Hélène Nazon : « Dépoussiérer nos projets éducatifs pour contrer le racisme »

Professeure de littérature au Cégep Garneau de Québec depuis plus de dix ans et vice-présidente à l’information au comité exécutif du syndicat des professeur-es depuis 2015, Hélène Nazon, dont les parents sont nés en Haïti, se plaît à répondre qu’elle vient du Nouveau-Brunswick quand on lui demande « d’où elle vient ».

« Quand je réponds ce qui est la vérité, que je suis bel et bien née au Nouveau-Brunswick, on me répond : “Non, mais tu comprends ce que je veux dire…” Je l’ai entendu tellement souvent ! J’ai aussi compris très tôt que je ne serais jamais vraiment vue comme étant “d’ici” aux yeux des autres », débute-t-elle.

Sa lunette de professeure fait en sorte qu’elle aborde les questions reliées au racisme en pensant au milieu de l’éducation en premier. « C’est mon milieu et je pense qu’on peut y faire beaucoup de choses », lance-t-elle.

Selon elle, le fait qu’une bonne partie du corps professoral des institutions d’enseignement supérieur ne représente pas la diversité de la société québécoise démontre que les choses doivent bouger. « On dit qu’on est le reflet de la société dans laquelle nous sommes. À mon département, je suis la seule professeure racisée, sur une quarantaine. Et c’est le deuxième département en importance. Dans le cégep au grand complet, il y a aussi bien peu de professeur-es racisés. Pour les déléguée-s de la FNEEQ, c’est la même chose. Pourtant, la question de la représentativité est importante pour une réelle lutte contre le racisme. Mes deux enfants voient bien peu de gens qui leur ressemblent dans les médias québécois. On ne parle même pas de quand moi j’étais enfant ! Quand les personnes qu’on voit dans les médias ou bien qui nous enseignent ne nous ressemblent à peu près jamais, quel message reçoit-on ? », demande-t-elle.

Les débats autour de la liberté académique en milieu universitaire et les revendications d’étudiantes et d’étudiants appartenant à des groupes minoritaires sont pour elle une occasion à saisir pour forcer des débats nécessaires. « À mon avis, la tangente qu’a pris cette discussion publique reflète à quel point les savoirs enseignés dans nos institutions gagneraient à être revisités et décolonisés. Et soulever ces questions dures, mais essentielles, vient toucher des cordes très sensibles, dans un contexte où notre gouvernement refuse de reconnaître la réalité du racisme systémique », souligne la professeure.

Mobilisé par ces questions, son comité exécutif a proposé à la direction du Cégep Garneau de mettre sur pied un comité de travail sur « sur l’enjeu des sujets sensibles abordés en classe » qui inclurait le syndicat, les professeur-es, la direction et les étudiantes et étudiants. « Ces discussions ne peuvent pas se faire sans eux. Il faut absolument travailler à créer de réels espaces de dialogue où toutes les parties présentes sont ouvertes à la discussion et ne demeurent pas campées sur leurs positions. Il faut voir cela comme une occasion de dépoussiérer le projet éducatif du collège », poursuit-elle.

Pour la professeure et syndicaliste, des organisations comme la CSN sont bien placées pour créer de tels espaces de dialogue. « Ces questions sont partout et ne feront que prendre plus de place avec le temps. Il faut prendre le taureau par les cornes et ne pas céder à la peur d’en parler. J’ai trouvé qu’entre le 65e et le 66e Congrès de la CSN, beaucoup de chemin avait été parcouru. On sent une mobilisation plus grande de la part du comité exécutif de la CSN. C’était important d’inscrire la campagne contre le racisme dans le plan d’action des trois prochaines années, appuyé par le plancher. Ce n’est que le début ! », termine-t-elle.

La CSN lance un avertissement à Viandes du Breton

Lors d’une conférence de presse tenue devant l’usine de Viandes du Breton, des représentants de la CSN ont lancé un avertissement à la direction de l’entreprise, en prévision de la prochaine ronde de négociation. Nancy Legendre, présidente du CCBSL–CSN, David Bergeron-Cyr, vice-président de la CSN et Alexandre Boileau-Laviolette, président de la FC–CSN étaient sur place pour appuyer les membres du Syndicat des travailleuses et travailleurs de Viandes du Breton. Ces derniers viennent d’adopter dimanche dernier un projet de négociation pour améliorer leurs conditions de travail en 2021. Le syndicat s’était aussi doté d’un mandat de moyens de pression quelques jours auparavant.

Le projet de négociation, adopté à 99 %, prévoit des augmentations salariales, mais aussi une révision des clauses qui traitent des relations de travail, de la gestion des congés ainsi qu’un raffermissement de la protection de la santé et sécurité des salarié-es au travail.

Santé et sécurité
« La santé et la sécurité des travailleurs dans l’usine sont constamment mises à risque. La direction leur demande de travailler avec des porcs de plus en plus lourds, gelés et raides, sans réviser les cadences à la baisse », a dénoncé le vice-président de la CSN, David Bergeron-Cyr. « Tout ça pour faire plus de profits. C’est lamentable ». L’insouciance de Viandes du Breton face à cet enjeu a d’ailleurs provoqué une éclosion de COVID-19 il y a quelques semaines dans la région. « Encore là, c’était pour éviter que leurs profits ne baissent, au détriment de la santé des gens d’ici. La CSN ne les laissera pas faire; quand nos membres prennent la peine de débattre en assemblée et se dotent de mandats clairs à propos de moyens de pression ou de négociation, la CSN est au rendez-vous. Tous nos services sont mis à contribution pour appuyer techniquement et financièrement les travailleurs dans leur lutte pour le respect. »

Relations de travail difficiles
« On dirait que cet employeur a plus à cœur le bien-être de ses cochons que celui de ses employé-es », a lancé pour sa part Nancy Legendre, résumant ainsi l’attitude de Viandes du Breton. Depuis des mois, la direction de Viandes du Breton a annulé plusieurs comités de relations de travail et comités de griefs. « Ça n’augure rien de bon pour les négos. Viandes du Breton va devoir se rendre disponible afin de discuter convenablement » a-t-elle précisé. « Il s’agit d’un employeur important de la région et s’il veut maintenir une image respectable, il va devoir écouter et considérer ses travailleuses et ses travailleurs », a ajouté Nancy Legendre.

Expertise
« Il semble que la tendance de Viandes du Breton à être arrogant ne date pas d’hier… Il y a quelques années, nous avions dû intervenir pour permettre aux employé-es d’avoir assez de temps pour aller aux toilettes. Un autre cas flagrant de manque de respect » a expliqué de son côté Alexandre Boileau-Laviolette, président de la FC–CSN. La fédération, qui représente des milliers de travailleuses et de travailleurs dans la transformation des viandes, entend mettre à profit son expertise lors de la prochaine négociation. « Au cours des dernières années, nous avons négocié parmi les meilleures conventions au Québec dans ce secteur. Les conditions de travail chez Viandes du Breton doivent être au diapason de ce que l’on retrouve dans nos autres entreprises. Viandes du Breton ne fera pas exception », a conclu Alexandre Boileau-Laviolette.

Projet de loi 59 sur la réforme de la Loi sur la santé et la sécurité du travail : des amendements qui ne règlent rien et qui ouvrent la porte aux abus

La Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ), la Confédération des syndicats nationaux (CSN), la Centrale des syndicats du Québec (CSQ) et la Centrale des syndicats démocratiques (CSD) accueillent avec beaucoup de déception les amendements proposés par le ministre du Travail, Jean Boulet, dans le cadre de l’étude article par article du projet de loi 59. Dès le dépôt du projet de loi, plusieurs lacunes ont été relevées non seulement par nos organisations, mais également par plusieurs représentants de la société civile, médecins en santé publique, juristes et universitaires. Malheureusement, les modifications soumises par le ministre demeurent insuffisantes afin d’assurer adéquatement la santé et la sécurité des travailleuses et des travailleurs.

« Concernant les mesures de réparation à la suite d’une lésion ou d’un accident, les Québécois et Québécoises vont encore être moins bien protégés avec le projet de loi 59. En ajoutant de multiples limitations d’accès à la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles (LATMP), le ministre complexifie et réduit considérablement l’accès aux droits de protection et de réadaptation. C’est inacceptable ! Plus ça va, plus on s’éloigne de l’objectif initial de cette loi. Faut-il rappeler au ministre qu’elle a pour but de protéger les travailleurs et travailleuses ? », dénonce le président de la FTQ, Daniel Boyer.

« En ce qui concerne la prévention, le nombre minimal de rencontres du comité SST est famélique. On ne sait même plus le nombre de représentants qui doivent y siéger. Plus rien sur le minimum d’heures de libération pour le représentant en prévention. Le ministre nous propose plutôt d’attendre que l’employeur et les travailleurs s’entendent, sinon la commission tranche et les parties peuvent contester les décisions devant les tribunaux. On n’avait pas assez de la judiciarisation des lésions professionnelles, maintenant c’est la judiciarisation de la prévention qui s’ajoute ! Cette façon de faire ne sert personne et aura pour effet de négocier la prévention dans nos relations de travail. La prévention, c’est non négociable ! », ajoute le président de la CSN, Jacques Létourneau.

