise notre monde que le gouvernement touche à ça », estime François Enault.

Ensemble, la CSN, la FTQ, la CSQ et l’APTS représentent plus de 420 000 travailleuses et travailleurs de l’État québécois dans les secteurs publics, en éducation, en santé et dans les services sociaux ainsi qu’en enseignement supérieur. Cinquante ans après le premier Front commun, les centrales unissent une fois de plus leurs forces pour la ronde de 2023.

Les technologies doivent servir les travailleuses et les travailleurs

Les progrès technologiques touchent particulièrement certains emplois de l’industrie de la construction. Par exemple, il y a une vingtaine d’années, les arpenteuses et les arpenteurs travaillaient toujours en équipe de deux sur les chantiers. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Avec l’informatisation des équipements, l’utilisation de robots, de drones et des technologies de localisation comme le GPS, ils travaillent maintenant seuls. Et ce n’est pas sans conséquence.

Le vice-président de la CSN–Construction, Jean-Louis Simard, est bien placé pour en parler : il ne cumule pas moins de 60 000 heures sur les chantiers québécois. « Les arpenteurs doivent maintenant transporter seuls tout leur matériel, souligne-t-il. Il n’y a plus de transfert de connaissances entre les plus anciens et les nouveaux. C’est une source de stress importante pour les plus jeunes, puisqu’on sait qu’une seule erreur, en arpentage, peut coûter très cher. C’est aussi un risque accru d’accident, car toute ton attention est portée sur la machine et forcément moins sur l’environnement autour. »

Pour la CSN–Construction, qui place la santé-sécurité au sommet de ses priorités, c’est un enjeu bien réel. « Les employeurs sont prêts à investir dans les nouvelles technologies, mais malheureusement, pas mal moins dans la santé et la sécurité », déplore-t-il.

Pourtant, la technologie peut aussi servir à assurer la sécurité de toutes et de tous sur les chantiers. Il mentionne, par exemple, un système utilisé sur celui de l’échangeur Turcot : tous les salarié-es portent un capteur spécial dans leur casque, lequel est relié aux véhicules lourds. Ainsi, si un risque de collision est détecté, le véhicule tombe automatiquement au neutre. Une belle innovation, trop peu répandue.

Jean-Louis Simard croit qu’on verra de plus en plus d’automatisation complète de certaines tâches, et pas seulement dans l’arpentage. Pensons au travail de forage du tunnel du REM, sous le Mont-Royal, effectué par une machine téléguidée à partir d’un bureau. Le vice-président de la CSN–Construction se garde bien de rejeter ces nouvelles technologies. Il souligne que celles-ci peuvent faciliter certaines tâches et diminuer le risque d’erreur de calcul.

GPS
Lorsqu’on parle de nouvelles technologies dans la construction, on ne peut faire fi de l’introduction d’un nouveau système de compilation des heures qui a été au cœur d’un conflit de travail ces dernières années. Les syndicats s’opposaient à l’obligation pour les travailleuses et les travailleurs d’installer une application de pointage sur leur téléphone personnel. Les syndicats, dont la CSN–Construction, n’ont pas pu en empêcher le déploiement. Toutefois, ils ont forcé la mise en place de plusieurs balises afin de protéger la vie privée des salarié-es, dont l’obligation pour l’employeur d’obtenir le consentement écrit de la personne salariée.

Réforme annoncée
Les prochains mois ne seront pas de tout repos à la CSN–Construction. En effet, le gouvernement a annoncé son intention d’augmenter la « versatilité » sur les chantiers. À ses yeux, cela implique de revoir l’organisation de l’industrie, notamment en ce qui a trait à la distribution des tâches entre les différents métiers. Le gouvernement demande à la Commission de la construction du Québec (CCQ) de trouver un terrain d’entente entre les syndicats et les employeurs.

De tels changements doivent d’abord être débattus au Comité sur la formation professionnelle dans l’industrie de la construction, un lieu paritaire. Car plusieurs questions sont en jeu, notamment celle de la formation pour les futurs salarié-es comme pour celles et ceux qui sont déjà dans l’industrie. De plus, il faudra s’assurer que ces changements n’auront pas comme effet de diminuer la rémunération pour certains d’entre eux, puisque les taux de salaire ne sont pas les mêmes dans tous les métiers… Des discussions sont en cours, mais personne ne peut prédire actuellement si un consensus pourra émerger.

Si le gouvernement et les patrons ont tendance à dénoncer « l’immobilisme syndical », il faut rappeler que les syndicats ont déjà accepté, dans le passé, de procéder à certains changements, par exemple en permettant aux apprenti-es dans certains métiers de procéder au ramassage de débris, ce qui était auparavant réservé aux manœuvres de l’industrie. Rappelons également que les syndicats ont déjà accepté de réunir les métiers d’opérateurs de machinerie lourde et de pelle mécanique. Si ce changement n’est pas mis en œuvre actuellement, cela s’explique surtout par la vétusté du système informatique de la CCQ, datant de 1972…

Pareils, mais différents

« Nos organisations mènent des luttes similaires, dont celle contre ce que nous appelons la digitalisation du travail, une dévalorisation qui se manifeste par l’absence ou le manque de créativité, les tâches répétitives, bref, par une perte de sens au travail. Cette perte de sens est accentuée par l’inégalité des statuts d’emploi qui implique forcément une inégalité des salaires versés. Alors que le secteur public tirait les conditions de travail vers le haut avec des emplois dits statutaires (permanents), nous constatons que le privé ne fait pas mieux et que même dans le public, les conditions sont tirées vers le bas avec la création de postes plus précaires.

« Les travailleuses et travailleurs sans-papiers vivent aussi de la discrimination similaire à celle contre laquelle vous luttez ici. Plus précaires, ils acceptent souvent des postes mal payés que d’autres refusent, des emplois peu valorisants. Nous militons donc pour qu’il y ait une régularisation de leur statut, ce qui amènerait automatiquement un rehaussement important de leurs conditions de travail afin de tirer ces salarié-es vers le haut et de contrer la dévalorisation du travail.

Et différents

« Notre organisation regroupe 1,5 million de membres, y compris les sans-emploi affiliés que nous représentons et à qui notre organisation verse les indemnités de chômage que nous recevons de l’État. Plus besoin de déclarer ses semaines au gouvernement, le versement se fait plus rapidement, plus facilement et nous soutenons leurs efforts pour retrouver un emploi, pour refaire leur CV, etc. Les sans-emploi sont membres à part entière et participent à tous nos congrès.

Contrer l’ubérisation et la précarisation du travail

« Nous travaillons aussi à la syndicalisation des travailleuses et des travailleurs de plateforme, de celles et de ceux, par exemple, qui livrent des repas via des applications, les faux indépendants qui ont le même employeur, afin d’élever leurs conditions de travail. On veut assurer leur santé et leur sécurité au travail tout en leur donnant accès aux protections sociales. Nous avons récemment vu, au Brésil, des applications pour obtenir les services d’un avocat payé à l’acte et donc précarisé, et nous devons organiser ces nouvelles formes d’accès au travail afin de leur garantir de bonnes conditions d’exercice.

« Nous travaillons également sur la mise en place de lois qui imposeraient un devoir de vigilance. Cela impliquerait que les maisons-mères des multinationales soient responsables et redevables pour toute la chaîne de production, du producteur de cacao en passant par celui qui le transforme pour le consommateur. Nous avons d’ailleurs tissé des liens avec la CSN lors de la courte grève des salarié-es de Barry Callebaut, en septembre 2019. Puisque nous avons la transparence financière en Belgique, nous avons divulgué les renseignements financiers nécessaires à la négociation des salarié-es de Saint-Hyacinthe.

« Finalement, comme vous, nous vivons une montée de l’extrême droite et nous sommes très vigilants à cet égard. Les élections européennes arrivent chez nous en 2024, à tous les niveaux de pouvoir du pays, et cela coïncide aussi avec les élections syndicales qui ont lieu tous les quatre ans. Nous avons des règles concrètes afin d’éjecter tout délégué-e affichant de telles postures politiques. Il n’est pas question pour nous de laisser l’extrême droite prendre place dans des organisations qui luttent pour la solidarité, l’entraide et la justice sociale. »

La CSN en bonne santé financière grâce à une forte croissance du nombre de membres

Fidèle à la longue tradition de transparence et de reddition de comptes propre à la CSN, le trésorier de la confédération, Yvan Duceppe, a présenté aujourd’hui aux délégué-es du congrès les états financiers de l’exercice se terminant le 28 février 2023, en plus des prévisions budgétaires 2023-2026.

