La Fabrique Notre-Dame : un employeur pas très catholique

Un an après le début de la pandémie de COVID-19, les membres de trois syndicats affiliés à la CSN se sont donné rendez-vous devant la mythique basilique Notre-Dame de Montréal pour un rassemblement solidaire afin d’exposer la difficile réalité vécue au sein de leurs milieux de travail respectifs.

« En plus d’avoir un lien d’emploi avec la Fabrique Notre-Dame, nos trois unités syndicales partagent plusieurs points en commun. En échangeant entre nous, nous avons constaté que l’employeur a profité de la pandémie pour abolir des postes pourtant essentiels à son bon fonctionnement, de souligner Hélène Godin, présidente du Syndicat des travailleuses et travailleurs de la Fabrique Notre-Dame–CSN. Récemment, la Fabrique a étalé ses problèmes financiers sur la place publique. Alors qu’elle déclare s’endetter depuis 12 ans, elle se paie à grands frais des avocats et des experts en ressources humaines, coupe des postes qui lui assureraient des revenus substantiels, tout en claironnant ne pas avoir d’argent pour ses salarié-es ».

Un employeur qui mine sa propre mission

« Dès le 13 mars 2020, nous avons été mis à pied et depuis ce temps, nous demeurons dans l’obscurité totale quant à notre avenir. En novembre dernier, nous avons appris l’abolition de 70 % de nos postes alors que la réouverture éventuelle de la basilique ne fait aucun doute. L’employeur se comporte de manière cavalière, nous ignore complètement alors qu’à plusieurs reprises, nous avons proposé des solutions concrètes et constructives pour la réouverture de ce joyau montréalais », de déplorer madame Godin.

« Pour notre part, nous sommes sans contrat de travail depuis décembre 2018 et en négociation depuis le mois de novembre 2019. Depuis le début de la pandémie, nous avons vécu de l’intimidation et malgré un plancher d’emploi inscrit dans notre convention collective, l’employeur n’a pas rappelé les salarié-es saisonniers à la fin du mois de mars 2020. Ils ont finalement été rappelés au début du mois de juillet alors qu’ils avaient été reconnus en tant que travailleurs prioritaires et que leurs salaires étaient payés à 50 % par le gouvernement, de préciser Patrick Chartrand, vice-président du Syndicat des travailleuses et des travailleurs du Cimetière Notre-Dame-des-Neiges–CSN. Contre toute logique, l’employeur gardait les accès du cimetière fermés, ce qui a attisé la colère de tous les gens qui voulaient se recueillir sur les tombes de leurs proches ».

« Pour tous les membres rassemblés ici, il y a comme un nuage gris au-dessus de nos têtes qui plombe notre environnement de travail. Dans les bureaux, l’employeur a profité de la pandémie pour abolir six postes de conseillers en préarrangements funéraires, et ce, au plus mauvais moment qu’il aurait pu choisir. Alors que la COVID nous rend déjà la tâche difficile, notre propre employeur déstabilise notre milieu de travail, ce qui compromet notre capacité à soutenir les familles endeuillées dans cette étape importante de leur processus de deuil. Nous y voyons tout simplement une tentative d’affaiblir nos unités syndicales », de conclure Éric Dufault, président du Syndicat des employées et employés de bureau du Cimetière Notre-Dame-des-Neiges–CSN.

Le Syndicat des travailleuses et travailleurs de la Fabrique Notre-Dame–CSN compte 30 membres; le Syndicat des travailleuses et des travailleurs du Cimetière Notre-Dame-des-Neiges–CSN rassemble 125 membres et le Syndicat des employées et employés de bureau du Cimetière Notre-Dame-des-Neiges–CSN en compte 19.

Renforcer la démocratie universitaire pour éviter les dérapages

La FP–CSN, le SPUQ et le SPUQO prennent position dans le débat sur la liberté académique dans les universités et estiment que la solution passe par un renforcement de la démocratie universitaire.

Demander à l’État d’encadrer ce que doit être la liberté académique, laquelle a été conquise et instituée pour défendre les universités contre les interventions de l’État est une démarche contradictoire, ouvrant potentiellement la porte à une restriction de la liberté académique, telle que protégée par les conventions collectives. 

La Fédération des professionnèles de la CSN (FP–CSN) estime qu’il faut plutôt renforcer la démocratie interne. Elle devrait par ailleurs toujours être exercée en collégialité, c’est-à-dire en incluant les professeur-es, les chargé-es de cours, les professionnèles, le personnel de soutien et les étudiantes et étudiants.

Sortie de crise

L’éditorial de Jacques Létourneau, président de la CSN

Un an de crise. C’est le triste anniversaire que nous soulignons cette semaine. Une pandémie qui aura emporté plus de 10 000 Québécoises et Québécois, qui aura directement affecté des centaines de milliers d’entre eux et dont les mesures sanitaires pour tenter de la contenir auront eu un impact financier et psychologique sur l’ensemble de notre société.

De multiples réflexions doivent se poursuivre, bien sûr, pour déterminer pourquoi le Québec fut à ce point happé par la crise actuelle, notamment quant à l’organisation de nos réseaux publics et de notre filet social. Mais l’heure n’est plus seulement à la réflexion : il faut se mettre en mode action et apporter les solutions qui s’imposent.

C’est d’ailleurs le mandat que nous ont confié les syndicats et les travailleuses et travailleurs que nous représentons lors du congrès de la CSN tenu en janvier dernier. C’est ce à quoi le comité exécutif de la CSN et nos équipes de travail s’affaireront au cours des prochaines semaines. Nous profiterons d’ailleurs de la tenue du conseil confédéral la semaine prochaine pour faire le point sur l’état des travaux portant sur les priorités dégagées par les congressistes.

Sans surprise, les enjeux de santé et de sécurité au travail occuperont une place prépondérante. Il ne faut pas non plus s’étonner qu’après des considérations bien immédiates reliées à la propagation du virus dans nos milieux de travail (accès aux équipements de protection individuelle, mise en place de mesures de protection, adaptation forcée au télétravail, etc.), des enjeux tout aussi importants, tels que l’épuisement professionnel et les problèmes de santé mentale qui en découlent, aient depuis accaparé nos structures militantes.

Au cours de la tournée précongrès tenue à l’automne, il nous est apparu très clairement que ces difficultés affectent directement les militantes et les militants de nos syndicats locaux : surcharges, difficultés à rejoindre et à mobiliser les membres… Les énergies supplémentaires qui ont dû être dégagées ont entraîné un épuisement réel. Certains comités exécutifs de nos syndicats ont été décimés et peinent à recruter de nouveaux responsables syndicaux. La pandémie a également affecté les personnes salariées de la CSN au même titre que l’ensemble de la population. Celles-ci ont redoublé d’ardeur pour continuer à offrir les mêmes services de qualité auprès de nos syndicats ; je tiens à souligner leur formidable travail et à les en remercier.

Nous devons apporter des solutions à cette réalité qui menace directement l’efficacité de nos structures militantes. Les syndicats présents au congrès nous ont mandatés pour consolider nos réseaux d’entraide existants, appuyer leur création là où le besoin se fait sentir et les outiller afin qu’ils puissent répondre aux besoins grandissants de leurs membres.

Bien entendu, notre campagne portant sur la réforme en santé et sécurité du travail menée par le ministre Boulet prendra de l’ampleur au cours des prochaines semaines. Considérant les avancées pour certains secteurs, il a toujours été dans notre intention de bonifier au maximum la réforme. Néanmoins, en fonction des reculs importants pour plusieurs de nos syndicats, la mobilisation est rapidement devenue nécessaire. D’autant plus qu’à la lumière des amendements déposés hier, nous avons constaté que les corrections souhaitées n’apparaissent pas au nouveau projet. Nous sommes encore loin de la coupe aux lèvres, voilà pourquoi notre mobilisation doit s’intensifier.

Le confinement et les mesures sanitaires auront bien évidemment affecté notre rapport de force. De nombreuses adaptations ont dû être proposées pour maintenir une vie syndicale et soutenir la mobilisation dans nos rangs. Nous avons pu retrouver un certain rythme, mais les défis demeurent nombreux. Lors du dernier congrès, nos syndicats ont clairement exprimé le besoin d’être davantage appuyés pour investir les espaces virtuels et les médias sociaux afin de renforcer la vie syndicale et favoriser leur mobilisation ; nous tâcherons d’y répondre de la meilleure façon.

Nous l’avons maintes fois répété : la crise aura mis au jour les trous béants de notre filet social, des failles que nous déplorons depuis déjà trop longtemps.

Le paroxysme aura été atteint en constatant l’hécatombe de notre réseau public de santé et de services sociaux. Toutefois, les problèmes de recrutement de la main-d’œuvre, directement reliés aux faibles salaires et aux mauvaises conditions de travail en général, s’appliquent tout autant aux réseaux de l’éducation et de la petite enfance.

La mobilisation des membres du secteur public, sans convention depuis bientôt un an, doit être appuyée par l’ensemble de notre mouvement. Les solutions, nous les connaissons et les avons mises de l’avant bien avant la venue de cette pandémie – dont les effets auraient été beaucoup moins dévastateurs si les gouvernements successifs, peu importe leur allégeance politique, avaient pris la peine de les prendre en considération.

Bien entendu, ces solutions ne pourraient être mises en place sans un réel changement de cap en matière de gestion de nos finances publiques. Malgré nos appels répétés, le gouvernement de François Legault s’entête à s’isoler dans le même carcan financier, basé sur l’équilibre budgétaire et une réduction accélérée de la dette, hérité du gouvernement de Lucien Bouchard il y a 25 ans.

Le 25 mars, le ministre des Finances annoncera que le prochain budget du Québec enverra des surplus budgétaires de trois milliards au Fonds des générations plutôt que de s’affairer à la consolidation de nos services publics et à la relance économique. Un total non-sens compte tenu des priorités bien plus urgentes pour la population du Québec.