« Ça fait 40 ans que nous attendons cette réforme, le ministre n’a pas le droit de manquer la cible. Alors qu’on veut des mécanismes de prévention fonctionnels, les amendements apportés risquent de judiciariser et d’engorger davantage les tribunaux. Le ministre s’était engagé à inclure les risques psychosociaux dans sa réforme, mais aucun ajout en ce sens n’est prévu, et ce, malgré toute l’importance qu’occupe cette problématique dans nos milieux de travail aujourd’hui. Les hommes et les femmes doivent pouvoir revenir auprès de leur famille en toute sécurité après une journée de travail. Le ministre a encore l’occasion d’apporter des correctifs et l’étude détaillée lui donne cette possibilité. Nous l’invitons à agir », déclare la présidente de la CSQ, Sonia Ethier.

« Nous l’avons dit dès le début, un sérieux coup de barre doit être donné et, malheureusement, rien ou presque dans ce que nous propose le ministre ne nous laisse entrevoir une amélioration du régime de santé et de sécurité du travail. Ce que nous observons en matière de prévention et de réparation soulève de grandes inquiétudes. Ce projet de loi va passer à l’histoire pour les mauvaises raisons s’il n’est pas sérieusement amendé », conclut le président de la CSD, Luc Vachon.

La Fabrique Notre-Dame : un employeur pas très catholique

Un an après le début de la pandémie de COVID-19, les membres de trois syndicats affiliés à la CSN se sont donné rendez-vous devant la mythique basilique Notre-Dame de Montréal pour un rassemblement solidaire afin d’exposer la difficile réalité vécue au sein de leurs milieux de travail respectifs.

« En plus d’avoir un lien d’emploi avec la Fabrique Notre-Dame, nos trois unités syndicales partagent plusieurs points en commun. En échangeant entre nous, nous avons constaté que l’employeur a profité de la pandémie pour abolir des postes pourtant essentiels à son bon fonctionnement, de souligner Hélène Godin, présidente du Syndicat des travailleuses et travailleurs de la Fabrique Notre-Dame–CSN. Récemment, la Fabrique a étalé ses problèmes financiers sur la place publique. Alors qu’elle déclare s’endetter depuis 12 ans, elle se paie à grands frais des avocats et des experts en ressources humaines, coupe des postes qui lui assureraient des revenus substantiels, tout en claironnant ne pas avoir d’argent pour ses salarié-es ».

Un employeur qui mine sa propre mission

« Dès le 13 mars 2020, nous avons été mis à pied et depuis ce temps, nous demeurons dans l’obscurité totale quant à notre avenir. En novembre dernier, nous avons appris l’abolition de 70 % de nos postes alors que la réouverture éventuelle de la basilique ne fait aucun doute. L’employeur se comporte de manière cavalière, nous ignore complètement alors qu’à plusieurs reprises, nous avons proposé des solutions concrètes et constructives pour la réouverture de ce joyau montréalais », de déplorer madame Godin.

« Pour notre part, nous sommes sans contrat de travail depuis décembre 2018 et en négociation depuis le mois de novembre 2019. Depuis le début de la pandémie, nous avons vécu de l’intimidation et malgré un plancher d’emploi inscrit dans notre convention collective, l’employeur n’a pas rappelé les salarié-es saisonniers à la fin du mois de mars 2020. Ils ont finalement été rappelés au début du mois de juillet alors qu’ils avaient été reconnus en tant que travailleurs prioritaires et que leurs salaires étaient payés à 50 % par le gouvernement, de préciser Patrick Chartrand, vice-président du Syndicat des travailleuses et des travailleurs du Cimetière Notre-Dame-des-Neiges–CSN. Contre toute logique, l’employeur gardait les accès du cimetière fermés, ce qui a attisé la colère de tous les gens qui voulaient se recueillir sur les tombes de leurs proches ».

« Pour tous les membres rassemblés ici, il y a comme un nuage gris au-dessus de nos têtes qui plombe notre environnement de travail. Dans les bureaux, l’employeur a profité de la pandémie pour abolir six postes de conseillers en préarrangements funéraires, et ce, au plus mauvais moment qu’il aurait pu choisir. Alors que la COVID nous rend déjà la tâche difficile, notre propre employeur déstabilise notre milieu de travail, ce qui compromet notre capacité à soutenir les familles endeuillées dans cette étape importante de leur processus de deuil. Nous y voyons tout simplement une tentative d’affaiblir nos unités syndicales », de conclure Éric Dufault, président du Syndicat des employées et employés de bureau du Cimetière Notre-Dame-des-Neiges–CSN.

Le Syndicat des travailleuses et travailleurs de la Fabrique Notre-Dame–CSN compte 30 membres; le Syndicat des travailleuses et des travailleurs du Cimetière Notre-Dame-des-Neiges–CSN rassemble 125 membres et le Syndicat des employées et employés de bureau du Cimetière Notre-Dame-des-Neiges–CSN en compte 19.

Sortie de crise

L’éditorial de Jacques Létourneau, président de la CSN

Un an de crise. C’est le triste anniversaire que nous soulignons cette semaine. Une pandémie qui aura emporté plus de 10 000 Québécoises et Québécois, qui aura directement affecté des centaines de milliers d’entre eux et dont les mesures sanitaires pour tenter de la contenir auront eu un impact financier et psychologique sur l’ensemble de notre société.

De multiples réflexions doivent se poursuivre, bien sûr, pour déterminer pourquoi le Québec fut à ce point happé par la crise actuelle, notamment quant à l’organisation de nos réseaux publics et de notre filet social. Mais l’heure n’est plus seulement à la réflexion : il faut se mettre en mode action et apporter les solutions qui s’imposent.

C’est d’ailleurs le mandat que nous ont confié les syndicats et les travailleuses et travailleurs que nous représentons lors du congrès de la CSN tenu en janvier dernier. C’est ce à quoi le comité exécutif de la CSN et nos équipes de travail s’affaireront au cours des prochaines semaines. Nous profiterons d’ailleurs de la tenue du conseil confédéral la semaine prochaine pour faire le point sur l’état des travaux portant sur les priorités dégagées par les congressistes.

Sans surprise, les enjeux de santé et de sécurité au travail occuperont une place prépondérante. Il ne faut pas non plus s’étonner qu’après des considérations bien immédiates reliées à la propagation du virus dans nos milieux de travail (accès aux équipements de protection individuelle, mise en place de mesures de protection, adaptation forcée au télétravail, etc.), des enjeux tout aussi importants, tels que l’épuisement professionnel et les problèmes de santé mentale qui en découlent, aient depuis accaparé nos structures militantes.

Au cours de la tournée précongrès tenue à l’automne, il nous est apparu très clairement que ces difficultés affectent directement les militantes et les militants de nos syndicats locaux : surcharges, difficultés à rejoindre et à mobiliser les membres… Les énergies supplémentaires qui ont dû être dégagées ont entraîné un épuisement réel. Certains comités exécutifs de nos syndicats ont été décimés et peinent à recruter de nouveaux responsables syndicaux. La pandémie a également affecté les personnes salariées de la CSN au même titre que l’ensemble de la population. Celles-ci ont redoublé d’ardeur pour continuer à offrir les mêmes services de qualité auprès de nos syndicats ; je tiens à souligner leur formidable travail et à les en remercier.

Nous devons apporter des solutions à cette réalité qui menace directement l’efficacité de nos structures militantes. Les syndicats présents au congrès nous ont mandatés pour consolider nos réseaux d’entraide existants, appuyer leur création là où le besoin se fait sentir et les outiller afin qu’ils puissent répondre aux besoins grandissants de leurs membres.

Bien entendu, notre campagne portant sur la réforme en santé et sécurité du travail menée par le ministre Boulet prendra de l’ampleur au cours des prochaines semaines. Considérant les avancées pour certains secteurs, il a toujours été dans notre intention de bonifier au maximum la réforme. Néanmoins, en fonction des reculs importants pour plusieurs de nos syndicats, la mobilisation est rapidement devenue nécessaire. D’autant plus qu’à la lumière des amendements déposés hier, nous avons constaté que les corrections souhaitées n’apparaissent pas au nouveau projet. Nous sommes encore loin de la coupe aux lèvres, voilà pourquoi notre mobilisation doit s’intensifier.

Le confinement et les mesures sanitaires auront bien évidemment affecté notre rapport de force. De nombreuses adaptations ont dû être proposées pour maintenir une vie syndicale et soutenir la mobilisation dans nos rangs. Nous avons pu retrouver un certain rythme, mais les défis demeurent nombreux. Lors du dernier congrès, nos syndicats ont clairement exprimé le besoin d’être davantage appuyés pour investir les espaces virtuels et les médias sociaux afin de renforcer la vie syndicale et favoriser leur mobilisation ; nous tâcherons d’y répondre de la meilleure façon.

Nous l’avons maintes fois répété : la crise aura mis au jour les trous béants de notre filet social, des failles que nous déplorons depuis déjà trop longtemps.