Les quelque 2 000 congressistes présents ont ainsi pu constater que la CSN demeure en bonne santé financière avec des excédents enregistrés dans chacun des trois fonds sur lesquels repose la structure financière de l’organisation, à savoir le Budget de fonctionnement, le Fonds de défense professionnelle (FDP) ainsi que le Fonds de soutien extraordinaire (FSE).

Croissance du nombre de membres
Ces excédents, notamment celui du Budget de fonctionnement qui s’élève à près de 27,7 M$, s’expliquent entre autres par une forte croissance du nombre de membres CSN qui a porté les revenus de per capita à un niveau jamais atteint auparavant. « Au cours du dernier exercice financier, il y a eu en moyenne près de 28 000 membres cotisants de plus que ce qui avait été budgété lors du dernier congrès, portant ainsi les revenus de cotisations à plus de 281,6 M$ », se réjouit Yvan Duceppe.

« Cette croissance importante du nombre de membres cotisants témoigne de toute l’attractivité du mouvement CSN. Il va sans dire que cela constitue aussi une bonne nouvelle pour la santé financière de notre organisation », poursuit le trésorier.

Plusieurs nouvelles ressources
Cette situation, jumelée à l’atteinte d’économies substantielles découlant de la pandémie, a donc permis à la CSN de bonifier les services aux syndicats et de déployer un programme de mentorat. Celui-ci vise à accompagner et à outiller les conseillères et les conseillers du mouvement pour assurer la continuité des services et mieux répondre aux besoins des syndicats.

« Nous croyons que l’ajout de ces ressources représente une marque de foi envers l’avenir de notre mouvement, puisque le déploiement de celles-ci va nous permettre d’aborder les nombreux défis qui nous attendent avec encore plus de confiance », ajoute Yvan Duceppe.

FDP : l’outil de solidarité par excellence
Du côté du Fonds de FDP, le nombre moyen de prestations hebdomadaires de grève et de lock-out a plus que quintuplé par rapport au dernier mandat, passant de 93 en 2017-2020 à 538 en 2020-2023. Voilà qui représente un montant total versé de plus de 25,6 M$ aux membres affectés par ces conflits depuis la bonification du niveau des prestations qui avait été adoptée lors du dernier congrès.

Malgré cette somme importante, les revenus du FDP demeurent plus élevés que les dépenses, ce qui en confirme la bonne santé financière. « Plus que jamais, le FDP est en mesure de soutenir les luttes de celles et de ceux qui veulent améliorer leurs conditions de travail ou simplement se faire respecter. C’est dans un tel contexte qu’un outil de solidarité aussi puissant que le FDP prend tout son sens », conclut Yvan Duceppe.

Tout au long de la séance plénière, les délégué-es ont pu débattre des différentes propositions portant sur les finances. Les débats se poursuivront jeudi, jour où les congressistes seront appelés à adopter la proposition budgétaire 2023-2026 qui permettra à la CSN de soutenir les activités de ses organisations affiliées et, au premier chef, celles de ses membres.

Des milieux de travail alliés contre la violence conjugale

Un dîner-causerie accueillait ce midi les délégué-es interpellés par la question de la violence conjugale en milieu de travail. Si on se fie à la participation à cette activité qui affichait complet, la mobilisation des syndicats dans la lutte contre la violence semble essentielle.

Nathalie Arguin, secrétaire générale de la CSN et responsable du dossier de la condition féminine, ouvrait la rencontre. L’objectif était « d’aborder un sujet important et délicat, celui de la violence conjugale. Même si on en parle un peu plus, selon Statistique Canada, seulement 30 % des victimes portent plainte… c’est donc un fléau et il y a plusieurs enjeux sur lesquels s’attarder aujourd’hui ». La secrétaire générale invitait chaleureusement les personnes présentes à participer à la période d’échange qui s’est tenue après la conférence.

Cette activité, qui s’est déroulée au Holiday Inn Montréal centre-ville en marge du congrès, est portée par Emmanuelle Proulx, responsable du comité confédéral de la condition féminine de la CSN. « Le but de la rencontre est d’initier les gens à la réalité de la violence conjugale en contexte de travail. Il faut que les gens réalisent que la violence conjugale, ça se poursuit au travail, pas nécessairement en matière d’actes, mais que la victime vit ça, même quand elle est sur les lieux de travail. Notre objectif est vraiment qu’il y ait une prise en charge syndicale de cette réalité », explique la conseillère syndicale.

Pour l’occasion, les organisatrices de l’événement ont invité Arina Grigorescu, chargée de projet des milieux de travail alliés contre la violence conjugale au Regroupement des maisons pour femmes victimes de violence conjugale, à présenter une conférence de sensibilisation en la matière. Ce regroupement est un vaste réseau engagé depuis 1979 pour le droit à l’intégrité physique et psychologique des femmes. « Notre travail, c’est de représenter les droits des femmes et des enfants victimes de violence conjugale. Au regroupement, on va porter leur voix et sensibiliser les gouvernements et les autres intervenants sociaux, » annonce Arina Grigorescu.

Le programme Milieux de travail alliés contre la violence conjugale a été mis sur pied en 2021. Il propose aux employeurs et aux syndicats québécois une série d’actions de sensibilisation et de mesures visant à rendre les milieux de travail plus sécuritaires et aidants pour les victimes de violence conjugale. Les syndicats doivent désormais se positionner comme des alliés en favorisant la prévention des impacts de la violence conjugale au travail.

Le secteur du papier commence sa transition

La baisse de consommation de papier de toutes sortes est constante depuis longtemps. Même si cette réalité est connue depuis des années, la transition commence à peine à se montrer le bout du nez.

« On développe la nanocellulose, notre employeur a décidé d’aller là », indique Gilles Vaillancourt, président du Syndicat national des travailleuses et travailleurs de Kénogami–CSN. Un projet pilote est en place depuis un mois et demi et la production annuelle prévue est de 125 tonnes en 2023. Cette nouvelle fibre peut servir à plein d’endroits, pour solidifier le béton, faire des pare-chocs ou encore des pellicules transparentes qui remplacent celles qui sont faites en plastique de pétrole. « Il n’y a pas encore de clients, mais plusieurs acheteurs potentiels font des tests en ce moment », précise Gilles Vaillancourt.

La fin du plastique à usage unique a été annoncée par le gouvernement Trudeau, mais l’entrée en vigueur se fait de façon très progressive. Une accélération de cette réglementation aiderait grandement la transition du secteur du papier.

« Le marché mondial du papier baisse de 10 % à 14 % par an mondialement. On se tire d’affaire, notamment avec les magazines qui passent maintenant du papier couché au papier calandré, un papier moins dispendieux que nous produisons », ajoute Gilles Vaillancourt, lequel estime que son usine n’est pas en mauvaise posture étant donné les récents investissements de 38 M$ à l’usine Résolu de Kénogami sur le papier calandré et la nanocellulose.

Manque d’investissement à Alma
La situation est moins reluisante à l’usine de Résolu d’Alma. « La machine numéro 9 est en arrêt à cause du supposé manque de commandes », lance Jean-Pierre Rivard, président du Syndicat national des travailleuses et travailleurs des pâtes et papiers d’Alma–CSN, qui craint la perte d’une machine si aucun investissement ne survient dans les années à venir.

L’usine d’Alma produit du papier pour les imprimantes ou les livres de poche ainsi que du papier journal. Il y a eu des essais de production de papier d’emballage pour le secteur alimentaire, mais les commandes ne suivent pas. « Ils disent que le marché va là, mais ils ne prennent pas le risque », analyse Jean-Pierre Rivard. Selon lui, l’usine est victime de son succès, puisque le patron affirme constamment que la production de papier va bien et que l’usine est payante. Le président ajoute que le prix du papier a tout de même augmenté de 300 $ la tonne en un an. Les derniers investissements datent cependant de 2004 à Alma.