Pour plusieurs, la question des finances publiques peut ne pas sembler la plus palpitante qui soit, j’en conviens amplement. Pourtant, les sommes consacrées aux différentes missions sociales de l’État ont un impact direct sur les budgets en santé, en éducation, en enseignement supérieur et en petite enfance. Sur les conditions de travail de ceux et celles qui y œuvrent, tout autant que sur l’accessibilité de tous et de toutes à ces services publics qui sont à la base de notre vivre-ensemble. Pour la CSN, s’en désintéresser ne constitue aucunement une option.

Projet de loi 59 : un sérieux coup de barre est nécessaire

La santé et la sécurité du travail devraient être une priorité pour toute société moderne. C’est avant tout une question de dignité humaine : personne ne devrait perdre sa vie à la gagner ni y laisser une partie de sa santé physique ou mentale. De la même manière, une victime de lésion professionnelle doit pouvoir facilement accéder aux droits et protections qui lui sont dévolus afin de réparer ces lésions et leurs conséquences, en respect du contrat social d’abandonner son droit de poursuite judiciaire.

C’est avec impatience que nous attendions le dépôt du projet de loi 59, Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail. Malgré son titre, nous constatons malheureusement que ce projet de loi représente plutôt, à plusieurs égards, un recul qui ne répond pas aux besoins du Québec.

Pour les travailleurs et travailleuses qui ont malheureusement subi une lésion professionnelle, les impacts du projet de loi seront dévastateurs. Afin d’octroyer des économies à court terme pour les employeurs, des milliers de travailleurs et de travailleuses vont se retrouver injustement traités, sans revenu et sans réadaptation, condamnés à vivre aux frais de la société civile, avec des coûts humains énormes.

L’introduction de plusieurs critères limitatifs et de nouveaux règlements réduisent la possibilité pour les victimes de faire reconnaître leur lésion professionnelle et de recevoir une réadaptation adéquate. Alors que les tribunaux ont pu maintenir une indépendance envers les positions de la CNESST, le projet de loi 59 vient sabrer cette saine distance, restreindre grandement l’acceptation des réclamations pour maladies professionnelles et limiter les traitements et les médicaments auxquels les victimes devraient avoir droit.

De plus, le projet de loi prévoit une diminution de la prépondérance de l’opinion du médecin traitant qui est inacceptable. Il est également inconcevable qu’on oblige des victimes à participer à des mesures de réadaptation, dont le retour au travail, sans leur consentement ni celui de leur médecin, et sans aucune possibilité de contester la décision de la CNESST. Il serait beaucoup plus opportun et bénéfique de développer la médecine du travail qui combine l’expertise médicale et la connaissance des contraintes des milieux de travail au Québec si l’on désirait améliorer le sort des travailleurs et travailleuses.

La science nous enseigne qu’une réelle prévention impliquant l’ensemble des acteurs d’un milieu de travail de manière paritaire diminue de façon draconienne le coût économique en plus de diminuer le nombre de lésions professionnelles. Nous comprenons mal pourquoi le gouvernement s’écarte de ce consensus scientifique. La distinction selon les secteurs d’activité économique et la diminution des mécanismes de prévention prévues dans le projet de loi ne permettront pas la prise en charge de la santé et la sécurité par les milieux de travail, en plus de maintenir la discrimination systémique dont les femmes sont victimes.

Il est aussi incompréhensible que le projet de loi propose de réduire les exigences en matière de prévention dans les secteurs déjà couverts par la loi actuelle et que l’on écarte l’expertise et la neutralité des médecins de Réseau de la santé publique en santé au travail pour laisser les employeurs désigner leur médecin. L’autonomie des médecins de la santé publique et les mécanismes actuels de prévention font partie du succès dans les milieux déjà couverts : pourquoi diminuer ce qui fonctionne?

Devant ces constats, nous demandons au gouvernement d’apporter d’importantes modifications au projet de loi 59 afin de garantir une prévention efficace pour tous et toutes de manière égale, d’assurer un accès facilité aux indemnités prévues à la loi actuelle et à la réadaptation ce qui permettra aux victimes de lésions professionnelles d’être traitées dignement et avec justice.

  • À bout de souffle…ça suffit
  • Aide aux Travailleurs Accidentés (ATA)
  • Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS)
  • Association des juristes progressistes (AJP)
  • Association des spécialistes en médecine préventive du Québec (ASMPQ)
  • Association des travailleurs et des travailleuses accidentés Joli-Mont
  • Association des travailleuses et travailleurs accidentés de l’Abitibi-Témiscamingue (ATTAAT)
  • Carrefour d’aide aux non-syndiqué-es (CANOS)
  • Centrale des syndicats démocratiques (CSD)
  • Centrale des syndicats du Québec (CSQ)
  • Centre des travailleurs et travailleuses immigrants (CTI)
  • Centre international de solidarité ouvrière (CISO)
  • Comité d’appui aux travailleurs et travailleuses de la région des Appalaches
  • Comité des travailleurs et travailleuses accidentés de l’Estrie
  • Confédération des syndicats nationaux (CSN)
  • Conseil d’intervention pour l’accès des femmes au travail (CIAFT)
  • Conseil provincial du Québec des métiers de la construction (International)
  • Fédération autonome de l’enseignement (FAE)
  • Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ)
  • Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ)
  • International Association of Heat and Frost Insulators and Allied Workers
  • PINAY
  • Réseau d’aide aux travailleuses et travailleurs migrants agricoles du Québec (RATTMAQ)
  • Réseau des avocates et avocats de l’UTTAM
  • Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec (SFPQ)
  • Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ)
  • Union des travailleuses et travailleurs accidentés ou malades (UTTAM)
  • Marie Laberge, Mélanie Laroche, Yanick Noiseux, Louis Patry, Susan Stock, Guylaine Vallée, (Université de Montréal)
  • Marie-Eve Major (Université de Sherbrooke)
  • Katherine Lippel (Université d’Ottawa)
  • Stéphanie Bernstein, Diane Berthelette, Vanessa Blanchette-Luong, Céline Chatigny, Yolande Cohen, Rachel Cox, Martin Gallié, Dalia Gesualdi-Fecteau, Audrey Gonin, Norman King, Mélanie Lefrançois, Karen Messing, Stéphanie Pache, Johanne Saint-Charles, Angelo Soares, Sid Ahmed Soussi, Hélène Sultan-Taïeb, Nicole Vézina (Université du Québec à Montréal)
  • Marie-Pierre Boucher, Valérie Lederer, Romaine Malenfant, Jessica Riel (Université du Québec en Outaouais)
    Geneviève Baril-Gingras, Chantal Brisson, Maria De Koninck, Pierre Deshaies, Émilie Giguère, Jean-Noël Grenier, Margot Kaszap,
  • Denis Laliberté, Louise St-Arnaud, Michel Vézina, Yv Bonnier-Viger, Simon Viviers (Université Laval)
  • Anne Renée Gravel (Université TÉLUQ)
  • Marie-Eve Beauregard, médecin spécialiste en santé publique
  • Jean-Pierre Bergeron, médecin spécialiste en médecine du travail
  • Luc Bhérer, médecin spécialiste en médecine du travail
  • Fatiha Haouara, médecin spécialiste en médecine préventive et santé publique
  • Marie-Claude Letellier, médecin spécialiste en médecine préventive et santé publique
  • Emily Manthorp, médecin spécialiste en médecine préventive et santé publique
  • Caroline Massicotte, médecin en santé publique et santé au travail
  • Bernard Pouliot, médecin conseil
  • Nabyla Titri, médecin spécialiste en médecine préventive et santé publique
  • Alice Turcot, médecin spécialiste en médecine du travail

Assurance-emploi : la CSN demande à l’ensemble des partis fédéraux d’appuyer l’extension des programmes d’aide

Alors que des milliers de travailleuses et de travailleurs n’ont toujours pas retrouvé leur source de revenus, la CSN interpelle l’ensemble des partis politiques siégeant à la Chambre des communes pour que ceux-ci appuient le projet du gouvernement canadien de prolonger la période de couverture des programmes de l’assurance-emploi et des prestations canadiennes d’urgence et de relance économique.

Pour la CSN, la crise de la COVID-19 a démontré toutes les lacunes des modalités de l’assurance-emploi dénoncées par le mouvement syndical depuis des années. « Nous avons salué la bonification du programme d’assurance-emploi et la mise sur pied, dès les premières semaines de la pandémie, des prestations canadiennes, rappelle le président de la CSN, Jacques Létourneau. Alors que l’économie redémarre tranquillement, de nombreux secteurs en auront pour plusieurs mois avant de retrouver un semblant de normalité, notamment dans les secteurs de la culture et du tourisme. On ne peut pas abandonner ces travailleuses et ces travailleurs, alors que la campagne de vaccination en cours nous permet d’espérer des jours meilleurs dans un avenir proche. »

Ainsi, la centrale syndicale demande à l’ensemble des partis d’opposition d’appuyer le projet de loi déposé par le gouvernement. « Nous appelons l’ensemble des partis politiques à faire preuve de leur sens des responsabilités. Les travailleuses et les travailleurs n’accepteront pas que les joutes partisanes se fassent à leur détriment. Ce projet de loi doit être adopté, et ce, rapidement », d’ajouter Jacques Létourneau.

État de choc dans les cégeps, des femmes poussées vers la voie de garage

À l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes, la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec (FNEEQ–CSN) rappelle que l’égalité des chances restera hors d’atteinte tant que le gouvernement restera indifférent aux impacts différenciés selon le genre qu’entraînent ses décisions. Dans cette perspective, la fédération dénonce vivement les récentes attaques contre des programmes collégiaux qui qualifient en grande majorité des femmes, et leur donnent accès à des professions intéressantes et recherchées.