Le paroxysme aura été atteint en constatant l’hécatombe de notre réseau public de santé et de services sociaux. Toutefois, les problèmes de recrutement de la main-d’œuvre, directement reliés aux faibles salaires et aux mauvaises conditions de travail en général, s’appliquent tout autant aux réseaux de l’éducation et de la petite enfance.

La mobilisation des membres du secteur public, sans convention depuis bientôt un an, doit être appuyée par l’ensemble de notre mouvement. Les solutions, nous les connaissons et les avons mises de l’avant bien avant la venue de cette pandémie – dont les effets auraient été beaucoup moins dévastateurs si les gouvernements successifs, peu importe leur allégeance politique, avaient pris la peine de les prendre en considération.

Bien entendu, ces solutions ne pourraient être mises en place sans un réel changement de cap en matière de gestion de nos finances publiques. Malgré nos appels répétés, le gouvernement de François Legault s’entête à s’isoler dans le même carcan financier, basé sur l’équilibre budgétaire et une réduction accélérée de la dette, hérité du gouvernement de Lucien Bouchard il y a 25 ans.

Le 25 mars, le ministre des Finances annoncera que le prochain budget du Québec enverra des surplus budgétaires de trois milliards au Fonds des générations plutôt que de s’affairer à la consolidation de nos services publics et à la relance économique. Un total non-sens compte tenu des priorités bien plus urgentes pour la population du Québec.

Pour plusieurs, la question des finances publiques peut ne pas sembler la plus palpitante qui soit, j’en conviens amplement. Pourtant, les sommes consacrées aux différentes missions sociales de l’État ont un impact direct sur les budgets en santé, en éducation, en enseignement supérieur et en petite enfance. Sur les conditions de travail de ceux et celles qui y œuvrent, tout autant que sur l’accessibilité de tous et de toutes à ces services publics qui sont à la base de notre vivre-ensemble. Pour la CSN, s’en désintéresser ne constitue aucunement une option.

Alstom : un investissement qui bénéficie à l’ensemble du Québec

La CSN se réjouit de l’annonce du gouvernement du Québec d’un prêt de 56 millions $ pour la modernisation de l’usine d’Alstom à La Pocatière. Pour la centrale syndicale, cet investissement représente un bénéfice pour l’ensemble du Québec, tant sur le plan environnemental que sur celui du maintien et de la création d’emplois de qualité au Québec.

« Lorsque la construction des trains du REM a été envoyée en Inde, la Caisse de dépôt et placements du Québec (CDPQ) avait le beau jeu de dire que l’usine de La Pocatière n’avait pas la “technologie appropriée” pour répondre à la demande, rappelle le président de la CSN, Jacques Létourneau. Le précédent gouvernement avait ignoré nos nombreuses demandes visant à appuyer la modernisation de l’usine afin, justement, de pouvoir répondre aux nombreux projets de transport en commun à venir au Québec. »

Ainsi, la CSN estime qu’avec cet investissement, l’usine de La Pocatière, cédée par Bombardier à l’entreprise Alstom l’an dernier, sera en bien meilleure position pour répondre aux nombreux projets de transport prévus pour Montréal, Québec et leurs banlieues.

« Le gouvernement de François Legault pose un geste important aujourd’hui, souligne Jacques Létourneau. Maintenant, s’il veut être cohérent avec lui-même, il doit enclencher rapidement les mécanismes d’appels d’offres pour les projets de transport en commun tant attendus et, surtout, y inclure l’ensemble des dispositions permises par les accords de libre-échange afin de favoriser le maximum de retombées économiques au Québec. Les travailleuses et les travailleurs de l’usine de La Pocatière ont démontré toute la qualité de leur savoir-faire au fil des ans. Les commandes du métro Azur venant à échéance très prochainement, le Québec ne peut se permettre de risquer une perte d’expertise entraînée par un arrêt des activités de l’usine de La Pocatière, de l’autre usine québécoise d’Alstom à Sorel et de nombreux sous-traitants. »

La centrale syndicale demande également au gouvernement du Québec de rappeler à l’ordre la CDPQ afin de favoriser un maximum de contenu local dans ses projets.

« Le gouvernement ne peut se cacher derrière l’indépendance de la Caisse pour justifier que des contrats aussi importants soient envoyés en Inde, comme cela a été le cas pour la première phase du REM. Cette institution québécoise, largement constituée de l’épargne-retraite des salarié-es du secteur public, a une énorme responsabilité envers les Québécoises et les Québécois. Il tombe sous le sens que le gouvernement doit leur rappeler leurs obligations sociales envers la population du Québec.

Assurance-emploi : la CSN demande à l’ensemble des partis fédéraux d’appuyer l’extension des programmes d’aide

Alors que des milliers de travailleuses et de travailleurs n’ont toujours pas retrouvé leur source de revenus, la CSN interpelle l’ensemble des partis politiques siégeant à la Chambre des communes pour que ceux-ci appuient le projet du gouvernement canadien de prolonger la période de couverture des programmes de l’assurance-emploi et des prestations canadiennes d’urgence et de relance économique.

Pour la CSN, la crise de la COVID-19 a démontré toutes les lacunes des modalités de l’assurance-emploi dénoncées par le mouvement syndical depuis des années. « Nous avons salué la bonification du programme d’assurance-emploi et la mise sur pied, dès les premières semaines de la pandémie, des prestations canadiennes, rappelle le président de la CSN, Jacques Létourneau. Alors que l’économie redémarre tranquillement, de nombreux secteurs en auront pour plusieurs mois avant de retrouver un semblant de normalité, notamment dans les secteurs de la culture et du tourisme. On ne peut pas abandonner ces travailleuses et ces travailleurs, alors que la campagne de vaccination en cours nous permet d’espérer des jours meilleurs dans un avenir proche. »

Ainsi, la centrale syndicale demande à l’ensemble des partis d’opposition d’appuyer le projet de loi déposé par le gouvernement. « Nous appelons l’ensemble des partis politiques à faire preuve de leur sens des responsabilités. Les travailleuses et les travailleurs n’accepteront pas que les joutes partisanes se fassent à leur détriment. Ce projet de loi doit être adopté, et ce, rapidement », d’ajouter Jacques Létourneau.

Rencontre du Collectif 8 mars avec la ministre Charest : tout simplement décevante

À l’approche de la Journée internationale des droits des femmes, les membres du Collectif 8 mars, qui représente plus de 700 000 femmes au Québec, ont rencontré la ministre responsable de la Condition féminine, Isabelle Charest, afin d’échanger avec elle sur les impacts de la pandémie à l’endroit des femmes. Les représentantes du Collectif se disent globalement déçues de cette rencontre et attendaient un engagement formel de la ministre pour prendre des mesures concrètes afin d’enrayer les discriminations systémiques vécues par les femmes et entre les femmes. Si la ministre a reconnu certains impacts causés par la pandémie, le Collectif se questionne sur la volonté du gouvernement d’écouter les femmes et de poser des actions concrètes au-delà des beaux discours.

La pandémie a eu des conséquences désastreuses pour les femmes
Depuis près d’un an, les conséquences de la pandémie de la COVID-19 se sont avérées particulièrement éprouvantes pour les femmes. Leurs conditions de vie et de travail se sont détériorées à vue d’œil, notamment en matière de pertes d’emplois et de revenu, sans compter l’augmentation de la violence envers elles.

La conciliation famille-travail-études-vie personnelle : un défi en temps de pandémie
En outre, les femmes ont vu augmenter leur charge de travail invisible ainsi que leur charge mentale. Au pire de la crise sanitaire, elles ont dû endosser plusieurs fonctions, dont celles de télétravailleuses ou de travailleuses essentielles, d’enseignantes privées, d’éducatrices, de proches aidantes et de responsables de la logistique domestique et familiale.

L’augmentation du salaire minimum est plus que nécessaire
Le revenu des bas salarié-es, qui ont souvent agi comme ressources essentielles pendant la crise sanitaire, est tout simplement insuffisant. Rappelons que 58 % des travailleuses et des travailleurs touchant le salaire minimum sont des femmes. Augmenter le salaire minimum est une façon de reconnaître la juste valeur du travail, de diminuer l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes, de réduire la pauvreté, et ainsi de tendre vers plus d’égalité.

Une modernisation du régime de santé qui protège aussi les femmes
La pandémie de COVID-19 a révélé au grand jour les risques, souvent sous-estimés, auxquels plusieurs femmes sont exposées au travail. Il est impératif que la modernisation du régime de santé et de sécurité du travail protège toutes les travailleuses et qu’elle tienne compte des situations diverses dans lesquelles elles se retrouvent. De plus, il est nécessaire, pour éviter de répéter les erreurs du projet de loi 59, que le gouvernement applique systématiquement l’Analyse différenciée selon les sexes et intersectionnelle (ADS+) dans l’élaboration de tous ses projets de loi.