Incertitude avec Paper Excellence
Le gros point d’interrogation pour les travailleuses et les travailleurs de Résolu est la direction que prendra l’entreprise depuis son achat par la multinationale indonésienne Paper Excellence. Tous les syndiqué-es se demandent s’il y aura des investissements et une transition claire dans les usines qui appartenaient à Résolu ou si la philosophie de pressage de citron de l’ancien propriétaire va perdurer. Des rumeurs veulent que l’usine de Gatineau passe à la production de carton ondulé, mais rien n’est encore certain, compte tenu des nouveaux patrons qui n’ont pas encore rencontré les employé-es.

Entente de principe acceptée à Bibliothèque et Archives nationales du Québec

L’entente de principe intervenue entre le Syndicat des travailleuses et travailleurs unis de Bibliothèque et Archives nationales du Québec–CSN et l’employeur a été acceptée à 77 % en assemblée générale ce lundi soir 15 mai.

« Sur une entente de six ans, nous avons obtenu 2 % d’augmentation pour 2020, 2021 et 2022 et une clause de parité liée à la négociation du secteur public avec une garantie d’un minimum de 1 % pour 2023, 2024 et 2025. Nous avons également obtenu une majoration salariale pour les plus bas salarié-es et nous toucherons divers montants forfaitaires pour les années 2020 et 2021. Nous avons triplé la contribution de l’employeur à nos assurances collectives, nous avons bonifié diverses primes et nous avons notre propre structure salariale qui diffère de celle du secteur public. Seul bémol, nous n’avons pas reçu de sommes compensatoires à la hauteur de ce que l’exercice du maintien de l’équité salariale nous aurait permis d’obtenir. Malgré tout, dans le contexte actuel, nous sommes satisfaits des gains obtenus. Il va sans dire que dans le cadre de notre prochaine négociation, nous allons revenir à la charge afin d’obtenir de meilleures conditions pour toutes et tous », déclare Sylviane Cossette, présidente du syndicat.

« Nous saluons la mobilisation des membres du syndicat qui leur a permis d’aller chercher des gains satisfaisants pour la majorité d’entre eux. Rappelons que les salarié-es de BAnQ partaient de loin : ils touchaient les salaires parmi les plus bas dans le domaine des bibliothèques et archives du Québec. Rappelons également que les budgets de BAnQ ne sont pas indexés et que l’établissement assume un déficit constant qui augmente chaque année, ce qui affecte directement ses opérations. Tant que le gouvernement ne corrigera pas ce sous-financement chronique, il sera difficile d’obtenir de meilleures conditions de travail pour celles et ceux qui protègent pourtant notre culture collective », ajoute Stéphanie Gratton, présidente par intérim de la Fédération des employées et employés de services publics–CSN.

À propos

Le Syndicat des travailleuses et travailleurs unis de BAnQ–CSN rassemble 350 salarié-es œuvrant dans 13 établissements de BAnQ.

 

 

Crise de l’information : un avenir en demi-teinte

La transition vers une information hybride, parfois papier, parfois entièrement numérique, ne s’est pas faite sans heurts pour les médias québécois. Comme partout dans le monde, la recherche d’un modèle de revenus qui assurerait la pérennité de l’information s’est faite au rythme des mises à pied et des fermetures des salles de presse.

C’est une génération entière de nouveaux journalistes qui ont été préparés à la précarité professionnelle dès les bancs d’école. Or, la situation économique de certains médias semble enfin se stabiliser. La pandémie a eu des retombées positives dans les salles de presse et a amené un afflux de lectrices et de lecteurs, de même que de nouveaux revenus publicitaires, notamment des différents paliers gouvernementaux.

« Je suis très optimiste en ce qui concerne le futur du Devoir, j’ai l’impression que la volonté gouvernementale est là. Les gens comprennent l’importance de la liberté de la presse », explique Andréanne Bédard, présidente du syndicat de la rédaction du Devoir.

Même son de cloche du côté de La Presse, qui a amorcé quant à elle l’année 2023 avec des bénéfices évalués à 11 millions de dollars.

Le chemin a toutefois été long pour que le gouvernement agisse concrètement afin d’assurer la viabilité et l’indépendance des médias d’information, et c’est notamment la pression mise par la Fédération nationale de la culture et des communications–CSN qui a permis d’obtenir la mise en place d’un crédit d’impôt remboursable de 35 % pour la masse salariale des salles de nouvelles.

Sur le plan canadien, les travailleuses et les travailleurs du domaine de l’information devraient bientôt pouvoir compter sur l’adoption de la loi C-18 qui forcerait les Google et Facebook de ce monde à négocier des ententes d’indemnisation équitables avec les médias pour le partage de leurs contenus journalistiques, un autre gain de la FNCC–CSN.

Une réalité en demi-teinte

La situation semble plus difficile du côté de la nouvelle Coopérative nationale de l’information indépendante (CN2i) qui rassemble une série de quotidiens régionaux (Le Soleil, Le Droit, Le Quotidien, La Voix de l’Est, La Tribune et Le Nouvelliste). Alors qu’ils avaient réussi à conserver l’édition papier de leurs journaux jusqu’à maintenant, ils se voient finalement forcés de transitionner totalement vers le numérique. Sur le banc des accusés, le coût toujours plus élevé de la production et de la distribution du papier. Cette transition s’accompagne de compressions d’une centaine d’emplois, soit près du tiers des effectifs de la coopérative.

À Montréal, la situation est précaire pour l’information locale, alors que la trentaine d’artisanes et d’artisans derrière le journal Métro et de ses hebdos de quartier pourraient bientôt perdre leur emploi. Métro Média attend toujours l’aide promise par l’administration Plante pour faire face à l’arrêt de la distribution des Publisac et à la perte draconienne de revenus publicitaires.

« Une vraie inquiétude règne au sein de la rédaction depuis quelque temps. On a tous conscience qu’il y a une crise dans l’industrie depuis plusieurs années, on sent que notre domaine d’emploi est précarisé », explique Zoé Magalhaes, présidente du syndicat montréalais de l’information qui représente les employé-es du Métro.

Ainsi, si la situation semble bonne dans certains grands médias, la santé financière est loin d’être au rendez-vous pour toutes et tous. Récemment, Québecor annonçait la suppression de 240 postes, dont 140 directement à TVA. De ces coupes, la majorité ne semble pas affecter les postes de journalistes, mais Pierre Karl Péladeau envisage de nouvelles compressions.

Du côté de Radio-Canada, c’est le spectre de Pierre Poilievre et du Parti conservateur qui angoisse. Ce dernier a récemment réitéré sa proposition de privatiser CBC/Radio-Canada s’il est porté au pouvoir lors des prochaines élections.

Les médias sont donc loin d’être sortis du bois et si certains font preuve d’optimisme, la majorité d’entre eux continuent de faire face aux défis que suppose la transformation en profondeur de leur modèle économique. La fin du modèle papier continue de s’imposer, mais bien futé celui ou celle qui prédira jusqu’où ira ce changement.

Transformation du monde du travail et beaucoup d’émotions

C’est au palais des congrès de Montréal que s’ouvrait ce matin le 67e Congrès de la CSN, où près de 2 000 participantes et participants se sont déplacés. Ce rassemblement permet aux centaines de syndicats présents de se prononcer démocratiquement sur les grands thèmes qui orienteront les actions de la centrale syndicale au cours des trois prochaines années.

Dans son allocution d’ouverture, la présidente de la centrale, Caroline Senneville, a souligné à grands traits les bouleversements profonds qui frappent le monde du travail. « La pandémie a laissé des traces. Nous nous sommes démenés pour que les services soient maintenus, pour que les industries roulent, pour que les biens soient transportés, les personnes logées, les bâtiments construits. Maintenant, nous devons nous adapter au télétravail, à la robotisation, à la numérisation, à l’intelligence artificielle, à la transition verte, aux impacts de la pénurie de main-d’œuvre et à l’inflation, notamment. »

La transformation des emplois – tout comme leur protection – est effectivement l’une des deux grandes orientations qui seront mises au jeu cette semaine. « À la CSN, on souhaite trois choses : tout d’abord, que nos syndicats soient alertés, qu’ils interpellent leur employeur sur ces enjeux et qu’ils soient mis au jeu pour orienter les transformations en cours dans leur milieu. Ensuite, comme centrale, c’est notre rôle d’outiller nos membres. Enfin, nous devons transmettre un message clair aux gouvernements pour qu’ils soutiennent ces transformations : si vous parlez aux patrons, vous devez parler aux syndicats. Toujours. »

Un nombre de conflits et un budget de soutien records

L’ouverture du congrès a également été l’occasion de souligner le nombre record de luttes qui se sont tenues au cours du dernier exercice. Ce sont d’ailleurs plus de 26 millions de dollars qui ont été remis aux grévistes CSN entre 2020 et 2023 en prestations de grève. Du jamais vu. « La CSN est la seule centrale syndicale qui s’est dotée de ce type de fond de grève, afin que nos membres gardent la tête haute… et hors de l’eau. La preuve que nous soutenons concrètement notre monde dans leur lutte pour obtenir des conditions de travail intéressantes ».