D’abord, il est particulièrement gênant pour le ministère de l’Enseignement supérieur (MES) de penser éliminer le programme de Bureautique, qui qualifie durablement une grande majorité de femmes en leur offrant des perspectives d’avancement en cours de carrière que le diplôme d’études professionnelles (DEP) du secondaire n’offre pas. Alors que les employeurs s’arrachent les finissantes du diplôme d’études collégiales (DEC), trop peu nombreuses pour pourvoir les postes disponibles, le MES abolit le programme, puis propose une voie de sortie beaucoup moins riche en termes de contenu. La fermeture du programme limiterait une vaste majorité de femmes sur le plan professionnel puisque 90 % de l’effectif étudiant est féminin.

Il est aussi très préoccupant de voir l’Ordre des infirmières et infirmiers du Québec (OIIQ) et l’Ordre professionnel des inhalothérapeutes du Québec (OPIQ) ― qui représentent une vaste majorité de femmes, revendiquer que l’accès à la profession ne passe plus par des DEC qualifiants du collégial, mais par un diplôme universitaire. La Fédération ne s’oppose pas à la formation universitaire dans ces domaines, mais rappelle qu’elle vise des finalités différentes de celles du DEC et est moins accessible que la formation collégiale, notamment en termes de coûts et de nombre d’établissements qui l’offrent.

« La pandémie a exacerbé le manque criant d’infirmières et d’inhalothérapeutes dans le réseau. Ce n’est pas en mettant de nouveaux freins à l’entrée dans la profession qu’on attirera plus de candidates et qu’on palliera le manque de personnel qualifié dans la profession », affirme Caroline Quesnel, présidente de la FNEEQ–CSN.

Encore en 2021, on déplore que les femmes soient plus touchées par la précarité financière que les hommes et qu’elles assument également une plus grande part du travail invisible, notamment celui qui est lié à l’organisation familiale. Dans ce contexte, il est contraire à toute logique de priver une majorité d’étudiantes et de futures travailleuses de perspectives d’emploi intéressantes et très accessibles grâce au réseau public des cégeps, qui leur offre un enseignement supérieur gratuit dans toutes les régions du Québec.

Bridon-Bekaert Ropes Group demeure inflexible malgré les offres de Québec

Le 5 janvier dernier, l’entreprise Bridon-Bekaert Ropes Group (BBRG), propriétaire d’Industries Câbles d’acier à Pointe-Claire, annonçait le déménagement de ses installations aux États-Unis en mai 2021. La Fédération de l’industrie manufacturière (FIM), affiliée à la CSN, déplore l’inflexibilité de l’entreprise malgré les interventions du ministère de l’Économie et de l’Innovation.

« Dans les dernières semaines, BBRG a montré son vrai visage. Le ministère de l’Économie et de l’Innovation ainsi qu’Investissement Québec se sont montrés plus qu’intéressés d’aider l’entreprise afin qu’elle reste au Québec. Ils lui ont offert plusieurs options pour qu’elle puisse développer ses activités à Pointe-Claire et, ainsi, éviter le déménagement. Un acheteur potentiel s’est même manifesté ! BBRG reste pourtant campée sur ses positions en refusant de vendre et en refusant l’aide de Québec. C’est plus que déplorable », déclare Louis Bégin, président de la FIM.

Les dirigeants de BBRG reconnaissent eux-mêmes que l’usine de Pointe-Claire est rentable. « Ils pensent nous berner en utilisant des phrases creuses comme “améliorer la compétitivité à long terme en tirant mieux parti de l’échelle des activités, des synergies et des gains d’efficacité”. Mais ce que BBRG veut, ce n’est pas d’être plus rentable, elle l’est déjà! Ce que l’entreprise veut vraiment, c’est tuer la concurrence et dominer le marché du câble d’acier en Amérique du Nord en concentrant ses activités aux États-Unis. Et cela se fait sur le dos de 145 familles de Pointe-Claire », déplore M. Bégin.

La présidente du Conseil central du Montréal métropolitain–CSN, Dominique Daigneault, souligne qu’avec ce déménagement, le Québec voit disparaître, une fois de plus, une expertise inégalée dans un domaine spécialisé. « Et nous perdons une centaine d’emplois dont le salaire horaire varie entre 28 $ et 36 $/h! Ces fameux jobs à 30 $ que le premier ministre François Legault aime tant, qui sont de plus en plus rares en ces temps de pandémie! », observe Mme Daigneault. « Alors que le gouvernement parle abondamment de stimuler l’économie locale, le secteur manufacturier au Québec continue pourtant de décroître. Québec et Ottawa doivent travailler ensemble pour contrer de telles délocalisations! », continue-t-elle.

Quelles options restent-ils pour les travailleurs ?
Devant l’inflexibilité de BBRG, le syndicat a déposé des griefs à la suite de l’annonce du déménagement, car ce dernier n’est pas permis en vertu du contrat de travail qui lie les parties. « Le syndicat conteste aussi les montants dus aux salariés, car – surprise! – l’employeur sous-estime ce qu’il doit payer aux travailleurs et pour l’instant, il refuse même d’honorer certains contrats qui le lient à des travailleurs retraités! Nous ne baisserons pas les bras. Les travailleurs de Câbles d’acier Pointe-Claire sont loin d’avoir dit leur dernier mot! », termine M. Bégin.

Les employé-es de quatre piscines gérées par la SODEM en grève

En grève depuis le 1er mars, les employé-es des centres aquatiques de Saint-Laurent, LaSalle, Varennes et de la Piscine St-Roch à Montréal, ont manifesté cet après-midi afin d’exiger que l’employeur revienne à la table de négociation. Ces employé-es sont regroupé-es au sein du Syndicat des travailleuses et des travailleurs des Centres aquatiques du Québec (STTCAQ) qui est affilié à la Confédération syndicats nationaux (CSN).

RCR pour les salaires!
« Ça fait deux ans que ce syndicat est en négociation. Actuellement, les employé-es sont payé-es 13,10 $/h. Et après deux ans de négociation, l’employeur (la SODEM) leur offre 13,55 $/h. 13,55 $/h, c’est 45 sous de plus que leur salaire actuel. C’est carrément humiliant, considérant les qualifications des employé-es et sachant que dans d’autres grandes villes, le taux horaire offert pour le même type d’emploi avoisine en moyenne les 18 $ l’heure! », déclare Jean-Pierre Bourgault, vice-président et trésorier de la Fédération des employées et employés de services publics (FEESP–CSN).

Pour Chantal Ide, vice-présidente du Conseil central du Montréal métropolitain (CCMM–CSN), la SODEM doit revoir son offre. « La demande initiale des employé-es était d’un salaire horaire de 20 $. Ils ont revu leur demande à la baisse en proposant 17 $/h. Ça serait la moindre des choses que l’employeur soit de bonne foi en augmentant lui aussi son offre! Parce que 13,55 $/h, ça ne rime pas du tout avec bonne foi! Au contraire, les employé-es vont avoir besoin de RCR avec ce salaire! », affirme Mme Ide.

Le STTCAQ–CSN demande à l’employeur de revenir à la table de négociation. « Depuis que nous avons voté la grève le 22 février dernier, la SODEM fait preuve de mauvaise foi. Ses représentants ont quitté la table de négociation le 25 février, ils nous ont envoyé une mise en demeure lundi dernier. Mardi, ils ont intenté une injonction contre nos lignes de piquetage en disant que nous empêchions les gens d’entrer dans les installations aquatiques, ce qui est faux. Nous avons d’ailleurs contesté l’injonction et nous avons gagné. Ils ont aussi fait une demande d’arbitrage. Mais d’ici à ce qu’un arbitre soit nommé, il y a encore possibilité de négocier. Nous demandons à la SODEM de revenir à la table de négociation sans plus attendre », déclare Sophianne Leclair, porte-parole du comité de négociation du STTCAQ–CSN.

L’offre salariale de la SODEM est grandement inférieure à la moyenne pour des emplois similaires. La Ville de Longueuil paie un taux horaire de 18,59 $ aux employé-es de ses centres aquatiques; 20,36 $/h à Cowansville et Boucherville. « Ce n’est pas parce que la majorité des travailleuses et travailleurs sont des adolescentes, des adolescents ou de jeunes adultes que cela veut dire qu’on peut leur rire au nez en pensant qu’on peut leur passer n’importe quoi! La SODEM doit bien se rendre compte maintenant que c’est tout le contraire! Les membres du STTCAQ–CSN démontrent bien par leurs actions qu’ils savent que des luttes syndicales sont nécessaires pour obtenir de bonnes conditions de travail. Ils ne sont pas près de baisser les bras », termine Éric Lalancette, vice-président du Conseil central de la Montérégie de la CSN.

 

Rencontre du Collectif 8 mars avec la ministre Charest : tout simplement décevante

À l’approche de la Journée internationale des droits des femmes, les membres du Collectif 8 mars, qui représente plus de 700 000 femmes au Québec, ont rencontré la ministre responsable de la Condition féminine, Isabelle Charest, afin d’échanger avec elle sur les impacts de la pandémie à l’endroit des femmes. Les représentantes du Collectif se disent globalement déçues de cette rencontre et attendaient un engagement formel de la ministre pour prendre des mesures concrètes afin d’enrayer les discriminations systémiques vécues par les femmes et entre les femmes. Si la ministre a reconnu certains impacts causés par la pandémie, le Collectif se questionne sur la volonté du gouvernement d’écouter les femmes et de poser des actions concrètes au-delà des beaux discours.

La pandémie a eu des conséquences désastreuses pour les femmes
Depuis près d’un an, les conséquences de la pandémie de la COVID-19 se sont avérées particulièrement éprouvantes pour les femmes. Leurs conditions de vie et de travail se sont détériorées à vue d’œil, notamment en matière de pertes d’emplois et de revenu, sans compter l’augmentation de la violence envers elles.