Les femmes oubliées dans les mesures du Plan de relance
Malgré ce portrait accablant, le premier ministre François Legault n’était pas présent à la rencontre du Collectif même si l’invitation lui a été lancée des mois en avance. Les femmes, qui subissent lourdement les impacts de la pandémie, semblent avoir été oubliées dans les mesures prévues au budget pour le plan de relance économique. Un an après le début de la pandémie, force est de constater que nous sommes toujours dans l’attente d’un plan qui prend en considération les impacts sur toutes les femmes, particulièrement sur celles qui vivent à la croisée des oppressions, c’est-à-dire les femmes immigrantes et racisées, les femmes noires, les femmes autochtones, les femmes ayant un handicap et les femmes aînées et les personnes LGBTQ+. Si la ministre Charest a mentionné l’existence d’un plan d’action Covid pour les femmes, il n’y a néanmoins aucune information sur son contenu, les mesures qu’il propose ou encore sa date de publication.

Autres actions féministes dans le cadre de la journée du 8 mars
Le Collectif 8 mars invite la population à participer aux événements organisés par FDO (Femmes de diverses origines), soit un webinaire le samedi 6 mars et un rassemblement le dimanche 7 mars à 16 h Place Émilie-Gamelin à Montréal.

À propos du Collectif 8 mars
Le Collectif 8 mars est formé de représentantes provenant de l’Alliance du personnel professionnel et technique de la santé et des services sociaux (APTS), de la Centrale des syndicats démocratiques (CSD), de la Confédération des syndicats nationaux (CSN), du Réseau des Tables régionales de groupes des femmes du Québec, de la Centrale des syndicats du Québec (CSQ), de la Fédération autonome de l’enseignement (FAE), de Femmes de Diverses Origines (FDO), de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ), de la Fédération des femmes du Québec (FFQ), de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ), du Syndicat de la fonction publique et parapublique du Québec (SFPQ) et du Syndicat de professionnelles et professionnels du gouvernement du Québec (SPGQ).

Yvan Duceppe, trésorier aux stratégies solidaires

Yvan Duceppe, nouvellement élu à titre de trésorier lors du 66e Congrès de la CSN tenu en janvier 2021, n’en est pas à ses débuts d’implication syndicale dans la défense de la classe ouvrière. En effet, ce comptable professionnel agréé compte à son actif près d’une trentaine d’années d’expérience à titre de conseiller chez MCE Conseils, un des outils collectifs de la confédération mis au service des syndicats dans le maintien et la création d’emplois ainsi que dans l’élaboration de stratégies de développement durable. Une vingtaine d’années passées à la trésorerie de la Fédération des professionnèles (FP–CSN) s’ajoute au parcours de ce militant hors pair qui comprend très bien le rôle fondamental que joue l’administration et la trésorerie dans le développement d’un syndicalisme combatif et solidaire.

Une révolution formatrice
Grandement inspiré par la Révolution tranquille et la montée du Parti Québécois dans les années 70, Yvan Duceppe commence son cheminement de militant au cours de ses études secondaires en s’impliquant dans la circonscription de nul autre que René Lévesque et en s’investissant corps et âme dans le référendum de 1980. « C’était une autre époque. Le Parti Québécois de 1976 était celui de la loi 101 et d’une panoplie de lois visant à améliorer le sort des travailleuses et des travailleurs, » explique-t-il. « Je suis peut-être nostalgique, mais il s’agissait là de moments très formateurs pour ce qui représente le centre de mon implication syndicale : l’écoute, l’entraide, et la solidarité. »

Après la défaite du camp du oui, Yvan poursuit ses études aux HEC en finances. « J’aime beaucoup les chiffres », nous confie-t-il en souriant. « Lorsque je termine mon bac en 1983, le Québec est en grande récession économique. Je décide donc de prolonger mes études en me plongeant dans la comptabilité publique afin d’obtenir le titre de comptable agréé. »

Quelques années plus tard, il remarque une annonce dans La Presse pour un poste d’analyste financier chez MCE Conseils tout près de chez lui à Longueuil. Il ne connaît pas l’entreprise, mais comme il admire sa mission, il décide de postuler. Lors de son processus d’embauche, il se retrouve devant Léopold Beaulieu, trésorier de la CSN à l’époque et éventuel fondateur de Fondaction, et comprend l’ampleur des défis qui l’attendent. Il accepte le poste et se lance dans une aventure qui marquera sa vie à jamais.

Des conseils stratégiques pour sauver des emplois
Accompagnant surtout les syndicats du secteur privé lors de sa carrière chez MCE Conseils, les dossiers qui l’animent le plus sont ceux où il réussit à « sauver la shop ». Il prend comme exemple le syndicat d’Expro de Salaberry-de-Valleyfield dans les années 90, où l’intervention de la CSN et de MCE Conseils n’a pas seulement aidé à garder les portes de l’usine ouvertes, mais aussi à la moderniser pour la rendre plus sécuritaire pour les personnes qui y travaillent. « Cette bataille qu’on a menée, oui, c’était pour sauver des jobs, mais c’était aussi pour sauver des vies. Puis, par la mise en place d’une coopérative de travailleurs-actionnaires, on souhaitait que les travailleuses et les travailleurs s’approprient des pouvoirs décisionnels sur l’orientation de l’entreprise. »

Yvan Duceppe (4e à gauche) lors de l’ouverture officielle de la scierie Saint-Michel des Saints en 2017:

Plus récemment, il y a eu la relance de la scierie Saint-Michel-des-Saints planifiée à la suite de la fermeture de la multinationale Louisiana Pacific et de son usine de panneaux à copeaux orientés (OSB) en 2007. « Quand Louisiana Pacific a fermé ses portes, c’était la mort annoncée de la petite scierie de Saint-Michel-des-Saints qui approvisionnait cette usine désuète. En fait, cela est arrivé en 2014. Le syndicat et la communauté se sont pris en main et se sont dit : « À qui le bois ? À nous le bois ! » Finalement, l’usine a repris ses activités en 2017. Les prévisions initiales de la création d’une cinquantaine d’emplois se sont révélées trop modestes. En fin de compte, c’est le double du nombre d’emplois attendus qui ont été créés. Pour moi, ça vaut toutes mes paies. »

L’amour du lointain, ou comment conjuguer syndicalisme et environnement
Tout comme son prédécesseur, le dossier de l’environnement et de la lutte contre la crise climatique se retrouve dans ses responsabilités. Il remarque d’ailleurs certains parallèles entre le travail stratégique qu’il menait pour MCE Conseils et ce qui l’attend dans ce dossier chaud.

« La transition juste, si tu ne t’en occupes pas, elle va s’occuper de toi. Il faut prendre les devants, outiller notre monde pour voir clair et viser juste afin de nous assurer que la transition soit équitable et ordonnée. Il ne faut pas la subir, mais plutôt la planifier », prévient Yvan. « Les travailleuses et les travailleurs sont les principaux acteurs de cette lutte. Quand je visitais des usines avant de démarrer un mandat de MCE Conseils, je disais que je connaissais bien les chiffres, mais que je devais m’imprégner du fonctionnement de l’usine. Pour y arriver, j’ai toujours estimé que les travailleurs devaient m’accompagner, puisque ce sont eux les spécialistes de l’usine. C’est essentiel de se servir des cerveaux des gens plutôt que de simplement se fier à leurs bras. Il faut avoir l’humilité de savoir qu’on ne peut pas être spécialiste dans tout, et avoir la sagesse de s’entourer des bonnes personnes, celles qui possèdent la connaissance de la réalité de leur travail et de leur usine. »

Une administration saine, combative et solidaire
En terminant, bien que l’administration et la trésorerie peuvent parfois paraître secondaires à la mobilisation et à la vie syndicale, Yvan Duceppe nous rappelle leur grande importance au bon fonctionnement du mouvement.

« Tous les combats syndicaux se font à partir de ressources. Si tu ne gères pas bien les finances qui te sont confiées, tu vas avoir des problèmes », précise le nouveau trésorier. Et la CSN a le devoir d’outiller les syndicats pour que leur gestion administrative soit plus simple. Aider les syndicats à s’occuper de leurs affaires est un de mes objectifs à titre de trésorier de la confédération. Les finances d’un syndicat servent à la solidarité, et ceux et celles qui les gèrent doivent avoir cette sensibilité. Ce n’est pas uniquement une tâche technique. C’est du militantisme que de veiller à ce que les conditions de travail de nos membres soient préservées et améliorées. C’est toute une mission. »

Le syndicat des agents correctionnels envoie un message et une autruche à la ministre Guilbeault

Le Syndicat des agents de la paix en services correctionnels du Québec (SAPSCQ–CSN) a livré une autruche en fleurs à la ministre de la Sécurité publique, Geneviève Guilbeault, lundi après-midi afin d’inviter le gouvernement à cesser de jouer à l’autruche et à reconnaître les risques importants que courent les agents en accomplissant leur travail essentiel.

« La pression exercée sur le réseau carcéral québécois présentement en raison de la deuxième vague de COVID-19 est insoutenable et le gouvernement continue de faire comme si de rien n’était, explique le président du SAPSCQ–CSN, Mathieu Lavoie. Les détenu-es dans les établissements de détention continuent de se promener dans leur secteur et de jouer aux cartes dans les aires communes, coude à coude, sans aucun équipement de protection. Il est temps que le gouvernement cesse de se mettre la tête dans le sable et impose des mesures sanitaires aux personnes incarcérées. »

Le cadeau, livré au bureau de la ministre, était accompagné d’une lettre détaillant les conditions extrêmes dans lesquelles les agentes et agents des services correctionnels exercent leurs fonctions depuis le début de la crise sanitaire

« Non seulement les équipements de protection individuelle et les autres mesures de prévention compliquent considérablement l’accomplissement de nos tâches, mais nous devons également composer avec des détenus de plus en plus hostiles et violents, ainsi qu’avec des risques de contagion décuplés en raison du fait que nous exerçons notre fonction dans un milieu clos où la proximité est difficilement évitable », peut-on y lire.