Des moments touchants

En conclusion de cette première journée, les ex-politiciennes Françoise David et Véronique Hivon sont venues parler aux participantes et aux participants de leur engagement militant et de la façon dont elles ont su rallier autour d’elles les personnes et les moyens nécessaires pour mener à bien les projets qui leur tenaient à cœur.

Le dernier acte du lundi fut sans doute le moment le plus émouvant et le plus attendu par les congressistes : la projection d’une vidéo retraçant l’ensemble des conflits du dernier mandat. Portées par la voix de la comédienne et dramaturge Évelyne de la Chenelière, les images de travailleuses et de travailleurs en conflit ont su tirer des larmes à de nombreuses personnes sur place.

Les congressistes seront en atelier demain avant-midi sur la question de la transformation des emplois. Les médias sont cordialement invités à y participer. Le congrès de la CSN se poursuit jusqu’au vendredi 19 mai.

Pouvoir combattre le cynisme et le désintérêt, maintenant

C’est un vibrant plaidoyer en faveur de l’engagement, du militantisme et de la solidarité qu’ont livré Françoise David et Véronique Hivon, cet après-midi, en ouverture du 67e Congrès de la CSN. Invitées à prendre la parole devant les 2000 congressistes, les deux ex-députées, respectivement de Québec solidaire et du Parti québécois, ont livré leur propre interprétation du thème du congrès, Pouvoir maintenant.

Rappelant qu’elle a elle-même été syndicaliste de 1977 à 1984, Françoise David a confié à l’assistance que c’est au cours de ces années à la CSN qu’elle a appris « comment on construit des stratégies, comment on mobilise les collègues, comment on gagne…  ou savoir quel chemin prendre quand on perd. » Car les victoires ne sont pas toujours immédiates, a-t-elle rappelé en citant les enseignements de Madeleine Parent. « Parfois, ça prend plus de dix ans, comme l’équité salariale », a ajouté Mme David.

L’ex-co-porte-parole de Québec solidaire a appelé les membres de la CSN « à travailler ensemble, pour le bien commun. Il faut prendre conscience qu’on a besoin les uns des autres » pour faire avancer notre société sur une base progressiste. « Le choix que nous faisons aujourd’hui, pour le bien commun, ce fut le choix de millions de personnes à travers les siècles pour changer leur vie, une révolution à la fois. Je nous fais confiance. Je sais que nous en sommes capables ».

Des propos qui ont trouvé beaucoup d’écho chez Véronique Hivon. « Il faut croire en ses capacités, sans attendre les conditions parfaites. On peut faire bouger les choses avec notre force militante ».

L’ancienne ministre et députée du Parti Québécois a rappelé aux congressistes la nécessité de construire un pouvoir ancré dans la base : un changement ancré dans la base, dans la réalité des citoyennes et des citoyens. Elle a souligné à plusieurs reprises que tout changement progressiste prend racine dans le militantisme. « Pour que les réformes aient du sens, elles doivent partir du monde. S’ancrer dans leur vie, dans leur vision. »

Une responsabilité que Véronique Hivon souhaite partager avec les militantes et les militants de la CSN présents au palais des congrès aujourd’hui. « Notre ennemi commun, c’est le cynisme, le désintérêt, la désaffection », a-t-elle conclu.

Appel à une solidarité renforcée

Comme le veut la tradition, les autres centrales syndicales ont été invitées au 67e Congrès de la CSN. La dirigeante de la FTQ ainsi que les deux dirigeants de la CSQ et de la CSD se sont adressés aux délégué-es de la confédération, en cette première journée d’événement. En pleine négociation du secteur public, les allié-es de la CSN dans le Front commun ont salué cette collaboration et lancé un appel à une solidarité encore plus tissée serrée.

D’entrée de jeu, Magali Picard, présidente de la FTQ, a souligné la belle complicité qui s’est établie au sein du Front commun. « C’est là qu’on voit que les valeurs syndicales vont bien au-delà du nom qu’on porte. Sachez que le Front commun est bien enraciné. On est une équipe de feu ! On a une belle lutte devant nous », a poursuivi Mme Picard. La présidente de la FTQ a rappelé l’adoption, lors du congrès de son organisation, d’une résolution demandant la tenue d’États généraux sur le syndicalisme. « On va avoir besoin de se tenir les coudes serrés. Vos valeurs sont les nôtres. La journée qu’on va toutes et tous vraiment travailler ensemble, ça va être un nouveau Québec et il n’y a rien qui va pouvoir nous arrêter », a-t-elle conclu.

« Malgré la pluralité syndicale, on est capables de travailler ensemble, de pousser dans le même sens. C’est notre force au Québec », a poursuivi Éric Gingras, président de la CSQ. Bien que la CSN et la CSQ soient différentes à bien des égards, dans la forme et sur le fond, M. Gingras a invité les congressistes de la CSN à « mettre le focus sur les choses qui nous rassemblent ». Il a également proposé de « reprendre notre position d’acteur social crédible dans l’espace public. Partout, on se fait dire qu’on est trop forts, qu’on n’a plus notre place », a-t-il rappelé en soulignant que les différentes centrales auront probablement un prochain rendez-vous lors d’États généraux sur le syndicalisme.

« Les luttes qu’on fait au Québec, ce n’est pas juste pour nos membres, mais pour la société tout entière », a enchaîné Luc Vachon, président de la CSD. M. Vachon a voulu saluer l’importance de l’implication des militantes et des militants pour des centaines de milliers de travailleuses et de travailleurs. « Être militante et militant, ce n’est pas toujours choisir la voie simple, la facilité. On fait souvent face à l’adversité, mais vous continuez, parce que vous êtes convaincus que c’est ensemble que notre voix porte plus loin. Vous donnez une voix à celles et à ceux qui n’en ont pas ou qui n’osent pas parler », a terminé le dirigeant.

En route pour un autre cent ans !

L’un des moments importants de tous les congrès est la présentation du rapport du comité exécutif. C’est l’occasion de revenir sur les événements marquants du dernier mandat du comité exécutif, élu en 2021, et sur les défis qui attendent la CSN au cours des prochaines années. C’est ainsi que s’est ouvert hier le 67e Congrès de la CSN, alors que la présidente de la CSN, Caroline Senneville, dressait le décor entourant les discussions qui se tiendront toute la semaine et qui visent à nous donner collectivement des objectifs et des orientations pour les trois prochaines années.

Des bouleversements profonds
Ces dernières années, on a assisté à des bouleversements importants qui interpellent encore les syndicats. Bien entendu, on ne peut passer sous silence la pandémie qui a révélé de nombreuses lacunes dans nos services publics. En santé, nous avons eu du mal à faire face à la pandémie, notamment à cause d’une gestion déshumanisante que nous dénoncions depuis longtemps : manque de personnel, horaires atroces, conditions de travail et salariales laissant à désirer, manque de valorisation et de reconnaissance… C’est dans ces conditions déjà difficiles que la pandémie s’invitait.

En éducation et en enseignement supérieur, la pandémie a forcé le recours désorganisé, voire improvisé, à l’enseignement à distance, entraînant de la détresse tant chez les enseignants que chez les apprenants. Dans ce milieu scolaire déjà en manque criant de ressources, on a assisté à un accroissement des épisodes de violence.