La conciliation famille-travail-études-vie personnelle : un défi en temps de pandémie
En outre, les femmes ont vu augmenter leur charge de travail invisible ainsi que leur charge mentale. Au pire de la crise sanitaire, elles ont dû endosser plusieurs fonctions, dont celles de télétravailleuses ou de travailleuses essentielles, d’enseignantes privées, d’éducatrices, de proches aidantes et de responsables de la logistique domestique et familiale.

L’augmentation du salaire minimum est plus que nécessaire
Le revenu des bas salarié-es, qui ont souvent agi comme ressources essentielles pendant la crise sanitaire, est tout simplement insuffisant. Rappelons que 58 % des travailleuses et des travailleurs touchant le salaire minimum sont des femmes. Augmenter le salaire minimum est une façon de reconnaître la juste valeur du travail, de diminuer l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes, de réduire la pauvreté, et ainsi de tendre vers plus d’égalité.

Une modernisation du régime de santé qui protège aussi les femmes
La pandémie de COVID-19 a révélé au grand jour les risques, souvent sous-estimés, auxquels plusieurs femmes sont exposées au travail. Il est impératif que la modernisation du régime de santé et de sécurité du travail protège toutes les travailleuses et qu’elle tienne compte des situations diverses dans lesquelles elles se retrouvent. De plus, il est nécessaire, pour éviter de répéter les erreurs du projet de loi 59, que le gouvernement applique systématiquement l’Analyse différenciée selon les sexes et intersectionnelle (ADS+) dans l’élaboration de tous ses projets de loi.

Les femmes oubliées dans les mesures du Plan de relance
Malgré ce portrait accablant, le premier ministre François Legault n’était pas présent à la rencontre du Collectif même si l’invitation lui a été lancée des mois en avance. Les femmes, qui subissent lourdement les impacts de la pandémie, semblent avoir été oubliées dans les mesures prévues au budget pour le plan de relance économique. Un an après le début de la pandémie, force est de constater que nous sommes toujours dans l’attente d’un plan qui prend en considération les impacts sur toutes les femmes, particulièrement sur celles qui vivent à la croisée des oppressions, c’est-à-dire les femmes immigrantes et racisées, les femmes noires, les femmes autochtones, les femmes ayant un handicap et les femmes aînées et les personnes LGBTQ+. Si la ministre Charest a mentionné l’existence d’un plan d’action Covid pour les femmes, il n’y a néanmoins aucune information sur son contenu, les mesures qu’il propose ou encore sa date de publication.

Autres actions féministes dans le cadre de la journée du 8 mars
Le Collectif 8 mars invite la population à participer aux événements organisés par FDO (Femmes de diverses origines), soit un webinaire le samedi 6 mars et un rassemblement le dimanche 7 mars à 16 h Place Émilie-Gamelin à Montréal.

À propos du Collectif 8 mars
Le Collectif 8 mars est formé de représentantes provenant de l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS), de la Centrale des syndicats démocratiques (CSD), de la Confédération des syndicats nationaux (CSN), du Réseau des Tables régionales de groupes des femmes du Québec, de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), de la Fédération autonome de l’enseignement (FAE), de Femmes de Diverses Origines (FDO), de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ), de la Fédération des femmes du Québec (FFQ), de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ), du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec (SFPQ) et du Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ).

Il y a urgence d’agir pour la santé et la sécurité de tout le personnel du réseau de la santé et des services sociaux

En négociation pour le renouvellement de leur convention collective, les travailleuses et les travailleurs de la santé et des services sociaux ont installé une pente de neige devant l’entrée des bureaux montréalais de la Coalition avenir Québec (CAQ). L’inaction du gouvernement en ce qui a trait à la santé et à la sécurité au travail dans le réseau de la santé et des services sociaux constitue une pente glissante, tant pour l’intégrité physique et mentale des salarié-es que pour l’accessibilité de la population à des services de qualité.

Bien que la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS–CSN) ait présenté ses revendications il y a près de 18 mois, en octobre 2019, le comité de négociation représentant les intérêts de plus de 100 000 travailleuses et travailleurs du réseau attend toujours un signal des employeurs indiquant qu’ils souhaitent s’attaquer aux problèmes les plus criants et mettre en place des solutions dès maintenant.

En négociation, la FSSS–CSN veut renforcer les dispositions des conventions collectives portant sur la prévention. La violence en milieu de travail, le harcèlement psychologique, la formation en intervention sécuritaire dans les cas d’urgence, les équipements de protection et le rôle des syndicats dans les programmes de prévention sont au nombre des voies de solutions prônées par la FSSS–CSN. Jusqu’à maintenant, les représentants patronaux n’ont démontré aucune ouverture à régler ces problèmes.

Pourtant, même avant la pandémie, au cours de laquelle plus de 30 000 salarié-es ont été infectés, la situation était alarmante. En effet, 18 % des accidents de travail et des lésions professionnelles au Québec proviennent du réseau de la santé et des services sociaux. En deux ans, le nombre d’actes de violence à l’encontre du personnel a augmenté de 82 %, les chutes de 45 % et les troubles musculo-squelettiques de 36 %. Un sondage réalisé par la FSSS–CSN, en novembre 2020, montrait que 75 % des travailleuses et des travailleurs étaient inquiets pour leur santé psychologique ou celle de leurs collègues. Pour la FSSS–CSN, en continuant d’ignorer ces enjeux, le gouvernement engage tout le réseau sur une pente glissante.

« Il faut faire plus de prévention. Il faut mieux protéger celles et ceux qui prennent soin des bénéficiaires, explique le président de la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS–CSN), Jeff Begley. Les chiffres donnent le vertige. En tant que plus grand employeur au Québec, on attend du gouvernement qu’il donne l’exemple, qu’il ne fasse aucun compromis quant à la santé et à la sécurité des travailleuses et des travailleurs. Nous avons proposé une dizaine de pistes de solutions pour améliorer ce bilan désolant. Jusqu’ici, il semble bien que nous soyons les seuls à vouloir régler la situation actuelle. Continuer de travailler dans le réseau de la santé et des services sociaux à s’en rendre malade n’est certainement pas la solution. Le gouvernement doit agir maintenant! »

« Protéger la santé et la sécurité des travailleuses et des travailleurs, ça a toujours été au cœur de notre mission comme organisation syndicale, enchaîne la présidente du Conseil central du Montréal métropolitain, Dominique Daigneault. On ne peut pas accepter que le gouvernement reste les bras croisés. La situation s’est tellement aggravée que c’est devenu aujourd’hui une des causes principales des difficultés de main-d’œuvre des établissements. Il y a l’équivalent de plus de 13 000 postes à temps complet en assurance-salaire dans le réseau au Québec. Ça doit changer maintenant! »

Yvan Duceppe, trésorier aux stratégies solidaires

Yvan Duceppe, nouvellement élu à titre de trésorier lors du 66e Congrès de la CSN tenu en janvier 2021, n’en est pas à ses débuts d’implication syndicale dans la défense de la classe ouvrière. En effet, ce comptable professionnel agréé compte à son actif près d’une trentaine d’années d’expérience à titre de conseiller chez MCE Conseils, un des outils collectifs de la confédération mis au service des syndicats dans le maintien et la création d’emplois ainsi que dans l’élaboration de stratégies de développement durable. Une vingtaine d’années passées à la trésorerie de la Fédération des professionnèles (FP–CSN) s’ajoute au parcours de ce militant hors pair qui comprend très bien le rôle fondamental que joue l’administration et la trésorerie dans le développement d’un syndicalisme combatif et solidaire.

Une révolution formatrice
Grandement inspiré par la Révolution tranquille et la montée du Parti Québécois dans les années 70, Yvan Duceppe commence son cheminement de militant au cours de ses études secondaires en s’impliquant dans la circonscription de nul autre que René Lévesque et en s’investissant corps et âme dans le référendum de 1980. « C’était une autre époque. Le Parti Québécois de 1976 était celui de la loi 101 et d’une panoplie de lois visant à améliorer le sort des travailleuses et des travailleurs, » explique-t-il. « Je suis peut-être nostalgique, mais il s’agissait là de moments très formateurs pour ce qui représente le centre de mon implication syndicale : l’écoute, l’entraide, et la solidarité. »

Après la défaite du camp du oui, Yvan poursuit ses études aux HEC en finances. « J’aime beaucoup les chiffres », nous confie-t-il en souriant. « Lorsque je termine mon bac en 1983, le Québec est en grande récession économique. Je décide donc de prolonger mes études en me plongeant dans la comptabilité publique afin d’obtenir le titre de comptable agréé. »

Quelques années plus tard, il remarque une annonce dans La Presse pour un poste d’analyste financier chez MCE Conseils tout près de chez lui à Longueuil. Il ne connaît pas l’entreprise, mais comme il admire sa mission, il décide de postuler. Lors de son processus d’embauche, il se retrouve devant Léopold Beaulieu, trésorier de la CSN à l’époque et éventuel fondateur de Fondaction, et comprend l’ampleur des défis qui l’attendent. Il accepte le poste et se lance dans une aventure qui marquera sa vie à jamais.