« Les quelque 2800 agentes et agents de la paix en services correctionnels du Québec mettent leur santé à risque chaque jour, rappelle la présidente de la Fédération des employées et employés de services publics (FEESP–CSN), Nathalie Arguin. Le gouvernement doit absolument reconnaître leur travail et prendre les moyens qui s’imposent pour les protéger le mieux possible. »

À propos
Le SAPSCQ–CSN est un syndicat autonome affilié à la Fédération des employées et employés de services publics (FEESP–CSN) et à la Confédération des syndicats nationaux (CSN) depuis 2006. Il représente plus de 2800 agentes et agents de la paix en services correctionnels, répartis dans 18 établissements de détention partout au Québec.

Un livre blanc, vraiment ?

Éditorial de Jacques Létourneau, président de la CSN

On apprenait cette semaine que des 15 000 places en CPE annoncées par le ministre de la Famille il y a deux ans, seulement 2300 d’entre elles ont pu être créées. Pendant ce temps, 51 000 familles sont toujours en attente d’une place pour leur enfant.

Le financement ne serait donc pas la seule raison du problème, comme c’était le cas sous le règne des libéraux. Ceux-ci avaient profité de leurs quinze années au pouvoir pour favoriser le développement des garderies privées, dont le nombre de places a été multiplié par six de 2010 à 2018 au détriment du développement et de la consolidation des services de garde en CPE ou en milieu familial.

Plusieurs voix se sont fait entendre au cours des derniers jours pour dénoncer la rigidité et la lenteur des procédures d’octroi de subventions au ministère de la Famille. Alors que la construction d’une école s’effectue généralement en 18 mois, il en prend entre 3 et 4 ans pour la construction d’un CPE, un type d’établissement dont l’ampleur et la complexité sont pourtant bien moindres. Pas moins de 17 étapes d’approbation — 17 ! — doivent être traversées.

Qu’on veuille bien faire les choses, nous en sommes. Mais quand le zèle du ministère de la Famille vient brimer la possibilité pour des milliers de parents de bénéficier de milieux de garde subventionnés, c’est toute notre société qui en souffre.

Ce sont toutefois les écarts d’accessibilité énormes entre différents milieux que je trouve, personnellement, encore plus aberrants. Comment expliquer que les résidents de Westmount aient accès, toutes proportions gardées, à deux fois plus de places en CPE que ceux de Montréal-Nord ou de Parc-Extension ?

Les projets de construction de CPE doivent être soumis au gouvernement « par la communauté ». Soit. Mais se pourrait-il qu’une « communauté » comme celle de Westmount, plus que privilégiée sur les plans social et économique, soit plus outillée pour élaborer de tels projets que celles de milieux beaucoup plus défavorisés ?

Poser la question, c’est y répondre.

Il est pourtant de la responsabilité du gouvernement de veiller au développement et à la consolidation du réseau des CPE et d’en assurer un accès équitable à l’ensemble des familles du Québec. Plutôt que de multiplier les étapes d’approbation, les gestionnaires du ministère de la Famille devraient soutenir les communautés dans le développement de leurs projets.

Malheureusement, l’idéologie du « tout-au-privé » du précédent gouvernement semble avoir eu raison du savoir-faire qui existait au ministère de la Famille. Au début des années 2000, qu’on s’en rappelle, c’est entre 8000 et 9000 places en CPE qui étaient créées chaque année.

Lors de l’annonce de la création des maternelles 4 ans, nous avions avisé le gouvernement de notre opposition à une solution mur-à-mur. Nous souhaitions qu’il privilégie la complémentarité des différents réseaux et qu’il tienne pleinement compte des besoins particuliers de l’ensemble des communautés. Entêté et enorgueilli par cette promesse électorale, il a plutôt fait fi de nos mises en garde, avec les conséquences que l’on connaît : les services de garde en milieu familial ont écopé et des milliers d’entre eux ont fermé depuis.

Développement, consolidation et complémentarité des réseaux de services de garde subventionnés, voilà les objectifs qui devraient prévaloir au ministère de la Famille. Au quotidien, les communautés ont besoin d’un appui logistique dans l’élaboration de projets répondant à leurs besoins.

Avant de penser à révolutionner le monde avec un livre blanc, le ministre Mathieu Lacombe doit faire le ménage dans son propre ministère et y ramener l’expertise et le savoir-faire qui y prévalaient lors des premières années de la mise en place du réseau des CPE. En y réduisant la bureaucratie, il permettra aux fonctionnaires qui y œuvrent de consacrer à nouveau leurs énergies à l’appui des communautés — notamment celles qui sont plus vulnérables — dans l’élaboration de leurs projets.

Le ministre Lacombe devra également convaincre ses collègues des Finances et du Trésor de s’attaquer au problème de pénurie de main-d’œuvre reliés aux maigres salaires et aux mauvaises conditions de travail des éducatrices en petite enfance. S’il n’y voit pas rapidement, c’est le réseau des CPE tout entier, ce joyau tant envié par le reste du Canada, qui s’en trouvera grandement fragilisé. De tous les programmes techniques offerts dans nos cégeps, cette formation demeure parmi les moins « rentables », celles dont le salaire figure parmi les plus bas sur le marché du travail. Déjà, les CPE peinent à recruter, et ce problème est en croissance depuis des années. Au manque de places criant, s’ajoute malheureusement un inquiétant manque de personnel.

Encore ici, ce n’est pas le livre blanc annoncé par le ministre Lacombe qui viendra régler cette situation plus que préoccupante.

Se mobiliser pour faire avancer nos revendications

« Jamais bataille n’est perdue pour celle qui se bat toujours ». Cette courte phrase résonne dans la tête de Katia Lelièvre, vice-présidente nouvellement élue au dernier congrès de la CSN, depuis qu’un ancien collègue la lui a lancée au détour d’une conversation. La citation, un brin philosophique, résume à elle seule l’engagement qui anime la militante depuis la naissance de son fils, il y a 28 ans.

À cette période de sa vie, Katia doit subvenir aux besoins de son garçon. Elle cogne à la porte de la Maison de la famille de Bois-des-Filion, un organisme communautaire de la banlieue nord de Montréal qui tente d’apaiser l’insécurité alimentaire des plus démunis. En préparant des plats à un dollar dans les casseroles de la cuisine collective mijotent aussi les ingrédients du militantisme dans le cœur de la jeune maman. Elle découvre l’entraide, la camaraderie, la solidarité et l’implication.

Rapidement, elle se retrouve responsable de la cuisine collective. « Personne ne voulait s’en occuper », rigole Katia, fidèle au franc-parler qui la caractérise. En s’impliquant au sein du conseil d’administration, elle en scrute les états financiers. La comptabilité créative de l’organisme permettait à 1 + 1 d’égaler 3. « J’ai posé plein de questions et tout le monde a démissionné. Je me suis retrouvée seule au CA », se rappelle-t-elle. En collaboration, les mères bénévoles se sont alors mobilisées pour trouver des subventions, des dons et un nouveau local. Menacée de fermeture à l’époque, la cuisine communautaire a toujours pignon sur rue, aujourd’hui.

Apprendre grâce au SEMB-SAQ–CSN
Cette première expérience de mobilisation et sa soif de justice lui serviront lorsqu’elle sera embauchée comme caissière-vendeuse à la SAQ, près de chez elle. Dans une lettre publiée dans le journal syndical et expédiée au président de la SAQ, la militante s’insurge contre des avantages conférés aux cadres, avantages pourtant retirés aux membres retraités de la société d’État.

S’amorce une implication active et formatrice auprès du Syndicat des employé-es de magasins et de bureaux de la SAQ (SEMB-SAQ–CSN), d’abord localement, puis régionalement et, par la suite, à la vice-présidence avec les responsabilités de la vie syndicale, des communications et de la mobilisation. « Ce sont les tâches que j’ai préférées parmi toutes », admet Katia, qui a aussi adoré présider le syndicat pendant quelques années. « Nous, on est dans 400 lieux de travail différents, aux quatre coins du Québec, avec des réalités diverses. La clé pour établir une cohésion de groupe, briser l’isolement et consolider la solidarité, c’est la communication. Grâce aux médias sociaux et à la vidéo, nous avons pu nous parler et relever le défi. » Elle cite en exemples l’instantanéité des médias sociaux et la force des capsules vidéo comme gages de succès pour mobiliser les membres, lors de la plus récente négociation du SEMB-SAQ–CSN en 2018.