Dans le secteur privé également, la pandémie a frappé fort. Elle a mis en lumière à quel point le travail des salarié-es du commerce de détail, du secteur de l’alimentation ou de la rénovation est essentiel dans notre société. Pourtant, nous le savons, les conditions de travail y sont difficiles. De plus, dans certains milieux comme les commerces à fort achalandage ou les usines de transformation de viande, on a assisté à des taux de contamination très élevés au virus de la COVID-19.

Comme syndicats et comme travailleuses et travailleurs, nous nous sommes démenés pour que les services soient maintenus, pour que les industries roulent, pour que les biens soient transportés, les personnes logées, les bâtiments construits…

La pandémie a eu des répercussions sur notre organisation elle-même. Il a fallu repenser la mobilisation en contexte de crise tout en recréant des liens pour nous donner les moyens de partager nos réalités et nous redonner des objectifs concrets.

« Certes, des emplois manufacturiers se perdent, mais des usines ont continué de croître. Dans l’adversité, plusieurs ont su explorer le potentiel de reconversion des entreprises, rajeunir les procédés et les équipements, voire parfois réorienter les activités de production. La CSN croit en cet élan et nos gouvernements doivent y croire aussi. »

Par ailleurs, la pandémie nous a rappelé cruellement notre dépendance à l’égard de l’importation dans des secteurs stratégiques, pensons à l’approvisionnement déficient en équipements de protection individuelle pour le personnel au front dans la santé et les services sociaux.

Ces dernières années, les transformations se sont également accélérées dans le secteur culturel. On a déploré de nouvelles coupes de postes dans les salles de presse au moment où tous les médias voient leurs sources de revenus publicitaires se tarir au profit de géants du Web qui utilisent notamment, en toute impunité, le contenu de nos médias québécois sur leur plate-forme. Dans le milieu des arts et des spectacles, la pandémie a aussi laissé des traces. Heureusement, on assiste actuellement à une certaine reprise dans le milieu et la réforme des lois sur le statut de l’artiste devrait permettre de combattre la précarité.

Montée de la droite
Ces deux dernières années, les événements dramatiques se sont multipliés sur la planète. Guerres, catastrophes, crises économiques, reculs des droits des femmes dans certains pays… Cette instabilité mondiale est d’autant plus préoccupante qu’on assiste également à la progression partout dans le monde de mouvements populistes de droite et d’extrême droite.

Cette montée de la droite n’épargne pas le Canada ni le Québec. À Ottawa, l’arrivée de Pierre Poilièvre à titre de chef de l’opposition du parti conservateur est préoccupante, alors qu’il met en avant des idées complètement opposées à celles que nous défendons, par exemple l’abolition de la taxe carbone, la fermeture de CBC, le pendant anglophone de Radio-Canada et ses énoncés flous sur le droit à l’avortement et sur ceux de la communauté LGBT+. Quant au parti libéral, force est de constater qu’une certaine usure du pouvoir pourrait mettre en péril le projet de régime public d’assurance médicaments ainsi que la réforme du régime d’assurance-emploi, une revendication phare de la CSN depuis des années. En début de mandat, le comité exécutif de la CSN a pu saluer l’entrée en vigueur de la Loi sur l’équité salariale au fédéral. Enfin, une loi anti-briseurs de grève, semblable à celle qu’on connait au Québec depuis 45 ans, entrera prochainement en vigueur pour les salarié-es qui travaillent dans des organisations de compétence fédérale.

Inflation et main-d’œuvre
En pleine pénurie, plutôt que de décider d’accueillir les personnes migrantes et leur famille pour qu’elles puissent pleinement contribuer à la société québécoise, on fait venir du cheap labor. Si ces personnes sont suffisamment intéressantes pour venir travailler chez nous, elles le sont également pour venir y vivre : elles ont le droit de vivre au Québec dignement, comme elles l’entendent.

Au Québec, des taux d’inflation à 7 %, c’est du jamais vu depuis des décennies. Les écarts de richesse se creusent encore davantage. Pendant que les multinationales de l’alimentation en profitent pour augmenter leurs marges de profits, on voit plus que jamais des travailleuses et des travailleurs à temps plein visiter les banques alimentaires. Ils peinent à se trouver un logement abordable ; ils n’ont pas accès à la propriété. Le mouvement syndical doit agir comme un rempart contre la pauvreté, comme le redistributeur de la richesse par excellence.

Comme la main-d’œuvre se fait plus rare, on peut penser que les salarié-es ont le gros bout du bâton. Pourtant, un trop grand nombre d’entre eux écopent : multiplication des heures supplémentaires, intensification du travail, épuisement, perte de sens du travail, manque de temps pour l’accompagnement des personnes nouvellement embauchées, diminution de la qualité des services offerts, diminution des critères d’embauche…

Certaines solutions se trouvent également à l’extérieur des conventions collectives. La CSN a contribué aux travaux menant au projet de loi sur l’encadrement du travail des enfants au Québec. Avec la rareté de main-d’œuvre, on assiste à l’arrivée massive de personnes immigrantes. Certaines de ces personnes n’ont même pas le droit d’offrir leur force de travail à un autre employeur. La CSN recommande que ces « travailleurs étrangers temporaires » ainsi que les sans-papiers puissent se voir octroyer le statut de résident permanent. De plus, les efforts doivent redoubler en francisation, en particulier en milieu de travail.

Perspectives
Bénéficiant d’une majorité confortable grâce au mode de scrutin qu’elle avait promis de modifier cinq ans plus tôt, la CAQ poursuit ses stratégies populistes pour un second mandat. En bonne partie des gestionnaires du privé, les élu-es caquistes, et surtout, le premier ministre, ne consultent pas, négocient sur la place publique, agissent en fonction des sondages et font leurs annonces via les médias sociaux.

Les choix économiques et fiscaux caquistes favorisent généralement les mieux nanti-es. Le gouvernement s’est privé de 5 milliards cette année au lieu d’investir pour répondre aux besoins qui sont nombreux : pensons aux services publics, au logement, à la francisation des personnes immigrantes ou encore à la nécessaire décarbonisation du Québec.

Soulignons que l’opposition généralisée a forcé le ministre de l’Économie à renoncer à repousser l’âge d’accès au Régime des rentes du Québec de 20 à 62 ans.

En santé et services sociaux, tout pointe vers encore plus de privatisation et un vaste rebrassage de structures. La CAQ se sert des difficultés vécues sur le terrain durant la pandémie pour mieux vendre l’idée de la privatisation à la population.

En éducation, elle peine à répondre aux besoins qui vont de la ventilation des écoles aux services de soutien. Saura-t-elle répondre aux enjeux du numérique, de l’enseignement à distance et de la montée de l’intelligence artificielle ? Le manque de places en services de garde éducatifs représente également tout un défi.

Négociations
Le renouvellement des conventions collectives du secteur public, en front commun CSN–FTQ–CSQ–APTS sera également des priorités confédérales à court terme.

Dans le secteur privé, les négociations récentes nous montrent que les travailleuses et les travailleurs retrouvent un certain rapport de force dans cette conjoncture économique faite d’inflation et de pénurie de main-d’œuvre. Plusieurs syndicats ont obtenu des augmentations record de 20, 30 voire 40 %. Notre Fonds de défense professionnelle (FDP) aura joué son rôle pour aider les grévistes à tenir la minute de plus : plus de 26 millions $ en prestations ont été versés ces trois dernières années.

Le dernier mandat a aussi été marqué par la coordination des négociations sur quelques enjeux, soit aucun salaire sous 18 $ l’heure, la déjudiciarisation et la négociation de clauses en santé–sécurité. Cela a porté ses fruits, puisque 70 % des syndicats dont la convention venait à échéance en 2022 ont complètement éliminé les salaires de moins de 18 $ l’heure. En parallèle, nous poursuivons la lutte pour l’augmentation du salaire minimum à 18 $ l’heure, avec nos allié-es, une cible qui sera revue cet automne.

Santé–sécurité
En santé et en sécurité du travail, on a vu l’entrée en vigueur de nouvelles dispositions. Malheureusement, nous pensons que le gouvernement aurait pu faire beaucoup mieux. Notre mobilisation et nos sorties publiques, en alliance, ont tout de même permis de faire reculer le ministre sur certains aspects.

Le travail se poursuivra lors du prochain mandat, notamment avec nos allié-es. Nous organiserons un grand sommet santé–sécurité, en 2025.