Des conseils stratégiques pour sauver des emplois
Accompagnant surtout les syndicats du secteur privé lors de sa carrière chez MCE Conseils, les dossiers qui l’animent le plus sont ceux où il réussit à « sauver la shop ». Il prend comme exemple le syndicat d’Expro de Salaberry-de-Valleyfield dans les années 90, où l’intervention de la CSN et de MCE Conseils n’a pas seulement aidé à garder les portes de l’usine ouvertes, mais aussi à la moderniser pour la rendre plus sécuritaire pour les personnes qui y travaillent. « Cette bataille qu’on a menée, oui, c’était pour sauver des jobs, mais c’était aussi pour sauver des vies. Puis, par la mise en place d’une coopérative de travailleurs-actionnaires, on souhaitait que les travailleuses et les travailleurs s’approprient des pouvoirs décisionnels sur l’orientation de l’entreprise. »

Yvan Duceppe (4e à gauche) lors de l’ouverture officielle de la scierie Saint-Michel des Saints en 2017:

Plus récemment, il y a eu la relance de la scierie Saint-Michel-des-Saints planifiée à la suite de la fermeture de la multinationale Louisiana Pacific et de son usine de panneaux à copeaux orientés (OSB) en 2007. « Quand Louisiana Pacific a fermé ses portes, c’était la mort annoncée de la petite scierie de Saint-Michel-des-Saints qui approvisionnait cette usine désuète. En fait, cela est arrivé en 2014. Le syndicat et la communauté se sont pris en main et se sont dit : « À qui le bois ? À nous le bois ! » Finalement, l’usine a repris ses activités en 2017. Les prévisions initiales de la création d’une cinquantaine d’emplois se sont révélées trop modestes. En fin de compte, c’est le double du nombre d’emplois attendus qui ont été créés. Pour moi, ça vaut toutes mes paies. »

L’amour du lointain, ou comment conjuguer syndicalisme et environnement
Tout comme son prédécesseur, le dossier de l’environnement et de la lutte contre la crise climatique se retrouve dans ses responsabilités. Il remarque d’ailleurs certains parallèles entre le travail stratégique qu’il menait pour MCE Conseils et ce qui l’attend dans ce dossier chaud.

« La transition juste, si tu ne t’en occupes pas, elle va s’occuper de toi. Il faut prendre les devants, outiller notre monde pour voir clair et viser juste afin de nous assurer que la transition soit équitable et ordonnée. Il ne faut pas la subir, mais plutôt la planifier », prévient Yvan. « Les travailleuses et les travailleurs sont les principaux acteurs de cette lutte. Quand je visitais des usines avant de démarrer un mandat de MCE Conseils, je disais que je connaissais bien les chiffres, mais que je devais m’imprégner du fonctionnement de l’usine. Pour y arriver, j’ai toujours estimé que les travailleurs devaient m’accompagner, puisque ce sont eux les spécialistes de l’usine. C’est essentiel de se servir des cerveaux des gens plutôt que de simplement se fier à leurs bras. Il faut avoir l’humilité de savoir qu’on ne peut pas être spécialiste dans tout, et avoir la sagesse de s’entourer des bonnes personnes, celles qui possèdent la connaissance de la réalité de leur travail et de leur usine. »

Une administration saine, combative et solidaire
En terminant, bien que l’administration et la trésorerie peuvent parfois paraître secondaires à la mobilisation et à la vie syndicale, Yvan Duceppe nous rappelle leur grande importance au bon fonctionnement du mouvement.

« Tous les combats syndicaux se font à partir de ressources. Si tu ne gères pas bien les finances qui te sont confiées, tu vas avoir des problèmes », précise le nouveau trésorier. Et la CSN a le devoir d’outiller les syndicats pour que leur gestion administrative soit plus simple. Aider les syndicats à s’occuper de leurs affaires est un de mes objectifs à titre de trésorier de la confédération. Les finances d’un syndicat servent à la solidarité, et ceux et celles qui les gèrent doivent avoir cette sensibilité. Ce n’est pas uniquement une tâche technique. C’est du militantisme que de veiller à ce que les conditions de travail de nos membres soient préservées et améliorées. C’est toute une mission. »

Donnons-nous les moyens de nos ambitions !

Depuis le début de la crise sanitaire, les enseignantes et enseignants du Québec ont porté le système d’enseignement supérieur sur leurs épaules. Nous avons dû adapter en un temps record notre enseignement pour permettre la réussite de nos étudiantes et étudiants et assurer un enseignement de qualité, malgré le manque de reconnaissance et de ressources pour le faire. À bout de souffle, nous exhortons le gouvernement du Québec à investir dans les ressources humaines pour nous permettre de poursuivre cette tâche colossale sans y engager notre santé ou compromettre la réussite de nos étudiantes et étudiants.

Le gouvernement Legault prétend que l’enseignement supérieur est une de ses priorités en temps de pandémie, au point de considérer le secteur comme un service essentiel. Pourtant, les faibles ressources investies pour faire face à un chamboulement majeur du mode d’enseignement ont davantage été dédiées à des infrastructures que pour le personnel enseignant.

Ce sont pourtant ces enseignantes et ces enseignants qui ont dû fournir la plus grande part de l’effort d’adaptation. Modifiant nos cours pendant nos temps libres et nos vacances, suivant des formations souvent non rémunérées pour apprendre des nouvelles formes d’enseignement et nous familiariser avec de nouvelles technologies, nous avons également dû dédier énormément d’heures supplémentaires, toujours bénévolement, pour assurer un encadrement adéquat à nos étudiantes et étudiants qui vivent des situations tout aussi difficiles.

Il va sans dire que la crise sanitaire a également eu un impact important sur la motivation et le parcours scolaire de milliers d’étudiantes et d’étudiants. Nous avons constaté à quel point les inégalités sociales étaient exacerbées par l’accès inégal aux ressources informatiques autant que culturelles. Il nous faut avoir les moyens de permettre à toutes et à tous de réussir et cela passe aussi par des conditions d’enseignement décentes, entre autres pour permettre une relation pédagogique plus humaine.

Un éventuel déconfinement ne devrait pas être plus aisé, puisque le gouvernement voudrait, sans jamais nous avoir consultés au préalable, nous imposer des cours en « comodal », c’est-à-dire à une partie de la classe en présence et l’autre à distance. Comme si l’animation d’une classe « normale » pouvait se faire de la même manière que celle d’un cours à distance, sans que l’une ou l’autre (ou les deux) ne perde en qualité. Toutes ces tâches et adaptations exigent du temps et des conditions de travail qui ne sont pas au rendez-vous. Il faudrait que le prochain budget provincial s’assure de nous donner les moyens d’enseigner dans des conditions adéquates.

Heureusement, nos efforts ont permis de maintenir un enseignement de qualité, malgré la situation adverse, et les taux de diplomation autant que la valeur de ces diplômes n’ont pas été compromis. À bout de ressources, sans moyens suffisants pour accomplir notre tâche, nous craignons cependant pour la santé mentale et physique du corps enseignant qui se sent épuisé et délaissé.

Dans un contexte où les services publics ont été affaiblis par des années d’austérité, le discours de retour à l’équilibre budgétaire qui se fait de plus en plus entendre nous fait craindre le pire. Le gouvernement doit injecter des sommes supplémentaires pour soutenir les enseignantes et les enseignants des cégeps et des universités afin de favoriser la réussite étudiante, condition essentielle au développement social, culturel et économique et génératrice de richesse collective.

Après des décennies de sous-financement de l’éducation et de l’enseignement supérieur, ce ne sont pas seulement des ressources pour une sortie de crise pandémique dont le réseau a besoin, mais d’un véritable réinvestissement à long terme qui permette à nos cégeps et nos universités d’assumer pleinement leur rôle de bâtisseurs de la société de demain.

Donnons-nous les moyens de nos ambitions !

Syndicat des professeures et professeurs enseignants de L’UQAM
Syndicat des professeures et professeurs du Collège de Rosemont
Syndicat des professeurs du Collège d’enseignement général et professionnel de Saint-Laurent
Syndicat des chargées et chargés de cours de l’université de Montréal-SCCUM
Syndicat du personnel enseignant du Collège d’enseignement général et professionnel d’Ahuntsic
Syndicat des professeurs du Collège d’enseignement général et professionnel du Vieux-Montréal
Syndicat des enseignantes et enseignants du Cégep Montmorency
Syndicat de l’enseignement du cégep André-Laurendeau

Rendre la culture vivante possible à nouveau

Le milieu des arts vivants et des arts de la scène a pris acte des avis rendus publics concernant la réouverture des salles de spectacles, des théâtres ainsi que des autres lieux de diffusion. Notre secteur demeure le plus touché par la pandémie en étant fermé au public depuis près d’un an et nous avons appris par l’entremise des médias que l’ouverture des lieux de diffusion était recommandée par la Santé publique depuis novembre. Plus le secteur attend sa réouverture, plus il sera difficile de le relever.

L’APASQ, l’AQAD, la FNCC–CSN, la GMMQ, TRACE et l’UDA souhaitent maintenant que le gouvernement prenne acte des nombreux sacrifices faits par les artistes, les créateurs et les musiciens, et qu’il agisse pour que ceux-ci puissent retourner à la rencontre de leurs publics. Maintenant qu’il est clair que la Santé publique est favorable à une ouverture des salles, le couvre-feu ne devrait pas être un frein à la production ni à la diffusion artistique. Le milieu a réellement besoin d’un signal clair de la part du gouvernement et nous implorons M. Legault d’exprimer rapidement ses intentions quant à la réouverture des salles de spectacle.

Le milieu des arts vivant a toujours fait preuve d’une grande créativité et d’innovation depuis le début de la pandémie. Nous sommes d’avis que tout le monde a son rôle à jouer. Aujourd’hui, nous demandons à tous les acteurs du milieu culturel ainsi qu’au gouvernement de faire preuve d’écoute et de flexibilité afin de favoriser une ouverture pérenne de nos lieux culturels, et ce, dans le plus grand respect des mesures sanitaires en vigueur et du bien collectif.