Un syndicalisme encore plus combatif
La vice-présidente de la CSN entame son nouveau mandat avec la promesse d’un style de syndicalisme encore plus combatif, ancré dans toutes les régions. Elle voudrait impliquer davantage les membres de partout dans leur prise en charge, pour qu’ils se mobilisent. Ça passe par la communication et la simplification des messages, selon elle, pour que les membres se sentent concernés.

Celle qui s’occupera également de la vie syndicale à la CSN rappelle qu’il faut se battre également entre les négociations. « Il faut maintenir le feu entre deux négos. Parce que si on le laisse s’éteindre, il faut le repartir avec du petit bois, pis c’est de l’ouvrage ! », image-t-elle.

Accueil Bonneau : une décision antisyndicale qui nuit aux personnes itinérantes

Les travailleuses et les travailleurs de l’Accueil Bonneau ont manifesté aujourd’hui pour dénoncer la décision de la direction de l’Accueil Bonneau qui a aboli unilatéralement tous les postes des intervenantes et intervenants qui travaillaient en première ligne à la nouvelle halte-chaleur dans le Vieux-Port de Montréal. Le Syndicat des travailleuses et des travailleurs de l’Accueil Bonneau (CSN) estime qu’il s’agit d’une mauvaise décision, dont les motifs ne sont pas aussi clairs que le prétend l’organisation.

Cette décision de janvier dernier a en effet permis de décimer l’exécutif syndical à la veille du début des négociations pour un nouveau contrat de travail. De plus, le syndicat estime qu’il n’est pas du tout « innovant », comme le prétend la direction, de remplacer les intervenantes et intervenants de première ligne expérimentés et formés, par des agents de sécurité sous prétexte que la priorité est maintenant au logement (housing first).

« Tant qu’il y aura des itinérants dans la rue, il faudra les accompagner de façon humaine et les besoins demeureront importants, même pour ceux et celles qui auront la chance d’obtenir un logement », soutient Chloé Bourbiaux, porte-parole du Syndicat des travailleuses et des travailleurs de l’Accueil Bonneau (CSN). « La tendance que l’on constate sur certains sites d’accueil de personnes itinérante d’embaucher des gardiens de sécurité pour faire le travail de première ligne n’est vraiment pas un pas dans la bonne direction. L’accueil devrait être plutôt axé sur l’humain et non pas concentré sur les seuls besoins de sécurité », affirme Katia Lelièvre, vice-présidente de la CSN.

Tendance au délaissement de la première ligne
La tendance actuelle à favoriser le logement d’abord (housing first), présente partout en Amérique du Nord et de plus en plus à Montréal, fait en sorte qu’elle canalise, dans certains ca, les subventions ou les dons du privé vers ces initiatives. « La course aux subventions associées à des projets et le désir de voir baisser les statistiques du nombre d’itinérants ne doit pas faire oublier qu’il y a encore des personnes dans la rue à Montréal, en plein hiver, en pleine pandémie et que leurs besoins comportent plusieurs dimensions », affirme Dominique Daigneault, présidente du Conseil central du Montréal métropolitain (CCMM–CSN).

 Cette tendance touche également les autres grands refuges de Montréal qu’ils soient permanents ou temporaires. « Il est important de conserver une première ligne forte pour accompagner les itinérantes et les itinérants. Il faut des lits pour un accueil inconditionnel qui ne repose pas sur l’enrôlement dans un programme de travail ou de logement », ajoute Jeff Begley, président de la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS–CSN). Ce dernier ajoute que la tendance au remplacement de la première ligne d’accueil des itinérants par des agents de sécurité n’est pas une politique innovante, bien au contraire.

Une gestion déficiente et irresponsable de la part de Viandes du Breton

Le Syndicat des travailleuses et travailleurs de Viandes du Breton STTVDB–CSN déplore la gestion déficiente et irresponsable de l’employeur à la suite de la confirmation de cas de COVID-19 dans l’usine. Le STTVDB–CSN dénonce le maintien à l’emploi de travailleurs issus d’agences de placement — et donc provenant de l’extérieur de la région —, par qui le virus s’est introduit. « Nous avons interpellé l’employeur il y a quelques semaines à propos des dangers que pouvaient représenter ces travailleurs qui proviennent des zones rouges. Mais, comme à son habitude, il a fait la sourde oreille et nous voilà rendus avec une éclosion dans l’usine. C’est irresponsable et dangereux, car cela met à risque nos membres ainsi que la population de Rivière-du-Loup, dénonce le président du syndicat, Yannick Morin. Peut-être que s’il payait ses employé-es raisonnablement, l’employeur n’aurait pas besoin de recourir à du personnel d’agence provenant de l’extérieur. »

Dépistage volontaire
D’autre part, le syndicat est déçu d’apprendre que l’employeur et la Santé publique ne font que « recommander fortement » le dépistage pour tous les salarié-es. Pour le syndicat, il est inconcevable que le dépistage ne soit pas déclaré obligatoire. « Faut aller se faire tester, mais ce n’est pas obligatoire… On va peut-être attraper la COVID à l’usine, mais on se fait tester pendant notre temps libre, sur une base volontaire et sans salaire. Déjà qu’ils ne nous paient pas si on manque une journée de travail à cause de la COVID. Épargner de l’argent passe avant la santé et la sécurité des gens, c’est ça le message qu’on reçoit », explique Yannick Morin.

Le syndicat tenu dans l’ignorance
Le Syndicat des travailleuses et travailleurs de Viandes du Breton–CSN dénonce également le manque de communication de l’employeur envers ses employé-es. C’est à travers Facebook, les communiqués de la Santé publique et les médias que le syndicat a été mis au fait qu’il y avait huit cas positifs dans l’usine. De plus, comme c’est le cas depuis le début de cette pandémie, toutes les discussions entre la Santé publique et l’employeur se font à huis clos, ce qui fait en sorte que le syndicat et les membres sont peu ou pas informés. « C’est inquiétant, ce manque de transparence et de considération de l’employeur. Et la Santé publique ne nous transmet aucune information non plus. Donc on travaille dans l’usine, on est à risque, mais on apprend ce qui se passe par les médias. Pour la considération, on repassera », conclut Yannick Morin.

Le musée des horreurs

Éditorial de Jacques Létourneau, président de la CSN

Des employé-es forcés de travailler malgré la fièvre. Des tâches de désinfection abandonnées pendant plus d’une semaine après que la responsable, malade, ait dû s’isoler. Des mouvements de personnel fréquents entre zones chaudes et froides. Une absence de mesures de prévention et de contrôle des infections. Des équipements en nombre tellement insuffisant qu’on doit se les partager entre collègues.

La lecture de l’enquête menée par les journalistes de La Presse ce matin donne froid dans le dos. Après avoir épluché les rapports d’intervention de la CNESST dans plus de 230 centres d’hébergement et autres établissements du réseau de la santé et des services sociaux, les journalistes en arrivent à la conclusion que 20 % d’entre eux ont enfreint les règles sanitaires les plus élémentaires.

À 20 %, le gouvernement ne peut prétendre qu’il ne s’agit que d’exceptions isolées.

Le gouvernement François Legault aura beau prétexter que nous sommes devant une pandémie à l’ampleur inégalée, un fait indéniable demeure : notre réseau de santé et de services sociaux, qui souffre de sous-financement chronique depuis des années, n’était absolument pas en mesure de répondre au moindre soubresaut.

Pourtant, l’ensemble des exemples révélés par les journalistes – qui relèveraient de l’anecdote s’ils n’étaient à ce point généralisés – ont pour origine deux causes bien documentées : le manque flagrant de personnel dans le réseau de la santé et des services sociaux, ainsi que l’hypercentralisation de son mode de gestion.

Deux réalités que les syndicats de la CSN dénoncent depuis des années. Encore faudrait-il que le gouvernement, peu importe sa couleur, prenne la peine de les écouter.

Depuis plusieurs négociations, les travailleuses et les travailleurs du secteur public martèlent que les faibles salaires et les surcharges de travail constituent le principal frein au recrutement de personnel en éducation et en santé. Quand un gestionnaire doit forcer quelqu’un à faire des heures supplémentaires ou à travailler malgré la présence de symptômes reliés à la COVID, quand on tolère involontairement que la désinfection d’un centre d’hébergement ne soit plus assurée en pleine pandémie, c’est qu’on n’a tout simplement pas les bras nécessaires.

« Des infirmières, on ne peut pas en inventer ! », se défendait François Legault mardi dernier. On lui accorde. Mais encore faudrait-il être en mesure d’attirer le personnel soignant avec des conditions de travail intéressantes, et de faire de même pour l’ensemble des employé-es du secteur public, frappés, à des degrés divers, par des problèmes de pénurie et de rareté de main-d’œuvre.

Quant au manque d’équipement de protection individuelle, François Legault persiste et signe : le Québec n’en a jamais manqué, il n’y a que des établissements qui « n’ont pas levé la main » pour signifier la rupture de stock. Tout pourrait s’expliquer par… l’absence d’un patron dans chaque CHSLD.

À défaut d’être naïfs, les membres de la CSN n’ont pas non plus cette magique poignée dans le dos.