Transitions
Nous entrons dans deux périodes de transition majeure qui marqueront les prochaines années, notamment les relations de travail et notre action syndicale. La première transition est liée aux changements climatiques. Plus que jamais, il faut défendre une transition juste : rendre l’économie plus verte, mais aussi plus équitable et plus inclusive !

L’autre transition en cours est celle du numérique. L’économie numérique et l’intelligence artificielle sont en déploiement. Cela pose de nombreuses questions en ce qui a trait à l’emploi, à la protection de la vie privée, à l’autonomie professionnelle ainsi qu’à la constitution du rapport de force en négociation. Une des clés sera la formation qualifiante.

Il faut innover, investir, former, et surtout, mettre les travailleuses et les travailleurs au cœur des processus de transformation.

Protection du français au Québec : une histoire de lutte des classes

Dans son documentaire Une histoire sur le goût de la langue, Hélène Choquette brosse le portrait des luttes menées pour la reconnaissance et la protection de la langue française au Québec, de l’arrivée des premiers colons à aujourd’hui. À travers les témoignages divers, elle montre comment la langue est devenue une composante essentielle de l’identité et de la cuture québécoises.

« Porteurs d’eau, scieurs de bois, locataires et chômeurs dans leur propre pays »
La lutte pour la reconnaissance du français au Québec est avant tout une lutte des classes, le français étant historiquement la langue de la classe ouvrière. L’infériorisation linguistique des Québécoises et des Québécois francophones va donc de pair avec leur exploitation économique. La question linguistique est présente dès la fondation des premiers syndicats catholiques. Dans les années 1950, la CSN s’est battue pour le droit de travailler et de négocier en français. Le documentaire retrace des grèves marquantes comme celles des ouvriers d’Arvida en 1957 et des réalisateurs de Radio-Canada en 1959 qui marquera le début de la carrière politique de René Lévesque et un déclencheur de son engagement en faveur de la souveraineté du Québec.

La langue, c’est l’ADN d’un peuple
La défense du français est au cœur du projet souverainiste et fait partie intégrante de l’affirmation de l’identité québécoise. Du foisonnement culturel des années 1970 aux deux référendums de 1980 et 1995, le documentaire inscrit la lutte pour la protection du français dans le projet souverainiste, alors porté majoritairement par les mouvements de gauche, syndicalistes et féministes. Ces derniers s’inspirent des mouvements sociaux de libération, dont ceux des communautés noires pour les droits civiques aux États-Unis.

L’adoption de la loi 101 en 1977 marquera un tournant majeur dans la reconnaissance du statut du français comme langue publique commune de toutes les personnes qui vivent au Québec. Alors que René Lévesque parlait du Québec comme « la patrie de tous les Québécois qui l’habitent et qui l’aiment », le documentaire met le doigt sur le rapport complexe, parfois difficile, entre immigration et protection de la langue française au Québec. Le témoignage d’un « enfant de la loi 101 » souligne qu’historiquement, les communautés immigrantes ont joué un rôle essentiel dans le maintien du français au Québec. D’un autre côté, les propos de Jacques Parizeau lors de l’échec du deuxième référendum ont provoqué une rupture majeure entre des communautés immigrantes et le mouvement souverainiste.

« Je trouve que le documentaire met bien la table au débat actuel, alors que les mouvements de droite instrumentalisent la protection de la langue française au profit d’un discours nationaliste anti-immigration. « Pourtant, les personnes immigrantes sont majoritaires à étudier et à travailler en français », partage une déléguée présente à la projection.

À la toute fin du documentaire, on évoque les solidarités à créer entre les Québécoises et les Québécois francophones et les peuples autochtones autour de ces enjeux. « J’aurais trouvé intéressant que le documentaire développe davantage cet aspect, car selon moi, notre lutte pour protéger la langue française est inséparable des luttes menées par les peuples autochtones pour défendre leurs langues et leur droit à l’autodétermination », soulève un autre délégué.

Produit à l’initiative de la CSN, le documentaire a été diffusé juste avant l’ouverture du 67e Congrès de la CSN. Il est accessible en ligne sur le site de la CSN.

« Négocier, obtenir des droits pour les salarié-es, c’était ça l’objectif »

Délégué représentant au congrès de la CSN, le plus grand syndicat français, la Confédération française démocratique du travail (CFDT), Pascal Catto, nous raconte son parcours professionnel et syndical et livre des clés pour comprendre la crise des retraites dans l’hexagone.

Originaire du nord de la France, Pascal Catto vient aussi de l’industrie du transport de devises. « L’employeur était un ancien militaire qui ne nous respectait pas, alors on est allés voir un syndicat. Mon grand-père était un cheminot membre de la CFTC (une majorité issue de la CFTC a créé la CFDT en 1964). Négocier, obtenir des droits pour les salarié-es, c’était ça l’objectif ».

Enjeux de sécurité au travail
Une épidémie de « braquages » violents touche alors la France au début des années 2000. Plusieurs camarades la paieront de leur vie, assassinés au travail. Pour être enfin respectés, les « convoyeurs » entament 15 jours de grève pour améliorer leur sécurité. « On a beaucoup travaillé pour renforcer la sécurité des blindages, de l’armement, on a négocié des primes de risque, créé des certificats de qualification professionnelle avec formation au tir et augmenté les salaires. » Nicolas Sarkozy – alors ministre de l’Intérieur – est à l’écoute. La CFDT obtient que des technologies (comme la « valise intelligente » qui asperge les billets d’encre en cas de vol) soient développées et financées par les banques. Vingt ans plus tard, la sécurité dans l’industrie est telle que les vols à main armée de fourgons de transport ont presque disparu.

Secrétaire général local dans la commune de Boulogne-sur-Mer pendant sept ans, Pascal devient représentant régional dans le nord de la France en 2002 avant d’intégrer le Bureau national confédéral en 2010. « Le nord a connu beaucoup de fermetures du jour au lendemain comme celle de MetalEurop Nord (filiale de Glencore, propriétaire de la Fonderie Horne au Québec) ». Par le dialogue social et la consultation, la CFDT élabore alors avec les gouvernements successifs des plans de reclassement économique et d’aide aux chômeuses et aux chômeurs qui sont désormais la norme.

Du nord de la France aux îles du Pacifique
Pascal est actuellement chargé du dialogue avec neuf espaces français d’outre-mer, dont le plus proche de nous est Saint-Pierre-et-Miquelon, dans le golfe du Saint-Laurent. L’outre-mer désigne une mosaïque de cultures, sur les deux hémisphères et sur quatre océans, héritées de l’empire colonial français. Là-bas vivent 2,8 millions d’habitants, soit 4 % de la population française. « Les réponses ne peuvent pas venir de Paris. Mon travail, c’est de construire avec les habitants de ces territoires un peu abandonnés, de les former et de les aider, de faire remonter leurs problèmes ». Ces territoires sont marqués par des enjeux rappelant parfois les territoires autochtones canadiens : des taux de chômage extrêmement élevés, la vie chère, des enjeux de dialogue social entre cultures, des défiscalisations qui ne profitent qu’aux riches, des problèmes environnementaux et d’accès à l’eau.

Retraites et crise démocratique
Analysant la mobilisation record contre la réforme des retraites françaises, Pascal déplore que le gouvernement ait choisi de financer d’autres budgets avec les régimes de retraite en faisant fi des sujets de société comme l’emploi des aîné-es. « Le gouvernement a pris le problème à l’envers, avec son totem de l’âge qui est un non-sens, car il pénalise les emplois pénibles commencés jeunes, malgré une durée de cotisation réalisée. Aujourd’hui, différents régimes coexistent et les salarié-es ne travaillent plus dans la même entreprise pendant 40 ans. Ce qui fait que des tas de salarié-es passés d’un régime à l’autre se voient pénaliser pour bénéficier d’une retraite à taux plein. Pour ces raisons, la CFDT demande un régime universel par points. Passée en force par un pouvoir plus impopulaire que jamais malgré une mobilisation “jamais vue de mémoire de syndicaliste”, la loi retraite (refusée par 90 % des salarié-es) est validée par le Conseil constitutionnel. Le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, parle de “grave crise démocratique”. La CFDT est régalienne, nous prenons acte de la décision. Mais on se rend compte que le gouvernement est en train de sortir des décrets en corrigeant ses erreurs, donc on est en train de gagner des choses sur ces questions ».