Citations

« Nous en appelons à la flexibilité et à la résilience de tous les acteurs de la chaîne culturelle. Pour le gouvernement, cela signifie qu’il ne doit pas être rigide dans l’application des programmes de compensation aux diffuseurs afin de permettre des ouvertures immédiates ou ultérieures adaptées à la réalité de chacune des productions. L’aide financière doit se poursuivre, tant pour les productions qui pourront reprendre rapidement en respectant les contraintes imposées par la Santé publique, que pour celles qui prendront plus de temps à pouvoir retrouver leur public. C’est une approche flexible et multilatérale qui nous permettra de sauver les arts vivants, les lieux de diffusion ainsi que nos artistes et créateurs. »

  • Pascale St-Onge, présidente de la FNCC–CSN

« Les décideurs publics doivent pouvoir faire preuve d’ouverture à l’égard des solutions qui sont proposées par le milieu, mais pour ce faire, il faudrait que tous les acteurs soient consultés, incluant les artistes, les créateurs et les professionnels qui sont au cœur de notre vie culturelle, afin que les propositions créatives soient mises sur la table. Cela vaut également pour les professionnels de la Santé publique qui mettent en place des protocoles et des scénarios de réouverture : sans fermer le secteur complet, serait-il possible d’ouvrir les lieux de diffusion et de les fermer à la pièce si une éclosion devait survenir, comme c’est le cas dans la plupart des autres milieux de travail ou scolaires ? »

  • Sophie Prégent, présidente de l’UDA

« La réouverture des salles sera salutaire pour les artistes et les travailleurs culturels sans travail depuis trop longtemps. Nos membres ont à cœur le bien de la population et ils ont le sentiment d’avoir largement contribué à cette lutte collective contre la pandémie, mais les impacts sur nous sont disproportionnés. C’est très difficile pour nous de comprendre que nous sommes toujours à l’arrêt malgré les avis contraires de la Santé publique. Nous souhaitons que le premier ministre applique les recommandations de la Santé publique pour notre secteur. »

  • Luc Fortin, président-directeur général de la GMMQ

« Nous sommes persuadés que le public est prêt à se mettre de la partie en acceptant d’aller voir des spectacles à des moments différents et variés afin de respecter le couvre-feu. Tout le monde peut contribuer à faire de l’ouverture un succès. Rien n’a démontré que les lieux de diffusion et les salles de spectacles étaient des sources de contamination pendant les 45 jours durant lesquels notre secteur a été ouvert au cours de la dernière année. Les mesures sanitaires ont fait leurs preuves. »

  • Viviane Morin, directrice générale de l’APASQ

« Le milieu des arts vivants est très diversifié : si certaines productions majeures ne sont pas encore prêtes à se produire, il y a une foule d’autres types de représentations qui pourraient s’adapter et aller à la rencontre du public rapidement. Rien ne nous empêche, collectivement, d’y aller étape par étape. Le gouvernement doit nous aider à reprendre le travail. »

  • Marie-Eve Gagnon, directrice générale de l’AQAD

« Le public a aussi un réel besoin de renouer avec les arts vivants et de pouvoir quitter sa bulle de temps en temps. Avec le couvre-feu et l’interdiction de rassemblement intérieur, la population devrait être encouragée à fréquenter des lieux publics contrôlés et sécuritaires tels que les lieux de diffusion culturelle. C’est bon pour le moral de tout le monde ! »

  • Shérane Figaro, co-porte-parole de TRACE

Un livre blanc, vraiment ?

Éditorial de Jacques Létourneau, président de la CSN

On apprenait cette semaine que des 15 000 places en CPE annoncées par le ministre de la Famille il y a deux ans, seulement 2300 d’entre elles ont pu être créées. Pendant ce temps, 51 000 familles sont toujours en attente d’une place pour leur enfant.

Le financement ne serait donc pas la seule raison du problème, comme c’était le cas sous le règne des libéraux. Ceux-ci avaient profité de leurs quinze années au pouvoir pour favoriser le développement des garderies privées, dont le nombre de places a été multiplié par six de 2010 à 2018 au détriment du développement et de la consolidation des services de garde en CPE ou en milieu familial.

Plusieurs voix se sont fait entendre au cours des derniers jours pour dénoncer la rigidité et la lenteur des procédures d’octroi de subventions au ministère de la Famille. Alors que la construction d’une école s’effectue généralement en 18 mois, il en prend entre 3 et 4 ans pour la construction d’un CPE, un type d’établissement dont l’ampleur et la complexité sont pourtant bien moindres. Pas moins de 17 étapes d’approbation — 17 ! — doivent être traversées.

Qu’on veuille bien faire les choses, nous en sommes. Mais quand le zèle du ministère de la Famille vient brimer la possibilité pour des milliers de parents de bénéficier de milieux de garde subventionnés, c’est toute notre société qui en souffre.

Ce sont toutefois les écarts d’accessibilité énormes entre différents milieux que je trouve, personnellement, encore plus aberrants. Comment expliquer que les résidents de Westmount aient accès, toutes proportions gardées, à deux fois plus de places en CPE que ceux de Montréal-Nord ou de Parc-Extension ?

Les projets de construction de CPE doivent être soumis au gouvernement « par la communauté ». Soit. Mais se pourrait-il qu’une « communauté » comme celle de Westmount, plus que privilégiée sur les plans social et économique, soit plus outillée pour élaborer de tels projets que celles de milieux beaucoup plus défavorisés ?

Poser la question, c’est y répondre.

Il est pourtant de la responsabilité du gouvernement de veiller au développement et à la consolidation du réseau des CPE et d’en assurer un accès équitable à l’ensemble des familles du Québec. Plutôt que de multiplier les étapes d’approbation, les gestionnaires du ministère de la Famille devraient soutenir les communautés dans le développement de leurs projets.

Malheureusement, l’idéologie du « tout-au-privé » du précédent gouvernement semble avoir eu raison du savoir-faire qui existait au ministère de la Famille. Au début des années 2000, qu’on s’en rappelle, c’est entre 8000 et 9000 places en CPE qui étaient créées chaque année.

Lors de l’annonce de la création des maternelles 4 ans, nous avions avisé le gouvernement de notre opposition à une solution mur-à-mur. Nous souhaitions qu’il privilégie la complémentarité des différents réseaux et qu’il tienne pleinement compte des besoins particuliers de l’ensemble des communautés. Entêté et enorgueilli par cette promesse électorale, il a plutôt fait fi de nos mises en garde, avec les conséquences que l’on connaît : les services de garde en milieu familial ont écopé et des milliers d’entre eux ont fermé depuis.

Développement, consolidation et complémentarité des réseaux de services de garde subventionnés, voilà les objectifs qui devraient prévaloir au ministère de la Famille. Au quotidien, les communautés ont besoin d’un appui logistique dans l’élaboration de projets répondant à leurs besoins.

Avant de penser à révolutionner le monde avec un livre blanc, le ministre Mathieu Lacombe doit faire le ménage dans son propre ministère et y ramener l’expertise et le savoir-faire qui y prévalaient lors des premières années de la mise en place du réseau des CPE. En y réduisant la bureaucratie, il permettra aux fonctionnaires qui y œuvrent de consacrer à nouveau leurs énergies à l’appui des communautés — notamment celles qui sont plus vulnérables — dans l’élaboration de leurs projets.

Le ministre Lacombe devra également convaincre ses collègues des Finances et du Trésor de s’attaquer au problème de pénurie de main-d’œuvre reliés aux maigres salaires et aux mauvaises conditions de travail des éducatrices en petite enfance. S’il n’y voit pas rapidement, c’est le réseau des CPE tout entier, ce joyau tant envié par le reste du Canada, qui s’en trouvera grandement fragilisé. De tous les programmes techniques offerts dans nos cégeps, cette formation demeure parmi les moins « rentables », celles dont le salaire figure parmi les plus bas sur le marché du travail. Déjà, les CPE peinent à recruter, et ce problème est en croissance depuis des années. Au manque de places criant, s’ajoute malheureusement un inquiétant manque de personnel.

Encore ici, ce n’est pas le livre blanc annoncé par le ministre Lacombe qui viendra régler cette situation plus que préoccupante.

Se mobiliser pour faire avancer nos revendications

« Jamais bataille n’est perdue pour celle qui se bat toujours ». Cette courte phrase résonne dans la tête de Katia Lelièvre, vice-présidente nouvellement élue au dernier congrès de la CSN, depuis qu’un ancien collègue la lui a lancée au détour d’une conversation. La citation, un brin philosophique, résume à elle seule l’engagement qui anime la militante depuis la naissance de son fils, il y a 28 ans.

À cette période de sa vie, Katia doit subvenir aux besoins de son garçon. Elle cogne à la porte de la Maison de la famille de Bois-des-Filion, un organisme communautaire de la banlieue nord de Montréal qui tente d’apaiser l’insécurité alimentaire des plus démunis. En préparant des plats à un dollar dans les casseroles de la cuisine collective mijotent aussi les ingrédients du militantisme dans le cœur de la jeune maman. Elle découvre l’entraide, la camaraderie, la solidarité et l’implication.

Rapidement, elle se retrouve responsable de la cuisine collective. « Personne ne voulait s’en occuper », rigole Katia, fidèle au franc-parler qui la caractérise. En s’impliquant au sein du conseil d’administration, elle en scrute les états financiers. La comptabilité créative de l’organisme permettait à 1 + 1 d’égaler 3. « J’ai posé plein de questions et tout le monde a démissionné. Je me suis retrouvée seule au CA », se rappelle-t-elle. En collaboration, les mères bénévoles se sont alors mobilisées pour trouver des subventions, des dons et un nouveau local. Menacée de fermeture à l’époque, la cuisine communautaire a toujours pignon sur rue, aujourd’hui.

Apprendre grâce au SEMB-SAQ–CSN
Cette première expérience de mobilisation et sa soif de justice lui serviront lorsqu’elle sera embauchée comme caissière-vendeuse à la SAQ, près de chez elle. Dans une lettre publiée dans le journal syndical et expédiée au président de la SAQ, la militante s’insurge contre des avantages conférés aux cadres, avantages pourtant retirés aux membres retraités de la société d’État.