Depuis 20 ans, le réseau de la santé et des services sociaux a été de deux opérations successives visant à centraliser la gestion et la prise de décision des établissements. D’abord, sous le règne Charest-Couillard, la fusion des CHSLD, des CLSC et des centres hospitaliers au début des années 2000, varlopant au passage les Agences régionales de santé et de services sociaux. Puis, sous celui de Couillard-Barrette, la mise en œuvre de la malheureuse réforme portant le nom de ce dernier. Cette hypercentralisation des pouvoirs s’est également accompagnée d’une vision de plus en plus hospitalo-centriste du réseau, confirmant ainsi l’hégémonie des médecins, tant généralistes que spécialistes.

Doit-on rappeler au gouvernement la première décision qu’il a prise en mars dernier ? Libérer 6000 lits en centres hospitaliers afin de pouvoir accueillir les éventuels malades de la COVID. Les directions des CIUSSS et des CISSS ont ainsi déplacé des milliers de patientes et de patients soignés dans des hôpitaux… dans des CHSLD où aucune mesure n’avait été prise.

Dès le printemps dernier, la CSN a exigé une commission d’enquête publique sur les conditions d’hébergement des aîné-es et l’ensemble de la gestion chaotique de la pandémie par le réseau de la santé et des services sociaux. Après avoir – bien brièvement – évoqué la nationalisation des centres d’hébergement privés, le gouvernement de François Legault a préféré confier à la commissaire à la santé et au bien-être, Joanne Castonguay, le soin d’examiner la performance du réseau lors de la première vague.

Plusieurs ont été déçus de ce mandat édulcoré. Pourtant, la commissaire pourra jouir de presque tous les pouvoirs conférés à une commission d’enquête. Encore faudra-t-il qu’elle les utilise à bon escient. La CSN y veillera.

David Bergeron-Cyr, nouveau vice-président élu au comité exécutif de la CSN

Lors du dernier congrès de la CSN, David Bergeron-Cyr a été élu à titre de deuxième vice-président au comité exécutif. Auparavant membre du Syndicat des travailleuses et travailleurs de PJC entrepôt–CSN et président de la Fédération du commerce (FC–CSN), le nouveau vice-président de la CSN a une longue implication dans le milieu syndical et plusieurs idées pour le dynamiser.

Quand on lui demande quels sont les trois mots qui résument le mieux sa vision du syndicalisme, il répond : « C’est très simple : travailleurs, pouvoir, mouvement. J’ai toujours milité à la CSN avec ces mots en tête. » Son parcours et ses priorités dans ses nouvelles fonctions en font foi.

Son parcours
À 18 ans, David Bergeron-Cyr commence à travailler au centre de distribution du Groupe Jean-Coutu à Longueuil. C’est sans hésiter que, dès sa première journée de travail, il demande à son délégué syndical comment il peut s’impliquer. En effet, s’impliquer dans son syndicat est déjà tout ce qu’il y a de plus naturel pour lui : « Ma mère m’a traîné avec elle de 1er mai en 1er mai toute ma jeunesse ! Elle a été très active dans les luttes ouvrières du secteur manufacturier à Montréal pendant plusieurs années. »

Alors syndiqué à la FTQ, David participe à la campagne de maraudage afin que son syndicat adhère à la CSN, fondant ainsi le syndicat CSN du centre de distribution du Groupe PJC au sein duquel il occupera plusieurs fonctions jusqu’en 2009. En 2004, il devient représentant du secteur entrepôt de la Fédération du commerce (FC–CSN). En 2009, il est élu vice-président de cette même fédération et prend en charge les dossiers de syndicalisation, des alliances intersyndicales et internationales et de santé et sécurité du travail, pour ne nommer que ceux-là. En 2018, il devient président de la FC–CSN où il a travaillé activement à développer l’action collective et une vie syndicale forte et dynamique.

Ses priorités
À titre de deuxième vice-président de la CSN, David Bergeron-Cyr compte prioriser deux dossiers dans les prochains mois : le projet de loi 59, Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail, et la conception d’un plan de syndicalisation structurant.

C’est de concert avec la troisième vice-présidente de la CSN nouvellement élue elle aussi, Katia Lelièvre, que David Bergeron-Cyr s’attaquera au projet de loi 59. Tous les deux travailleront avec les conseils centraux et les fédérations afin de concevoir une campagne de mobilisation visant à bonifier substantiellement le projet de loi. « Nous allons appeler les membres de la CSN à s’activer sur le terrain pour faire pression sur le ministre du Travail afin qu’il modifie son projet de loi. Nous serons là pour rappeler au ministre que le projet de loi 59 doit servir à mieux protéger les travailleurs et les travailleuses, et non pas à donner encore plus de pouvoir au patronat ! »

Pour élaborer les grandes orientations d’un plan de syndicalisation confédéral porteur, il entamera dans les prochaines semaines une tournée des fédérations, des conseils centraux et des équipes de travail concernées afin d’entendre les préoccupations de tous et de toutes à ce sujet. En outre, il souhaite grandement que ce plan puisse être déployé partout au Québec ce printemps ou cet automne.

Prisons provinciales : la Sécurité publique doit cesser de jouer à l’autruche

Le Syndicat des agents de la paix en services correctionnels du Québec (SAPSCQ–CSN) exhorte le ministère de la Sécurité publique (MSP) à renforcer les mesures sanitaires s’appliquant aux personnes incarcérées afin de contenir les éclosions de COVID-19 qui sévissent dans les établissements de détention du Québec.

« C’est quand même insensé de voir que le gouvernement a serré la vis à tout le monde sauf aux détenu-es, s’étonne Mathieu Lavoie, président du SAPSCQ–CSN. On impose le couvre-visage, la distanciation physique et l’interdiction de voir leurs proches à la population entière; nos aîné-es dans les résidences pour personnes âgées et les CHSLD doivent aussi respecter la distanciation et porter le couvre-visage dans leurs aires communes; mais les détenu-es dans nos prisons peuvent se promener dans leur secteur et socialiser coude à coude sans aucun équipement de protection. Il est temps que le gouvernement cesse de se mettre la tête dans le sable et oblige les détenu-es à suivre les mêmes règles que tout le monde! »

Au cours des dernières semaines, la deuxième vague de la pandémie a frappé durement les établissements de détention de la province, particulièrement les établissements de Québec (secteur féminin), de Rivière-des-Prairies, de Saint-Jérôme et de Montréal (Bordeaux) qui, à eux quatre, comptent plus de 150 personnes incarcérées et près de 40 employé-es présentement atteints de la COVID-19.

La multiplication des congés de maladie, des retraits par mesure préventive et l’incapacité de pourvoir les postes vacants depuis le début de la crise sanitaire font en sorte que le réseau correctionnel se retrouve sous pression alors que le taux d’absentéisme chez les agentes et les agents frise maintenant les 30 %.

« Le manque de soutien et de reconnaissance du gouvernement envers les employé-es des services correctionnels qui sont au front chaque jour depuis mars dernier met à risque notre santé et celle des détenu-es, poursuit M. Lavoie. La ministre de la Sécurité publique, Mme Guilbeault, se plaît à demander à la population d’être docile, il faudrait maintenant qu’elle ait le courage d’en demander autant à la population carcérale. »

« On comprend mal l’entêtement du MSP à ne pas imposer de mesures sanitaires aux détenu-es, alors que les éclosions continuent de se multiplier dans les établissements de détention. En plus des détenu-es, ce sont les quelque 2800 agentes et agents correctionnels qui mettent leur santé à risque au quotidien. Cette situation est non seulement inacceptable, mais irresponsable, dénonce la présidente de la Fédération des employées et employés de services publics (FEESP–CSN), Nathalie Arguin. Le ministère doit impérativement réajuster le tir. Il en va de la protection de tout le monde. »

À propos

Le SAPSCQ–CSN est un syndicat autonome affilié à la Fédération des employées et employés de services publics (FEESP–CSN) et à la Confédération des syndicats nationaux (CSN) depuis 2006. Il représente plus de 2800 agentes et agents de la paix en services correctionnels, répartis dans 18 établissements de détention partout au Québec.

Budget du Québec : se donner tous les moyens

Alors que la deuxième vague continue de s’abattre sur notre société, il va sans dire que les défis qui attendent le Québec sont gigantesques. Non seulement pour redémarrer l’économie, mais également pour s’assurer que nos institutions publiques, particulièrement nos réseaux de santé et d’éducation, soient en mesure de soutenir nos efforts en matière de relance économique et sociale.

Devant des défis d’une telle ampleur, il nous apparaît insensé que le Québec ne puisse compter sur l’ensemble des moyens qui sont à sa disposition. C’est en ce sens que nous interpellons aujourd’hui le ministre des Finances du Québec en vue du dépôt du prochain budget.

Le gouvernement doit rompre avec la stratégie d’austérité budgétaire qu’il poursuit depuis maintenant 25 ans. Il est aberrant que le carcan financier imposé par le retour à l’équilibre budgétaire et les versements au Fonds des générations — deux mesures adoptées dans un tout autre contexte et qui, de surcroît, avaient rempli leurs objectifs avant le début de la pandémie ! — continuent de miner notre capacité à nous sortir de la crise actuelle. Pourtant, au cours des deux dernières décennies, les finances publiques du Québec se sont grandement améliorées : la dette nette est désormais comparable à celles des gouvernements du Canada et de l’Ontario et, contrairement à celui du Québec, aucun de ces gouvernements ne détourne une part de ses revenus courants vers le remboursement de sa dette publique.