Promettant de rouvrir des discussions sur des sujets négligés comme l’usure au travail, la CFDT souhaite revoir le dialogue social. « On veut un accord de méthode avec le gouvernement sur les discussions qui vont s’ouvrir. La CFDT travaille toujours en intersyndicale à la mobilisation du 6 juin pour appuyer l’initiative de parlementaires visant à annuler la réforme ».

« On a enregistré un nombre d’adhésions record depuis le début du mouvement en France ! »

Spécialiste des relations internationales et invité au congrès de la CSN, Pierre Coutaz est permanent syndical à la Confédération générale du travail (CGT), la deuxième plus grande organisation syndicale de France. Il a accepté de répondre à quelques questions.

Bonjour camarade, pourrais-tu stp nous décrire ton mandat ?

J’anime avec 12 camarades l’espace international chargé des relations bilatérales — comme le congrès de la CSN — et multilatérales dans le cadre de la Confédération syndicale internationale (CSI) et de la Confédération européennes des syndicats (CES). Je suis chargé de la solidarité concrète dans les zones du monde souffrant d’attaques aux droits sociaux et humains et de catastrophes. J’ai également travaillé avec la CSN et la FTQ sur des dossiers comme le rôle du français au travail.

La nouvelle secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, est une femme, cadre, écologiste. Que t’inspire cette première en 130 ans de CGT ?

Nous avons eu un congrès tendu, marqué par des oppositions fortes. C’est un signe d’intelligence collective remarquable d’avoir su surmonter des divisions en trouvant une camarade charismatique et investie qui incarne le changement !

On l’a vue refuser des entrevues à des chaines de télévision très antisyndicales et conservatrices, c’est une stratégie personnelle ?

Non, c’est une décision collective qui date des élections de 2022, compte tenu de l’orientation de ces chaines sanctionnées pour incitation à la haine et leur participation active aux campagnes de candidates et de candidats d’extrême droite. Sophie l’a exprimé de façon très forte en tête de cortège.

Dans une France réputée pour ses grèves, la très forte mobilisation (jusqu’à 3,5 millions de manifestantes et de manifestants) contre la réforme des retraites a surpris. Pourquoi ?

Il y a le sentiment d’une réforme injuste et inutile qui légitime totalement la lutte. On nous dit qu’il faut reculer de deux ans l’âge de départ. Mais les experts ne signalent pas de problème de financement. Et une travailleuse/un travailleur sur deux termine sa vie active sans travail, car les employeurs ne veulent pas des ainé-es. L’espérance de vie en bonne santé en France est de 64 ans, donc on prend les deux seules années de retraite en bonne santé. Il y a aussi l’obligation de cotiser 43 ans pour espérer bénéficier d’une retraite à taux pleins. Là où d’autres pays permettent de partir plus tôt, la France impose une « double peine ».

Est-ce que la mobilisation s’est traduite par une hausse des adhésions ?

On a enregistré un nombre d’adhésions record depuis le début du mouvement, avec 31 000 cartes supplémentaires, soit +5 %. Et ça continue !

La CGT a renoué avec une très vieille pratique de grève : les interruptions d’électricité ciblées. Et les Françaises et les Français font du « charivari » lors des déplacements de ministres. Comment expliquer ces réappropriations ? As-tu d’autres exemples ?

Quand un pouvoir est sourd, aveugle et muet, on n’a pas d’autres solutions que de se faire entendre en tapant sur des casseroles ou en « coupant le jus ». Nos camarades de la Guyane (Amérique du Sud) ont même empêché en avril le décollage de la fusée spatiale Ariane ! Et à Paris, l’orchestre symphonique est venu jouer pour les manifestantes et les manifestants.

Parfois, le mécontentement social général, par exemple des « gilets jaunes », se mêle avec des problématiques liées au monde du travail. Comment la CGT traite-t-elle cette « convergence des luttes » ?

Depuis six ans, Emmanuel Macron piétine la démocratie dans un « libéral -autoritarisme » permanent. Il a asséché l’hôpital, l’école, les transports publics, bref le ciment social. Il y a un mécontentement général contre les politiques libérales qui ont mis à sac notre patrimoine social. On est en lutte sur de multiples fronts, par-delà l’intersyndicale historique sur les retraites, par exemple les luttes sectorielles. Il y a aussi les inquiétudes de la jeunesse concernant son intégration au marché du travail, le changement climatique et l’eau comme on l’a vu lors des manifestations contre les méga-bassines à Sainte-Soline.

Quels enseignements la CSN peut-elle tirer de la situation française ?

J’ai regardé avec envie votre Printemps érable (rires). On s’intéresse aussi à ce qui se passe chez vous. Un mouvement social est une alchimie un peu magique qui transforme une énergie populaire en source de progrès sociaux. Personne n’a la recette et je n’ai pas de conseils même si l’internationalisme adresse des enjeux similaires avec une temporalité différente.

Déclaration de reconnaissance territoriale autochtone de la CSN

De nombreuses organisations débutent leurs rencontres officielles par une brève déclaration reconnaissant le territoire autochtone où elles se trouvent réunies. Pour certaines organisations, c’est un effet de mode, mais pour d’autres, c’est loin d’être le cas.

La CSN s’est rangée publiquement en faveur des droits des peuples autochtones dès 1973 et elle vient d’adopter un nouveau plan d’action en ce sens. Pour la CSN, la reconnaissance du lien qui unit les Autochtones au territoire n’est donc pas un simple geste pour faire bonne figure. Il s’agit plutôt d’un acte d’éducation à l’endroit des personnes réunies et d’un engagement organisationnel en faveur de la vérité et de la réconciliation.

De nos jours, il ne fait aucun doute que toutes les Amériques ont été peuplées par diverses nations autochtones depuis des millénaires et que nous vivons sur leurs territoires ancestraux. Un territoire ancestral est la zone géographique identifiée par une première nation comme la terre occupée et utilisée par ses ancêtres, dont elle est gardienne jusqu’à aujourd’hui.

Ces nations habitent le continent depuis la dernière période glaciaire, il y a 15 000 ans. Les Premiers Peuples sont arrivés sur le territoire désigné aujourd’hui comme le Québec il y a 12 000 ans, lorsque les eaux glaciaires de la mer de Champlain se sont retirées. Quand les Européens sont arrivés à leur tour, il y a cinq siècles, les Amériques étaient habitées par les Autochtones depuis déjà 150 siècles.

On dit souvent que les territoires autochtones sont « non cédés », ce qui signifie qu’aucune entente ni aucun traité n’a été signé pour officialiser l’abandon définitif et le transfert des droits territoriaux vers les colons par les Autochtones au sens de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, c’est-à-dire par un consentement libre, préalable et éclairé (CLPÉ). Le congrès de la CSN a endossé la déclaration en 2008, le Québec en a appuyé les principes en 2019 et le Canada en a fait une loi en 2021.

Une partie importante du territoire du Québec n’a jamais été cédée par les Autochtones, sauf les territoires qui sont touchés par la Convention de la Baie-James et du Nord québécois signée en 1975 et ceux touchés par la Convention du Nord-Est québécois signée avec la Nation naskapie en 1978 à laquelle, par ailleurs, la nature du consentement au sens de l’ONU ne fait pas l’unanimité aujourd’hui.

La recherche historique démontre que les territoires peuvent avoir été occupés par plus d’un peuple autochtone au fil du temps. Il importe donc de bien s’informer avant de citer un territoire comme étant celui d’un peuple ou d’un autre, lors d’une rencontre dans une région ou une autre.

Entente de principe à Bibliothèque et Archives nationales du Québec

Une entente de principe est intervenue entre le Syndicat des travailleuses et travailleurs unis de Bibliothèque et Archives nationales du Québec–CSN et l’employeur.

Le contenu de l’entente sera présenté sous peu aux membres en assemblée générale. Aucune entrevue ne sera accordée d’ici là.

À propos

Le Syndicat des travailleuses et travailleurs unis de BAnQ–CSN rassemble 350 salarié-es œuvrant dans 13 établissements de BAnQ.