S’amorce une implication active et formatrice auprès du Syndicat des employé-es de magasins et de bureaux de la SAQ (SEMB-SAQ–CSN), d’abord localement, puis régionalement et, par la suite, à la vice-présidence avec les responsabilités de la vie syndicale, des communications et de la mobilisation. « Ce sont les tâches que j’ai préférées parmi toutes », admet Katia, qui a aussi adoré présider le syndicat pendant quelques années. « Nous, on est dans 400 lieux de travail différents, aux quatre coins du Québec, avec des réalités diverses. La clé pour établir une cohésion de groupe, briser l’isolement et consolider la solidarité, c’est la communication. Grâce aux médias sociaux et à la vidéo, nous avons pu nous parler et relever le défi. » Elle cite en exemples l’instantanéité des médias sociaux et la force des capsules vidéo comme gages de succès pour mobiliser les membres, lors de la plus récente négociation du SEMB-SAQ–CSN en 2018.

Un syndicalisme encore plus combatif
La vice-présidente de la CSN entame son nouveau mandat avec la promesse d’un style de syndicalisme encore plus combatif, ancré dans toutes les régions. Elle voudrait impliquer davantage les membres de partout dans leur prise en charge, pour qu’ils se mobilisent. Ça passe par la communication et la simplification des messages, selon elle, pour que les membres se sentent concernés.

Celle qui s’occupera également de la vie syndicale à la CSN rappelle qu’il faut se battre également entre les négociations. « Il faut maintenir le feu entre deux négos. Parce que si on le laisse s’éteindre, il faut le repartir avec du petit bois, pis c’est de l’ouvrage ! », image-t-elle.

L’enseignement à distance post-pandémie : pas si vite, dit la FNEEQ

À la suite de la publication aujourd’hui d’une lettre adressée à la ministre Danielle McCann et signée par 55 professeur-es de cégep, la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants du Québec (FNEEQ-CSN), qui représente environ 85 % des gens enseignant dans le réseau collégial public, tient à réitérer la valeur inestimable de l’enseignement en présence et ses avantages incomparables.  

La dernière année a obligé le personnel enseignant à improviser et à multiplier les efforts pour diminuer sensiblement l’impact de la pandémie sur la réussite ainsi que sur la persévérance des étudiantes et des étudiants. Cela dit, elle n’a pas encore permis de réfléchir collectivement aux balises essentielles à l’intérieur desquelles le développement de l’enseignement à distance doit s’effectuer. La façon de dispenser la formation collégiale, par exemple en présence ou non, ou de manière synchrone ou asynchrone, doit pouvoir se justifier tant sur le plan de la pédagogie que sur celui du développement psychosocial. De plus, la fédération estime qu’il s’avère impératif que la qualité et la richesse des interactions ainsi que le développement de compétences relationnelles et communicationnelles restent des critères d’appréciation aussi importants pour les cours à distance que pour ceux qui sont donnés en mode présentiel. Il importe que tout mode de transmission de la formation vise le développement des personnes sur les plans humain, citoyen et professionnel de même que le développement de leur autonomie et de leur esprit critique.

 « La pandémie a fait en sorte que la formation en mode non présentiel s’impose sans réelle réflexion, préparation ou discussion. En raison de son caractère inédit, cette période ne doit surtout pas servir de modèle pour l’avenir de l’enseignement supérieur », souligne Caroline Quesnel, présidente de la FNEEQ-CSN. « Nous ne sommes pas encore sortis de la crise sanitaire et il serait prématuré, autant pour le ministère de l’Enseignement supérieur que pour les directions d’établissement, de prendre des décisions à cet égard, notamment en lien avec l’instauration généralisée de l’enseignement comodal. »

 Afin de permettre à toutes les enseignantes et à tous les enseignants de se faire entendre, la fédération demande que les conventions collectives prévoient la consultation des instances concernées (département, comité de programme, etc.) avant toute mise en œuvre d’un enseignement à distance.

« Nous ignorons encore où nous en serons l’automne prochain et la contribution de toutes les personnes préoccupées par l’avenir de l’enseignement supérieur est la bienvenue. Ce type de discussion doit se faire dans les lieux appropriés, par exemple les assemblées générales », conclut Yves de Repentigny, vice-président et responsable du regroupement cégep de la FNEEQ-CSN.

Accueil Bonneau : une décision antisyndicale qui nuit aux personnes itinérantes

Les travailleuses et les travailleurs de l’Accueil Bonneau ont manifesté aujourd’hui pour dénoncer la décision de la direction de l’Accueil Bonneau qui a aboli unilatéralement tous les postes des intervenantes et intervenants qui travaillaient en première ligne à la nouvelle halte-chaleur dans le Vieux-Port de Montréal. Le Syndicat des travailleuses et des travailleurs de l’Accueil Bonneau (CSN) estime qu’il s’agit d’une mauvaise décision, dont les motifs ne sont pas aussi clairs que le prétend l’organisation.

Cette décision de janvier dernier a en effet permis de décimer l’exécutif syndical à la veille du début des négociations pour un nouveau contrat de travail. De plus, le syndicat estime qu’il n’est pas du tout « innovant », comme le prétend la direction, de remplacer les intervenantes et intervenants de première ligne expérimentés et formés, par des agents de sécurité sous prétexte que la priorité est maintenant au logement (housing first).

« Tant qu’il y aura des itinérants dans la rue, il faudra les accompagner de façon humaine et les besoins demeureront importants, même pour ceux et celles qui auront la chance d’obtenir un logement », soutient Chloé Bourbiaux, porte-parole du Syndicat des travailleuses et des travailleurs de l’Accueil Bonneau (CSN). « La tendance que l’on constate sur certains sites d’accueil de personnes itinérante d’embaucher des gardiens de sécurité pour faire le travail de première ligne n’est vraiment pas un pas dans la bonne direction. L’accueil devrait être plutôt axé sur l’humain et non pas concentré sur les seuls besoins de sécurité », affirme Katia Lelièvre, vice-présidente de la CSN.

Tendance au délaissement de la première ligne
La tendance actuelle à favoriser le logement d’abord (housing first), présente partout en Amérique du Nord et de plus en plus à Montréal, fait en sorte qu’elle canalise, dans certains ca, les subventions ou les dons du privé vers ces initiatives. « La course aux subventions associées à des projets et le désir de voir baisser les statistiques du nombre d’itinérants ne doit pas faire oublier qu’il y a encore des personnes dans la rue à Montréal, en plein hiver, en pleine pandémie et que leurs besoins comportent plusieurs dimensions », affirme Dominique Daigneault, présidente du Conseil central du Montréal métropolitain (CCMM–CSN).

 Cette tendance touche également les autres grands refuges de Montréal qu’ils soient permanents ou temporaires. « Il est important de conserver une première ligne forte pour accompagner les itinérantes et les itinérants. Il faut des lits pour un accueil inconditionnel qui ne repose pas sur l’enrôlement dans un programme de travail ou de logement », ajoute Jeff Begley, président de la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS–CSN). Ce dernier ajoute que la tendance au remplacement de la première ligne d’accueil des itinérants par des agents de sécurité n’est pas une politique innovante, bien au contraire.

Le musée des horreurs

Éditorial de Jacques Létourneau, président de la CSN

Des employé-es forcés de travailler malgré la fièvre. Des tâches de désinfection abandonnées pendant plus d’une semaine après que la responsable, malade, ait dû s’isoler. Des mouvements de personnel fréquents entre zones chaudes et froides. Une absence de mesures de prévention et de contrôle des infections. Des équipements en nombre tellement insuffisant qu’on doit se les partager entre collègues.

La lecture de l’enquête menée par les journalistes de La Presse ce matin donne froid dans le dos. Après avoir épluché les rapports d’intervention de la CNESST dans plus de 230 centres d’hébergement et autres établissements du réseau de la santé et des services sociaux, les journalistes en arrivent à la conclusion que 20 % d’entre eux ont enfreint les règles sanitaires les plus élémentaires.

À 20 %, le gouvernement ne peut prétendre qu’il ne s’agit que d’exceptions isolées.

Le gouvernement François Legault aura beau prétexter que nous sommes devant une pandémie à l’ampleur inégalée, un fait indéniable demeure : notre réseau de santé et de services sociaux, qui souffre de sous-financement chronique depuis des années, n’était absolument pas en mesure de répondre au moindre soubresaut.

Pourtant, l’ensemble des exemples révélés par les journalistes – qui relèveraient de l’anecdote s’ils n’étaient à ce point généralisés – ont pour origine deux causes bien documentées : le manque flagrant de personnel dans le réseau de la santé et des services sociaux, ainsi que l’hypercentralisation de son mode de gestion.

Deux réalités que les syndicats de la CSN dénoncent depuis des années. Encore faudrait-il que le gouvernement, peu importe sa couleur, prenne la peine de les écouter.

Depuis plusieurs négociations, les travailleuses et les travailleurs du secteur public martèlent que les faibles salaires et les surcharges de travail constituent le principal frein au recrutement de personnel en éducation et en santé. Quand un gestionnaire doit forcer quelqu’un à faire des heures supplémentaires ou à travailler malgré la présence de symptômes reliés à la COVID, quand on tolère involontairement que la désinfection d’un centre d’hébergement ne soit plus assurée en pleine pandémie, c’est qu’on n’a tout simplement pas les bras nécessaires.

« Des infirmières, on ne peut pas en inventer ! », se défendait François Legault mardi dernier. On lui accorde. Mais encore faudrait-il être en mesure d’attirer le personnel soignant avec des conditions de travail intéressantes, et de faire de même pour l’ensemble des employé-es du secteur public, frappés, à des degrés divers, par des problèmes de pénurie et de rareté de main-d’œuvre.

Quant au manque d’équipement de protection individuelle, François Legault persiste et signe : le Québec n’en a jamais manqué, il n’y a que des établissements qui « n’ont pas levé la main » pour signifier la rupture de stock. Tout pourrait s’expliquer par… l’absence d’un patron dans chaque CHSLD.

À défaut d’être naïfs, les membres de la CSN n’ont pas non plus cette magique poignée dans le dos.