Une vaste majorité d’analystes s’entendent pour dire qu’un retour à l’équilibre budgétaire dès 2025 est irréaliste sans devoir hausser les impôts ou couper dans les dépenses publiques. Une solution souhaitable serait de repousser cette date butoir, comme le gouvernement l’a fait à la suite de la crise économique de 2008 dont l’ampleur était pourtant moins grave que celle d’aujourd’hui.

En pleine pandémie, il est inconcevable que le gouvernement s’oblige à dégager un surplus de près de 3 milliards de dollars afin de rembourser la dette publique à partir des revenus courants. Cela constitue une politique d’austérité budgétaire. L’état du ratio dette nette/PIB du Québec, inférieur à ceux de l’Ontario et de nombreuses économies de l’OCDE, milite en faveur d’une suspension des versements au Fonds des générations — tout comme la faiblesse actuelle et à venir des taux d’intérêt, et donc du service de la dette.

On s’en doute, le Québec a des besoins immédiats beaucoup plus importants, y compris pour ces « générations futures » qui, dans l’immédiat, se butent au sous-financement chronique de notre réseau d’éducation.

Bien que nous soyons entièrement d’accord avec la volonté du gouvernement du Québec de voir le gouvernement fédéral augmenter sa contribution aux coûts du système de santé, force est de constater qu’il fait piètre figure à ce chapitre : il se classe à l’avant-dernier rang des provinces en matière de dépenses en santé, accusant un écart de 333 $ par habitant sous la moyenne canadienne.

Pour nos organisations, il est urgent d’investir massivement dans le réseau de la santé et des services sociaux ainsi qu’en éducation.

Faut-il, une fois de plus, faire ici la démonstration des liens directs entre les piètres conditions de travail du secteur public et les graves problèmes de pénurie et de rareté de main-d’œuvre qui ont miné la capacité de nos services de santé et d’éducation — sans parler des services de garde, essentiels au plein emploi et à la croissance économique — à répondre aux impacts de la pandémie ?

Les conditions de travail des employé-es des services publics ne peuvent plus être la variable servant à accélérer le retour à l’équilibre budgétaire. Avant même de pouvoir envisager un règlement dans le cadre des négociations du secteur public, il revient au ministre des Finances de s’assurer que la croissance des budgets alloués aux dépenses de programmes des principales missions de l’État permette l’amélioration des conditions de travail du secteur public et l’embauche du personnel nécessaire à la prestation de ces services.

Dans son budget, le ministre des Finances devra prévoir un financement adéquat d’un plan de relance de l’économie. Dès le printemps dernier, nous demandions au gouvernement d’instaurer les bases d’un véritable dialogue social avec la société civile pour discuter des différents moyens appropriés pour appuyer les travailleuses, les travailleurs et les entreprises dans leurs efforts de numérisation, de robotisation, de formation et de transition écologique, pour ne nommer que ceux-là.

Malheureusement, cet appel ne semble pas avoir été entendu par le premier ministre. Encore moins par son ministre de l’Économie, Pierre Fitzgibbon, dont la quête de « synergies » et de « pôles d’innovation » ne semble pas s’aventurer au-delà des portes closes d’un cercle restreint d’initiés.

Ce sont les membres que nous représentons, faut-il le rappeler, qui ont subi de plein fouet les impacts de la crise. Dans l’ensemble des démarches pour la relance de l’économie, nous estimons nécessaire d’instaurer ce dialogue social afin que les travailleurs et les travailleuses puissent faire valoir leurs besoins et leurs préoccupations en matière d’emploi, de formation et de transformation de leurs milieux de travail. Les organisations syndicales connaissent leurs secteurs d’activités et, en ce sens, ont un rôle de premier plan à jouer dans cette relance.

Texte signé par : Jacques Létourneau, président de la CSN, Daniel Boyer, président de la FTQ, Sonia Ethier, présidente de la CSQ, Luc Vachon, président de la CSD

Québec doit investir dans les services publics et éviter le piège de l’austérité

Les présidents et présidente de nos organisations, Luc Vachon (CSD), Jacques Létourneau (CSN) et Daniel Boyer (FTQ) et Sonia Ethier (CSQ), rencontrent cet après-midi à 13 h 30 le ministre des Finances, Éric Girard, dans le cadre des rencontres prébudgétaires afin de le mettre en garde contre un retour à l’austérité.

« La relance économique fait partie de nos priorités et cela passe par un réinvestissement important dans les services publics, mis à mal par les gouvernements précédents. Québec doit mettre en place une véritable politique industrielle et nous sommes prêts à mettre l’épaule à la roue », déclarent les leaders syndicaux.

« Un plan de relance crédible devra passer par l’instauration d’un véritable dialogue social afin de faire valoir les besoins et préoccupations des travailleuses et travailleurs en matière d’emploi, de formation, de protection sociale et de soutien du revenu. La pandémie nous donne l’opportunité de rendre la société québécoise plus juste, solidaire et plus verte », ajoutent les leaders syndicaux.

« Nous devons changer d’approche en matière de finances publiques. Il n’y a pas d’urgence à lutter contre le déficit. Québec doit également suspendre les versements au Fonds des générations et utiliser ces revenus pour remettre sur les rails notre économie », concluent Sonia Ethier, Luc Vachon, Jacques Létourneau et Daniel Boyer.

Consulter le mémoire de la CSD, la CSN, la CSQ et la FTQ déposé auprès du ministre des Finances sur les sites de nos organisations. Les leaders syndicaux sont également disponibles pour commenter le mémoire et la rencontre avec le ministre.

Heures supplémentaires : victoire syndicale chez Fer et Titane

Le tribunal d’arbitrage vient de rendre une décision selon laquelle, en vertu des nouvelles normes du travail, une usine ne peut forcer ses employé-es à faire des heures supplémentaires lorsque ceux-ci sont en congé, à moins de leur donner un avis de cinq jours. Bien que la notion d’urgence puisse toujours être invoquée par l’employeur pour exiger un rappel au travail, elle ne s’appliquait pas dans le cas soumis au tribunal pour l’usine de Rio Tinto Fer et Titane de Sorel.

Le litige portait sur l’interprétation de la clause 59.0.1 de la Loi sur les normes du travail entrée en vigueur depuis le 1er janvier 2019. Cette clause permet à un travailleur de refuser de travailler s’il n’est pas informé au moins cinq jours à l’avance. Malgré l’argumentation du patron qui invoquait l’urgence de la situation, l’arbitre a conclu que le travailleur n’avait pas un devoir de disponibilité au sens de la loi. Un employeur qui veut forcer une travailleuse ou un travailleur à rentrer au travail doit donc l’aviser au moins cinq jours à l’avance.

Le Syndicat des Ouvriers du Fer et Titane–CSN a donc obtenu gain de cause contre l’employeur qui voulait forcer un travailleur à rentrer au travail pour faire des heures supplémentaires, malgré le refus de ce dernier.

Pour comprendre la nature de la décision, il faut se remettre dans le contexte. L’employeur opère ses usines avec un personnel minimal et même en sous-effectif depuis des années. Au début de 2019, il est incapable de trouver un travailleur pour combler son manque de personnel. Il contacte donc le plus jeune syndiqué en lui ordonnant de rentrer travailler. « Le syndicat s’est toujours battu afin que les heures supplémentaires se fassent sur une base volontaire. Un grief a été déposé à cet effet et a cheminé jusqu’en arbitrage », explique Dominique Blais, trésorier du syndicat.

Le 20 septembre 2020, le syndicat obtient gain de cause avec le jugement de l’arbitre Rosaire S. Houde. « L’employeur ne peut pas forcer un salarié en congé, même le salarié comptant le moins d’ancienneté, à effectuer des heures supplémentaires s’il ne lui a pas donné cinq jours d’avis », écrit l’arbitre dans sa conclusion.

Manque de personnel et de formations
« On a toujours dénoncé le boss quand il veut combler ses besoins de base par des heures supplémentaires au lieu d’embaucher. Le patron doit arrêter de gérer le manque de personnel avec les heures supplémentaires », soutient Dominique Blais.

Ce dernier précise que ce n’est pas d’hier que le syndicat dénonce un manque de formation pour certains postes clés, ce qui limite parfois à quelques personnes seulement les employé-es en mesure de remplacer un absent. On observe aussi un changement de mentalité des travailleuses et des travailleurs, qui sont moins enclins à effectuer des heures supplémentaires.

Pour le syndicat, cette question est un enjeu majeur. « Cette section de l’usine fonctionne avec le minimum d’employé-es possible, il n’y a personne de prévu pour remplacer les vacances. Ajoutez-y le fait que l’employeur, pendant des années, n’a pas complété les formations prévues et ça explique mieux l’enjeu que représentent les heures supplémentaires », explique le trésorier du syndicat.

L’employeur a déjà signalé qu’il entend contester le jugement. Il devra toutefois démontrer qu’il y a eu une erreur de droit de la part de l’arbitre.