Indigné, le Front commun intensifie les moyens de pression

Plus d’un millier de personnes se sont réunies samedi pour manifester lors du congrès de la Coalition Avenir Québec (CAQ), réclamant de meilleurs salaires et une amélioration des conditions de travail dans les réseaux de la santé et des services sociaux, de l’éducation et de l’enseignement supérieur, alors que le gouvernement s’apprête lui-même à rehausser immédiatement de près de 30 % la rémunération des parlementaires. Pour la même année, l’offre qu’il fait à ses travailleuses et travailleurs des services publics est dix fois moindre, soit 3 % au 1er avril 2023.

Devant ces offres méprisantes, le Front commun a obtenu le mandat d’intensifier la pression sur le gouvernement du Québec et se prépare à franchir les différentes étapes menant à l’acquisition du droit de grève. L’objectif est de s’assurer d’avoir en mains toutes les cartes et les leviers nécessaires si le gouvernement nous force à y avoir recours.

« Jeudi matin, le gouvernement caquiste rajoutait une couche d’insultes en présentant un projet de loi afin d’augmenter ses propres salaires. Ce qui est bon pour pitou doit être bon pour minou. La hausse du coût de la vie pèse lourdement sur l’ensemble des 420 000 membres du Front commun, dont le salaire annuel moyen est de 43 916 $. Devant les offres insultantes et l’intransigeance du gouvernement aux tables de négociation, nos membres nous ont confié un message très clair : nous appauvrir, pas question! La dévalorisation des réseaux publics, c’est terminé », ont déclaré les porte-paroles du Front commun François Enault, premier vice-président de la CSN, Éric Gingras, président de la CSQ, Denis Bolduc, secrétaire général de la FTQ, et Robert Comeau, président de l’APTS.

« Plus d’un mois après l’échéance des conventions collectives, le gouvernement doit mettre des offres sérieuses sur la table. En ce moment on ne sent pas le leadership de la part de François Legault. Le gouvernement doit arrêter de vouloir imposer obstinément ses priorités et ses solutions et se mettre en mode écoute » ont ajouté les porte-paroles syndicaux alors que le premier ministre sera soumis à un vote de confiance des membres de la CAQ.

Vers une grande manifestation nationale

Fort de son mandat d’intensification des moyens de pression le Front commun tiendra, au cours des prochaines semaines, des actions dans les établissements des réseaux et dans l’espace public aux quatre coins du Québec. Une grande manifestation nationale se prépare pour le mois de septembre dans le cas où les travaux aux tables de négociation ne permettront pas d’arriver à une entente d’ici là.

Rappelons que, pour résoudre la pénurie de main-d’œuvre dans les services publics, le Front commun réclame un mécanisme permanent de protection contre l’inflation d’une part et, d’autre part, un enrichissement visant un rattrapage salarial général. Ainsi, il revendique une augmentation de 100 $ par semaine pour l’année 2023 ou l’indice des prix à la consommation (IPC) +2 % (selon la formule la plus avantageuse), l’IPC +3 % pour 2024 et, finalement, l’IPC +4 % pour 2025.

Pour plus d’information sur la négociation en cours : https://www.frontcommun.org/.

À propos du Front commun

Ensemble, la CSN, la CSQ, la FTQ et l’APTS représentent plus de 420 000 travailleuses et travailleurs de l’État québécois dans les secteurs publics, en éducation, en santé et dans les services sociaux ainsi qu’en enseignement supérieur.

La Cour d’appel reconnaît le caractère antisyndical de la Loi 15

La Cour d’appel a confirmé le 10 mai que le gouvernement du Québec a « compromis de façon substantielle la liberté des employé-es du secteur municipal de négocier collectivement » en adoptant la Loi 15 en décembre 2014.

La Loi favorisant la santé financière et la pérennité des régimes de retraite à prestations déterminées du secteur municipal (Loi 15) avait alors modifié unilatéralement les régimes de retraite du secteur municipal. Plus précisément, la Loi 15 avait notamment fixé la répartition des charges entre employeurs et employé-es à 50/50, pour tous les régimes de retraite municipaux, même si des travailleuses et des travailleurs avaient négocié une autre répartition plus avantageuse pour eux en échange de concessions sur d’autres points dans les négociations antérieures.

Les juges estiment en effet qu’il s’agissait d’une entrave substantielle pour les syndicats, mais que cette entrave était justifiée dans les circonstances de l’époque. « Même si le jugement ne permettra pas de corriger rétroactivement les régimes de retraite, au moins les trois juges reconnaissent que le gouvernement était allé trop loin et cela a créé un précédent sur lequel s’appuyer si jamais d’autres lois similaires étaient débattues à l’Assemblée nationale dans le futur », souligne Caroline Senneville, présidente de la CSN.

Notons par ailleurs que le jugement confirme le droit des retraité-es aux bénéfices d’une indexation automatique de leurs rentes.

La CSN analysera rigoureusement le jugement et déterminera les actions à prendre dans ce dossier dans les prochaines semaines.

Le STTuBAnQ–CSN déclenche à nouveau la grève

Ce jeudi 11 mai, les membres du Syndicat des travailleuses et travailleurs unis de Bibliothèque et Archives nationales du Québec (STTuBAnQ–CSN) déclenchent une seconde séquence de grève de 5 jours, et ce, dans les 13 points de service de Bibliothèque et Archives nationales du Québec.

« Nous sommes en négociation depuis octobre 2021 et toujours sans contrat de travail depuis le mois de mars 2020. Nous sommes rendus à cinq ans sans augmentation salariale, nos salaires sont parmi les plus bas dans notre domaine et l’inflation actuelle touche durement la majorité de nos membres. Notre négociation traîne inutilement depuis plus d’un an et la colère des salarié-es de BAnQ nous pousse à déclencher cette seconde séquence de cinq jours de grève. Nous envisageons même la grève générale illimitée si nos demandes demeurent sans réponse satisfaisante. Pour en arriver à une entente, le Conseil du trésor devra bonifier ses offres à incidence financière, puisque celles-ci ne comblent toujours pas nos attentes, souligne la présidente du syndicat, Sylviane Cossette. Nous revendiquons toujours un rehaussement salarial conséquent qui reconnaîtra enfin notre travail à sa juste valeur. »

Le 16 janvier dernier, les membres du STTUBAnQ–CSN ont voté à 94 % en faveur d’une banque de 10 jours de grève à déclencher au moment jugé opportun. Un premier bloc de cinq jours a été exercé à partir du 14 février dernier.

« Les budgets de BAnQ ne sont pas indexés et dans le contexte de rareté de main-d’œuvre et d’inflation, l’établissement doit assumer un déficit constant qui augmente chaque année et qui affecte directement ses opérations. Le Conseil du trésor doit donc obligatoirement bonifier les budgets de BAnQ afin de favoriser l’attraction et la rétention de ses salarié-es, ajoute Stéphanie Gratton, présidente par intérim de la Fédération des employées et employés de services publics–CSN. Rappelons que les demandes du syndicat sont basées sur des comparatifs d’emplois rédigés de concert avec la direction de BAnQ, elles sont donc plus que légitimes, réalistes et nécessaires pour la viabilité de l’organisation. Nous interpellons donc à nouveau Sonia LeBel, présidente du Conseil du trésor, afin qu’elle comprenne cet enjeu majeur pour la survie de BAnQ. »

« Le sous-financement de BAnQ est tout simplement scandaleux. Il cause des problèmes de stabilité de la main-d’œuvre et provoque des vagues de mises à pied à chaque augmentation salariale, puisque l’employeur ne peut plus soutenir ses coûts de main-d’œuvre. Le gouvernement ne peut pas traiter nos institutions culturelles de la sorte et prétendre qu’il défend la culture québécoise. Alors que l’établissement se positionne comme LA référence en bibliothéconomie et en archivistique, le Conseil du trésor ignore volontairement la réalité du marché de l’emploi dans ce secteur, les villes et les universités offrant à leur personnel qualifié de bien meilleures conditions salariales », conclut Chantal Ide, vice-présidente du Conseil central du Montréal métropolitain–CSN.

À propos

Le Syndicat des travailleuses et travailleurs unis de BAnQ–CSN rassemble 350 salarié-es œuvrant dans 13 établissements de BAnQ.