Depuis 20 ans, le réseau de la santé et des services sociaux a été de deux opérations successives visant à centraliser la gestion et la prise de décision des établissements. D’abord, sous le règne Charest-Couillard, la fusion des CHSLD, des CLSC et des centres hospitaliers au début des années 2000, varlopant au passage les Agences régionales de santé et de services sociaux. Puis, sous celui de Couillard-Barrette, la mise en œuvre de la malheureuse réforme portant le nom de ce dernier. Cette hypercentralisation des pouvoirs s’est également accompagnée d’une vision de plus en plus hospitalo-centriste du réseau, confirmant ainsi l’hégémonie des médecins, tant généralistes que spécialistes.

Doit-on rappeler au gouvernement la première décision qu’il a prise en mars dernier ? Libérer 6000 lits en centres hospitaliers afin de pouvoir accueillir les éventuels malades de la COVID. Les directions des CIUSSS et des CISSS ont ainsi déplacé des milliers de patientes et de patients soignés dans des hôpitaux… dans des CHSLD où aucune mesure n’avait été prise.

Dès le printemps dernier, la CSN a exigé une commission d’enquête publique sur les conditions d’hébergement des aîné-es et l’ensemble de la gestion chaotique de la pandémie par le réseau de la santé et des services sociaux. Après avoir – bien brièvement – évoqué la nationalisation des centres d’hébergement privés, le gouvernement de François Legault a préféré confier à la commissaire à la santé et au bien-être, Joanne Castonguay, le soin d’examiner la performance du réseau lors de la première vague.

Plusieurs ont été déçus de ce mandat édulcoré. Pourtant, la commissaire pourra jouir de presque tous les pouvoirs conférés à une commission d’enquête. Encore faudra-t-il qu’elle les utilise à bon escient. La CSN y veillera.

Les travailleuses et travailleurs de la santé enfin mieux protégé-es face à la COVID-19

Comme le réclame la FSSS–CSN depuis le début de la pandémie, les travailleuses et travailleurs de la santé qui travaillent auprès des patients atteints de la COVID-19 pourront utiliser des appareils de protection respiratoire N-95 ou leur équivalent pour se protéger.

Rappelant que plus de 30 000 travailleuses et travailleurs de la santé ont contracté la COVID-19 et que certains y ont laissé leur vie, la FSSS–CSN se réjouit du fait que la CNESST affirme enfin et sans ambiguïté que les appareils de protection respiratoires constituent des moyens de prévention nécessaires pour réduire les risques d’exposition des travailleurs et travailleuses de la santé œuvrant en zone chaude.

Cette nouvelle directive vient calmer l’indignation que la récente décision du comité sur les infections nosocomiales (CINQ) de l’INSPQ avait provoquée au sein du personnel du réseau. En effet, tout en indiquant vouloir protéger le personnel de la santé et leur donner accès aux masques N-95, le CINQ recommandait de ne considérer offrir ces respirateurs N-95 que dans les cas d’éclosion non contrôlée et au terme d’une longue démarche bureaucratique, ainsi que d’une série de conditions restreignant considérablement leur accès au moment opportun.

« Ça fera bientôt un an que la pandémie est en cours. Il est plus que temps que la CNESST intervienne pour s’assurer que le personnel de la santé soit bien protégé. La CNESST doit s’imposer en matière de prévention en santé et de sécurité au travail. C’est son travail, et il était impératif d’intervenir en réponse aux directives du CINQ de l’INSPQ », affirme Jeff Begley, président de la FSSS–CSN.

La décision de la CNESST est l’aboutissement d’une longue lutte des organisations syndicales et de certains scientifiques et professionnels de la santé qui revendiquent ce droit depuis les débuts de la pandémie. Face à la flambée des cas au sein du personnel, mais aussi de la population, tout a été mis en œuvre pour obtenir ce changement d’orientation. Des recours juridiques ont été entrepris, des représentations constantes ont été faites auprès des organisations en cause, des documents ont été déposés et les médias alertés. Ces recours multiples ont finalement fait entendre la voix de la raison. Mieux vaut tard que jamais, surtout que nous ne sommes pas à l’abri de nouveaux variants.

« Nous n’avons ménagé aucun effort et nous continuerons de le faire, de telle sorte à s’assurer que le personnel soit bien protégé au travail à l’avenir, mais aussi pour s’assurer qu’une telle situation, où pendant un an on met la santé et la sécurité du personnel à risque, ça ne puisse plus se reproduire », ajoute Judith Huot, première vice-présidente à la FSSS–CSN.

Cette victoire démontre, une fois de plus que la mobilisation et l’organisation sont les seuls garants de la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs et travailleuses.

Budget du Québec : se donner tous les moyens

Alors que la deuxième vague continue de s’abattre sur notre société, il va sans dire que les défis qui attendent le Québec sont gigantesques. Non seulement pour redémarrer l’économie, mais également pour s’assurer que nos institutions publiques, particulièrement nos réseaux de santé et d’éducation, soient en mesure de soutenir nos efforts en matière de relance économique et sociale.

Devant des défis d’une telle ampleur, il nous apparaît insensé que le Québec ne puisse compter sur l’ensemble des moyens qui sont à sa disposition. C’est en ce sens que nous interpellons aujourd’hui le ministre des Finances du Québec en vue du dépôt du prochain budget.

Le gouvernement doit rompre avec la stratégie d’austérité budgétaire qu’il poursuit depuis maintenant 25 ans. Il est aberrant que le carcan financier imposé par le retour à l’équilibre budgétaire et les versements au Fonds des générations — deux mesures adoptées dans un tout autre contexte et qui, de surcroît, avaient rempli leurs objectifs avant le début de la pandémie ! — continuent de miner notre capacité à nous sortir de la crise actuelle. Pourtant, au cours des deux dernières décennies, les finances publiques du Québec se sont grandement améliorées : la dette nette est désormais comparable à celles des gouvernements du Canada et de l’Ontario et, contrairement à celui du Québec, aucun de ces gouvernements ne détourne une part de ses revenus courants vers le remboursement de sa dette publique.

Une vaste majorité d’analystes s’entendent pour dire qu’un retour à l’équilibre budgétaire dès 2025 est irréaliste sans devoir hausser les impôts ou couper dans les dépenses publiques. Une solution souhaitable serait de repousser cette date butoir, comme le gouvernement l’a fait à la suite de la crise économique de 2008 dont l’ampleur était pourtant moins grave que celle d’aujourd’hui.

En pleine pandémie, il est inconcevable que le gouvernement s’oblige à dégager un surplus de près de 3 milliards de dollars afin de rembourser la dette publique à partir des revenus courants. Cela constitue une politique d’austérité budgétaire. L’état du ratio dette nette/PIB du Québec, inférieur à ceux de l’Ontario et de nombreuses économies de l’OCDE, milite en faveur d’une suspension des versements au Fonds des générations — tout comme la faiblesse actuelle et à venir des taux d’intérêt, et donc du service de la dette.

On s’en doute, le Québec a des besoins immédiats beaucoup plus importants, y compris pour ces « générations futures » qui, dans l’immédiat, se butent au sous-financement chronique de notre réseau d’éducation.

Bien que nous soyons entièrement d’accord avec la volonté du gouvernement du Québec de voir le gouvernement fédéral augmenter sa contribution aux coûts du système de santé, force est de constater qu’il fait piètre figure à ce chapitre : il se classe à l’avant-dernier rang des provinces en matière de dépenses en santé, accusant un écart de 333 $ par habitant sous la moyenne canadienne.

Pour nos organisations, il est urgent d’investir massivement dans le réseau de la santé et des services sociaux ainsi qu’en éducation.

Faut-il, une fois de plus, faire ici la démonstration des liens directs entre les piètres conditions de travail du secteur public et les graves problèmes de pénurie et de rareté de main-d’œuvre qui ont miné la capacité de nos services de santé et d’éducation — sans parler des services de garde, essentiels au plein emploi et à la croissance économique — à répondre aux impacts de la pandémie ?

Les conditions de travail des employé-es des services publics ne peuvent plus être la variable servant à accélérer le retour à l’équilibre budgétaire. Avant même de pouvoir envisager un règlement dans le cadre des négociations du secteur public, il revient au ministre des Finances de s’assurer que la croissance des budgets alloués aux dépenses de programmes des principales missions de l’État permette l’amélioration des conditions de travail du secteur public et l’embauche du personnel nécessaire à la prestation de ces services.

Dans son budget, le ministre des Finances devra prévoir un financement adéquat d’un plan de relance de l’économie. Dès le printemps dernier, nous demandions au gouvernement d’instaurer les bases d’un véritable dialogue social avec la société civile pour discuter des différents moyens appropriés pour appuyer les travailleuses, les travailleurs et les entreprises dans leurs efforts de numérisation, de robotisation, de formation et de transition écologique, pour ne nommer que ceux-là.

Malheureusement, cet appel ne semble pas avoir été entendu par le premier ministre. Encore moins par son ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, dont la quête de « synergies » et de « pôles d’innovation » ne semble pas s’aventurer au-delà des portes closes d’un cercle restreint d’initiés.

Ce sont les membres que nous représentons, faut-il le rappeler, qui ont subi de plein fouet les impacts de la crise. Dans l’ensemble des démarches pour la relance de l’économie, nous estimons nécessaire d’instaurer ce dialogue social afin que les travailleurs et les travailleuses puissent faire valoir leurs besoins et leurs préoccupations en matière d’emploi, de formation et de transformation de leurs milieux de travail. Les organisations syndicales connaissent leurs secteurs d’activités et, en ce sens, ont un rôle de premier plan à jouer dans cette relance.

Texte signé par : Jacques Létourneau, président de la CSN, Daniel Boyer, président de la FTQ, Sonia Ethier, présidente de la CSQ, Luc Vachon, président de la CSD